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L’éviction difficile du commissaire aux comptes

Une faible influence sur les acteurs sociaux

Section 1. Les limites du pouvoir d’écarter les acteurs sociaux

B. L’éviction difficile du commissaire aux comptes

82. L’indépendance du commissaire aux comptes. L’indépendance des commissaires aux comptes vis-à-vis de la direction de la société a été pendant longtemps sujette à réflexion. Parce que ces organes sont nommés par l’assemblée générale, ils étaient traditionnellement considérés comme « des mandataires des actionnaires »334. Par conséquent, il était difficile, voire délicat pour eux, de remettre en question les actes et décisions de leurs mandants. Au fil des législations335 et de la jurisprudence336, cette idée fût très vite remise en cause337 laissant ainsi place à une récusation ou à une révocation338 judiciaire. Cependant les pouvoirs du juge n’ayant pas été définis, sa mission est difficilement mise en œuvre. Celle-ci consiste à

333 CA Niamey, n° 142, 24 déc. 2003, www.ohada.com, Ohadata J-04-75.

334 V. Ripert (G.), Roblot (R.), Traité de droit des affaires, op. cit., p. 531, n°2275,

335 V. Ripert (G.), Roblot (R.), Traité de droit des affaires, op. cit., p.529, n°2274, Du Pontavice, Le commissariat aux comptes dans les lois du 24 juillet 1966 et 4 janvier 1967, Etudes à la mémoire de Cabrillac (H.), 1968, p.377 ; Mabilat, « Le nouveau statut professionnel des commissaires aux comptes », Rev. Sociétés, 1970, p.1 ; Contin, Le contrôle de la gestion des sociétés anonymes, 1975 ; Sayag et Palmade, « Le commissariat aux comptes en proie aux réformes », Rev. Sociétés ; 1985, p.339 ; Fénéon (A.), Droit des sociétés en Afrique, op. cit., p.387 et s., n°760, V. Goncalves, « Commissaires aux comptes : le nouveau régime issu de la réforme de l’acte uniforme relatif aux sociétés commerciales et aux groupement d’intérêts économiques », Penant n°887, p. 244.

336 CA Paris, 26 juin 1943, Dalloz, 1945, p.151, note Ripert. Dans cette affaire, les juges avaient décidé que les commissaires aux comptes ne pouvaient pas être révocable ad nutum.

337 Les commissaires aux comptes sont certes nommés par les associés, mais ils ne leurs revient pas de mettre fin, de façon prématurée, à leurs fonctions. La fin de leur mission ne répond pas au principe du parallélisme des formes prévu dans le cadre de la révocation des dirigeants sociaux.

338 Si sur le plan procédural la révocation et la récusation sont des techniques d’éviction quasiment identiques au regard de la forme et des délais de leur procédure (cf. art. 732, 733 et 734 de l’AUDSCGIE), elles demeurent conceptuellement différentes. En effet, l’action en récusation obéit aux dispositions de l’art. 730 al. 1 et 2 de l’AUDSCGIE. Sa mise en œuvre ne peut se réaliser que dans un temps très court à partir de sa désignation. Or la révocation, quant à elle, est régie par les dispositions de l’art. 731 du même acte et peut intervenir à tout moment du mandat du commissaire aux comptes.

rechercher les fondements de la récusation du commissaire aux comptes (1) ou à définir les critères de caractérisation de la faute du commissaire qui a été mentionnée de façon évasive dans les textes (2).

1. La recherche du fondement de la récusation du commissaire aux comptes

83. En référence à la jurisprudence française, le juge a jadis fondé la récusation sur l’opposition entre actionnaires (a). Mais à la suite de la jurisprudence et de la doctrine, on pourrait admettre que cette récusation est désormais fondée sur les justes motifs (b).

