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2.4 Mesure des constantes de temps

2.4.3 Refroidissement puls´e

Nous avons ´egalement ´etudi´e le m´ecanisme de refroidissement d’un point de vue temporel et non plus spectral comme dans la partie pr´ec´edente. Nous nous sommes en particulier int´eress´es aux constantes de temps qui r´egissent l’apparition du r´egime refroidi lorsque l’on branche la force de friction froide, ainsi qu’au temps de retour `a l’´equilibre thermodynamique lorsque l’asservissement est coup´e alors que le miroir est dans un ´etat refroidi.

Mesure d’une puissance de bruit par un analyseur de spectre

Nous avons observ´e l’´evolution temporelle de la puissance de bruit sur une plage de fr´equence ∆f autour de la fr´equence de r´esonance ΩM. Pour avoir une r´esolution temporelle satisfaisante, le temps de mesure Tmde l’analyseur de spectre et la r´esolution spectrale ∆f doivent satisfaire la mˆeme condition que pr´ec´edemment, c’est-`a-dire Γ 

2π/Tm . 2π∆f  ΩM. La mesure est ensuite moyenn´ee sur un grand nombre de

cycles, ce qui revient `a moyenner la puissance de bruit P (ΩM, t) (2.46) sur toutes les r´ealisations possibles de la force de Langevin,

Px(ΩM, t) = Z ΩM+π∆f ΩM−π∆f dω 2π 1 Tm Z t+Tm t dτ Z t+Tm t0 e−iω(τ −τ0)x(τ )x(τ0). (2.53) Les int´egrales temporelles se r´esument aux composantes spectrales convolu´ees par des sinus cardinaux et la puissance se met sous la forme :

Px(ΩM, t) = Tm Z ΩM+π∆f ΩM−π∆f dω 2π Z +∞ −∞ dΩ 2π Z +∞ −∞ dΩ0 2π e−i(Ω+Ω0)(t+Tm2 )sinc(ω − Ω)Tm 2  sinc  (ω + Ω0)Tm 2  x[Ω]x[Ω(2.54)0]. Si les composantes spectrales x[Ω] ne sont non nulles que pour des fr´equences Ω proches de ±ΩM sur une largeur petite devant 1/Tm, Ω et Ω0 peuvent ˆetre approch´es par ΩM dans les fonctions sinus cardinal. Apr`es int´egration par rapport `a Ω et Ω0, la puissance Px s’´ecrit : Px(ΩM, t) = Tm Z ΩM+π∆f ΩM−π∆f dω 2π sinc 2  (ω − ΩM)Tm 2  x  t + Tm 2 2 . (2.55)

La bande passante ∆f de l’analyseur de spectre ´etant plus grande que 1/Tm et la

variance du mouvement variant peu sur des temps de l’ordre de Tm, on trouve finalement que la quantit´e mesur´ee par l’analyseur de spectre est ´egale `a la variance du mouvement `a l’instant t :

Le choix d’une r´esolution spectrale ∆f grande devant l’´etendue spectrale des

compo-santes du mouvement, tout en ayant un temps de mesure Tm petit devant le temps

caract´eristique d’´evolution 1/Γ, permet donc de mesurer la variance instantan´ee du mouvement.

Notons que cette relation n’est plus v´erifi´ee si les composantes spectrales sont non nulles en dehors de la plage de fr´equences ∆f . Dans le cas particulier d’un r´egime stationnaire, on peut ´evaluer la puissance Px mesur´ee par l’analyseur de spectre en utilisant le fait que

x[Ω]x[Ω0] = 2πδ(Ω + Ω0)Sx[Ω], (2.57)

o`u Sx d´esigne le spectre de x. L’´equation (2.54) devient : Px(ΩM, t) = Tm Z ΩM+π∆f ΩM−π∆f dω 2π Z +∞ −∞ dΩ 2πsinc 2  (ω − Ω)T2m  Sx[Ω]. (2.58) On obtient le spectre de bruit de x convolu´e par un sinus cardinal carr´e. Dans le cas d’un spectre de largeur grande devant 2π/Tm l’´elargissement dˆu au produit de convolution est n´egligeable et on obtient :

