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Au fil de ce mémoire, nous avons pu appréhender de quelle manière les analyses de besoins se structurent concrètement dans des organisations aux profils divers et variés. D’une part, nous avons pu observer qu’aux yeux des informateurs, une procéduralisation ne recouvrant pas l’entièreté des étapes de l’analyse des besoins n’est pas forcément un désavantage tant que leurs méthodes informelles principalement basées sur des échanges oraux leurs savoirs tacites leur permet cette analyse. D’autre part, nous avons pu réaliser que le fait de dévier de la procédure ou de la compléter en fonction de la singularité des expressions de besoins et des situations des demandeurs n’est pas un biais en soit. Nous sommes même arrivés au constat que poursuivre une procédure inadaptée à la situation réelle peut être plus dommageable qu’improviser de manière réfléchie une stratégie sur-mesure. C’est ainsi que nous avons, à nouveau, pu nous rendre compte de la capacité que les travailleurs ont de faire usage d’une ingéniosité et d’une ruse efficace afin de face aux situations imprévisibles auxquels l’organisation du travail prescrit n’a pas songé. Dans la pratique, les formalités se complètent par des méthodologies évolutives, à l’informel, au sur-mesure et à la liberté créatrice propre au facteur humain. L’analyse des besoins se fait dans un esprit de co-construction et d’interprofessionnalité. Suite à nos réflexions, nous émettons l’hypothèse que les procédures permettent d’analyser les besoins d’un travail qui serait égal au travail prescrit, tandis que les méthodologies créées sur la base des savoirs tacites tout en passant par le filtre de la phronesis permettent l’analyse des besoins prenant place dans la complexité du travail réel.

Dès à présent nous partageons quelques réflexions personnelles qui ont émergées au fil de notre analyse. Ce travail de recherche nous a valu de longues heures de réflexion et de questionnements autour de l’analyse de besoins, c’est ainsi que nous avons été amenées à faire plusieurs raisonnements supplémentaires que nous n’avons pas pu intégrer jusqu’à présent dans ce travail.

Analyse de besoins et cahier des charges

Ce travail de recherche nous a amené à nous questionner principalement au sujet de deux aspects : le lien que l’analyse de besoins entretient, d’une part, avec la construction des cahiers des charges des collaborateurs et, d’autre part, avec le recrutement de nouveaux collaborateurs.

Tout d’abord, il nous semble que la proximité de l’auteur du cahier des charges avec le poste qu’il décrit influence la ressemblance du cahier des charges avec le travail réel du futur collaborateur.

Ainsi, notre réflexion nous amène à penser que si le cahier des charges est formulé par un collaborateur expérimenté du poste en question, les futures analyses de besoin et donc les dépenses en termes de formation peuvent être potentiellement réduites ou du moins mieux distribuées.

Ensuite, nous nous sommes intéressées au potentiel lien entre la manière de pratiquer l’analyse de besoins, sa temporalité et la façon dont est pensé le recrutement au sein de l’organisation.

Nous imaginons qu’en fonction de la réponse à diverses questions : Le recrutement est-il pensé

101 au regard des besoins futurs ou uniquement ceux d’aujourd’hui ? Le recruteur pense-il déjà aux potentiels besoins de formation que pourrait exprimer le candidat s’il est le futur collaborateur pour le poste en question ? l’analyse de besoin prend une place différente au sein de l’organisation.

Dans le cas où le recrutement est mené avec une vision stratégique à moyen ou long-terme et que l’organisation considère par exemple l’évolution du collaborateur en son sein avec des parcours de formation à l’appui, il nous semble que le volume d’analyses de besoins pourrait être réduit car le collaborateur est davantage adapté à son poste, aux évolutions de ce dernier étant reliées en partie aux évolutions stratégiques vers lesquelles l’organisation se dirige.

Notre but ici n’est pas de vouloir à tout prix réduire le nombre d’analyses de besoins ou encore d’actions de formation. Par cette réflexion notre intention première est d’envisager des moyens idéaux35 permettant d’éviter l’émergence des dysfonctionnements en situation de travail, des inadéquations au poste et donc des besoins ayant pu être prévenus par le biais d’une analyse de besoins actuels et futurs lors de la rédaction de l’offre d’emploi ou encore du cahier des charges.

Au final, il nous semble que la temporalité de l’analyse de besoins et la représentation que l’organisation véhicule autour de la fonction du recrutement peuvent avoir d’importants impacts sur le volume de formation. In fine, ce procédé pourrait éviter des coûts superflus dû à une incompatibilité partielle du collaborateur au poste et à ses évolutions qui étaient partiellement prévisibles en amont. Ainsi, nous supposons qu’une analyse de besoins menée de manière plus efficiente permettrait d’augmenter la rentabilité de la formation en baissant une partie des coûts monétaires mais également non-monétaires toute en facilitant l’exécution d’analyses de besoins sous les conditions qu’imposent le travail réel.

N’oublier personne

Tout au long de ce travail, un certain doute planait quant à l’exhaustivité des besoins récoltés par les responsables de formation participant à notre recherche. Nous redoutions que certains besoins ne soient ni conscientisés, ni exprimés par les acteurs concernés et donc impossibles à traduire en actions de formation.

C’est pour cette raison et aussi pour proposer une synthèse visuelle de notre compréhension de la construction des analyses de besoins. Nous proposons un schéma sous forme d’entonnoir constitué de différents filtres illustrant les différentes étapes permettant le traitement d’une commande en demande soit en besoin réel. Ce schéma est le résultat d’une compilation des pratiques évoquées par les informateurs et des connaissances au sujet des pratiques d’analyses de besoins que nous avons pu construire et perfectionner au fil de ce travail de mémoire. Le schéma représente un processus dynamique, itératif et continu de construction de l’analyse de besoins. Les éléments présents dans une colonne peuvent donc tout à fait se retrouver à un autre moment dans ce processus.

35 Nous prenons conscience que nous formulons nos réflexions sans prendre en compte la faisabilité et la transférabilité de nos propositions dans l’environnement complexe des organisations

102 Pour faciliter la lecture de ce schéma voici quelques précisions quant aux légendes des trois lignes du tableau :

Supports : Il s’agit des supports (physiques ou non) ou des sources véhiculant certaines informations-clés soutenant l’analyse de besoins.

Relations : Il s’agit des relations permettant la construction des pratiques d’analyses de besoins.

Processus : Il s’agit des processus de pensée, d’analyse ou l’esprit dans lequel l’analyse de besoins se construit.

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