a. Une récusation jadis fondée sur l’opposition entre actionnaires

84. L'article 730 de l'AUDSCGIE. La récusation est une procédure par laquelle les fonctions du commissaire aux comptes prennent prématurément fin quelques temps après sa désignation339. Elle permet de ne pas faire entrer dans la société un commissaire dont l’indépendance est douteuse340. L’article 730 de l’AUDSCGIE qui consacre la récusation du commissaire aux comptes dans les SA, ne précise pas ses fondements. Selon cet article, « un

ou plusieurs actionnaires représentant le dixième au moins du capital ainsi que le ministère public, peuvent demander en justice la récusation des commissaires aux comptes nommés par l'assemblée générale ordinaire ». A travers cette disposition, la loi permet au juge lorsqu’il est

saisi par un ou plusieurs actionnaires ou par le ministère public, de porter atteinte aux fonctions du commissaire aux comptes par le moyen de la révocation. La récusation a longtemps été considérée comme un mécanisme qui permet au juge de porter atteinte à la souveraineté de l'assemblée générale. Bien plus, elle a été perçue comme une procédure venant rompre avec la règle qui rend définitives toutes nominations effectuées par ladite assemblée, du moment qu'elles ont eu lieu dans le respect des conditions légales. En effet avec la nouvelle loi, il est permis à une minorité d'actionnaires par le biais d'une demande en justice, de mettre un terme

339 V. Poracchia (D.), Merland (L.) et Lamoureux (M.), « Commissaire aux comptes », Rép. Droit des sociétés, Dalloz, n° 218 et s. ; Le cannu (P.) et Dondero (D.), Droit des sociétés, LGDJ, coll. Domat droit privé, 8e éd., 2019, p. 343, n° 518 ; Guengang (A.), De vendeuil (S.), Davodet (D.) et Engel (P.), Juge et droit des sociétés en

70 thèmes, Litec, coll. Litec Professionnels, 2008, p. 73.

340 V. Takafo-Kenfack (D.), « Libres propos sur l’indépendance de l’auditeur légal des sociétés anonymes OHADA », Rev. ERSUMA, dr. aff., prat. Prof., n°6, jan. 2016, disponible sur www.ohada.org, consulté le 15/03/19.

aux missions d'un commissaire régulièrement élu par la majorité 341. À notre avis, cela paraît illogique de penser qu'il s'agit d'une atteinte à la souveraineté de l'assemblée générale. L'intervention du juge est ponctuelle et exceptionnelle, il vient résoudre un problème qui pourrait empêcher le fonctionnement normal de la société et auquel les associés ne peuvent pas mettre un terme. Le problème devrait se poser sur un autre terrain, celui de l’absence de précision des motifs de la récusation. En effet, le législateur a confié le pouvoir de récusation au juge sans toutefois déterminer le fondement de son intervention.

85. La position du juge dans l'arrêt du 9 mai 1969. Dans l’affaire du 9 mai 1969342, la société connaissait une crise très grave qui avait abouti à une demande en dissolution de la société. Parallèlement, celle-ci avait subi un contrôle fiscal avec pour conséquence la démission des commissaires aux comptes dont le remplacement créa un conflit entre les actionnaires. En effet, l'actionnaire minoritaire s'opposait à la décision de nomination du nouveau commissaire aux compte au motif qu'il n'avait pas été régulièrement convoqué à l'assemblée générale au cours de laquelle avait été nommé ledit commissaire. L'associé minoritaire demanda au juge la révocation du nouveau commissaire aux comptes sous prétexte qu'il n'était pas agréé. Or, la société reprochait au minoritaire le fait de n'avoir pas d'arguments sérieux permettant de soutenir sa demande. Les arguments du minoritaire ne remettaient pas en cause la compétence du commissaire, encore moins son honorabilité. Contre toute attente, le président du tribunal fit droit à la demande de récusation en invoquant deux arguments. D'une part, le juge releva le caractère irrégulier de l'assemblée générale au cours de laquelle avait été désigné le commissaire aux comptes. L'irrégularité était due à l'absence de convocation de l'associé minoritaire à ladite assemblée. D'autre part, il reprocha à la société de n'avoir pas désigné un commissaire agréé. Certes, il n'opposa pas au commissaire désigné une quelconque incompétence mais il précisa tout de même que les commissaires aux comptes agréés sont reconnus par leur compétence et leur professionnalisme. Le juge souligna que conformément à la réglementation en vigueur, « (…) les actionnaires peuvent fonder leur demande sur une

irrégularité de la nomination du commissaire aux comptes, son incapacité, son défaut de qualité de commissaire inscrit, sur n'importe quel motif permettant de suspecter l'objectivité des commissaires ou encore sur des considérations de fait tenant à l'accomplissement de son mandat, ce libéralisme étant limité par le pouvoir d'appréciation du juge ». Toujours dans

l'optique de motiver sa décision, le président du tribunal ajouta que les commissaires « doivent

