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Définition et traitement de la fraude dans la Convention des Nations Unies sur les garanties indépendantes et les lettres Nations Unies sur les garanties indépendantes et les lettres

LA FRAUDE ET SES CONSÉQUENCES DANS LE CRÉDIT DOCUMENTAIRE

3. La définition et le traitement de la fraude sur le plan international et dans quelques droits nationaux international et dans quelques droits nationaux

3.2. Définition et traitement de la fraude dans la Convention des Nations Unies sur les garanties indépendantes et les lettres Nations Unies sur les garanties indépendantes et les lettres

de crédit stand-by

Sur le plan conventionnel, les travaux de la Commission des Nations Unies pour le droit commercial international (CNUDCI/UNCITRAL) ont permis l'adoption en 1995 de la "Convention des Nations Unies sur les garanties indépendantes et les lettres de crédit stand-by"61 , qui s'harmonise avec les

presumably recover the payment if the seller can be found." (International Banking Law, 1982, 57)".

5S La CCI s'en tient, à l'heure actuelle, à une attitude très réservée sur la question de la fraude. C'est ainsi qu'elle n'a pas voulu, dans ses récentes International Standby Practices (ISP98), publication CCI no. 590, en vigueur depuis le 1er janvier 1999, trai-ter de la fraude et de ses conséquences. Bien au contraire, elle a expressément précisé que: "These Rules do not define or otherwise provide for: [ ... ] defenses to honour based on fraud, abuse, or similar matters. These matters are left to applicable law." (art. 1.05 litt. c). On relèvera que les International Standby Practices contiennent, à l'instar des RUU, une clause d'exonération de responsabilité de l'émetteur de la lettre de crédit stand-by: "An issuer is not responsible for: a. performance or breach of any underlying transaction; b. accuracy, genuineness, or effect of any document presented under the standby [ ... ]" (art. 1.08).

59 Au sujet de la possibilité pour les banques d'exclure leur responsabilité en droit suisse, notamment en vertu de l'art. 15 RUU, cf. supra chapitre IV, 3.2.2.

60 "The way to avoid fraud is to avoid dealing with a rogue, rather than to deal with him and hope to prevent a fraud by a mass - or "mess" of detail"; CHAMBRE DE COM-MERCE INTERNATIONALE (1984a), p. 15 (commentaire de la CCI à propos de l'art. 5 RUU 400).

61 United Nations Convention on Independant Guarantees and Stand-by Letters of Credit;

UNO-Konvention über unabhiingige Garantien und Stand-by Letters of Credit.

CHAPITRE VIII -LA FRAUDE

règles de la CCI62 telles que les RUU et les Règles uniformes relatives aux garanties sur demande (RUGD), et dans laquelle la fraude est pour la pre-mière fois définie d'un point de vue intemational63.

Cette Convention entrera en vigueur le 1er janvier 2000 pour les rares pays ayant déposé leurs instruments de ratification ou d'adhésion64. Si l'exa-men de cette Convention consacrée aux instrul'exa-ments de garantie65 nous inté-resse néanmoins dans le cadre de notre étude, c'est non seulement en raison du fait que la fraude trouve pour la première fois une définition dans un texte conventionnel, mais aussi parce que - nous avons déjà eu l'occasion de le souligner - la garantie suit un mécanisme très semblable à celui du crédit

62 Au sujet de l'impact de la Convention des Nations Unies sur les RUU, cf. FAYERS (1995), pp. 17 et 23; idem (1995a), pp. 22-23; idem (1995b), pp. 22-23.

63 La note explicative du secrétariat de la CNUDCI (Explanatory note by the UNCITRAL secretariat on the United Nations Convention on lndependant Guarantees and Stand-by Letters of Credit), reproduite notamment en annexe dans HORN (1997), pp. 116-129, souligne la compatibilité entre notamment les RUU et la Convention: "The Convention gives legislative support to the autonomy of the parties to apply rules ofpractice such as the Uniform Customs and Practice for Documentary Credits (UCP), formulated by the International Chamber of Commerce (ICC), or other rules that may evolve to deal specifically with stand-by letters of credit, and the Uniform Rules for Demand Guarantees (URDG, also formulated by ICC). In addition to being essentially consistent with the solutions found in rules of practice, the Convention supplements their operation by dealing with issues beyond the scope of such rules. lt does so in particular regarding the question of fraudulent or abusive demands for payment and judicial remedies in such instances. Furthermore, the deference of the Convention to the specific terms of independent guarantees and stand-by letters of credit, [ ... ], enables the Convention to work in tandem with rules ofpractice such as UCP and URDG" (cf. in: HORN (1997), p. 118, no. 5; à ce sujet, cf. aussi idem, p. 125, no. 36; MARKUS (1997), p. 9).

