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Reconstitution de la mesure de la population urbaine par les chercheurs

Evolution de l’urbanisation en Chine

1. Evaluation de la population urbaine et le niveau de l’urbanisation Définitions et mesures

1.2. Evaluation de la population urbaine et du niveau d’urbanisation

1.2.3. Reconstitution de la mesure de la population urbaine par les chercheurs

Prenant en considération l’incohérence de la définition officielle des urbains, de nombreux auteurs ont tenté d’évaluer le niveau d’urbanisation en recalculant la population urbaine à partir des statistiques officielles, plus particulièrement pour les années 1980. Il est largement reconnu que la source de l’incohérence des statistique officielles porte sur la part croissante des habitants agricoles comptés dans la population urbaine, suite au relâchement des critères de désignation urbaine et à l’expansion des circonscriptions administratives des villes et des bourgs entre 1964 et 1990. La méthode de réévaluation la

8Ces statistiques officielles sous-estiment probablement la taille de la population temporaire. Kojima (1995) donne l’estimation de cette population de 5 millions en 1982, 10 millions en 1983, 20 millions en 1985, 40 millions en 1988 et 50 millions pour 1989 et 1991.

plus courante consiste à corriger la population urbaine en déterminant une proportion raisonnable de la population agricole dans la population urbaine.

La plupart des auteurs ont soutenu que la série de statistiques sur la base de la population urbaine non-agricole est plus cohérente que celle sur la base de la population totale, dans la mesure qu’elle est moins soumise aux changements de définition des zones urbaines. La série de PNA a été donc préférée par certains auteurs pour mesurer la population urbaine pour les années 1980 (Aubert, 1996). Néanmoins, d’autres auteurs sont d’avis qu’elle ne peut pas être utilisée directement pour mesurer la population urbaine. Basée sur le statut de Hukou non-agricole, cette mesure a exclut les habitants permanents agricoles et les migrants de plus d’un an qui vivent à l’intérieur des zones urbaines. Ces auteurs proposent alors un ajustement sur la série officielle de la population non-agricole pour obtenir le niveau réel de la population urbaine.

Le principe de l’ajustement est représenté par la formule suivante : PU* = PNAU /

(1-k), où PU* représente la population urbaine estimée et PNAU la population non-agricole urbaine publiée officiellement, k est le coefficient d’ajustement qui représente la proportion théorique de la population agricole dans la population urbaine totale. La différence entre les méthodes d’estimation des auteurs porte essentiellement sur les coefficients adoptés.

L’estimation de Wu (1994) s’est fait sur la base de la formule ci-dessus, mais l’auteur a effectué un pré-ajustement sur la série officielle de la population non-agricole avant de l’appliquer dans la formule. La série ajustée de la population non-agricole est

PNAU* = PNAU (1 + u ), où u représente la part des migrants sous-estimés dans la population urbaine totale, supposée entre 1% et 5% selon les périodes. Ensuite, une proportion de 10% est proposée comme la part des habitants agricoles acceptables dans la population urbaine, soit k = 10%. Finalement, la population urbaine estimée est PU* =

PNAU (1 + u )/ (1- k ). L’auteur a effectué les calculs sur la série de 1949 à 19909.

A partir du même principe d’estimation, Kojima (1995) a retenu deux coefficients d’ajustement différents, soient k = 20% et 30% respectivement pour les villes et les bourgs10, en soutenant que la proportion de la population agricole dans la population

9 L’auteur n’a pas expliqué la méthode d’estimation pour la série entre 1949 et 1960, puisque la série de PNAU n’est disponible qu’à partir de l’année 1961. Nous ne savons pas les valeurs de u retenues pour cette période non plus.

10 Selon l’auteur, ces estimations de pourcentage se basent sur des enquêtes empiriques, mais il n’y a pas d’explication détaillée dans l’article.

urbaine varie entre ces deux unités urbaines. Ces deux pourcentages ont été ensuite utilisés pour obtenir la population urbaine réelle. Les calculs se sont fait sur la période 1961-1991.