341 V. Bastian (M. D.), « La réforme du droit des sociétés par actions », JCP, 1968, p, 2183, n° 591 et s.

jouir d'une totale indépendance et d'un juste équilibre dans leurs pouvoirs et ne doivent être ni les instruments d'une majorité abusive, ni le refuge d'une minorité suscitant des dissensions » ;

car, « ils sont donc l'organe supra-social de contrôle au profit de tous les associés ». La décision du juge dans cette affaire nous semble inopportune. La position occupée par le président du tribunal laisse subsister une interrogation. La seule opposition d'avis entre les actionnaires permettrait-elle au juge de récuser un commissaire aux comptes, quand bien même aucun reproche répondant aux critères subjectifs du mis en cause ne lui serait adressé ? La réponse à cette question ne peut être que négative. La décision de récusation du commissaire aux comptes ne saurait être prise à la suite de l’opposition de l’associé minoritaire fondée sur sa non-participation à l’assemblée générale ayant décidé de ladite nomination. Le motif de révocation devrait tirer ses origines du comportement du commissaire aux comptes.

b. Une récusation désormais fondée sur le juste motif

86. Les motifs tenant à la personne du commissaire. En effet, le juge ne peut se fonder que sur des motifs tenant à la personne du commissaire aux comptes pour décider de sa révocation. Cette règle a été rappelée dans un arrêt de la Cour d’Appel de Paris en date du 11 juillet 1969343. En l’espèce, la Cour infirma l'ordonnance du président du tribunal du 09 mai 1969 sus évoqué en précisant que le juge ne pouvait révoquer le commissaire aux comptes que lorsque les preuves permettant de suspecter sérieusement sa compétence, son honorabilité, son impartialité ou son indépendance à l'égard de la majorité qui l'a désigné étaient établies344. La fonction de commissaire aux comptes requiert une certaine attache à la fonction345. C’est pour cette raison que la compétence, l’impartialité et l’indépendance346 sont les qualités exigées lors de la nomination de cet organe. Ces qualités sont le signe de l’efficacité de sa mission de

343 CA Paris, 11 juillet 1969, Dalloz 1969, p.519.

344 V. Muka Tshibende (L.-D.), L’information des actionnaires, source d’un contre-pouvoir dans les sociétés anonymes de droit Français et du périmètre OHADA, disponible sur http://books.openedition.org, consulté le 10/04/2018.

345 Cf. AFECAC, Synthèse des travaux du séminaire international sur le « rôle du commissaire aux comptes dans la gouvernance de l’entreprise dans l’espace OHADA », disponible sur le site www.ohada.com, consulté le 29/06/2017 ; Bybi (Ch.), Statut professionnel et responsabilité du commissaire aux comptes au Cameroun, Ed.

Dianoîa, 2013, p.21 s. ; Kling (D.), « Le rôle des commissaires aux comptes », REF, 1997, vol 4, p. 87 et s.;

Guyon (Y.) et Coquereau (G.), « Le commissariat aux comptes ; aspects juridiques et techniques », Revue de la

compagnie 1971, p.11 et s.

346 V. Kenmogne Simo (A.), Le mandat du contrôleur légal des comptes en zone OHADA, RDBF n°1, janvier 2017, étude 3.

contrôle, par conséquent, il semble logique que le défaut de ces qualités ou leur disparition soit un motif de la remise en cause anticipée de leur mandat.

87. Certes, le législateur de l’OHADA n’a pas fait référence, de façon expresse, à la notion de juste motif pour fonder l’intervention judiciaire en matière de récusation du commissaire aux comptes. Mais, il ressort implicitement de l’article 730 al. 2 de l’AUDSCGIE que le juge peut fonder sa décision de révocation sur la présence de juste motif lié à la personne du commissaire. En plus, la jurisprudence suivie par la doctrine en ont fait un fondement347. En effet, le terme « s’il est fait droit à leur demande »348 utilisé par le législateur, donne au juge le pouvoir d’apprécier la pertinence des raisons invoquées par l’auteur de la demande. Et, pour que ces raisons puissent justifier la demande, il faudra qu’elles soient « des circonstances

permettant de suspecter le commissaire de quelques imperfections »349. Il s’agira par exemple des conditions dans lesquelles le commissaire a exercé ses fonctions antérieures. Malgré tout, il serait souhaitable que la notion de juste motif soit expressément contenue dans les dispositions de l’article 730 de l’AUDSCGIE. Cela pour éviter la divergence d’appréciation judiciaire que connait la notion de faute dans le cadre de la révocation du commissaire aux comptes.