Px(ΩM, t) =

Z ΩM+π∆f

ΩM−π∆f dΩ

Sx[Ω]. (2.59)

Px(ΩM, t) est simplement ´egal `a la puissance spectrale `a l’int´erieur du filtre de l’analy-seur de spectre. Cette ´equation est en particulier valable pour un bruit blanc Sb, auquel cas on obtient :

Px(ΩM, t) = Sb ∆f. (2.60)

Etude th´eorique du refroidissement puls´e

Dans ce paragraphe, nous ´evaluons par un calcul th´eorique les temps de relaxation lorsque l’on branche ou que l’on coupe brusquement la force de friction froide. Nous consid´erons d’abord le cas o`u le refroidissement est appliqu´e `a l’instant t = 0 alors que le miroir se trouve `a l’´equilibre thermodynamique `a la temp´erature T . Pour des temps positifs, l’´equation d’´evolution de x(t) s’´ecrit :

M [ ¨x + Γ ˙x + Ω2Mx ] = FT − gMΓ ˙x, (2.61)

o`u FT est la force de Langevin due au coulage avec le bain thermique et o`u le terme −gMΓ ˙x correspond `a la force de friction froide (g d´esigne le gain de la boucle de contre r´eaction ; voir ´equation (2.13)). Comme dans la section pr´ec´edente, on utilise la transformation de Laplace pour r´esoudre l’´equation d’´evolution et l’on retrouve une expression de x(t) similaire `a l’´equation (2.39),

x(t) = Z t

0

χf b(t − τ)FT(τ )dτ + M {Γx(0) + ˙x(0)} χf b(t) + M x(0) ˙χf b(t). (2.62) o`u χf b(t) est la susceptibilit´e m´ecanique du miroir refroidi qui correspond `a celle d’un oscillateur harmonique de masse M , de fr´equence de r´esonance ΩM mais dont le taux d’amortissement vaut Γf b = (1 + g)Γ :

χf b(t) = sin(ΩMt) M ΩM exp  −Γ2(1 + g)t  . (2.63)

Comme le montre l’´equation (2.62), x(t) est de nouveau la somme de la r´eponse xF(t) `a la force de Langevin et d’un terme x0(t) d´ependant uniquement des conditions initiales :

x(t) = xF(t) + x0(t), (2.64) avec xF(t) = Z t 0 χf b(t − τ)FT(τ )dτ, (2.65) x0(t) = M {Γx(0) + ˙x(0)} χf b(t) + M x(0) ˙χf b(t). (2.66) A la diff´erence du calcul pr´ec´edent, la force FT et les valeurs x(0) et ˙x(0) sont des variables al´eatoires. On va donc s’int´eresser aux propri´et´es statistiques de la position x(t) du miroir. La force de Langevin correspond `a un bruit blanc de valeur moyenne nulle (FT(t) = 0) dont le spectre est donn´e par le th´eor`eme fluctuations-dissipation. La fonction d’auto-corr´elation de FT(t) est ´egale `a :

FT(t)FT(t0) = 2M ΓkBT δ(t − t0). (2.67)

Les processus de dissipation correspondent `a des ph´enom`enes sans m´emoire, ainsi FT(τ > 0) et les conditions initiales sont ind´ependantes et les variances de xF(t) et de x0(t) s’ajoutent. En utilisant l’expression de xF(t), on montre alors que ce terme a une valeur moyenne nulle et une variance ∆x2F(t) ´egale `a :

∆x2F(t) = 2M ΓkBT Z t

0

f b(τ )]2dτ. (2.68)