Zhang et Zhao (1998) ont effectué un ajustement plus détaillé sur la série de la population non-agricole. Ils ont divisé le coefficient k en deux parties, k1 et k2 pour représenter les part des deux composants de la population sous-estimée par la série PNAU: la population agricole permanente vivante dans les zones urbaines et les migrants qui ont habité depuis plus d’un an dans les villes. Au lieu de prendre arbitrairement les valeurs des coefficients d’ajustement, ils ont effectué des enquêtes et des interviews de terrain pour les estimer. Leurs estimations identifient différents coefficients pour différentes régions et différents niveaux d’unités urbaines, qui varient entre 25% et 40%11. L’ajustement final s’est fait sur les années 1980, 1985, 1988, 1990, 1993, 1995 pour toutes les provinces.

Figure 2.1 Différentes séries d’estimation de la population urbaine chinoise

100 150 200 250 300 350 400 450 500 550 600 196119621963196419651966196719681969 197019711972 1973 19741975 19761977197819791980198119821983198419851986 19871988 1989 1990 (m il li on ) PU officielle (2002) PU Wu (1994) PU Kojima (1995) PUT (RKNJ,2002) PNA (RKNJ,2002)

Source : TJNJ, RKNJ (NBS, plusieurs éditions, diverses années) ; Wu, 1994 ; Kojima, 1995.

La Figure 2.1 montre les différentes séries d’estimation de la population urbaine entre 1961-1990. La série de Wu (1994) donne les estimations les plus modestes, puisque l’auteur retient 10% comme le pourcentage de population agricole dans ses recalcules, qui

11 Pour les villes au-dessus du niveau préfectoral dans les régions de l’est, du centre et de l’ouest, les coefficients estimés sont 30%, 25%, 20% respectivement. Pour les villes-district, les trois coefficients correspondants sont 35%, 30%, 25% ; pour les bourgs, ils sont 40%, 25% et 30%.

semble relativement faible selon l’usage international. L’estimation de Kojima (1995) à partir d’un pourcentage de 20% ou 30% reste assez proche de la série officielle publiée en 2002. Zhang et Zhao (1998) n’ont fait l’estimation que sur six années discontinues, la différence entre leurs estimations et la série officielle est minime, notamment pour les quatre années de la décennie 1980 (les écarts sont inférieurs à 1%). A part des pourcentages de la population agricole retenus, il faut noter également que les séries de PNAU utilisées par différents auteurs comme la base d’ajustements ne sont pas exactement les mêmes. En fait, comme nous l’avions mentionné plus haut, les données sur la population sont différentes selon les sources et les années de publication, notamment avant les années 1990.

La plupart des recalcules portent sur les séries d’avant l’année 1990, la définition du recensement de 1990 a été reconnu plus raisonnable, selon laquelle les habitants de plus d’un an des espaces urbanisés à l’intérieur des cités et bourgs constituent la population urbaine. Par l’exclusion d’une partie de la population rurale sous l’administration des petites villes et des bourgs, cette mesure est devenue moins sensible à l’expansion des zones administratives des zones urbaines12. La définition de 2000 tend à améliorer davantage cette mesure en excluant une partie des habitants agricoles dans les grandes et moyennes villes avec une population moins dense, d’une part, et en incorporant une partie des habitants de facto urbains relevant des unités administratives rurales.

A partir de ces redéfinitions, le Bureau d’Etat des statistiques a aussi élaboré une reconstitution de la série de la population urbaine depuis 1949. En comparant les annuaires statistiques chinoises de 1991 à 2007, nous avons constaté deux ajustements majeurs sur l’indicateur de la population urbaine totale: l’un en 1992 sur la série entre 1982 et 1990, l’autre en 2002 sur la série 1991-1999. En comparaison avec les recalcules des auteurs, les reconstitutions officielles sont fondées sur des enquêtes des échantillons, au lieu des évaluations approximatives qui sont plus ou moins subjectives. S’il manque de clarté dans

12 Fondé principalement sur les divisions administratives, la définition de 1990 devient moins pertinente, avec la divergence croissante entre la désignation urbaine et le niveau d’industrialisation. D’une part, elle sur-estime la population urbaine dans les faubourgs des grandes villes, d’autre part, elle sous-estime la population urbaine dans les bourgs connaissant une rapide industrialisation, notamment dans les provinces côtières. Toutefois, les auteurs considère que cette définition donne un chiffre raisonnable à l’échelle nationale, car la sur-estimation et la sous-estimation s’annule (Zhang et Zhao, 1998, Zhou et Ma, 2003, Chan et Hu, 2003).