2. La divergence d’appréciation de la notion de faute en cas de révocation du commissaire aux comptes

88. En matière de révocation du commissaire aux comptes, il existe une divergence d’appréciation de la notion de faute commise par cet organe. Certains critères sont contenus dans l’article 731 de l’AUDSCGIE (a) et d’autres sont d’origine jurisprudentielle (b).

347 Cf. Anoukaha (F.), Abdoulaye (C.), Ndiaw (D.) et al., OHADA, Sociétés commerciales et groupement d’intérêt

économique, Bruylant, coll. DUA, 2002, p. 453-454 ; Takafo-Kenfack (D.), « Libres propos sur l’indépendance

de l’auditeur légal des sociétés anonymes OHADA », op. cit.

348 Cf. art. 730 al. 2 de l’AUDSCGIE.

349 Cf. Guengang (A.), De vendeuil (S.), Davodet (D.) et Engel (P.), Juge et droit des sociétés en 70 thèmes, op.

a. Le contenu de l’article 731 de l’AUDSCGIE

89. Révocation et relèvement. L’article 731 de l’AUDSCGIE dispose que « un ou

plusieurs actionnaires représentant le dixième au moins du capital, le conseil d’administration ou l’administrateur général, selon le cas, l’assemblée générale ordinaire ou le ministère public peuvent demander en justice la révocation du commissaire aux comptes en cas de faute ou en cas d’empêchement ». En revanche, l’article 823-7 du code de commerce français dispose

quant à lui que, « en cas de faute ou d’empêchement, les commissaires aux comptes peuvent,

dans les conditions fixées par décret du conseil d’Etat, être relevés de leurs fonctions avant l’expiration normale de celles-ci, sur décision de justice, à la demande de l’organe collégial chargé de l’administration, de l’organe chargé de direction, d’un ou plusieurs actionnaires ou associés représentant au moins 5% du capital social, du comité d’entreprise, du ministère public (…) ». Ces différentes dispositions donnent le pouvoir au juge de décider de la mise à

l’écart du commissaire aux comptes. Il est important de souligner que, bien que visant le même objectif, les termes employés pour fonder l’intervention du juge sont différents en droit français et en droit de l’OHADA. Alors que le législateur de l’OHADA emploie le terme « révocation », son homologue français préfère le terme « relèvement ». Le « relèvement » et la « révocation » traditionnellement utilisés par le législateur français sont-ils des termes distincts ? Une partie de la doctrine350 a soutenu l’idée selon laquelle la notion de « relèvement » serait utilisée à des fins d’adoucissement car elle permettrait de modérer les conséquences du départ forcé du commissaire aux comptes. D’avis avec un auteur, il nous semble que cette distinction n’a pas lieu d’être dans la mesure où, « il est parfaitement possible d’obtenir la révocation de

dirigeants sociaux »351 lorsque celle-ci a été demandé par le titulaire de l’action.

90. Les titulaires du droit de révocation. Lorsque le juge est saisi d’une demande en révocation, il doit vérifier que les conditions relatives à la mise en œuvre de cette procédure ont été respectées. Le législateur de l’OHADA au même titre que son homologue français a étendu le champ des titulaires du droit de révocation352. Ainsi, la révocation peut être demandée par un ou plusieurs actionnaires. Toutefois, l’ouverture de la demande de révocation aux 350 Le Cannu (P.) et Dondero (B.), Droit des sociétés, op., cit., p.375, n°521 ; Y Guyon, Actualisé par B. François, « Commissaires aux comptes-statut et conditions générales d’exercice du contrôle « , JCL. Sociétés, fac. 134-10, n°141. Ces auteurs pensent qu’il y’a lieu de faire une distinction entre la révocation et le relèvement. Car le relèvement désigne une procédure judiciaire contrairement à la révocation qui ne devrait d’ailleurs plus être utilisée.

351 V. Nemoz-Rajot (Q.), Les interventions judiciaires spécifiques au droit des sociétés in bonis, op. cit., p.291, n°405.

