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Résumé des résultats

Le tableau G6 (en annexe) présente l’ensemble de nos résultats. Les deux premières colonnes contiennent les coefficients de la fonction de production estimée par la méthode des moindres carrés ordinaires (MCO). Dans la pre- mière colonne, les variables indépendantes ne mentionnent que les caractéristiques de l’en- treprise, alors qu’en colonne 2, nous introdui- sons des variables indépendantes caractérisant les gérants des UPI. Tous les modèles incluent les effets fixes pays.

En ce qui concerne les caractéristiques des entreprises, au premier abord, toutes les esti- mations des fonctions de production sont stables. Toutes les variables de contrôle sont signées de manière intuitive, ou non signifi- cative. La variable indicatrice d'ouverture, indi- quant que l'UPI fait du commerce internatio- nal direct ou non, est significativement positif au niveau de 1 %. Comme prévu, le signe du coefficient du logarithme de capital, de main- d’œuvre et d’âge de l’UPI est positif, au seuil de 1 %, ce qui signifie que la valeur ajoutée, toutes choses égales par ailleurs, croît, alors que les intrants utilisés augmentent et que l’entreprise vieillit (ainsi que les réseaux so- ciaux du gérant de l’entreprise).

Quant aux variables spécifiques aux gérants des UPI, l’idée principale ressortant tableau G6 (en annexe) correspond à nos attentes. Nos résultats indiquent en effet que les UPI gérées par des femmes ont moins de succès, probablement parce qu’elles ont des objectifs plus diversifiés que l’augmentation simple des bénéfices faits par leur entreprise. En

outre, nos résultats semblent indiquer que les performances des entreprises informelles augmentent suivant le niveau d’éducation de leur gérant.

Nos régressions présentent néanmoins deux résultats frappants. Tout d’abord, le coefficient de l’expérience de corruption n’est pas signi- ficatif au niveau de 10 %, ce qui indique qu’il n’y a aucun lien entre la corruption et la pro- duction des entreprises. Il faut ici noter que Fisman et Svensson (ibid.) montrent également une faible association entre les taux de corru- ption et les performances des entreprises, mesurées par la croissance des ventes de l’en- treprise, par les régressions MCO. Ensuite, la quantité d’impôts payés est positive et signifi- cative au niveau de 1 %. En conséquence, payer plus d’impôts semble être positivement lié avec les performances des entreprises, ce qui contredit l’intuition de base et les conclusions d'études précédentes, dont celle de Fisman et Svensson (ibid.).

L’étrangeté d’un tel résultat peut néanmoins être mitigée par le type d’impôt payé par les UPI. En effet, la moitié de la valeur des impôts payés par les entreprises informelles se com- pose, en fait, d’impôts locaux (comme les frais de réservation d'un stand sur un marché). Évi- demment, si ces impôts locaux représentent des frais pour les UPI, ils peuvent aussi leur permettre de développer leurs activités de manière draconienne, en leur donnant accès à des infrastructures ou en les faisant connaître à des clients, ce qui leur permet ensuite d'aug- menter leurs performances. Cet argumentaire s’appuie sur des preuves de l’avantage de la formalisation (Rand et Torm, 2010)

Une fois de plus, pour résoudre le problème de l'endogénéité, nous présentons les résultats de la régression IV, où l’expérience de la cor- ruption est instrumentée par (i) le pourcenta- ge spécifique à la situation géographique des entreprises déclarant avoir dû payer un pot- de-vin, et (ii)la moyenne par industrie et par situation des impôts payés. Les résultats de l’estimation IV, dont la liste est dressée à la colonne 3, soutiennent l’hypothèse selon laquelle la corruption fait chuter les perfor- mances de l’entreprise, et confirment le fait que, dans le secteur informel, plus les entre- prises payent leurs impôts, meilleures sont leurs performances. Plus précisément, le coef- ficient d’expérience de la corruption prend la valeur négative de -3 et est significatif au niveau de 5 %. L’effet estimé d’avoir à payer un pot-de-vin est une chute de 95 % (100* (e-3-1)) de la valeur ajoutée.

Pour tester plus avant la robustesse de nos résultats, nous utilisons aussi une régression IV sur les performances des entreprises, où l’ex- périence de la corruption et le logarithme des impôts payés sont instrumentés par le pour- centage d’entreprises locales déclarant avoir dû payer un pot-de-vin, et la quantité moyen- ne d’impôts payés par industrie et situation géographique. L’effet estimé de la corruption augmente, ainsi que celui des impôts. Les effets estimés de la corruption sont ex- trêmement élevés et jettent un doute sur la pertinence de nos instruments. Malheu- reusement, nous n’avons pas de meilleurs instruments de test, et nous ne pouvons pas comparer nos résultats avec des études pré- cédentes. Svensson (2003) et Vial et Hanoteau (2010) utilisent en effet comme variables dépendantes les indicateurs de croissance des e nt re p r i s e s , p l u t ô t q u e l e n i ve a u d e p e r - formance.

