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Obligations du donneur d'ordre, mandant et assignant Pour l'essentiel, le donneur d'ordre a, en sa qualité de mandant, deux

RESPECTIVES DES PARTIES

3. Obligations des parties dans un accréditif irrévocable avec intervention d'une seule banque intervention d'une seule banque

3.3. Obligations du donneur d'ordre, mandant et assignant Pour l'essentiel, le donneur d'ordre a, en sa qualité de mandant, deux

obliga-tions principales vis-à-vis de son mandataire, la banque émettrice240: il doit lui rembourser la somme d'accréditif qu'elle a payée au bénéficiaire, et lui payer la commission convenue.

3.3.1. Remboursement de la somme d'accréditif

En vertu de l'art. 402 al. 1 CO, "le mandant doit rembourser au mandataire, [ ... ], les avances et frais que celui-ci a faits pour l'exécution régulière du mandat, et le libérer des obligations par lui contractées". En matière de crédit documentaire, l' actio mandati contraria signifie que le donneur d'ordre de-vra rembourser à la banque émettrice le montant d'accréditif payé au bénéfi-ciaire. Cette obligation naît dès que les conditions de l'engagement de la ban-que assignée de réaliser l'accréditif sont remplies, et pour autant ban-que la banban-que ait régulièrement exécuté son mandat241.

En effet, dès que la banque émettrice a reçu des documents strictement con-formes en apparence avec les termes et conditions du crédit, la condition suspensive grevant son engagement est réalisée242. Si la banque accepte (ou

239 DOHM (1993a), pp. 6-7; ÎEVINI Du PASQUIER (1990), pp. 160-161.

240 Vis-à-vis du bénéficiaire, le donneur d'ordre doit principalement faire émettre le cré-dit documentaire conformément à ce qui a été convenu entre les parties au rapport contractuel de base; cf. BODMER (1991), pp. 21-23; SLONGO (1980), p. 19; SCHÂRRER (1980), p. 61. En droit étranger, cf. p. ex. CANARIS (1988), no. 1048.

241 Au sujet de l'obligation de remboursement du mandant en général, cf. TERCIER (1995), no. 4097 ss; HOFSTETTER (1994), pp. 73-75; FELLMANN (1992), no. 4 SS ad art. 402 CO.

En matière de crédit documentaire, cf. notamment DOHM (1993a), p. 7; TEVINI Du PASQUIER (1990), pp. 162-163; J. HARTMANN (1974), pp. 107-110.

242 Cf. à ce sujet infra chapitre IX.

ne refuse pas) de lever ces documents, elle subit une diminution de son patri-moine, car sa dette envers le bénéficiaire243 devient inconditionnelle244 • La banque est alors immédiatement fondée, sauf convention contraire245 , à ré-clamer le remboursement du montant d'accréditif quand bien même, comme dans l'accréditif à paiement différé, le paiement effectif de la somme corres-pondante au bénéficiaire interviendra plus tard246.

Ce n'est évidemment qu'en cas d"'exécution régulière du mandat", que naîtra le droit au remboursement de la banque mandataire247; cela découle du texte

243 Engagement de payer la somme d'accréditif (art. 468 al. 1 CO).

244 La dette de la banque assignée, vis-à-vis du bénéficiaire, devient également incondi-tionnelle si elle accepte (ou ne refuse pas) des documents non conformes sans l'accord de son mandant (principe "paiement contre documents"). Dans cette hypothèse toute-fois, la banque n'aura pas droit au remboursement de ses frais dès lors qu'elle aura irrégulièrement exécuté son mandat.

245 L'art. 402 al. 1 CO étant de droit dispositif (ATF 78 II 42, 51=JT19521515, 519-520), les parties peuvent p. ex. convenir que la banque ne sera remboursée qu'une fois le donneur d'ordre entré en possession des documents représentatifs de marchandise (c'est p. ex. fréquemment le cas dans les crédits à paiement différé); cf. TEVINI Du PASQUIER (1990), p. 164, avec les références citées sous n. 164.

Elles conviennent également assez souvent, car les banques y ont grand intérêt, que le donneur d'ordre devra fournir à la banque une provision au moment de la conclusion du contrat de mandat d'ouvrir l'accréditif; idem, p. 164, n. 163.

