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7. Présentation des résultats

7.1. Dimensions propres à la pratique d’analyse des besoins

Tout d’abord nous constatons que dans toutes les organisations, l’analyse de besoins se fait grâce au travail commun de plusieurs acteurs significatifs en fonction du besoin et de la situation. Très souvent le chef du service, pour lequel le besoin est identifié est présent durant la majeure partie des étapes de l’analyse de besoins.

Ensuite, nous remarquons que les niveaux de formalisation varient selon nos informateurs. Cette première observation nous a poussés à créer deux catégories distinctes. Ainsi, la première catégorie englobe les aspects qui semblent être formalisés et effectués de manière régulière lors de la grande majorité des analyses de besoins, tandis que la deuxième rassemble les étapes et les modalités qui se voient adaptées selon les situations et les analyses de besoin.

7.1.1. Aspects standards de l’analyse des besoins

Dans quatre organisations sur cinq, nous avons pu observer un certain nombre d’étapes mises en œuvre de manière régulière et selon un ordre chronologique précis et respecté. Il s’agit principalement de formulaires à remplir et de documents à établir. Le formulaire représente le début officiel de la démarche d’analyse de besoins.

Informateurs Informations présentes dans le premier formulaire N°1 Définition et motif de la demande

Résultats escomptés

Mesures envisagées pour réaliser et assurer le transfert

N°2 But et motif de la demande

N°3 But

Objectifs pédagogiques Définition du contenu

Type de dispositif de formation (choix à cocher) Personnes constituant le groupe de travail

N°4 Thème de la formation

Type de formation (choix à cocher) Nécessité de la formation

Motivation de la demande

N°5 Aucun formulaire

Figure 9 : Informations demandées par les formulaires de demande de formation

Nous retenons les observations suivantes.

 Les buts sont évoqués dans deux formulaires (N°2,3)

 Les motifs et motivations sont récoltés dans deux formulaires (N°1,2)

 La définition du thème et le contenu sont présents dans (N°1,3,4)

 Le transfert n’est évoqué qu’une seule fois. (N°1)

 Une organisation ne possède aucun formulaire. (N°5)

68 Plusieurs informateurs (2,3,5) précisent que des rencontres sont planifiées périodiquement et officiellement dans l’agenda des responsables de formation et d’autres acteurs significatifs. Trois interlocuteurs indiquent la présence d’un cahier des charges (1,3,5), de formations pilote (3) ou de formations zéro (2).

« Mais je crois que je sous-estime les contacts plus informels et réguliers que j’ai avec l’ensemble des collaborateurs. Donc forcément les séances avec les cadres sont marquées dans l’agenda donc ils ressortent de manière un peu plus concrète.

Mais finalement au quotidien le nombre de fois où les collaborateurs me parlent de leurs besoins c’est très fréquent. Je pense que c’est vraiment l’agenda qui déforme ma perception. » (E 5, lignes 37-41, p.66)

« Mais ça part tout de la base qui est le cahier de charges. Après on va faire les différentes validations ; la stratégie si nécessaire et après on part vraiment plus finement dans la création du guide d’animation. Après, il y a le développement pur de la formation : les supports, le matériel, la partie logistique etc. Chaque fois, il y a des étapes de validation par le groupe de travail. Formation pilote donc là on a la phase conception, là déploiement. Formation pilote où le client va choisir quelques personnes, souvent il va se mettre dedans mais il va prendre quelques personnes du public cible qu’on va choisir ensemble pour créer une formation pilote. » (E 3, lignes 427-433, p.39)

Tous les informateurs soutiennent les demandeurs dans leur expression de besoins. Parmi eux, une organisation (4) propose un outil de type e-learning pour accompagner les personnes, en amont de leur premier contact avec le secteur formation.

