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La recherche d’un critère de distinction. De nombreux auteurs admettent que les notions de cause légitime et de juste motif sont des notions dont la distinction est très nette

Une faible influence sur les acteurs sociaux

Section 1. Les limites du pouvoir d’écarter les acteurs sociaux

B. La consécration nécessaire de l'exclusion judiciaire au sein de l’OHADA

60. La recherche d’un critère de distinction. De nombreux auteurs admettent que les notions de cause légitime et de juste motif sont des notions dont la distinction est très nette

D’une part, en prenant pour référence la révocation telle que prévue en droit français, il est admis par des auteurs que les avantages de l’une et de l’autre notion ne sont pas identiques. La révocation par l’associé offre plus d’avantages pour la société et les associés que la révocation judiciaire, notamment en termes de célérité de la procédure267. D’autres part, en se fondant sur l’étendue des pouvoirs du juge, certains auteurs268 pensent que le juste motif de révocation est entendu dans un sens plus large que la cause légitime de révocation qui, quant à elle, est plus restreinte269. Le juste motif est le motif qui présente « un certain caractère de gravité, compte

tenue de l’importance de la mesure qu’il autorise »270. Elle repose sur l’existence d’un critère objectif remettant en cause toute appréciation subjective271. La cause légitime en ce qui la concerne, est souvent rattachée à l’activité du gérant. Elle peut être définie comme une cause

267 CA Paris, ch.08, 29 nov. 2016, Rev. sociétés, 2017, p. 295, n°4, note Lecourt (A.) L’auteur présentant la distinction entre la cause légitime et le juste motif, relève que la révocation par les associés est « plus rapide que

la révocation judiciaire, elle est également nettement plus efficace, sinon radicale (…) ».

268 Berr (Cl.), L’exercice du pouvoir dans les sociétés commerciales, op. cit., p.338, n°675 ; Aubert (J.L.), « La révocation des organes d’administration des sociétés commerciales », RTD com., 1968, p.995.

269 V. Le Cannu (P.) et Dondero (B.), Droit des sociétés, LGDJ, 8e éd., coll. Précis Domat, 2019, p.921 et 922, n°1370.

270 V. Baillod (R.), « Le juste motif de révocation des dirigeants sociaux », op. cit., p. 403.

271 TC Paris, 5 juill. 1972, JCP, 1974, note Synvet. Le juge avait décidé que l’appréciation subjective pouvait être exceptionnellement faite lorsque les faits soulevés le justifient. Dans cette affaire, le juge a révoqué le dirigeant en estimant que la perte de confiance des associés était justifiée par la « gestion dispendieuse » du dirigeant.

en vertu de laquelle le gérant n’a pas rempli ou ne peut plus remplir convenablement ses fonctions. C’est précisément le cas lorsque ce dernier fait l’objet d’une absence prolongée et injustifiée, d’une incapacité physique, d’une malversation, d’une insuffisance technique. Ces auteurs pensent que les faits qui doivent être pris en considération par le juge se résument en l’attitude et le comportement du dirigeant. Au-delà, le juge ne peut plus procéder à une révocation judiciaire. Ainsi par exemple, la négligence dans une gestion pourra être une cause de révocation. A contrario, le souci de diminuer les charges sociales par une compression de personnel ne pourra pas l’être. L’admettre permettra à un seul associé d’obtenir du juge une décision de compression des dépenses. Cette mesure pourra remettre en cause l’exercice collectif de la fonction d’associé.

61. D’autres auteurs272 en revanche s’accordent à penser que les expressions de cause légitime et de juste motif ont le même sens et recherchent le même objectif. Il s’agit toutes des notions qui n’ont pas fait l’objet de définitions par le législateur et qui sont laissées à l’appréciation du juge. Un auteur constate que « les tribunaux confèrent un contenu normatif

très proche à la notion cause légitime et à la notion de juste motif »273. En effet, l’appréciation par le juge de la cause légitime nous semble aussi délicate que celle du juste motif274. Ainsi, dans l’un ou l’autre cas, le juge a pu dégager que la faute et même l’absence de faute sont des éléments qui permettent de justifier la révocation judiciaire. Ainsi, la faute du gérant peut consister à son refus persistant de convoquer l’assemblée générale annuelle, ou en ses agissements frauduleux consistant à laisser se tenir une assemblée générale composée d’un seul associé ou encore, de tenter lors d’une autre assemblée générale, de faire compter comme présent un associé qui ne l’était pas.

