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RESPECTIVES DES PARTIES

1.1. Rapport d'assignation

Selon l'art. 466 CO, "[l]'assignation est un contrat par lequel l'assigné est autorisé à remettre à l'assigna taire, pour le compte de l'assignant, une somme d'argent[ ... ], que l'assignataire a mandat de percevoir en son propre nom".

De fait, il est majoritairement admis quel' assignation, malgré la lettre de l'art. 466 CO, n'est pas un contrat, mais une double autorisation158 . D'une

BODMER (1991), p. 5; TEVINI DU PASQUIER (1990), pp. 69-71; ULRICH (1989), p. 95;

E. BUCHER (1988a), p. 271; GAN! (1987), p. 24; FREY (1987), p. 215; SCHÔNLE/

THÉVENOZ (1986), p. 50; GUGGENHEIM (1986), pp. 172-173; idem (1985), pp. 201 et 205; MEIER-HAYOZ/VON DER CRONE (1985), § 31, no. 56-72; SCHÀRRER (1980), pp. 45 ss; SLONGO (1980), pp. 28-29; J. HARTMANN (1974), pp. 14 ss; KELLER (1941), pp. 43 SS.

156 Cf. cependant les critiques de la théorie dominante émises par GAN! (1987), pp. 37-38;

SLONGO (1980), pp. 33 et 54-57; GAUTSCHI (1964), no. 12b ad art. 407 CO; HAHN références de doctrine citées; SCHÔNLE ( 1993), Vorbemerkungen zu Art. 184-551, no. 11;

ENGEL (1992), pp. 533; TEVINI Du PASQUIER (1990), p. 69, et les références de doc-trine citées sous n. 7; BUCHER (1988a), pp. 267-268. L'existence d'un rapport contrac-tuel entre !'assigné et l'assignataire est cependant controversée en doctrine, cf. infra chapitre XVI, 3, n. 86. Contra: TERCIER (1995), no. 4568, pour qui"[ ... ] l'assignation est une institution qui réunit deux mandats en une opération unique"; GAUTSCHI (1962), Vorbemerkungen no. 2 et 3b ad art. 466 CO, pour qui l'assignation est un double man-dat.

Quant au Tribunal fédéral, après avoir parlé de "contrat d'assignation" aux ATF 92 II 335 = JT 1968 I 41=SJ1967 31 et ATF 73 II 43, 46-47, il qualifie lui aussi l'assigna-tion de "double autorisal'assigna-tion" ("Doppeleimachtigung") (ATF 122 III 237, 239 consid. 1 b = JT 1997 I 102, 105). Cf. cependant l'arrêt non publié de la lère Cour civile du Tribunal fédéral du 5 août 1998 (4C.23/1998) consid. 3 d (résumé in: SCHWAIBOLD (1999), pp. 209-210), dans lequel le Tribunal fédéral ne se détermine pas sur la quali-fication de l'assignation: "Die Anweisung besteht definitionsgemass aus einer Doppelermachtigung bzw. einem Doppelauftrag [avec référence à TERCIER (1995), no. 4571 et à T. KOLLER (1996), no. 1 ad art. 466 CO]".

CHAPITRE IV-NATURE JURIDIQUE DES RAPPORTS D'ACCRÉDITIF ET OBLIGATIONS DES PARTIES

part, l'assignant autorise !'assigné à remettre une somme d'argent à l'assignataire, pour le compte de l'assignant; d'autre part, l'assignant auto-rise l'as signataire à recevoir cette prestation en exécution du rapport d' accré-ditif159. Dans un crédit documentaire triangulaire, l'assignant est le donneur d'ordre (acheteur ou importateur), !'assigné est la banque émettrice, et l' assignataire est le bénéficiaire (vendeur ou exportateur).

Cette qualification d'assignation entraîne, en matière d'accréditif, un certain nombre de conséquences juridiques 160, parmi lesquelles on mentionnera les conséquences suivantes:

dès que la banque assignée a, par une manifestation unilatérale de vo-lonté, notifié son acceptation de l'assignation au bénéficiaire (notifica-tion intervenue en principe par l'avis d'ouverture de l'accréditif)161, elle est tenue de le payer, pour autant que certaines conditions soient rem-plies (art. 468 al. 1 CO). La banque assignée ne peut alors opposer à l'assignataire "[ ... ]que les exceptions résultant de leurs rapports person-nels ou du contenu de l'assignation, à l'exclusion de celles qui dérivent de ses relations avec l'assignant" (ait. 468 al. 1 CO): l'assignation est donc indépendante du rapport contractuel de base, ce qui est aussi prévu, en matière d'accréditif, par les ait. 3 et 4 RUU162;

l'assignation dans l'opération d'accréditif est toujours conditionnelle au sens des art. 468 al. 1et151 al. 1 CO; cela signifie que la banque assi-gnée ne s'engage à réaliser le crédit documentaire qu'à la condition sus-pensive que les documents prescrits lui soient présentés et que toutes les conditions, notamment celles relatives au temps et au lieu de

présenta-159 TEVINI DU PASQUIER (1990), pp. 69-70.