On suppose que le facteur de qualit´e m´ecanique est tr`es grand devant 1 (ΩM  Γ), condition qui est r´ealis´ee dans notre exp´erience. Dans ce cas la susceptibilit´e oscille un grand nombre de fois avant que son amplitude ne d´ecroisse significativement. On peut alors approcher le terme | sin(ΩMt)|2 dans l’expression de [χf b(τ )]2, par sa valeur moyenne 1/2. La variance ∆x2

F(t) est alors ´egale `a : ∆x2F(t) = ∆x 2 T 1 + g 1 − e−Γ(1+g)t , (2.69) o`u ∆x2 T = kBT /M Ω2

M est la variance de la position du miroir lorsque celui-ci est en ´equilibre thermodynamique `a la temp´erature T [´equation (2.4)].

Calculons maintenant la variance du terme x0(t). Comme `a l’instant t = 0 le syst`eme est `a l’´equilibre thermodynamique `a la temp´erature T , on a :

∆x2(0) = ∆x2T, (2.70)

∆ ˙x2(0) = Ω2M∆x2T, (2.71)

En utilisant ces r´esultats et l’expression (2.66), on trouve que la variance de x0(t) est ´egale `a :

∆x20(t) = M2 ˙χf b(t)2+ Ω2Mχf b(t)2 ∆x2

T(t), (2.73)

o`u, comme dans la section 2.4.1, on a n´eglig´e le terme Γx(0) devant ˙x(0) dans l’ex-pression (2.66) donnant x0(t). En utilisant l’expression de χf b(t) donn´ee par l’´equation (2.63) on obtient finalement :

∆x20(t) = ∆x2Te−Γ(1+g)t. (2.74)

Ce terme d´ecroˆıt exponentiellement, ce qui indique que le miroir perd la m´emoire des conditions initiales en un temps caract´eristique de 1/Γ(1 + g).

La variance de x(t) est obtenue en ajoutant ∆x2

F(t) [´equation (2.69)] et ∆x2 0(t) [´equation (2.74)] : ∆x2(t) = ∆x 2 T 1 + g 1 + ge −Γ(1+g)t . (2.75)

Cette ´equation montre que la variance ´evolue avec un taux de relaxation ´egal au taux d’amortissement Γf b = Γ(1 + g) du miroir en pr´esence du processus de refroidissement. La variance varie entre ∆x2

T `a l’instant t = 0 et ∆x2

T/(1 + g), valeur atteinte lorsque t est grand devant 1/Γf b. Cette situation peut ˆetre interpr´et´ee comme un retour `a l’´equilibre thermodynamique `a la temp´erature T /(1 + g), le syst`eme partant `a l’instant t = 0 d’une situation hors d’´equilibre dont la variance correspond `a celle d’un ´equilibre thermodynamique `a la temp´erature T .

Dans le cas oppos´e o`u l’on part du syst`eme refroidi et o`u l’on supprime brusquement le refroidissement `a l’instant t = 0, le miroir est libre pour des temps positifs, et les conditions initiales correspondent `a une situation d’´equilibre thermodynamique `a la temp´erature T /(1 + g). Les ´equations (2.65) et (2.66) sont encore valables si l’on remplace χf b par la susceptibilit´e χ d’un miroir libre donn´ee par l’´equation (2.38). Les ´equations (2.70) et (2.71) sont ´egalement modifi´ees et deviennent :

∆x2(0) = ∆x2

T/(1 + g), (2.76)

∆ ˙x2(0) = Ω2M∆x2T/(1 + g). (2.77)

Le calcul des variances des deux termes x0(t) et xF(t) donne alors ∆x20(t) = ∆x 2 T 1 + ge −Γt, (2.78) ∆x2F(t) = ∆x2T 1 − e−Γt . (2.79)

On obtient, en sommant ces deux ´equations, la variance du mouvement en fonction du temps : ∆x2(t) = ∆x2T  1 − 1 + gg e−Γt  . (2.80)

La variance ´evolue avec le taux d’amortissement Γ du miroir sans asservissement. Elle part de la valeur ∆x2

T/(1 + g) `a t = 0 correspondant `a une situation refroidie et effectue un retour `a l’´equilibre thermodynamique `a la temp´erature T . La variance tend alors vers la valeur ∆x2

Fig. 2.17 – R´egimes transitoires lorsque l’on coupe (courbe montante) ou que l’on applique (courbe descendante) le refroidissement pour un gain ´egal `a 5, 2.