Enfin, la banque prévoira souvent, dans ses formulaires d'ouverture d'accréditif, qu'elle n'aura pas à demander le remboursement de la somme d'accréditif, mais qu'elle pourra débiter directement le compte du donneur d'ordre; cette formule présente le grand avantage pour les banques d'inverser les rôles, en cas de litige, puisqu'il appartiendra dès lors au donneur d'ordre d'ouvrir action contre son mandataire; idem, p. 164, n. 166.

246 Le Tribunal fédéral l'exprime en ces termes: "Dans les opérations d'accréditif, il est conforme à leur notion même[ ... ] et consacré par l'expérience que la banque chargée d'ouvrir l'accréditif acquiert d'emblée et immédiatement, dès qu'elle a reçu les docu-ments promis, le droit d'exiger de son mandant qu'il accepte ces docudocu-ments, c'est-à-dire qu'il en prenne possession contre paiement et qu'il lui paie la rémunération usuelle ou convenue", ATF 78 II 42, 52 = JT 1952 I 515, 520. Cf. également l'arrêt de la Cour de Justice de Genève du 22 novembre 1996, Bank Kreiss Aktiengesellschaft c/ Société E., SJ 1998 393, 395 consid. 4 d: "[ ... ]l'obligation de la banque émettrice, mandante, de couvrir son correspondant mandataire naît immédiatement, à savoir dès la souscrip-tion de l'engagement de la banque confirmatrice vis-à-vis du bénéficiaire de l'accrédi-tif (Fellmann, Commentaire bernois [FELLMANN (1992)], n[o]. 89, 117 à 119 ad art. 402 CO;[ ... ]); son exigibilité est simplement reportée à l'échéance du crédit docu-mentaire"; ainsi que THÉVENOZ (1998), p. 204, r30, ch. 1. Cf. enfin DOHM (1993a), p. 7; TEVINI DU PASQUIER (1990), p. 163; ULRICH (1989), p. 125; GUGGENHEIM (1985), p. 203; J. HARTMANN (1974), pp. 107-110.

247 DOHM (1993a), p. 7; TEVINI Du PASQUIER (1990), pp. 165-168. Pour une définition générale du terme "exécution régulière du mandat", cf. WEBER (1996), no. 6 ad art. 402 CO; FELLMANN (1992), no. 33 ss, notamment 37 ad art. 402 CO.

CHAPITRE IV -NATURE JURIDIQUE DES RAPPORTS D'ACCRÉDITIF ET OBLIGATIONS DES PARTIES

même de l'art. 402 al. 1 CO. Il faut donc que la banque ait suivi strictement, et en faisant preuve de toute la diligence requise, les instructions de son man-dant, qu'elle ait procédé avec le soin voulu à l'examen de l'apparence de confo1mité des documents et se soit assurée du respect de toutes les condi-tions de l'accréditif; il faut qu'elle se soit, en fait, conformée parfaitement à toutes ses obligations de mandataire résultant de l'art. 398 al. 2 CO et des RUU248

Il convient de relever ici que l'exécution régulière du mandat au sens de l'ati. 402 al. 1 CO, qui ouvre le droit au remboursement du mandataire,"[ ... ] ne correspond pas [forcément] au fait que la banque ait 'accepté des docu-ments conformes '"249. Il se peut en effet que la banque exécute bien son man-dat en acceptant des documents non strictement conformes, parce que son mandant, qu'elle a interpellé à ce sujet, lui a donné instruction d'accepter néanmoins ces documents250En règle générale, toutefois, nous verrons que la banque exécute bien son mandat lorsqu'elle accepte des documents stricte-ment conformes en apparence avec les termes et conditions du crédit251Le critère décisif, en vertu du contrat de mandat, est celui de la diligence requise par l'art. 398 al. 2 CO, principalement lors de la vérification des documents présentés252Si donc la banque décidait de lever des documents qui s'avére-raient par la suite non effectivement (ou matériellement) conformes (pourvu qu'ils aient été strictement conformes en apparence aux conditions de l'ac-créditif), la banque ne perdrait pas pour autant son droit au remboursement si elle n'avait pu déceler les vices affectant les documents en dépit d'un examen diligent de ces demiers253Il peut donc arriver- p. ex. en cas de fraude avec des documents faux, falsifiés et/ou dénués de sincérité254, non décelables -que le donneur d'ordre doive rembourser la somme d'accréditif à la banque émettrice, quand bien même il ne recevrait pas la marchandise prévue. Il