64 La Convention entre en vigueur le premier jour du mois suivant l'expiration d'un délai d'un an à compter du dépôt du cinquième instrument de ratification, d'acceptation, d'approbation ou d'adhésion (art. 28 para. 1).

À mi-mai 1999, la Convention était signée par la Biélorussie et les États-Unis. L'ont ratifiée le El Salvador et le Panama; y ont adhéré l'Équateur, le Koweït et la Tunisie.

Pour sa part, la Suisse n'a pas signé la Convention et n'entend, pour l'heure, pas y adhérer (communication téléphonique avec M. Alexander R. Markus, chef de section à l'Office fédéral de la Justice, avril 1999).

MARKUS (1997), .PP· 56-57, estime que la Convention ne devrait pas être signée par un grand nombre d'Etats, en raison notamment du traitement peu satisfaisant de la fraude;

en revanche, ces travaux de la CNUDCI devraient, d'une manière générale, servir de modèle à d'autres textes législatifs, que ce soit sur le plan national ou international (ils pourraient p. ex. influencer à terme les règles établies par la CCI dans ce domaine).

65 Au sujet de cette Convention en général, cf. MARKUS (1997), pp. 7 ss et la bibliogra-phie citée aux pp. 58-60; HORN (1997), pp. 96 ss; ZOBL (1997), pp. 30-31; BüHLER (1997), pp. 115-116 et 158-161; KILGUS (1995), pp. 59 s. Pour des références biblio-graphiques sur les travaux législatifs ayant conduit à l'adoption de cette Convention, cf. HORN (1997), p. 116, n. 33; ainsi que KILGUS (1995), pp. 59-67.

documentaire et est régie par le même principe de l'abstraction, ce qui fait qu'en général les solutions prévalant en matière de garantie sont souvent ap-plicables par analogie à l'accréditif; en l'espèce, la similitude entre ces deux institutions se trouve même consacrée par le fait que la Convention prévoit qu'elle s'applique aux crédits documentaires si les parties déclarent expres-sément dans l'accréditif vouloir s'y soumettre66 .

L'hypothèse de la fraude est donc expressément visée, en son art. 19, par la Convention qui tente d'uniformiser la pratique divergente des différents États en donnant une définition générale, admise sur le plan international, des diffé-rents types de situations dans lesquelles une exception à l'obligation de paie-ment se justifie en matière de garanties indépendantes et de lettres de crédit stand-by67 . La teneur de cette disposition est la suivante:

66 "Art. premier - Champs d'application [ ... ]

2. La présente Convention s'applique aussi à une lettre de crédit internationale non visée à l'article 2 [i.e. une garantie indépendante ou lettre de crédit stand-by] s'il y est expressément mentionné qu'elle est soumise à la Convention.

[ ... ]".

La note explicative du secrétariat de la CNUDCI précise ce qui suit: "Letters of credit other than stand-by letters of credit are not covered by the Convention. However, the Convention does recognize a right of parties to international letters of credit other th an stand-by letters of credit to "opt into" the Convention (article 1(2)). That provision bas been included in particular because the Convention provides a set of rules that parties to commercial letters of credit may wish in their own judgement to take advantage of, in view of the broad common ground between commercial and stand-by letters of credit, and in view of the occasional difficulties in determining whether a letter of credit is of a stand-by or commercial variety" (cf. in: HORN (1997), p. 120, no. 16).

À vrai dire, cette faculté des parties de soumettre leurs relations d'accréditif à la Con-vention a été vivement combattue par certaines délégations, dont la Suisse et la CCI, notamment en raison du fait que la fonction et la nature juridique du crédit documen-taire (instrument essentiellement de paiement) et de la garantie indépendante (mode de sûreté) sont différentes: cf. à ce sujet MARKUS (1997), pp. 15-16.

67 De fait, selon le secrétariat de la CNUDCI, l'uniformisation sur le plan international du traitement de la fraude constituait l'un des objectifs principaux de la Convention: "That has been a particularily troublesome and disruptive area in practice because allegations of fraud have a tendancy to arise when there is a dispute as to the performance of an underlying contractual obligation. That difficulty and the resulting uncertainty have been compounded further because of the divergent notions and ways with which such allegations have been treated both by the guarantor/issuers and by courts approached for provisional measures to block payment" (cf. in: HORN (1997), p. 127, no. 45).