« C’est vrai que l’outil, c’est moi qui l’ai développé et il permet de faire réfléchir les gens sur la nécessité d’aller suivre cette formation alors que ce soit le bénéfice pour le collaborateur, pour le service, l’équipe et plus largement pour l’organisation et c’est vraiment d’amener les deux personnes concernées : le collaborateur qui va suivre cette formation et son supérieur hiérarchique. De les amener à se questionner sur : Est-ce que c’est vraiment utile de le faire maintenant ? Et pourquoi cette demande vient maintenant ? Pourquoi cette demande n’est pas venue il y a six mois ? et pourquoi est-ce qu’elle ne pourrait pas venir dans deux ans ? »

(E 4, lignes 110-115, p.51)

69 Parmi nos organisations, trois d’entre elles (1,3,5) énoncent utiliser des présentations Powerpoint, un fichier Excel ou un diagramme de projet lorsqu’un besoin doit être validé par le secteur potentiellement concerné par la formation. Pour le troisième informateur, il était initiateur de la formation et voulait confirmer le besoin qu’il avait repéré dans ce département. En parlant de l’analyse de besoins, il affirme :

« Ce n’est pas plus formalisé que ça. Par contre, si on le fait on ne peut pas venir les mains dans les poches. Si on n’a pas une analyse de besoins. » (E 3, lignes 508-509, p.41)

Tous nos informateurs nous présentent la confrontation du nouveau besoin avec l’offre du catalogue de formation et le renouvellement périodique de cette dernière comme une étape d’analyse importante. Les informateurs nous partageant les critères utilisés afin de renouveler l’offre citent le nombre d’inscriptions et les projets actuels de l’organisation. Le nombre de participants aux formations du catalogue est le critère le plus cité indiquant l’adéquation entre l’offre et le besoin. Les projets départementaux, les actualités des secteurs de l’organisation structurent également le renouvellement de l’offre catalogue (1,3).

« Alors c’est le nombre de fois qu’elle a été dispensée dans l’année et le nombre de participants. Voilà et c’est assez binaire, si elle n’a pas été dispensée durant l’année on la laisse encore une année et si au bout de deux ans elle n’a pas été dispensée, alors en l’enlève. C’est assez simple.» (E 3, lignes 81-83, p.32)

Trois organisations (1,2,4) pondèrent l’utilisation des procédures. Notre deuxième informateur illustre ce propos de la manière suivante :

« On s’est rendu compte qu’il faut quelques formulaires pour fixer un peu le processus, ça il n’y a pas de soucis. Mais trop de formulaires, ça servirait à rien car tout est interprétable selon la manière dont on le mentionne ou on l’écrit. » (E2, lignes 492-493, p.24)

Finalement, une distanciation par rapport aux modèles théoriques se fait particulièrement ressentir auprès d’un informateur.

« Donc ça c’est le modèle théorique parce que ça ne se fait pas de manière aussi structurante. » (E 1, lignes 112-113, p.3)

Une organisation en particulier (3) présente un groupe de travail très structuré avec un groupe d’acteurs toujours présent comprenant au minimum le demandeur soit le client qui est souvent un chef du secteur. Ensuite :

« un responsable de secteur, un chef d’équipe, un chef de projet, quelqu’un des RH. » (E 3, ligne 167, p.34)

70 La majorité des organisations (1,2,3,4) font appel, à différents moments et avec une intensité variable au service des ressources humaines au fil du processus.

Tous les responsables de formation nous confient que leur analyse de besoins ne repose pas uniquement sur des outils formels. Les propos ne sont pas toujours très clairs à ce sujet mais un clivage apparaît entre une analyse de nature tantôt formelle et tantôt d’une nature différente.

