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Les rôles de capitation du département de l’Isère : Un corpus incomplet

Chapitre III. : Premiers résultats de recherche : Les apports des rôles de capitation

B. Les rôles de capitation du département de l’Isère : Un corpus incomplet

1) Un grand nombre de communautés dépourvues de rôles de capitation

Notre étude étant circonscrite au département de l’Isère dans ses limites de la fin du XVIIIè siècle, nos recherches se sont intégralement déroulées aux Archives Départementales de l’Isère. Nous avons dans un premier temps cherché à rassembler l’ensemble des rôles de capitations conservé au dépôt départemental des archives de l’Isère. Les rôles de capitation y sont essentiellement classés dans la Sous-série 4 E représentant les Fonds des communes. Il est à noter que certains rôles de capitation échappent au classement traditionnel et sont à chercher dans d’autres Séries. C’est notamment le cas de la Série J (Fonds entrés par voie extraordinaire) et de la Sous-série 1 J (Fonds entrés par voie extraordinaire contenant moins de dix articles) qui peuvent recéler quelques-unes des listes d’impositions que nous convoitons. Ainsi en est-il, par exemple, du rôle de capitation de la communauté de Tréminis, située dans la Trièves, pour l’année 1770.

Avant de dresser l’inventaire des rôles de capitation à disponibilité du chercheur, rappelons au lecteur que deux critères essentiels ont guidés notre démarche. Le sujet de notre enquête étant centré sur le milieu socio-professionnel en milieu rural, nous avons dû écarter de notre corpus l’ensemble des communautés identifiées par René Favier dans ses travaux sur Les villes du Dauphiné5 comme dépassant les deux mille habitants et intégrant de ce fait la nomenclature urbaine6. D’autre part, les communautés appartenant au massif montagneux de l’Oisans ont également été exclues de notre inventaire. Abritant de nombreux colporteurs, dont les trajectoires professionnelles et sociales ont été largement étudiées par Laurence Fontaine7, les frontières de nos recherches devaient par conséquent s’arrêter aux portes de l’Oisans.

5 Favier, René, Les villes du Dauphiné aux XVIIè et XVIIIè siècles, op.cit., 512p.

6 Dans les cadres géographiques de notre étude, neuf communautés citées par René Favier comme étant des

villes ont dû être écartées de notre corpus : Vienne, Crémieu, Bourgoin, La-Côte-Saint-André, Le Pont-de- Beauvoisin, Voiron, Saint-marcellin, La Mure et Grenoble. Plusieurs gros bourgs ont également été ignorés, parmi lesquels nous pouvons citer, entre autres exemples, les centres de Saint-Syphorien d’Ozon, Beaurepaire, Moirans, Morestel, La-Tour-du-Pin, Tullins ou encore Pont-en-Royans.

7 Fontaine, Laurence, Histoire du Colportage en Europe, op.cit., 336p.

Ce bornage effectué, nous nous sommes lancés à la recherche de l’ensemble des rôles de capitation qui nous est parvenu. Sur les Trois cent trente huit communautés dont les fonds communaux sont enregistrés aux Archives Départementales de l’Isère, quatre-vingt dix-neuf d’entre-elles possèdent des archives de capitation, rôles et laçons8 confondus. Au final, moins d’une communauté sur trois possède des archives de l’ancien impôt royal. Le nombre de communautés répondant aux critères définis plus haut et disposant d’archives de capitation est donc relativement faible. En outre, le caractère fragmentaire de notre corpus devait être poussé un peu plus loin puisque sur l’ensemble des communautés disposant des archives de capitation, un certain nombre d’entre-elles devait être éliminé.

2) Des communautés disposant de lançons de capitation, sans les rôles fiscaux

Sur l’ensemble des archives de capitation qui nous est parvenu, un certain nombre s’est révélé inexploitable puisque étant essentiellement constitué de lançons de capitation. Ces avis d’imposition décrétés par l’Intendant de la Province du Dauphiné n’offrent, en effet, aucune information concrète sur les modalités de taxation des habitants des communautés soumis à la fiscalité royale. Seul le montant total de l’impôt des communautés y était apposé, une fois que les péréquateurs avaient additionné la taxe payée par chacun des chefs de famille du village. Citons, entre autres exemples, les communautés de Saint-Geoire-en-Valdaine pour les années 1706-1708, Saint-Mury-de-Monteymont pour les années 1742-1783 ou encore de Thoranne pour les années 1725-1753 ou de Vourey pour les années 1777-1778, qui présentaient uniquement des lançons de capitation. Sans utilité pour le chercheur, nous avons par conséquent dû opérer un nouveau tri et nous séparer de l’ensemble des communautés pour lesquelles nous disposions uniquement des lançons de capitations, sans les rôles.

A l’inverse nous avons gardé dans notre collection, les communautés pour lesquelles les lançons se mélangeaient aux rôles de capitation proprement dits. C’est le cas notamment du village de Chichilianne dont l’unique rôle de capitation qui nous soit parvenu date de 1696 et qui ne présente que des lançons entre l’année 1709 et 1789. Dans le même esprit, citons le village de Valbonnais qui a su préserver ses rôles de capitation pour les cinq premières années du Siècle des Lumières mais qui ne présente que des avis d’imposition entre1706 et 1727.

8 Les lançons sont des avis d’imposition collective, remis aux communautés soumises à l’impôt royal sous la

Au total, ce ne sont pas moins de dix communautés qui ont été passées au tamis et que nous avons du écarter de notre corpus.

3) Le risque du manque d’exhaustivité d’un corpus fragmentaire

A ce stade de notre inventaire, nous devons nous interroger sur le caractère exhaustif de notre corpus. Afin de répondre aux critères de notre sélection et après plusieurs écrémages successifs, ce sont les rôles de capitation de quatre-vingt neuf villages de l’ancien département de l’Isère qui ont été conservés, et qui constituent le matériau principal de notre recherche. Ces quelques quatre-vingt neuf villages représentent au total un peu plus d’un village isérois sur quatre. L’écueil principal de notre étude est par conséquent le plausible manque d’exhaustivité du corpus des rôles de capitation restant à notre disposition. Il est possible, en effet, que les résultats tirés de l’analyse des listes fiscales qui nous sont parvenues surévaluent ou, au contraire, sous évaluent les réalités du peuplement et du niveau de vie du groupe marchand. Il nous faut donc souligner le caractère transitoire de notre étude qui devra impérativement être menée à plus petite échelle afin d’englober un maximum de communautés et pallier ainsi au manque d’exhaustivité inhérent à l’étude nombrée d’un groupe social.

Pour autant, et bien qu’il nous faille prendre avec une certaine précaution les informations tirées de notre corpus, l’inventaire des rôles fiscaux à notre disposition nous semble assez riche pour nous donner, si ce n’est un tableau achevé du monde rural marchand, à tout le moins de grandes orientations que nous espérons fidèles aux réalités vécues par les membres de notre groupe socio-professionnel.

Par ailleurs, les rôles fiscaux qui furent gardés dans notre collection se sont révélés globalement complets, bien rédigés par les greffiers des communautés, couvrant pour la plupart une ou plusieurs décennies et s’étendant de manière relativement homogène sur l’ensemble du territoire que nous avons choisi comme laboratoire de notre recherche.

Au final, s’il nous faut émettre quelques réserves quant au caractère fragmentaire de notre inventaire, nous pouvons également souligner les qualités d’une source fiscale dont nous espérons tirer tout le parti afin d’éclairer plus avant la figure du marchand rural dans la partie septentrionale de l’ancienne province dauphinoise

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