248 Au sujet de la diligence de la banque mandataire, cf. supra chapitre IV, 3.2.1.

249 TEVINI Du PASQUIER (1990), p. 166.

250 Idem, p. 167.

251 Nous verrons que l'apparence de conformité doit apparaître telle aux yeux de tout banquier (i) faisant preuve, dans l'examen des documents, du "soin raisonnable" com-mandé à l'art. 13 a RUU, ainsi que de la diligence requise à l'art. 398 al. 2 CO, (ii) tenant compte des "pratiques bancaires internationales telles que reflétées dans les [RUU]" dans la détermination de la conformité apparente des documents, (iii) et enfin placé dans des conditions identiques. Cf. à ce sujet inft·a chapitre IX, 6.

252 Au sujet de la notion d'exécution régulière du mandat, cf. également inft·a chapitre XII, 1.1.

253 TEVINI Du PASQUIER (1990), p. 166. Cf. aussi DOHM (1993a), p. 7.

254 Au sujet des notions d'authenticité et de sincérité des documents, cf. infra chapitre VIII, 2.2.3.

n'aurait dès lors pas d'autre choix que de s'en prendre au bénéficiaire, en droit suisse, par le biais d'une action pour violation du rapport contractuel de base (art. 97 ss CO), ou d'une action pour acte illicite (art. 41 ss CO), voire éventuellement d'une action en enrichissement illégitime (art. 62 ss C0)255.

Enfin, il va de soi qu'en cas d'exécution irrégulière du mandat, la banque mandataire ne sera nullement fondée à se prévaloir de l 'actio mandati con-traria à l'encontre du donneur d'ordre. Néanmoins, si la banque, en cas de fraude du bénéficiaire, a accepté des documents non conformes en apparence, à la suite d'un examen défectueux de ces derniers, et déjà payé la somme d'accréditif, elle pourra se retourner contre le bénéficiaire sur la base des dispositions sur l'enrichissement illégitime (art. 62 ss CO), voire sur celles de la responsabilité délictuelle (art. 41 ss C0)256.

3.3.2. Paiement de la commission bancaire

La seconde obligation principale du donneur d'ordre, en vertu du contrat de mandat, est de verser à la banque mandataire la rémunération convenue257 pour ses services (ait. 394 al. 3 C0)258. À l'instar de ce qui prévaut pour le remboursement de ses frais, la banque mandataire ne peut exiger de commis-sion que si elle a correctement exécuté son mandat259 . Sauf convention con-traire, ce droit à la commission ne prend naissance qu'à partir du moment où la banque a reçu les documents prévus et peut exiger du donneur d'ordre qu'il en prenne possession260.

255 DüHM (1993a), p. 7. Au sujet de ces différents moyens d'action, cf. infi·a chapitre XII, 1.2.1.1. à 1.2.1.3.

256 Au sujet des moyens d'action de la banque pour se retourner contre le bénéficiaire, cf. infi'a chapitre X, 1.2.2.1. et 1.2.2.2.

257 Indépendamment de toute convention spéciale entre les parties, le mandant doit une rémunération lorsque tel est l'usage. Il est admis que tel est le cas lorsqu'une partie -en l'occurr-ence une banque-r-end un service à titre professionnel; ATF 82 IV 145 = JT

1957 IV 71; cf. aussi TERCIER (1995), no. 4118.

258 Au sujet du droit aux honoraires dans le contrat de mandat, cf. TERCIER (1995), no. 4115 ss; FELLMANN (1992), no. 362 ss ad art. 394 CO. En matière de crédit documentaire, cf. DüHM (1993a), p. 8; TEVINI Du PASQUIER (1990), pp. 175-177; J. HARTMANN (1974), p. 111.

259 ATF 108 II 197

=

JT 1982 I 548; TERCIER (1995), NO. 4119.

260 ATF 78 II 42, 52 = JT 1952 I 514, 520.

CHAPITRE IV -NATURE JURIDIQUE DES RAPPORTS D'ACCRÉDITIF ET OBLIGATIONS DES PARTIES

4. Rapports juridiques entre les parties dans un accréditif