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Pour donner suite à l’observation systémique des différents environnements entourant les pratiques de formation, nous allons partager nos réflexions et questions d’acteurs par rapport aux les tendances évoquées et la construction des pratiques d’analyses de besoins.

À ce stade de la recherche, nous identifions cinq portes d’entrées pouvant colorer les manières d’analyser les besoins dans les organisations. Nous dressons donc un panorama succinct des différentes variables identifiées jusqu’à présent et illustrons ces dernières avec des questions intuitives, spontanées et empiriques que nous nous sommes posés en tant qu’acteurs de terrain.

3.1 Auprès des évolutions sociétales et technologiques

De nos jours, l’envie de consommer tout type de biens et de services s’étend à la formation. Il devient tendance de suivre une formation. La formation devient donc attrayante. Pourtant, cette mode comporte le risque de diminuer la pertinence des formations proposées. En effet les

« formations cadeau » sont perçues comme des dérives actuelles. L’enjeu de définir correctement et précisément les besoins de formation est de taille afin d’éviter que la formation devienne un passe-temps.

Comment les responsables de formations s’y prennent-ils afin d’éviter de créer de « faux » besoins ?

Par ailleurs, la réflexion autour de la digitalisation de la formation nous amène à nous demander si cette tendance touche aussi les pratiques d’analyses de besoin.

De quelle manière les outils digitaux sont-ils intégrés pour accompagner l’analyse de besoins de formation ?

3.2. Au contact des évolutions législatives

Globalement, la pluralité des lois impacte les actions des citoyens et des entreprises. Cela est aussi le cas dans le domaine de la formation. De cette manière, les lois régulent l’offre de formation, prescrivent certaines pratiques à adopter et poussent ainsi les fournisseurs de formation à mesurer la demande. Ainsi, le caractère obligatoire des lois conditionne les pratiques d’analyses de besoins.

Comment les pratiques d’analyses de besoins sont-elles menées dans le cas de formations obligatoires ?

Comment l’analyse du public ayant besoin de cette formation spécifique est-elle opérée ?

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3.3. Au contact de la croissance économique

Dans la constellation actuelle d’une économie sujette à des fluctuations inattendues, la gestion des risques ne peut se faire dans des conditions optimales. À une plus grande échelle, les lacunes de compétences sont un facteur pouvant mener à des fractures économiques pesant sur l’économie locale ou même mondiale11. Afin d’éviter ce type de récession, une analyse prévisionnelle des besoins des professionnels peut être une stratégie à adopter afin de combler les lacunes avant qu’elles n’aient de conséquences sur l’exercice de l’activité professionnelle.

Cette idée est confirmée par Doray (2015) qui pense que face aux mutations économiques, « il est nécessaire de développer des pratiques d’apprentissage tout au long de la vie afin de permettre aux individus de s’insérer dans la vie active » (p. 121). En effet, plus l’environnement est instable, plus la gestion prévisionnelle des besoins en formation est nécessaire et, paradoxalement, plus son application est ardue. Au travers de ce travail de recherche, nous nous demandons :

Quelles sont les pratiques actuellement investiguées afin d’anticiper les défis que les employés devront être aptes à relever demain ?

3.4. Dans l’entreprise

Dans la pratique, le besoin est un terme dont les professionnels de la formation font un usage fréquent. Nous nous questionnons sur la finesse avec laquelle les besoins sont observés, recueillis et/ou analysés.

En quoi les pratiques d’analyse de besoins se différencient-elles ?

Nous supposons que, dans tous les domaines d’activité confondus, les professionnels ont de la peine à exprimer leurs réelles difficultés. Cette réalité peut être due à leur personnalité, à leur posture professionnelle, à l’environnement organisationnel de l’entreprise mais surtout au fait que l’individu n’est pas assez accompagné lorsqu’il cherche à accéder à la formation.

Comment le responsable de formation accompagne-t-il l’employé dans son expression des besoins ?

Souvent l’expression d’un besoin de formation est associée à une prise de risques et à une sortie de la zone de confort de la personne concernée. La difficulté s’agrandit lorsque l’employeur a de la peine à interpréter les difficultés exposées en dispositif de formation.

Comment le responsable de formation ou le chef d’équipe traduit-il les situations évoquées par le travailleur en termes d’objectifs de formation ?

Prenons à présent le cas où l’initiative de formation provient de l’employeur : ces questions se posent à nouveau mais comportent des enjeux différents. Ces enjeux peuvent notamment être plus intimement liés aux aspects de rentabilité et de productivité de l’employé sur sa place de travail. Il y aurait donc plusieurs types de besoins : ceux de l’entreprise à un niveau global (plutôt

11 Conclusions de Florence Noiville dans son ouvrage « J’ai fait HEC et je m’en excuse » paru en 2009.

21 avec une visée de développement stratégique de l’entreprise) et ceux de l’employé à un niveau spécifique (plutôt avec une visée sur l’optimisation de l’exécution d’une tâche précise).

Dans quelle mesure ces deux types de besoins sont-ils en concurrence ? Comment le responsable de formation priorise-t-il ces deux types de besoins ?

3.5. Au plus proche de l’individu

Afin de pouvoir procurer une offre de formation correspondante en tout temps et en toutes circonstances, les responsables de l’offre de formation au sein d’une institution interrogent l’avenir. Or, dans l’environnement changeant :

Comment les responsables de formation peuvent connaître les besoins de demain si les conditions de demain ne sont pas encore établies ?

En 2018, les exigences des entreprises envers leurs employés ne cessent d’accroître. Le diplôme et l’expérience ne suffisent plus : cela est le cas depuis 2006 d’après un article12 des deux DRH13 d’Adecco. Selon eux, l’employé doit réaliser avec facilité les tâches qui lui sont attribuées (habiletés fonctionnelles), adopter une attitude positive lui permettant de s’intégrer dans son équipe (habiletés individuelles) sans oublier qu’il doit également pouvoir aisément travailler avec cette dernière (habiletés interpersonnelles). Afin de remplir la plus grande majorité des exigences de l’employeur, l’employé peut faire recours à la formation et notamment s’inscrire dans une démarche de formation tout au long de la vie. En effet, l’employé d’aujourd’hui ne peut se permettre de stagner. L’injonction à s’adapter et à évoluer est forte et également nécessaire pour s’assurer une employabilité et une évolution professionnelle.

Toutes ces mutations modifient le rôle de la formation dans les entreprises ainsi que les pratiques qui en découlent. De manière générale, des questions se posent quant au rôle de la formation continue dans les organisations :

Son rôle est-il de faire acquérir de plus en plus de connaissances transversales aux salariés afin qu’ils puissent acquièrent les compétences d’un généraliste ? Ou alors la tendance se situe-elle davantage du côté d’une spécialisation fine afin d’obtenir une expertise spécifique à un poste de travail ?

12 Publié sur le site internet de de l’Ordre des conseillers en ressources humaines agrées renseignant sur le marché de l’emploi au Québec

13 Directeur des Ressources Humaines

À retenir :

L’analyse des besoins semble être une pratique complexe au carrefour d’une multitude de tensions et influences diverses et variées.

Venant de l’extérieur, les modes, les innovations de plusieurs domaines et venant de l’intérieur les particularités de l’organisation, de son contexte, des situations de travail y prenant place semblent structurer les pratiques d’analyses de besoins des responsables de formations d’une manière qui nous intrigue.

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