Cf. également idem, p. 127, no. 46; MARKUS (1997), pp. 45-46.

CHAPITRE VIII -LA FRAUDE

"Art. 19 - Exception à l'obligation de paiement 1. S'il est clair et patent:

a) Qu'un document n'est pas authentique ou a été falsifié;

b) Qu'aucun paiement n'est dû sur la base des motifs invoqués dans la demande et des documents joints; ou

c) Qu'eu égard au type et à l'objet de l'engagement, la demande n'a pas de justification concevable,

le garant/émetteur, agissant de bonne foi, a le droit, à l'encontre du bénéficiaire, de s'abstenir de payer.

2. Pour l'application de l'alinéa c) du paragraphe 1 du présent article, les situations dans lesquelles une demande n'a pas de justification concevable sont notamment les suivantes:

a) L'éventualité ou le risque contre lequel l'engagement est sup-posé protéger le bénéficiaire ne se sont indubitablement pas maté-rialisés;

b) L'obligation sous-jacente du donneur d'ordre a été déclarée in-valide par un tribunal ou un tribunal arbitral, sauf s'il est indiqué dans l'engagement que cette éventualité relève du risque que l'en-gagement devait couvrir;

c) L'obligation sous-jacente a indubitablement été acquittée à la sa-tisfaction du bénéficiaire;

d) Il apparaît clairement que l'exécution de l'obligation sous-jacente a été empêchée du fait d'une faute intentionnelle du bénéficiaire;

e) Dans le cas d'une demande de paiement d'une contre-garantie, le bénéficiaire de la contre-garantie a payé de mauvaise foi en tant que garant/émetteur de l'engagement auquel se rapporte la contre-garantie.

3. Dans les circonstances énoncées aux alinéas a), b) ou c) du paragra-phe 1 du présent article, le donneur d'ordre a vocation à obtenir des mesures judiciaires provisoires en application de l'article 20".

L'art. 19 de la Convention dispose ainsi, en son para. 1, que le garant/émet-teur de bonne foi a le "droit" de refuser le paiement au bénéficiaire lorsqu'il est "clair et patent" qu'"un document n'est pas authentique ou a été falsifié"

(litt. a), ou qu"'aucun paiement n'est dû sur la base des motifs invoqués dans la demande et les documents joints" (litt. b ), ou enfin qu'"eu égard au type et à l'objet de l'engagement, la demande n'a pas de justification concevable"

(litt. c ).

Cette dernière hypothèse (litt. c) est précisée au para. 2 de l'art. 19, qui prévoit qu'une demande de paiement du bénéficiaire n'a pas de "justification concevable" "notamment" lorsque "l'éventualité ou le risque contre lequel l'engagement est supposé protéger le bénéficiaire ne se sont indubitablement

pas matérialisés" (litt. a), ou lorsque l'obligation du donneur d'ordre décou-lant du rapport contractuel de base "a été déclarée invalide par un tribunal ou un tribunal arbitral, sauf s'il est indiqué dans l'engagement que cette éven-tualité relève du risque que l'engagement devait couvrir" (litt. b ), ou "a indu-bitablement été acquittée à la satisfaction du bénéficiaire" (litt. c ), ou encore lorsqu'il "apparaît clairement" que son exécution "a été empêchée du fait d'une faute intentionnelle du bénéficiaire" (litt. d).

Enfin, l'art. 19 para. 3 dispose que le donneur d'ordre a vocation à obtenir des mesures judiciaires provisoires telles que prévues à l'art. 20 de la Con-vention. Cette dernière disposition est libellée comme suit:

"Art. 20 - Mesures judiciaires provisoires

1. Lorsque, sur requête du donneur d'ordre ou de la partie ordonnatrice, il apparaît qu'il y a une forte probabilité que, en ce qui concerne une demande présentée ou susceptible d'être présentée par le bénéficiaire, il existe une des circonstances visées aux alinéas a), b) ou c) du para-graphe 1 de l'article 19, le tribunal peut, sur la base d'éléments de preuve sérieux immédiatement disponibles:

a) Prononcer une mesure provisoire ou conservatoire tendant à ce que le bénéficiaire ne reçoive pas le paiement, y compris une me-sure tendant à ce que le garant/émetteur retienne le montant de l'engagement; ou

b) Prononcer une mesure provisoire ou conservatoire tendant à ce que le produit de la garantie payé au bénéficiaire soit bloqué, en prenant en considération le risque de préjudice grave que le don-neur d'ordre courrait à défaut d'une telle mesure.

