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RESPECTIVES DES PARTIES

3. Obligations des parties dans un accréditif irrévocable avec intervention d'une seule banque intervention d'une seule banque

3.1. Obligations de la banque émettrice, mandataire et assignée Dans une opération d'accréditif, la banque émettrice assume le double rôle de

3.2.1. Degré de diligence requise

Dans le cadre de son mandat en général, et plus particulièrement dans l'exé-cution des obligations qui sont les siennes dans une opération de crédit docu-mentaire (notamment acceptation de l'assignation, c'est-à-dire ouverture et notification de l'accréditif, examen des documents et des conditions de l'ac-créditif), la banque mandataire doit non seulement respecter les instructions reçues (art. 397 CO), mais aussi faire preuve de la diligence prévue par les dispositions sur le mandat et par les RUU.

La mesure de la diligence requise de la banque, en vertu du contrat de mandat, est indiquée à l'art. 398 al. 2 CO qui prévoit que "[l]e mandataire est responsable envers le mandant de la bonne et fidèle exécution du mandat"227.

Cette obligation de diligence ne peut se définir in abstracto; il faut tenir compte de l'ensemble des circonstances de chaque cas d'espèce, notamment du genre du mandat, du temps à disposition, de l'importance de l'affaire et de la qua-lification des parties228 . Dans les opérations de crédit documentaire, les RUU, les usages bancaires et la jurisprudence rendue en la matière jouent un rôle essentiel pour juger du niveau de la diligence requise229. Les banques

agis-226 Au sujet des moyens à disposition de la banque pour se garantir le remboursement de la somme d'accréditif, cf. ULRICH (1989), pp. 127-149; GAN! (1987), pp. 70 ss;

THÉVENOZ (1985), pp. 1 ss; J. HARTMANN (1974), pp. 104-106.

227 Au sujet du devoir de diligence du mandataire en général, cf. TERCIER ( 1995), no. 4012 ss; WERRO (1993), no. 542 ss; FELLMANN (1992), no. 16 ss ad art. 398 CO. En matière de crédit documentaire, à propos de la banque mandataire, cf. p. ex. DOHM (1993a), pp. 5-6; TEVINI Du PASQUIER (1990), pp. 138-142; GUGGENHEIM (1986), pp. 174-176.

228 Cf. TERCIER (1995), no. 4013-4014; WERRO (1993), no. 561 SS.

229 DOHM (1993a), p. 5; TEVINI Du PASQUIER (1990), p. 139, Il. 57. Cf. aussi l'arrêt du Tribunal fédéral du 7 juillet 1964, Bank X cl United Commercial Bank Ltd: "Suivant sa jurisprudence antérieure, il [le Tribunal fédéral] a admis que le rapport interne liant les deux banques parties à l'accréditif était soumis, en principe, aux règles du mandat, mais qu'il fallait tenir compte des particularités caractérisant l'accréditif. Celui-ci con-cerne un domaine particulier, où les usages de la pratique et l'opinion des spécialistes revêtent une grande importance, même dans l'appréciation juridique", ATF 90 II 302, 306 = JT 1965 1 120, 123.

CHAPITRE IV -NATURE JURIDIQUE DES RAPPORTS D'ACCRÉDITIF ET OBLIGATIONS DES PARTIES

sant en qualité de mandataires professionnels, le degré de diligence que le donneur d'ordre peut attendre d'elles est accru230.

La détermination de l'étendue du devoir de diligence est importante. Cette notion joue en effet un rôle capital paiticulièrement lors de la vérification des documents par la banque désignée, ce qui constitue son obligation principale dans les rapports de mandat dans le cadre d'une opération de crédit documen-taire231. Surtout, la "bonne et fidèle exécution du mandat" détermine "l' exé-cution régulière du mandat" au sens de l'art. 402 al. 1 CO, et donc le droit de la banque de se faire rembourser la somme d'accréditif payée au bénéficiaire, ainsi que son droit à sa commission232.

3.2.2. Exclusion de la responsabilité de la banque mandataire Certaines dispositions des RUU, les art. 15 à 18 RUU, prévoient de nom-breux motifs d'exclusion de la responsabilité des banques, notamment en qui concerne la valeur des documents présentés (art. 15), la transmission des messages (art. 16), les cas de force majeure (art. 17), et le respect des instruc-tions données à une partie (art. 18).

Surtout, l'art. 15 i.i. RUU énonce que "les banques n'assument aucun engagement ni responsabilité quant à la forme, la suffisance, l'exactitude, l'authenticité, la falsification ou l'effet juridique du/ des document( s) [ ... ]".

