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Avis du 13 juin 2013 relatif à la possession de documents personnels par les personnes détenues et à l’accès de

visioconférence à l’égard des personnes privées de liberté

2.4 Avis du 13 juin 2013 relatif à la possession de documents personnels par les personnes détenues et à l’accès de

celles-ci aux documents communicables

À la suite de cet avis, publié au Journal officiel du 11 juillet 2013 et resté sans réponse du garde des sceaux, la directrice de l’administration pénitentiaire a fait part de ses obser-vations au CGLPL le 16 septembre 2016.

2.4.1 Supprimer la remise obligatoire des documents mentionnant le motif d’écrou au greffe de l’établissement

Le CGLPL considère que cette disposition, issue de l’article 42 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009, qui protège utilement la personne détenue de la curiosité de ses codétenus ainsi que du personnel de surveillance, a également des conséquences fâcheuses en ce qu’elle place un grand nombre d’obstacles matériels, le plus souvent indirects, à la consultation par la personne détenue des documents qui la concernent et qui sont parfois essentiels pour la gestion de sa situation pénale.

Sur le fondement de ce double constat, le CGLPL a donc préconisé que chaque personne détenue puisse avoir le choix de déposer au greffe les documents qui mentionnent son motif d’écrou ou de les conserver en cellule avec elle. Dès lors, le CGLPL considère qu’il incombe à l’administration pénitentiaire, sous réserve des contrôles nécessaires, de veiller au respect du caractère personnel des documents. Il recommande à cette fin :

– que chaque personne détenue ait accès au matériel de papeterie nécessaires à garantir la confidentialité ;

– que chaque cellule comporte, pour chacune des personnes qui sont hébergées, une armoire fermant à clé comme cela existe déjà dans certains établissements ;

– que les documents trouvés dans ces armoires lors des fouilles ne soient examinés qu’en présence de la personne détenue et par des officiers ou gradés spécialement désignés par le chef d’établissement et ce uniquement dans le but de rechercher des biens et substances interdits, c’est-à-dire en excluant toute lecture des documents eux-mêmes dans la mesure où la loi n’autorise l’administration à lire aucun autre document que ceux qu’elle contrôle au titre de l’article 40 de la loi pénitentiaire, relatif aux correspondances écrites des personnes détenues ;

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– qu’aucun document, placé dans ces armoires ou non, ne soit détruit à l’occasion des fouilles.

L’administration pénitentiaire ne partage pas l’analyse du CGLPL et considère que l’article 42 de la loi pénitentiaire, dans sa rédaction actuelle, « instaure un régime équilibré, respectueux tant des droits des personnes détenues que des nécessités du maintien de l’ordre de la sécurité au sein des établissements pénitentiaires ainsi que de la prévention des infractions. »

Elle considère que les fouilles réalisées dans les cellules des personnes détenues permettent de « découvrir certains documents dont le contenu laisse suspecter [sic]

l’existence de trafics ou de préparatifs d’évasion » et que « la remise obligatoire des documents personnels au greffe permet à la fois d’assurer leur confidentialité et à l’ad-ministration de réaliser les contrôles de sécurité nécessaires en détention ». Elle souligne que les fouilles de cellules sont réalisées hors de la présence des personnes détenues et que cette présence serait contraire à des objectifs de sécurité publique. Le fait d’exiger la présence d’un officier ou d’un gradé lors de ces fouilles ne se justifie donc pas à ses yeux compte tenu d’une part du faible nombre de gradés et officiers présents et d’autre part du fait que le personnel de surveillance est habilité à réaliser les fouilles de cellules.

Le CGLPL ne peut se satisfaire d’une pareille position. Les visites effectuées posté-rieurement à son avis de 2013 ont montré la persistance de difficultés importantes que les personnes détenues rencontrent dans l’accès à leurs documents personnels. Ces diffi-cultés doivent donc être surmontées. Si l’administration ne souhaite pas le faire par les moyens préconisés, elle doit à tout le moins prendre toute mesure utile pour que les documents personnels remis au greffe soient accessibles sans restriction, sur demande de la personne qui les a déposés, dans un délai bref et au terme d’une procédure transpa-rente et traçable. Cette accessibilité doit être regardée comme une obligation de résultat.

Cette obligation est d’ailleurs définie dans l’Ensemble de règles minima des Nations unies pour le traitement des détenus (dites Règles Nelson Mandela), au sein duquel elle constitue la règle 53, ainsi rédigée : « les détenus doivent pouvoir accéder aux documents relatifs à leur procès ou être autorisé à les garder en leur possession, sans que l’administration péniten-tiaire ne puisse y avoir accès ».

S’agissant de la présence des détenus lors des fouilles de leurs effets personnels, le CGLPL se bornera à rappeler la règle pénitentiaire européenne numéro 54.8, ainsi libellée : « tous les détenus doivent assister à la fouille de leurs effets personnels, à moins que les techniques de fouille ou le danger potentiel que cela représente pour le personnel ne l’interdisent. »

Le CGLPL recommande de mettre en place toute mesure utile pour que chaque personne détenue ait accès sans délai, sans obstacle et de manière traçable aux documents qu’elle a remis au greffe et, à défaut, supprimer toute obligation de dépôt de ces documents. Le régime des fouilles de cellules doit en outre être mis en conformité avec les règles pénitentiaires européennes.