62. La cause légitime et le juste motif, deux notions aux objectifs communs. La cause légitime et le juste motif ont toutes les deux une fonction disciplinaire. Elles visent l’une et l’autre à sanctionner la méconnaissance par le gérant du cadre légal et statutaire dans lequel il a promis d’exercer ses fonctions qui consistent essentiellement à assurer la bonne gestion de la société. Bien plus, il a également été admis que ces deux notions ne s’entendent pas 272 Cf. Germain (M.) et Magnier (V.), Ripert (G.) et Roblot (R.) (dir.), Droit commercial, op. cit., p.716, n° 961 ; Fénéon (A.), Droits des sociétés en Afrique (OHADA), op. cit., p.506, n°1310 ; Cozian (M.), Viandier (A.), Deboissy (Fl.), Droit des sociétés, op. cit., p.608, n°1515; Merle (Ph.) et Fauchon (A.), Sociétés commerciales,

op. cit., p. 235, n° 226; Mestre (J.), Velardocchio (D.), Mestre-Chami (A.-S.), Lamy Sociétés commerciales, 2013, n° 3045; Dione (A.), « La révocation des dirigeants des sociétés anonymes et des sociétés à responsabilité limitée à la lumière de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et des groupements d’intérêt économique, EDJA, n°54, juil.-sept., 2002, p.55.

273 CA Paris, 17 mars 2015, Rev. Sociétés, 2015, p. 588, note Lecourt (A.).

seulement en fonction du comportement du dirigeant, mais aussi et surtout, en fonction de l’intérêt social qui est le but vers lequel doit tendre sa mission. Ainsi, qu’il s’agisse de la révocation judiciaire pour cause légitime prévu par l’article L. 223-25 du code de commerce français ou de celle pour juste motif, organisée par l’article 326 al. 3 de l’AUDSCGIE, sa mise en œuvre doit être justifié par l’intérêt social275.

63. L’appréciation judiciaire de l’intérêt social. La révocation judiciaire est la sanction des agissements préjudiciables à l’intérêt social276. Admettre donc l’intérêt social comme fondement de l’intervention judiciaire revient à étendre les pouvoirs du juge, car il sera appelé à apprécier cet intérêt social. Lorsque le juge est saisi d’une demande en révocation, il apprécie les actes et le comportement critiqués par les associés demandeurs à la lumière du préjudice qu’ils ont causé ou auraient pu causer à la société. Pour éviter une quelconque immixtion judiciaire dans la gestion de la société, un auteur propose que la cause légitime de révocation s’apprécie non seulement en considération de l’intérêt social, mais aussi en tant qu’entité économique et juridique, qui ne coïncide pas nécessairement avec l’intérêt des seuls associés277. Certes, la cause légitime de révocation s'entend le plus souvent d'un grief tiré du comportement du gérant qui méconnaît ses obligations légales de dirigeant social ou les dispositions statutaires, ou encore qui cherche à préserver déloyalement ses intérêts personnels, et met en péril les intérêts de la société. Mais elle pourrait aussi trouver son fondement dans des considérations relatives à la personne même du gérant qui n'est plus en mesure d'exercer ses fonctions dans l'intérêt de la société. Il pourrait également s’agir des circonstances de fait qui, tel l'éloignement du gérant, nuisent à la poursuite efficace de sa mission. Dans le cas contraire, la loi permet au gérant de contester sa révocation lorsque celle-ci a été irrégulière278. La mission du juge consiste donc à rechercher la menace qui pèse sur l’intérêt social. Si les pouvoirs du juge sont clairement définis en matière de révocation du dirigeant social à l’initiative de l’associé, il n’en est pas de même en ce qui concerne les conditions d’exercice de l’action en révocation. Le législateur est resté muet sur la question des pouvoirs judiciaires dans le cas de l’exercice d’une action sociale.

275 Cass. com., 10 juill. 2007, Bull. Joly, 2007, p.1337, note Saintourens. Les juges ont relevé dans cette affaire que la cause légitime doit être appréciée conformément à l’intérêt de l’entreprise qui n’est pas forcément l’intérêt des seuls associés.

276 Cass. com. 10 juill. 2007, RJDA, 2007, no 979 ; Bull. Joly, 2007. 1337, note Saintourens ; Dr. Sociétés, 2008, n° 56, obs. Monnet.