Pour tester plus avant la robustesse de nos résultats, nous utilisons aussi une régression IV sur les performances des entreprises, où l’ex- périence de la corruption et le logarithme des impôts payés sont instrumentés par le pour- centage d’entreprises locales déclarant avoir dû payer un pot-de-vin, et la quantité moyen- ne d’impôts payés par industrie et situation géographique. L’effet estimé de la corruption augmente, ainsi que celui des impôts. Les effets estimés de la corruption sont ex- trêmement élevés et jettent un doute sur la pertinence de nos instruments. Malheu- reusement, nous n’avons pas de meilleurs instruments de test, et nous ne pouvons pas comparer nos résultats avec des études pré- cédentes. Svensson (2003) et Vial et Hanoteau (2010) utilisent en effet comme variables dépendantes les indicateurs de croissance des e nt re p r i s e s , p l u t ô t q u e l e n i ve a u d e p e r - formance.

La présente étude a analysé les liens entre le secteur informel et l’État. Elle a examiné spécifiquement l’intensité de la corruption et ses conséquences au sein de l’économie in- formelle. C'est la première fois que la question de la corruption dans le secteur informel, mesurée par expérience plutôt que par per- cep-tion, est analysée de manière extensive. Notre étude apporte plusieurs enseignements nouveaux.

Nos données montrent surtout, et contraire- ment aux idées reçues, que dans les capitales d’Afrique de l’Ouest, les UPI ne sont pas énor- mément victimes de tentatives de corruption par des fonctionnaires. En effet, seules 4,2 % des UPI déclarent avoir dû payer des pots- de-vin avant l'enquête. Ce chiffre ne signifie pas pour autant que la corruption est un phé- nomène anecdotique : si l’expérience de la corruption était répartie de manière inégale et indépendante au sein de la population, en moins de 12 ans, la moitié des UPI en aurait fait l'expérience.

En outre, si nous prenons en compte unique- ment les UPI ayant été en contact avec les représentants de l’État dans l’année précé- dant l’enquête, cette proportion passe à 37 %, ce qui signifie que les pots-de-vin sont une méthode significative pour régler les pro- blèmes rencontrés avec des agents de l’État. Notre analyse des déterminants de la corrup- tion parmi les UPI montre que les mécanismes ne sont pas différents de ceux qui prévalent dans le secteur formel. Il est plus probable

que les plus grandes entreprises et les entre- prises du secteur du transport subissent le comportement prédateur de représentants de l’État. En outre, nos résultats suggèrent fortement que l’expérience de la corruption réduit grandement les performances des entreprises.

Des politiques de lutte contre la corruption sont donc nécessaires, mais n’ont pas à se concentrer particulièrement sur le secteur informel. Si la corruption ne semble pas géné- ralisée dans le secteur informel, la lutte contre la corruption semble rester un élément clé du succès des politiques cherchant à augmenter la formalisation.

Notre étude présente également des résultats consternants sur la non-immatriculation : les données de phase 2 indiquent en effet que celle-ci est surtout une conséquence du faible respect des lois plutôt que de la corruption. En d’autres termes, la non-immatriculation ne répond pas principalement à la volonté d’évi- ter le comportement prédateur des fonction- naires cherchant des pots-de-vin auprès de toute personne officiellement immatriculée. 39 % des UPI estiment que l’immatriculation n’est pas obligatoire, et 21 % ne savent pas qu’elle est nécessaire. En outre, les résultats de l’enquête indiquent qu’il n’y a aucune volonté de l’État de forcer les UPI à respecter la loi. Dans les sept capitales, seuls 6,2 % des gérants d’UPI indiquent avoir eu des problèmes avec des fonctionnaires dans l’année précédant l’enquête.

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Dans de nombreuses régions d’Afrique sub- saharienne, la plupart des entreprises infor- melles n'enregistrent aucune croissance de leur activité, que celle-ci soit mesurée en nombre d'emplois créés ou en termes d'augmentation du capital productif. Le taux de réinvestisse- ment des profits est en effet généralement faible en raison de l'existence de contraintes sur le marché des capitaux, lesquelles peuvent être liées à la non-convexité des fonctions de production, de l'aversion au risque des micro- entrepreneurs ou encore de leur manque de compétences et de fibre entrepreneuriale. Pour certains auteurs, une autre raison est à chercher du côté de l'entourage des entrepre-

neurs. Selon eux, il est possible que les entre- preneurs dont l'activité prospère soient dans l'incapacité d'épargner leurs profits en vue de les réinvestir, du fait de la pression redistribu- tive exercée par leurs proches. Il est également possible que les entrepreneurs soient désin- cités à investir ex ante s'ils anticipent qu'ils devront redistribuer une partie importante de leurs profits futurs. En d'autres termes, le faible réinvestissement des profits serait lié à la « solidarité forcée » à laquelle fait réfé- rence la littérature sociologique, ou encore à la « face cachée du capital social » (Portes et Sensenbrenner, 1993).

2.4. La solidarité forcée

bride-t-elle l'activité

des micro-entrepreneurs?

Une analyse à partir de données

ouest-africaines*

Michael Grimm, Flore Gubert, Ousman Koriko, Jann Lay

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