Tableau 2.2 Population urbaine et niveau d’urbanisation de Chine 1949-2003

(Unité : million de personnes)

RKNJ 2002 RKNJ 2002 Wu, 1994 Kojima,1995

PT PU(1) PU(1)/PT PU(2) PU(2)/PT PU(3) PU(3)/PT

1949 63,30 1950 67,90 1951 72,60 1952 574,82 71,63 12,46% 77,60 13,5% 1953 81,50 1954 84,30 1955 614,65 82,85 13,48% 85,00 13,8% 1956 90,40 1957 93,80 1958 116,80 1959 121,10 1960 662,07 130,73 19,75% 127,80 19,3% 1961 658,59 127,07 19,29% 117,80 17,9% 138,14 21,00% 1962 672,95 116,59 17,33% 109,10 16,2% 127,47 18,90% 1963 691,72 116,46 16,84% 111,20 16,1% 130,12 18,80% 1964 704,99 129,50 18,37% 110,90 15,7% 128,81 18,30% 1965 725,38 130,45 17,98% 114,10 15,7% 132,63 18,30% 1966 745,42 133,13 17,86% 115,60 15,5% 134,36 18,00% 1967 763,68 135,48 17,74% 119,10 15,6% 138,66 18,20% 1968 785,34 138,38 17,62% 117,50 15,0% 136,72 17,40% 1969 806,71 141,17 17,50% 116,70 14,5% 135,99 16,90% 1970 829,92 144,24 17,38% 118,10 14,2% 137,65 16,20% 1971 852,29 147,11 17,26% 122,60 14,4% 139,70 16,00% 1972 871,77 149,35 17,13% 126,70 14,5% 144,75 16,20% 1973 892,11 153,45 17,20% 129,90 14,6% 148,44 16,60% 1974 908,59 155,95 17,16% 131,10 14,4% 149,86 16,40% 1975 924,20 160,30 17,34% 132,90 14,4% 151,99 16,40% 1976 937,17 163,41 17,44% 135,00 14,4% 154,25 16,50% 1977 949,74 166,69 17,55% 136,80 14,4% 156,26 16,50% 1978 962,59 172,45 17,92% 142,40 14,8% 163,26 17,00% 1979 975,42 184,95 18,96% 152,30 15,6% 174,03 17,80%

Tableau 2.2 (la suite). Population urbaine et niveau d’urbanisation de Chine 1949-2003

(unité : million de personnes)

RKNJ 2002 RKNJ 2002 Wu, 1994 Kojima,1995 Zhang et Zhao,1998

PT PU(1) PU(1)/PT PU(2) PU(2)/PT PU(3) PU(3)/PT PU(4) PU(4)/PT

1980 987,05 191,40 19,39% 158,70 16,1% 181,17 18,40% 190,01 19,25% 1981 1000,72 201,71 20,16% 163,90 16,4% 187,02 18,70% 1982 1016,54 214,80 21,13% 168,40 16,6% 197,11 19,40% 1983 1030,08 222,74 21,62% 174,40 16,9% 208,44 20,30% 1984 1043,57 240,17 23,01% 194,70 18,7% 232,95 22,50% 1985 1058,51 250,94 23,71% 209,70 19,8% 254,86 24,70% 248,47 23,47% 1986 1075,07 263,66 24,52% 216,00 20,1% 263,04 24,90% 1987 1093,00 276,74 25,32% 226,80 20,8% 263,04 24,30% 1988 1110,26 286,61 25,81% 238,10 21,4% 305,87 28,10% 284,59 25,63% 1989 1127,04 295,40 26,21% 244,80 21,7% 325,77 29,40% 1990 1143,33 301,95 26,41% 251,20 22,0% 313,23 27,60% 303,96 26,59% 1991 1158,23 312,03 26,94% 340,34 29,70% 1992 1171,71 321,75 27,46% 1993 1185,17 331,73 27,99% 342,74 28,92% 1994 1198,50 341,69 28,51% 1995 1211,21 351,74 29,04% 386,08 31,88%