277 Charvériat (A.), Couret (A.) et Zabala (B.), Sociétés commerciales 2015, op. cit., p. 414, n°31157.

278 V. TRHC Dakar, n°327, 19 févr. 2003, Ohadata J-03-180, disponible sur www.ohada.com. Consulté le 10/10/18 ; Cass. com., 9 nov. 2010, n°09-71. 284, RJDA 2/11 n° 160. Lorsque la prise de position violente du dirigeant social est faite dans l’intérêt de la société, cela ne constitue pas un motif légitime de sa révocation.

b. La question de la révocation judiciaire des dirigeants sociaux en cas d’action sociale 64. L’action individuelle. Les articles 326 al.3 de l’AUDSCGIE et L. 223-25 du code de commerce français disposent que la demande en révocation judiciaire doit être faite par tout associé279. On ne peut manquer de relever qu’il s’agit là des dispositions objectives qui n’opèrent pas de distinction entre les associés. Ainsi à travers l’action individuelle, chaque associé280 a la faculté de s’adresser directement au juge en vue d’obtenir la révocation du dirigeant. Aucune condition de majorité n’est exigée. Or, il est admis que si les associés par le biais des statuts ont la possibilité d’exiger une importante majorité, ils ne peuvent cependant revendiquer l’unanimité281. En somme, la révocation judiciaire n’est prévue par la loi que

lorsque la demande est faite par un associé. Rien n’est dit en ce qui concerne l’action sociale ce qui conduit à la question de savoir si le juge saisi par la société doit faire une analyse littérale ?

65. Une action individuelle non soumise à conditions. Dans le contexte français, il a été posé aux juges la question de savoir si l’associé qui demande la révocation judiciaire doit préalablement mettre en cause les autres associés ou la société. Les juges de la Cour d’appel282

ont répondu à cette question par l’affirmative. Ils ont estimé que dans la mesure où la demande en révocation impliquait non seulement la société mais également les autres associés, le demandeur avait l’obligation de consulter préalablement les autres associés et même la société.

A contrario, la Cour de cassation, quant à elle, a décidé dans une affaire 15 janvier 2013283 que, conformément à la loi, l’associé qui demandait la révocation judiciaire du dirigeant social n’avait pas l’obligation de mettre en cause ni les autres associés, ni la société. Aux divergences jurisprudentielles sur la question, se sont jointes celles doctrinales. Certains auteurs284 pensent que la mise en cause des autres associés et même de la société par le demandeur relève de l’évidence. D’autres en revanche, considérant la position de la Cour de cassation, se posent tout de même la question de savoir s’il ne serait pas cohérent d’exiger que tous les associés soient mis en cause pour apprécier la réalité ou non, de l’atteinte à l’intérêt social. Allant dans le 279 V. Gibirila (D.), Droit des sociétés, Ellipses, coll. Manuel universités, 4e éd., 2012, p. 273, n° 480.

280 Cf. Merle (Ph.) et Fauchon (A.), Droit commercial Sociétés commerciales, op. cit., p. 235, n°226.

281 Cf. Le Cannu (P.) et Dondero (B.), Droit des sociétés, LGDJ, coll. Domat droit privé, 8e éd., 2019, p.899, n°1362.

282 CA Paris, 3e ch., sect. B, 26 mai 2000, JCP E, 2000, pan. 1359.

283 Cass. com., 15 janv. 2013, Rev. Sociétés, 2013, p. 444, note Reygrobellet (A.).

284 Cass. com., 15 janv. 2013, Dr. Sociétés, 2013, comm. n°43, comm. Hovasse (H.). L’auteur pense « nul commentaire ne s’impose, tant la solution se présente avec la force de l’évidence »

même sens que certains auteurs285, nous pensons qu’il s’agit d’une procédure qui n’offre aucun avantage quant à la protection de l’intérêt social. Elle participe davantage à alourdir la procédure, en la dénuant de toute célérité pourtant recherchée.