352 Dans le cadre de la révocation, les titulaires du droit de révocation sont plus nombreux que ceux de la récusation.

organes d’administration et de direction pose le problème de la saisie du juge. Parce qu’ils n’ont pas de personnalité juridique, il leur est en effet interdit de saisir le juge en leurs noms propres. D’ailleurs, dans une affaire du 03 octobre 2006, la Cour de cassation a rejeté la décision rendue par la Cour d’appel353 en lui rappelant que « si le conseil d'administration a

qualité pour décider le relèvement du commissaire aux comptes de la société, l'action en justice doit être introduite par le représentant légal de la société car le conseil ne dispose pas de la personnalité morale »354. Quoi qu’il en soit, le juge lorsqu’il est saisi doit rechercher l’existence de la faute au milieu des nombreux critères évoqués au sein de la jurisprudence.

b. Les critères de la faute évoqués par les juges

91. Les fondements de la révocation du commissaire aux comptes. Le juge peut prononcer la révocation du commissaire aux comptes soit pour faute, soit en cas d’empêchement. Les cas d’empêchements du commissaire n’étant pas complexes, ce motif de révocation ne pose à priori pas de difficulté. Les interventions judiciaires sont par conséquent rares, elles ne sont nécessaires que lorsque le commissaire ne démissionne pas355. Il s’agit en général d’un évènement entraînant l’impossibilité temporaire ou définitive d’exercice du commissaire, notamment la maladie, l’incompatibilité, la suspension ou la radiation sur la liste des commissaires agréés356. Dans ce cas, le rôle du juge est assez simple puisqu’il consiste à la qualification des situations qui paraissent certaines et au remplacement du commissaire défaillant puisque la loi prévoit qu’en cas d’empêchement du commissaire aux comptes, ce dernier est immédiatement remplacé par son suppléant357. A contrario, les cas de révocations

pour faute du commissaire aux comptes posent beaucoup plus de problèmes car la loi ne donne aucune précision ni sur sa définition, ni sur sa nature, encore moins sur la gravité de cette faute. Le législateur a laissé la possibilité au juge d’apprécier l’opportunité de la faute commise par

353 CA de Toulouse, 2e chbre., sect.1, du 13 janvier 2005.

354 Cf. Fénéon (A.), Droit des sociétés en Afrique OHADA, op. cit., p.36 et s., n°93 ; Cass. com., 3 oct. 2006, Bull.

Joly société, 2007, p.33, n°2, note J-F. Barbièri ; Rev. Sociétés, 2007, p. 117, note Merle (P.).

355 En principe, en cas d’empêchement du commissaire aux comptes, celui-ci doit présenter sa démission afin d’être remplacé pour que son empêchement ne cause pas un préjudice à la société.

356 Cf. Guegant (A.), Troussière (P.) et De Vendeuil (S.), Le rôle du juge dans la vie des sociétés, op. cit., p. 77, n° 2 ; Mestre (J.), Velardocchio (D.) et Mestre-Chami (A.-S.), Lamy sociétés commerciales 2015, op. cit., 2014, n°1322.

le commissaire et d’en préciser les contours. Cependant, les positions jurisprudentielles en la matière ont contribué à complexifier davantage la notion donnant lieu à de nombreux débats358.

92. La controverse entre les juges. L’affaire Beaunier c/ Lemoigne et autres a été le prélude aux controverses doctrinales et jurisprudentielles sur la notion de faute en matière de révocation du commissaire aux comptes. En effet, le président du conseil d’administration d’une SA, après avoir constaté que le commissaire aux comptes avait fait une large utilisation des prérogatives qui lui étaient reconnues dans le cadre de sa mission, avait demandé sa relève. L’attitude du commissaire aux comptes montrait qu’il avait non seulement envoyé vingt-six lettres au président du conseil d’administration en six mois, mais aussi déclenché la procédure d’alerte et saisi le parquet de nombreuses fois aux fins de dénonciation de prétendus faits délictueux. En outre, il s’était opposé à la transformation de la société en SARL par la manifestation de son refus de certifier que le montant des capitaux propres était égal à celui du capital de la société. La Cour d’appel359 avait fait droit à la demande en la motivant par le fait que le commissaire aux comptes « avait fait preuve d’une minutie extrême qui avait exaspéré

les dirigeants de la société et avait accordé à des lacunes constatées une importance démesurée ». La Cour avait précisé que l’attitude du commissaire l’avait conduit d’abord à

mettre en œuvre sans motifs valables, la procédure d’alerte, ensuite à saisir sans motif valable le procureur de la république et enfin « à refuser, à tort une attestation de l’article 237 ». La Cour a conclu que l’attitude du commissaire, précisément ces fautes d’appréciations et ses abstentions coupables, auraient rendu intolérable le maintien du lien contractuel pour la société.

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