Notes : RKNJ : Annuaires de la population (NBS, 2002); PT : Population Totale ; PU : Population urbaine. les méthodes d’estimation et d’ajustement, ces reconstitutions représentent des améliorations significatives et offrent une base de données commune et plutôt acceptable pour les chercheurs (Zhang et Zhao, 1998 ; Zhou et Ma, 2003 ; Chan et Hu, 2003). Cette mesure plus rigoureuse et plus cohérente permet un meilleur suivi des tendances de l’urbanisation en Chine au cours des dernières décennies. Elle rend également possible la comparaison des niveaux d’urbanisation entre la Chine et d’autre pays en développement (Chan et Hu, 2003). Par conséquent, dans nos analyses, nous retenons la série de la population urbaine officielle reconstituée à la base des définitions des recensements de 1990 et de 2000 pour étudier l’évolution de l’urbanisation en Chine.

1.3. Caractéristiques principales de l’urbanisation en Chine 1.3.1. L’urbanisation avant les réformes

Comme le montre la Figure 2.2, le processus d’urbanisation en Chine a connu beaucoup de fluctuations depuis 1949, en particulier durant la période avant les réformes.

Durant cette période « maoïste » marquée par un régime de plan hautement centralisé, l’urbanisation progressait lentement. La part de la population urbaine est passée de 10,6% à 17,9% en Chine de 1949 à 1978, alors que le niveau moyen des pays moins développés est passé de 17,9% à 29,5% durant 1950-1980.

Cette période peut être divisée en quatre phases, dont les rythmes et les tendances de l’urbanisation sont distinctes (Figure 2.2). Chaque phase de l’urbanisation correspond à une conjoncture économique particulière.

Figure 2.2 L’Urbanisation et la Croissance Urbaine en Chine 1949-2005

-10 0 10 20 30 40 50 60 1949 1958 1961 1963 1965 1967 1969 1971 1973 1975 1977 1979 1981 1983 1985 1987 1989 1991 1993 1995 1997 1999 2001 2003 2005

Population urbaine (10 millions) Taux d'urbanisation (%)

Variation annuelle de la population urbaine (%)

Source : China Statistcs Yearbook (NBS, diverses années).

1949-1957 : la restauration de l’économie et l’essor de l’industrie – le démarrage d’une croissance urbaine rapide.

C’est une phase du démarrage du processus d’urbanisation à un rythme stable et relativement rapide : la population urbaine est passée de 57,6 millions d’individus en 1949 à 99,5 millions d’individus en 1957, le taux de croissance annuel moyen est de 7%, tandis que la population totale nationale s’est accrue à un taux annuel autour de 2%. Le taux d’urbanisation a connu une rapide croissance de 11% en 1949 à 16% en 1957.

Avant la fondation de la République populaire en 1949, la société chinoise avait souffert de deux décennies de guerres, de sorte que la production nationale était fortement réduite. D’après les estimations, la production agricole et la production industrielle lourde ne représentait que 70% et 30% respectivement de leurs plus hauts niveaux d’avant-guerre (World Bank, 1981). Les quatre premières années de la nouvelle république correspond à une phase de stabilisation et de restauration de l’économie nationale. La structure productive et les réseaux de distribution ont été rétablis, des réformes sur la propriété mises en place. La croissance urbaine pendant cette période est le corollaire de l’industrialisation lancée par le Premier Plan Quinquennal (1953-1957), pendant lequel le revenu national13 s’est accru à un taux élevé de 8,9% par an (NBS, 1990), et près de 3 millions d’agriculteurs émigrent chaque année vers les villes (Aubert, 1996). C’est une des périodes les plus marquées par la forte migration rurale-urbaine.