66. L’action sociale. A défaut de précision textuelles, il est difficile d’apporter une réponse à la question de la révocation judiciaire à la suite de la demande de la société. Dans le contexte français, conformément à l’article L. 226-2 al. 4 du code de commerce286, l’action sociale est ouverte tant aux associés qu’aux représentants légaux dans les sociétés en commandites par actions287. À notre avis, l’action sociale devrait être expressément prévue par les textes dans le contexte de l’OHADA. La société pourrait ainsi avoir la possibilité de demander par le biais de ses représentants légaux, la révocation judiciaire d’un dirigeant qui ne respecte plus ses engagements. Nous pensons que cette mesure permettrait de contourner l’immobilisme des associés pour préserver les intérêts de la personne morale. En définitive, la révocation judiciaire est rendue légitime au regard de l'intérêt social, de l'incompatibilité entre la situation soumise au juge et le maintien en fonction du gérant. Le pouvoir de sanction du juge peut avoir pour effet de mettre fin aux fonctions du dirigeant social. Si cette question est réglée au sein de la SARL, elle se pose encore avec acuité dans les autres formes sociales.

2. Une révocation progressivement admise dans les autres formes sociales par les juges en France

67. La double attitude judiciaire. De nombreux arguments justifient très souvent l’hostilité de certains juges face à la révocation du dirigeant social en l’absence de prescriptions légales. Face à la relativité de ces arguments (a), d’autres juges dans le contexte français, tendent à admettre la révocation du dirigeant dans les formes sociales autres que la SARL (b). Les conséquences288 que pourraient entrainer le mauvais comportement d’un dirigeant social sur le fonctionnement de la société sont graves et exigent qu’une réflexion soit menée sur la possibilité de son extension aux dirigeants sociaux des autres formes sociales (c).

285V. Nemoz-Rajot (Q.), Les interventions judiciaires spécifiques au droit des sociétés in bonis, thèse Lyon III, 2015. p. 278, n°388.

286 L’article 226-2 al. 4 du code de commerce français dispose que « (…) le gérant est révocable par le tribunal de commerce pour cause légitime, à la demande de tout associé ou de la société ».

287 Cf. Dereu (Y.), « Sociétés en commandite par action. Gérance-Contrôle », JCL Sociétés, fasc. 153-10, n°22 et s.

288 Ces conséquences peuvent naitre d’un conflit d’intérêts. V. Schmith (D.), Les conflits d’intérêts dans les

a. La relativité des arguments contre la révocation judiciaire des dirigeants sociaux dans les autres formes sociales

68. La nature contractuelle de la société. La révocation judiciaire est une mesure qui vise à sanctionner le mauvais comportement du dirigeant « lorsque celui-ci ne serait pas

convaincu de la nécessité de son abstention, voire de sa démission »289. Face au silence du législateur sur la question de la révocation judiciaire des dirigeants dans les formes sociales autres que la SARL, de nombreux arguments contre cette mesure ont été avancés par certains juges en France. Le respect de la nature contractuelle de la société semble être l’un de ces arguments. En effet, dans un arrêt du 29 novembre 1961290, la Cour d’appel de Paris a rejeté la demande d’un actionnaire qui revendiquait la révocation d’un dirigeant en précisant que les administrateurs n’étaient révocables que par l’assemblée générale des actionnaires qui les avaient nommés291. Dans cette affaire, un actionnaire mécontent à la suite d’une opération de fusion, avait assigné les administrateurs communs de la société absorbante en reddition de compte, restitution et aussi en révocation. Sur ce dernier point, la Cour a renvoyé les parties devant les tribunaux aux fins de sollicitation de la nomination d’un administrateur provisoire avec mission de convoquer une assemblée générale spécialement appelée à statuer sur une telle question. Quelques années plus tard dans un arrêt du 17 septembre 2013292, les juges se sont une fois de plus montrés hostiles à la demande de révocation du président de la SAS. Cette fois, les juges ont fondé l’irrecevabilité de la demande sur l’absence de clause statutaire prévoyant la révocation des administrateurs. Par le biais de ces arrêts, les juges confirmaient la position doctrinale selon laquelle « d’une manière générale, la révocation des dirigeants relève du

pouvoir souverain des organes sociaux, et d’aucuns contestent la légitimité des tribunaux à intervenir en la circonstance »293. En refusant de révoquer le dirigeant, la Cour a clairement

289 Le directeur général de la Caisse de dépôts et de consignations a démissionné de ses fonctions d’administrateur du Crédit foncier de France lorsque la caisse, sur demande de l’État, a initié une offre publique d’achat visant les actions du Crédit foncier de France; cette démission fut donnée « pour éviter tout conflit d’intérêts lié à sa fonction de Directeur général de la Caisse de dépôts et de consignations » : cf. sous II-D de la « Note d’information conjointe à la Caisse des dépôts et consignations et au crédit foncier de France », La tribune, 9 sept. 1996, cité par D. Schmith, Les conflits d’intérêts dans les sociétés anonymes, éd. Joly, 2004, p.438, n°448.