2. Lorsqu'il prononce une mesure provisoire ou conservatoire visée au paragraphe 1 du présent article, le tribunal peut demander au requé-rant de fournir la forme de garequé-rantie qu'il jugera appropriée.

3. Le tribunal ne peut prononcer une mesure provisoire ou conservatoire du type visé au paragraphe 1 du présent article pour toute raison autre que celles visées aux alinéas a), b) ou c) du paragraphe 1 de l'article

19 ou l'utilisation de l'engagement à des fins délictueuses".

Le para. 1 de l'art. 20 de la Convention prévoit donc que le tribunal peut,

"sur la base d'éléments de preuve sérieux immédiatement disponibles", et "en prenant en considération le risque de préjudice grave que le donneur d'ordre coun-ait à défaut d'une telle mesure", prononcer une mesure provisoire ou conservatoire tendant soit "à ce que le bénéficiaire ne reçoive pas le paie-ment, y compris une mesure tendant à ce que le garant/émetteur retienne le

CHAPITRE VIII-LA FRAUDE

montant de l'engagement" (litt. a), soit "à ce que le produit de la garantie payé au bénéficiaire soit bloqué" (litt. b ). L'art. 20 para. 3 limite toutefois la possibilité du tribunal de prononcer une mesure conservatoire aux seules hy-pothèses prévues à l'art. 19 para. 1 (litt. a à c), ou pour empêcher une "utili-sation de l'engagement à des fins délictueuses".

Sans vouloir procéder ici à une analyse approfondie de ces deux disposi-tions68, on relèvera tout d'abord qu'en cas de réalisation d'une des hypothè-ses donnant lieu à une exception à l'obligation de payer, la Convention auto-rise le garant/émetteur à refuser le paiement, mais ne l'y oblige pas. L'idée de la CNUDCI semble être de laisser une certaine marge de manoeuvre à la banque, lui permettant de procéder à une pesée des intérêts enjeu et de pré-server la fiabilité commerciale des garanties indépendantes69. De fait, laques-tion du caractère obligatoire ou non du refus de la banque de payer en cas de situations de fraude a été l'un des points de discussion centraux lors de l'éla-boration de la Convention. Les partisans de la libre appréciation ("discretion") du garant70 craignaient qu'une obligation stricte de refuser le paiement en cas de fraude conduise les banques à adopter une position stéréotypée consistant à ne pas payer en cas de situations douteuses 71. Toujours est-il que la solution finalement retenue est peu satisfaisante, car la banque se trouve dès lors auto-risée à payer en dépit d'un abus clair et manifeste, tout en conservant

appa-68 Au sujet de la fraude et de son traitement dans la Convention, cf. en général MARKUS (1997), pp. 44-53; HORN (1997), pp. 98-102; BÜHLER (1997), pp. 158-161.

69 La note explicative du secrétariat de la CNUDCI expose que: "The Convention [ ... ] strikes a balance between the interests and considerations at play. By allowing discretion to the guarantor/issuer acting in good faith, the Convention is sensitive to the concem of guarantor/issuers over preserving the commercial reliability of undertakings as pro-mises that are independent from underlying transactions" (cf. in: HORN (1997), pp. 127-128, no. 48).

70 Essentiellement les États-Unis (dont on verra que la législation régissant les crédits documentaires laisse aux banques le choix d'honorer, ou non, les crédits documentaires même en cas de fraude du bénéficiaire; cf. inji-a chapitre VIII, 3.3.), mais aussi les association des banques allemandes et grecques. L'association européenne des banques (Europiiische Bankenvereinigung) était également opposée à une interdiction de payer en cas d'appel abusif: elle faisait valoir que les banques voulaient parfois honorer leur garantie afin de préserver leur crédibilité dans le commerce international, quand bien même elles n'étaient pas tenues de payer (il existerait en effet des listes noires des banques refusant trop souvent de donner suite aux appels aux garanties); à quoi il est observé avec raison que même dans un régime strict la banque peut payer en cas d'abus manifeste en s'exposant naturellement à ne pas être remboursée par le donneur d'or-dre; cf. MARKUS (1997), p. 46, Il. 121.