1958-1960 : le Grand Bond en Avant – l’expansion excessive de l’espace urbain et la sur-urbanisation

Cette phase est caractérisée par une expansion excessive de l’espace urbain et un exode rural accéléré. En 1960, la population urbaine a atteint 130,73 millions d’individus, soit une augmentation de 31,4% par rapport à celle de 1957, alors que la population totale n’a augmenté que de 2,4% ; il en résulte que le niveau d’urbanisation a atteint 19,8%. Au cours de cette période, le nombre de ville a augmenté de 33. On parle d’une sur-urbanisation de cette période.

L’urbanisation excessive de cette période s’est déroulée dans un contexte d’industrialisation rapide et déséquilibrée provoquée par le mouvement du Grand Bond en Avant. Initié en 1958, le mouvement du Grand Bond visait à accélérer la croissance économique par un essor des industries lourdes. Toutes les ressources possibles ont été mobilisées pour financer le développement industriel, même dans les zones rurales. La mise en œuvre de nombreux projets industriels et la construction des infrastructures urbaines ont suscité une croissance dramatique de la main-d’œuvre en ville alimentée par un exode rural. Ce mouvement dirigé par la volonté politique plutôt que par le raisonnement économique a interrompu le processus normal de croissance économique

13 Le système de comptabilité nationale en Chine est différent de celui de PNB jusqu'à 1994, où le Revenu National mesure la valeur ajoutée de l’économie, définie comme « la valeur créée par le travail engagé dans des activités de production matérielle » (NBS, 1990). La différence essentielle entre le Revenu National et le PNB est que le premier ne compte pas la valeur ajoutée des services.

ainsi que celui d’urbanisation. La structure économique handicapée a conduit à l’expansion excessive des industries et des zones urbaines accompagnée d’un exode rural massif. 1961-1965 : la grande famine et l’ajustement de l’économie nationale - la dé-urbanisation

C’est une phase de dé-urbanisation : pour la première fois dans l’histoire de la nouvelle république, la population urbaine a connu une décroissance, le niveau d’urbanisation a régressée de 19,8% en 1960 à 14,6% en 1964.

Cette phase de dé-urbanisation a correspondu à une période difficile de l’économie chinoise. Suite au bouleversement du mouvement aveugle du Grand Bond en Avant, l’économie chinoise s’est trouvé dans un véritable chaos, la situation s’étant encore aggravée à la fin des années 1950, par la grande famine et la rupture diplomatique avec l’Union Soviétique. Les activités productives sont paralysées. Le gouvernement a été obligé de réajuster la structure économique pour rétablir le processus de développement économique. Freiner le rythme d’urbanisation fait partie de cet ajustement structural économique. Au cours de 1961-1965, près de 30 millions (Aubert, 1996) de nouveaux immigrés urbains (ceux de la fin des années 1950) sont renvoyés autoritairement dans leur village d’origine. Des critères plus stricts de qualification urbaine ont été également mis en place pendant cette période (voir la section 1.1.1), de façon à empêcher la croissance du nombre de villes et de la population urbaine.

1966-1976 : la révolution culturelle - la deuxième tendance à dé-urbanisation

Cette phase est caractérisée par une croissance faible et une stagnation du taux d’urbanisation aux alentours de 17%. En fait, pendant cette période, la population urbaine croît moins vite que la population totale. Le bouleversement politique pendant la révolution culturelle a paralysé l’organisation de la production, les activités économiques ont été quasiment suspendues, l’économie nationale était complètement dans un chaos dramatique. Le gouvernement a renvoyé des cadres et des jeunes instruits urbains dans la campagne (le nombre estimé se situe entre 15 et 20 millions, Aubert, 1996). Cela a conduit directement à la deuxième phase de dé-urbanisation. Pendant cette décennie, le nombre de villes n’a augmenté que d’une vingtaine, dont la plupart étaient des villes industrielles. 1.3.2. L’urbanisation après les réformes

Depuis l’introduction des réformes économiques, l’urbanisation a redémarré et repris désormais un rythme élevé : en moins de trois décennies, la population urbaine s’est triplée,

soit une croissance annuelle moyenne de 4.46% entre 1978 et 2006. La part de la population vivant dans les zones urbaines est passée de 17,9% à 43,9%. Durant l’époque post 1978, le processus d’urbanisation se progresse à un rythme relativement stable.