160 Pour une analyse détaillée de l'assignation et de ses conséquences en matière de crédit documentaire, cf. TEVINI Du PASQUIER (1990), pp. 69 SS. Cf. aussi LOMBARDINI (1994), pp. 51-55; SCHÂRRER (1980), pp. 49-53; J. HARTMANN (1974), pp. 14-16 et 21-23.

161 L'engagement de la banque assignée reste en vigueur pour la durée stipulée dans l'as-signation. L'art. 42 RUU précise que tout crédit documentaire doit stipuler une date extrême de validité à laquelle les documents doivent au plus tard avoir été présentés (sous réserve de l'art. 44 RUU). De surcroît, selon l'art. 43 a RUU, tout crédit qui exige un ou des documents de transport devrait fixer une période expressément définie après la date d'expédition, au cours de laquelle les documents doivent être présentés.

Si une telle période n'est pas stipulée, les banques refuseront les documents présentés plus de 21 jours après la date d'expédition. Dans tous les cas, cependant, les docu-ments doivent être présentés au plus tard à la date d'expiration du crédit.

162 Au sujet du principe de l'abstraction du crédit documentaire, cf. infra chapitre VII.

tian des documents 163, stipulées dans le crédit soient respectées ( ati. 9 a et 9 b RUU)164;

d'après l'art. 467 al. 1 CO, la dette contractée par l'assignant envers l'assigna taire n'est éteinte que par le paiement de l 'assigné. En d'autres termes, dans le crédit documentaire, c'est le paiement effectif de la somme d'accréditif par la banque assignée au bénéficiaire qui permet d'éteindre la dette de l'acheteur envers le vendeur, et non la seule autorisation don-née par l'acheteur-donneur d'ordre à sa banque d'émettre une assigna-tion en faveur du vendeur-bénéficiaire 165. On considère en effet que l'auto-risation donnée à la banque assignée intervient en vue de paiement et non à titre de paiement de la dette résultant du rapport de valeurl66;

enfin, cette dette du donneur d'ordre envers le bénéficiaire devientsubsi-diaire à celle assumée par la banque assignée envers le bénéficiaire, puis-que ce dernier, s'il a accepté l'assignation, ne sera autorisé à faire valoir de nouveau sa créance contre l'assignant que s'il n'a pu en obtenir le paiement auprès de la banque assignée à l'expiration de terme fixé dans l'assignation (art. 467 al. 2 CO)l67.

1.2.

Rapport de mandat

Comme le vendeur veut être certain de recevoir le prix de sa marchandise, il exigera d'être mis au bénéfice d'un véritable engagement de la banque assi-gnée de réaliser le crédit documentaire. Il est donc indispensable que cette banque ne soit pas seulement autorisée168 à payer la somme d'accréditif, mais qu'elle y soit tenue (art. 2 i RUU). Or, aussi longtemps que la banque assi-gnée n'a pas notifié son acception de l'assignation, le bénéficiaire assignataire

163 Tout crédit doit en effet stipuler une date extrême de validité et un lieu de présentation des documents pour sa réalisation: art. 42 et 43 RUU, art. 77 al. 3 CO.

I64 DOHM (1993), p. 17; TEVINI Du PASQUIER (1990), pp. 50 et 70; J. HARTMANN (1974), p. 16. Au sujet du contenu de la condition suspensive, cf. infra chapitre IX.

165 DOHM (1993), p. 17; TEVINI DU PASQUIER (1990), p. 75.

166 Cf. ATF 105II104, 106=JT 19791489, 491; ATF 95II176, 185; DOHM(1993),p. 17;

TEVINI Du PASQUIER (1990), p. 75; WEBER (1982), Einleitung und Vorbemerkungen ad art. 68-96 CO, no. 218; GAUTSCHI (1962), no. 3 b ad art. 467 CO.

167 Cf. DOHM (1993), p. 17; TEVINI DU PASQUIER (1990), pp. 75-76.

168 GUHL/MERZ/DRUEY (1991), p. 543.

CHAPITRE IV -NATURE JURIDIQUE DES RAPPORTS D'ACCRÉDITIF ET OBLIGATIONS DES PARTIES

ne dispose d'aucun droit propre contre la banque169 . Il importe donc, dans le crédit documentaire, que le donneur d'ordre mandate (au sens des art. 394 ss CO) la banque assignée d'accepter l'assignation, autrement dit des 'obli-ger envers l' assignataire. C'est ainsi que le bénéficiaire obtiendra avec certi-tude l'engagement de la banque assignée en sa faveur170.

De surcroît, le contrat de mandat fournit le fondement juridique à l'obligation de diligence de la banque mandataire, et à la détermination du droit au rem-boursement de la somme d'accréditif du mandataire contre son mandant.

Le rapport de mandat lie le donneur d'ordre (mandant) à la banque émettrice (mandataire). En revanche, le bénéficiaire n'est pas partie au contrat de man-dat, lequel demeure pour lui une res inter alios acta.

2.

Rapports juridiques entre les parties dans un accréditif