Les formules (2.75) et (2.80) montrent qu’il existe une dissym´etrie entre le temps de refroidissement valant 1/Γf b et celui de retour `a l’´equilibre `a la temp´erature T , qui vaut 1/Γ. Le r´egime refroidi s’´etablit donc plus rapidement que le syst`eme ne relaxe vers l’´equilibre thermodynamique, et d’autant plus rapidement que le gain de la friction froide est grand.

R´esultats exp´erimentaux

Le montage exp´erimental est identique au montage utilis´e pour le refroidissement du miroir, mais l’interrupteur rapide est ins´er´e d´esormais dans la boucle de contre-r´eaction. Pour obtenir les transitions les plus franches possibles, l’interrupteur est plac´e `a la sortie de la boucle apr`es le filtre passe-bande, le d´ephaseur et l’amplificateur (voir figure 2.6). On s’affranchit ainsi des constantes de temps que tous ces ´el´ements pourraient engendrer. Comme dans la mesure de la section 2.4.2, l’analyseur de spectre est en mode zerospan avec une bande passante de 1 kHz et il est synchronis´e, grˆace `a la boˆıte de temporisation, avec l’ouverture ou la fermeture de l’interrupteur.

La figure 2.17 montre les r´egimes transitoires observ´es lorsque l’on coupe ou que l’on applique le refroidissement pour un gain ´egal `a 5, 2. On mesure ici le bruit ther-mique (le faisceau d’excitation est coup´e). Les ajustements sont obtenus `a l’aide des formules (2.75) et (2.80). On constate que lorsque le refroidissement est appliqu´e, le bruit thermique descend rapidement, avec une constante de temps de 0,5 ms, en bon accord avec la valeur de l’amortissement Γf b. Par contre, lorsque le refroidissement est arrˆet´e, le miroir revient `a l’´equilibre thermodynamique avec une constante de temps plus longue (2,6 ms), associ´ee `a l’amortissement m´ecanique du miroir Γ.

On notera ici encore le tr`es bon accord entre les mesures exp´erimentales et les ex-pressions th´eoriques. Par ailleurs le faible bruit sur les courbes exp´erimentales est li´e `a la possibilit´e de notre montage de r´ealiser une moyenne sur un tr`es grand nombre de cycles. Les courbes obtenues correspondent en effet `a une moyenne statistique sur

plu-Fig. 2.18 –Bruit thermique pour un gain fort du refroidissement, en ´echelle semi-logarithmique. La courbe a est le bruit thermique dans le cas du miroir libre. Les courbes b `a d sont obtenues pour un gain du refroidissement croissant.

sieurs milliers de r´ealisations. Si on s’int´eresse `a un cycle individuel, le bruit thermique induit une marche au hasard, avec une condition initiale x(0), ˙x(0) pr´esentant de tr`es large fluctuations, et une ´evolution vers un ´etat d’´equilibre thermodynamique ayant lui-mˆeme une dispersion importante. C’est seulement en moyennant sur un grand nombre de r´ealisations que l’on peut reconstruire une ´evolution statistique exponentielle, simi-laire `a celles pr´esent´ees sur les figures 2.15 et 2.16. Cette marche au hasard est d´ecrite plus en d´etail dans le chapitre suivant, o`u l’on a observ´e l’´evolution temporelle du miroir dans l’espace des phases.