1978 - 1984 : la reprise de la croissance économique et de l’urbanisation grâce aux réformes agricoles

C’est une phase de reprise d’une urbanisation rapide : la population urbaine s’est accrue de 5,37% en moyenne par an, ou plus de 10 millions de personnes supplémentaires se sont ajoutées à l’ensemble d’habitants urbains chaque année. Le niveau d’urbanisation est atteint 23% en 1984.

Cette phase correspond à un point tournant de l’économie chinoise. La mise en place des réformes économiques depuis la fin des années 1970 a en premier lieu décollectivisé le système d’organisation dans l’agriculture. Avec l’introduction des mécanismes d’incitation, la production agricole a pris son essor. Dans le même temps, le surplus de main-d’oeuvre agricole a été libéré pour s’engager dans les activités non-agricoles, dont une grande partie dans les TVEs (Town and Village Entreprises). L’industrialisation rurale s’est démarré durant cette période a contribué au développement des bourgs et des petites villes. Par ailleurs, environ 20 millions des cadres et « jeunes intellectuels » citadins (zhishi

qingnian) envoyés dans la campagne pendant l’époque maoïste ont été permis de se réinstaller en ville (Lu, 2003).

1985-1991 : l’urbanisation stable et les réformes urbaines

Durant cette phase, la population urbaine a continué à croître à un taux assez élevé (3,82% par an), et le niveau d’urbanisation a approché les 27% en 1991.

Depuis le début des années 1980, les réformes économiques se sont étendues dans les secteurs urbains. D’une part, les mécanismes d’incitation ont été introduits afin de rationaliser la gestion et à améliorer l’efficience des entreprises publiques, d’autre part, les réformes ont autorisé l’émergence des structures productives non étatiques. Un marché des produits industriels en dehors du plan administratif est également apparu. Les politiques d’ouverture constituent un autre facteur contribuant à la croissance l’économie urbaine. Suite à l’établissement des « zones spéciales économiques » dans quatre villes14 entre 1980 et 1982, d’autres quatorze villes côtières ont été désignées « villes ouvertures »15 en 1984.

14 Shenzhen, Zhuhai, Xiamen, Shantou.

15 Dalian, Qinhuangdao, Tianjin, Yantan, Qingdao, Lianyungang, Nantong, Shanghai, Ningbo, Wenzhou, Fuzhou, Guangzhou, Zhanjiang, Beihai.

Puis, plusieurs zones d’ouvertures à l’échelle régionale ont été établies dans les provinces côtières16.

La croissance urbaine dans cette phase est promue à la fois par la reprise de l’économie industrielle urbaine et la prospérité des TVEs. Par ailleurs, depuis 1984, le gouvernement a commencé à relâcher les restrictions sur la migration, le transfert de la main-d’œuvre agricole persistait vers les secteurs non-agricoles et les zones urbaines. 1992-présent: l’approfondissement des réformes économiques et l’urbanisation rapide

Durant 1992-2006, la population urbaine s’accrue à un taux moyen de 4,19% par an, et le niveau d’urbanisation s’élève de 16 points de pourcentage.

L’année 1992 marque le début d’une nouvelle phase des réformes économiques en Chine. Le gouvernement central a décidé l’accélération des réformes internes en fixant officiellement l’objectif d’établissement d’une « économie socialiste de marché ». Les réformes sur les entreprises publiques deviennent plus radicales, le poids du secteur non étatique dans l’économie ne cesse de croître. Avec les réformes s’intensifient dans tous les domaines que sont la fiscalité et le financement, un système de l’économie du marché s’établit. Simultanément, l’économie chinoise voit son intégration croissante dans l’économie mondiale, avec l’influx persistant des investissements directs étrangers et la croissance continue du commerce extérieur.

Durant cette période, les restrictions sur la migration sont relâchées davantage. L’urbanisation est caractérisée par une prise en ampleur de la migration rurale-urbaine, bien que cette dernière soit pour l’essentielle informelle. Cette population appelée « temporaire » se concentre dans les villes côtières les plus dynamiques sur le plan économique.