290 CA Paris, 29 nov. 1961, RTD com., 1962, p.699, obs. Houin ;

291 CA Paris, 17 oct. 1964, RTD com., 1965, p.855, obs. Houin ; Cass. com., 7 juin 1963, Rev. Sociétés, 1964, p.855, obs. Houin.

292 CA Versailles, 17 sept. 2013, Dr. sociétés, 2014, comm. 67, comm. Roussille (M.).

293 Hémard (J.), Terré (F.) et Mabillat (P.), « Sociétés commerciales », Revue Internationale de droit comparé, vol. 25, n°3, juill-sept., 1973, p. 755 ; addé, Gordon (L.), La société par actions simplifiée, LGDJ, coll. Droit des affaires, 2014, p.387, n°516. Cet auteur pense que « l’affirmation d’un principe général de révocation judiciaire

reconnu l’interdiction de la révocation judiciaire dans les SA qui, à notre avis, ne manque pas d’entrainer de nombreuses conséquences.

69. La conséquence du refus de la révocation judiciaire. A travers cet arrêt, la jurisprudence masque ainsi derrière ces motifs, une défaillance des juges dans leur mission de protection de la minorité, surtout de l’intérêt social. Les conséquences d’une telle décision sont évidentes. Il empêche l’actionnaire minoritaire de faire révoquer un conseil d’administration ou un administrateur qui a reçu ses pouvoirs de la majorité et dont la gestion serait mauvaise. Alors que cette mesure aurait constitué une garantie à l’associé minoritaire, lui permettant d’évincer un administrateur fautif. Ainsi donc, il est nécessaire de donner la possibilité au juge de révoquer les administrateurs car il n’existe, à notre sens, aucune raison de supprimer dans les SA une prérogative que les textes reconnaissent à la SARL. Surtout que, la révocation ad

nutum qui peut paraître comme une garantie suffisante contre le « mauvais » administrateur est

tout à fait illusoire pour la minorité puisque par hypothèse, celle-ci ne peut pas en faire usage. 70. La révocation ad nutum face à la révocation judiciaire. La révocation judiciaire ne saurait remettre en cause le principe de la révocation ad nutum. La première n’empêche pas la mise en œuvre de la seconde normalement prévue dans le cadre de la SA et dont la mise en œuvre se fait par l’assemblée générale. En revanche, elles peuvent être considérées comme des mesures complémentaires car la révocation judiciaire viendrait en appui aux mesures existantes. De même, la souveraineté de l’assemblée générale ne serait nullement ébranlée ou limitée par cette mesure étant donné qu’elle restera l’organe chargé de nommer le nouvel administrateur, au cas où la révocation judiciaire serait décidée. Aussi, la multiplication des procédures n’influencerait pas en soi le bon fonctionnement de la société car toutes ces mesures sont également prévues dans les autres formes sociales. Ainsi, retenir cet argument remettrait en cause les techniques de révocation du dirigeant qui existent dans la SARL par exemple. Un auteur souligne à cet effet que « dans toutes les sociétés, la révocation des gérants peut être

demandée au tribunal alors même que d’ordinaire elle relève de la compétence des associés statuant à la majorité ». Dès lors l’argument relatif à la souveraineté de l’assemblée générale

avancé pour rejeter la révocation judiciaire ne saurait prospérer, du moment où l’intervention judiciaire à ce stade permettrait également de lutter contre les excès de cette assemblée. En dehors de la nature contractuelle de la société, d’autres raisons sont invoquées pour justifier le rejet de la révocation judiciaire des dirigeants sociaux dans les SA.

71. L’absence d’efficacité de l’action judiciaire. L’absence d’efficacité de l’action judiciaire est très souvent évoquée pour justifier le refus de la révocation judiciaire du dirigeant dans la SA. En effet à la suite de la révocation judiciaire, le dirigeant mis hors de la société doit absolument être remplacé. Certains auteurs soutiennent que, parce que le remplacement de ce dirigeant se fait toujours par les actionnaires, il n’est pas exclu que ceux-ci nomment un « nouvel affidé »294. Alors, la révocation judiciaire n’aura eu pour effet que celui de faire sortir de la société un de ses organes. La société se retrouvera dans la même situation que celle qui

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