Cette disposition non seulement précise que la banque ne fait que vérifier l'apparence de confotmité des documents sans en garantir la sincérité et l'authenticité, mais tend également à exclure la responsabilité des banques en raison del 'inexécution de leurs obligations résultant du contrat de mandat et de la rigueur documentaire233 . De surcroît, les banques mandataires peuvent également tenter de limiter ou d'exclure leur responsabilité par le biais de leurs conditions générales. Se pose dès lors la question de la validité, au regard du droit suisse, de telles clauses exclusives de responsabilité qui peu-vent revêtir une importance considérable en cas de fraude.

230 DOHM (1993a), p. 5.

231 TEVINI Du PASQUIER (1990), p. 139, n. 57.

232 Ibidem. Cf. infra chapitres IV, 3.3.1. et 3.3.2., ainsi que XII, 1.1.

233 TEVINI DU PASQUIER (1990), pp. 152-153.

La doctrine dominante considère que l'art. 398 al. 2 CO, définissant le devoir de diligence du mandataire, est une norme de droit dispositif à laquelle les parties peuvent déroger dans les limites des art. 1 OO et 101 C0234.

En vertu de l'art. 100 al. 1 CO, le débiteur ne peut valablement exclure sa responsabilité pour faute grave. Cette règle s'applique également à lares-ponsabilité des organes du mandataire235 . De surcroît, dans la mesure où l'exercice de l'activité du mandataire est subordonnée à une concession de l'autorité-c'est le cas de l'exploitation d'une banque-, le juge pourra même tenir pour nulle une clause qui le libérerait d'une faute légère (art. 1 OO al. 2 C0)236. Enfin, en vertu de l'art. 101 al. 3 CO, le mandataire ne pourra, si sa responsabilité résulte de l'exercice d'une industrie concédée par l'auto-rité, s'exonérer conventionnellement de la responsabilité de ses auxiliaires (à savoir de ses employés) que si celle-ci découle d'une faute légère23 7.

Si l'on accepte la nature dispositive de l'art. 398 al. 2 CO et l'application des règles générales (art. 100 et 101 CO) à la responsabilité du mandataire, il faut donc considérer que les banques ne peuvent exclure leur responsabilité par le biais de leurs conditions générales et en vertu de l'art. 15 i.i. RUU qu'en matière de faute légère du fait de leurs auxiliaires. Cette solution, préconisée par la doctrine majoritaire, doit être retenue238 .

Quant aux dispositions des art. 18 a et b RUU qui excluent la responsabilité de la banque émettrice ayant recours aux services d'une autre banque, elles

234 Cf. WEBER (1996), no. 34-35 ad art. 398 CO; TERCIER (1995), no. 4088-4091; WERRO

(1993), no. 937-939; FELLMANN (1992), no. 513 ss ad art 398 CO et les références citées. Contra: GAUTSCHI (1971), no. 72 c ad art. 395 CO, et no. 25 b ad art. 398 CO;

idem (1964), no. 17 c ad art. 407 CO; une partie de la doctrine considère en effet que le mandataire, s'il fait profession d'offrir ses services, ne peut se libérer par conven-tion de son devoir de bonne et fidèle exécuconven-tion. Considérant l'art. 398 al. 2 CO comme une norme de droit impératif, elle est d'avis que la banque mandataire ne peut se prévaloir d'aucune clause exclusive de responsabilité et répond dès lors de toute faute, grave ou légère, en vertu de l'art. 99 al. 1 CO. Cf. à ce sujet TEVINI Du PASQUIER

(1990), pp. 157-159 et les références citées.

235 Art. 55 al. 2 CC.

236 Cf. pour tous TERCIER (1995), no. 4089; ATF 112 II 450 = JT 1987 I 91 rés. Cf. égale-ment, en général, TEVINI Du PASQUIER (1990), pp. 154-156; GUGGENHEIM (1986), pp. 44 SS.

237 TERCIER (1995), no. 4090.

238 Cf. en matière d'accréditif LOMBARDINI (1994), pp. 40-41; DOHM (1993a), p. 6.

Cf. également TEVINI Du PASQUIER (1990), p. 156, qui ne semble toutefois pas pren-dre parti en faveur du caractère dispositif ou impératif de l'art. 398 al. 2 CO; cf. aussi idem, p. 26.

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ne peuvent être acceptées, en droit suisse, que dans les limites de l'art. 399 al. 2 CO. Cela signifie que la banque ne peut s'exonérer du soin avec lequel elle choisit et instruit la banque sous-mandataire ( curae in eligendo et in instruendo ); en revanche, elle n'est pas tenue de surveiller son substitut (cura in custodiendo ), et ne répond dès lors pas d'une éventuelle mauvaise exécu-tion du mandat de la banque sous-mandataire239.

3.3. Obligations du donneur d'ordre, mandant et assignant