71 Cf. à ce sujet idem, pp. 46-48.

remment le droit de débiter le compte du donneur d'ordre72 . Cette conception est d'ailleurs radicalement contraire à celle prévalant en Suisse, puisqu'en effet l'on considère - en matière d'accréditif, et également en matière de ga-rantie bancaire - que si la banque découvre qu'un ou plusieurs documents sont faux, falsifiés, et/ou non sincères et que le bénéficiaire est en train de commettre un abus de droit manifeste au sens de l'art. 2 al. 2 CC, elle peut, et même doit, refuser de réaliser le crédit, et ce quand bien même le donneur d'ordre n'interviendrait en aucune manière 73 . L'exigence, formulée à l'art. 19 para. 1 de la Convention, d'une situation dans laquelle il est "clair et patent"

qu'une fraude ou abus entache la demande de paiement du bénéficiaire pour que celle-ci ne soit pas honorée aurait constitué, à notre avis, un garde-fou suffisant pour éviter les blocages intempestifs de paiement par la banque.

M. Markus, délégué suisse aux travaux de la CNUDCI ayant conduit à l'élaboration de la Convention, fait remarquer que la décision de laisser le pouvoir de libre appréciation à la banque garante a pour conséquence de programmer d'ores et déjà le recours au juge en cas d'abus de droit, car celui-ci est tenu dans une telle situation de prononcer une mesure provisionnelle interdisant le paiement74, alors que la banque peut payer même en cas d'ap-pel abusif à la garantie; une démarche du donneur d'ordre auprès de sa ban-que pour empêcher le paiement pourrait dès lors se révéler trop souvent d'avance inutile. Le para. 3 de l'art. 19, prévoyant la possibilité pour le don-neur d'ordre de saisir le juge des mesures provisoires dans les circonstances énoncées au para. 1, litt. a, b ou c, ferait donc office de correctif au pouvoir de libre appréciation du garant75.

Cet auteur souligne encore, avec raison, que la solution adoptée par la Convention serait adaptée aux situations dans lesquelles la banque nourrirait de simples doutes sur le caractère abusif de la demande de paiement formulée par le bénéficiaire; or, une telle hypothèse n'est pas couverte par l'art. 19 qui ne vise que les cas dans lesquels l'abus de droit est "clair et patent"76.

72 Idem, p. 48.

73 Cf. TEVINI Du PASQUIER (1990), p. 232 if; ATF 122 III 321, 323 consid. 4 a if= JT 1997 I 256 non rés. sur ce point (arrêt rendu en matière de garantie bancaire). Sur le droit et le devoir de la banque de refuser les documents et le paiement en cas de fraude, cf. infra chapitre XI, 2.

74 Pour autant évidement que les conditions d'octroi de la mesure provisionnelle, en droit de procédure, soient réalisées. En droit suisse, cf. à ce sujet infra chapitre XVII, 4.

75 MARKUS (1997), p. 48.

76 Ibidem.

CHAPITRE VIII - LA FRAUDE

La solution dégagée au terme des travaux de la CNUDCI sur cette ques-tion du pouvoir de libre appréciaques-tion de la banque n'est donc pas entièrement satisfaisante. Elle n'est, à tout le moins, pas en phase avec celle retenue par le droit suisse qui fait, à notre avis à juste titre, obligation au garant de refuser son paiement en cas d'abus de droit clair et manifeste. Si la banque entend néanmoins payer, pour des raisons de standing ou des motifs commerciaux, elle ne doit pas être fondée à se rembourser par débit du compte du dom1eur d'ordre77•

Par ailleurs, il ne semble pas que l'expression"[ ... ] le garant/émetteur, agissant de bonne foi, [ ... ]" de l'art. 19 para. 1 if soit de nature à rendre moins libre le choix-laissé à l'appréciation de la banque-de procéder ou non au paiement; la signification de cette exigence n'a en effet pas été clari-fiée lors des travaux en commission 78. Il nous apparaît bien plutôt

Par ailleurs, il ne semble pas que l'expression"[ ... ] le garant/émetteur, agissant de bonne foi, [ ... ]" de l'art. 19 para. 1 if soit de nature à rendre moins libre le choix-laissé à l'appréciation de la banque-de procéder ou non au paiement; la signification de cette exigence n'a en effet pas été clari-fiée lors des travaux en commission 78. Il nous apparaît bien plutôt