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2.4.2 Abroger les dispositions du règlement intérieur type des

établissements pénitentiaires approuvé par décret du 30 avril 2013 qui autorise l’administration pénitentiaire à retenir, sous réserve de l’exercice des droits de la défense, tout manuscrit rédigé en détention et à ne le restituer à son auteur qu’au moment de sa libération

La direction de l’administration pénitentiaire souligne que cette disposition ne figurait pas dans le projet de décret transmis au Conseil d’État, mais résulte des travaux de cette institution, et en tire la conclusion qu’elle est nécessairement conforme à la loi.

Sans entrer dans une controverse juridique, le CGLPL rappelle que le législateur a estimé nécessaire de prévoir une autorisation expresse pour le contrôle des correspondances des personnes détenues et n’a pas considéré que les dispositions générales permettant de restreindre les droits des personnes détenues en raison de contraintes inhérentes à la détention et pour des motifs liés notamment à la sécurité et au bon ordre des établissements suffisaient à fonder un tel contrôle.

En conséquence, le CGLPL considère qu’il appartient seulement au législateur de déterminer les conditions dans lesquelles peuvent être contrôlés les documents écrits que possèdent les personnes détenues. Une disposition législative de portée générale ne saurait suffire à fonder une restriction de liberté générale et pérenne.

Il est nécessaire de mettre un terme à tout contrôle des documents que possède une personne détenue qui ne trouverait pas son fondement dans une disposition législative explicite et d’abroger toute disposition réglementaire contraire.

2.4.3 Favoriser l’accès aux documents administratifs en créant un recueil régulièrement mis jour des textes légaux et réglementaires ainsi que des circulaires applicables aux personnes détenues

L’administration soutient que la constitution d’un tel recueil, et plus encore sa mise à jour régulière, s’avère irréalisable compte tenu du volume de textes concernés. Elle rappelle que les bibliothèques des établissements pénitentiaires proposent d’ores et déjà des exemplaires à jour du code de procédure pénale et du Journal officiel de la Répu-blique Française. Elle indique également que des consignes ont été données pour que des exemplaires du règlement intérieur type des établissements pénitentiaires soient tenus à la disposition des personnes détenues au sein des bibliothèques et pour que les chefs d’établissement communiquent aux personnes détenues qui en font la demande les documents qui bien que publiés, ne leur sont pas accessibles directement.

Aucune des mesures mentionnées par la direction de l’administration pénitentiaire n’était postérieure à l’adoption de l’avis du CGLPL, il n’y a donc dans sa réponse aucune raison de voir cette proposition évoluer.

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S’agissant du caractère « irréalisable » d’un recueil des textes applicables aux personnes détenues et de sa mise à jour, on peut s’interroger sur le sérieux d’un tel argument : si l’administration pénitentiaire se considère dans l’incapacité de recenser le droit qu’elle est chargée d’appliquer, cela renforce le besoin d’en établir un recueil. Un tel recueil permettrait en effet de satisfaire un droit fondamental des personnes détenues, mais aussi de répondre de manière efficace au besoin de formation du personnel péni-tentiaire et de l’ensemble des intervenants en milieu pénipéni-tentiaire (médecins avocats, associations, enseignants, contrôleurs, etc.), dont la connaissance des règles applicables est parfois insuffisante et, plus largement, de satisfaire un besoin d’information des universitaires et du public.

Le CGLPL souligne que le fait de placer des personnes privées de liberté dans l’im-possibilité de connaître le droit qui leur est applicable constitue un traitement arbitraire.

En témoigne notamment la règle numéro 54 de l’Ensemble de règles minima des Nations unies pour le traitement des détenus :

« Lors de son admission, chaque détenu doit rapidement être informé par écrit de ce qui suit :

a) le droit pénitentiaire et la réglementation pénitentiaire applicable ;

b) ses droits, y compris les moyens autorisés pour obtenir des renseignements, son droit de bénéficier de « conseils juridiques, y compris les dispositifs d’aide juridictionnelle, et les procédures de formulation de demandes et de plaintes ;

c) ses obligations, y compris les mesures disciplinaires applicables ;

d) tous autres points nécessaires pour lui permettre de s’adapter à la vie de l’établissement. »

Les Règles pénitentiaires européennes reprennent ce principe en des termes différents mais avec les mêmes conséquences :

« 30.1 – Lors de son admission et ensuite aussi souvent que nécessaire, chaque détenu doit être informé par écrit et oralement – dans une langue qu’il comprend – de la réglementation relative à la discipline, ainsi que de ses droits et obligations en prison.

30.2 – Tout détenu doit être autorisé à garder en sa possession la version écrite des informations lui ayant été communiquées. »

Le CGLPL recommande de réaliser à très court terme et tenir à jour un recueil des textes légaux et réglementaires ainsi que des circulaires applicables aux personnes détenues.

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2.5 Avis du 8 août 2013 relatif aux jeunes enfants en prison

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