Comme nous le livre par exemple premier informateur :

« Si vous voulez, c’est très diversifié. Une fois qu’on a fait l’analyse de besoins, de manière très factuelle. On fait l’analyse de besoins, on s’assure que la demande est la bonne, qu’on a répondu. » (E 1, lignes 663-664, p.14)

7.1.2. Autres étapes de l’analyse des besoins

Tous nos informateurs nous ont expliqué qu’ils se rencontrent et qu’ils mènent des discussions avec les demandeurs et d’autres acteurs-clé. Les formulaires et autres documents présents dans la procédure d’analyse de besoin requièrent la plupart du temps des rencontres. Un questionnement se crée dans l’interaction sous la forme de séances. Tous les informateurs s’accordent sur l’importance de ces interactions.

Nous avons relevé de manière très récurrente que les responsables de formation nous expliquent ce qu’ils font en termes d’analyse de besoins en nous citant les questions qu’ils posent. Leurs questions sont d’une part posée à l’acteur exprimant le besoin et, d’autres part, posées au responsable de formation lui-même. Dans le premier cas, deux des informateurs dirigent leurs questions de manière très différentes : l’un (5) axe ses questions directement sur le besoin tandis que l’autre formule des questions qui, indirectement, vont mener à l’expression du besoin (3).

Tous nos informateurs évoquent que lors de ces séances, un accent majeur est mis sur les faits concrets et sur les situations de travail vécues ou observées en rapport avec le besoin évoqué que peuvent livrer les demandeurs.

« Donc on va leur dire, leur poser la question, on a fait une petite trame : Quels sont les défis que doivent affronter les managers les cinq prochaines années ? Quelles sont les compétences nécessaires ? Comment être armé pour pouvoir affronter ces défis ? Donc là du coup on ressort les compétences. Au final, est-ce qu’il y aurait des formations qui vous permettrait d’augmenter vos compétences pour répondre à ces défis, qui répondraient aux besoins et aux enjeux. Comme ça on ne va pas directement demander Quelles sont les formations dont vous avez envie ? » (E 3, lignes 601-606, p.43)

Lors du processus d’analyse des besoins, les informateurs (5,3) font souvent recours à des tactiques improvisées et novatrices afin de récolter les besoins d’une manière optimale.

71 De manière générale, les informateurs (1,3,5) éprouvent des difficultés à révéler clairement les rouages leur permettant de définir le réel besoin sur la base duquel ils vont concevoir la formation. En effet, l’informateur de la première organisation nous explique ce qui guide son analyse des besoins :

« L’expérience mais aussi beaucoup de feeling et comme je disais avant le fait d’avoir cette granularité fine au niveau relationnel avec les gens avec qui vous travaillez. Je pense qu’il y a des choses qu’on ne peut pas expliquer, les perceptions, aussi au feeling et tout ce qu’on retire de la formation… » (E 1, lignes 415-418, p.9)

« Donc ça ne vous aide peut-être pas beaucoup. Mais c’est une réalité. » (E 1, lignes 421-422, p.9)

Tous les acteurs énoncent que l’analyse se construit entre eux dans un esprit de co-construction (1,4), de négociation (1,4) et de confiance (2,4). Le questionnement dans ces interactions est central. En plus de ces questions posées au demandeur, nos informateurs nous livre les questions qu’ils se posent à eux-mêmes au fil de l’analyse.

« Durée de la formation souhaitée, c’est pas du tout définitif mais ça nous donne un ordre d’idée : « Est-ce qu’il pense plutôt à une sensibilisation d’une heure ou à une formation complète de 10 jours ? » et après le délai, et ce qui nous intéresse le plus c’est le but. « Quelle est la situation actuelle et quelle est la situation souhaitée ? », « Est-ce qu’il a une remarque particulière ? » (E 3, lignes 134-137, p.33)

« Cette formation pilote va permettre de valider déjà Est-ce qu’on est bien en phase avec le cahier des charges ? ; Est-ce que tout le contenu décrit est traité

? ; Est-ce que les objectifs pédagogiques sont atteints ou on pense qu’ils seront atteints avec cette formation pilote? Ou alors peut-être aussi valider le côté métier, et aussi le côté pédagogique. »

(E 3, lignes 441-444, p.39)

7.2 Dimensions construisant les pratiques