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Correction du biais d’endogénéité

Le deuxième problème d’estimation est la simultanéité potentielle dans la détermination de la production et le paiement de pots-de- vin. En effet, les théories de harcèlement op- timal (Myrdal, 1968 ; Kaufmann et Wei, 1999) semblent indiquer que les possibilités de payer des pots-de-vin varient énormément d’une entreprise à l’autre. Les fonctionnaires à la re- cherche de pots-de-vin manipulent les règle- mentations, les taxes, la bureaucratie et leur pouvoir discrétionnaire en fonction des « ca- pacités à payer » de l’entreprise, pour pous- ser les entreprises à payer la somme maximale qu'elles sont prêtes à payer. En sus, les repré- sentants de l’État exigent probablement plus souvent des pots-de-vin des entreprises dont les performances sont les meilleures. En outre, comme l’indiquent Shleifer (2004), et Fisman et Svensson (2007), certains entrepreneurs

peuvent se servir de la corruption comme stratégie de développement de leur affaire. Il est en effet possible que les UPI choisissent d'allouer des ressources aux pots-de-vin : on peut en effet imaginer qu’en cas de contrôle, un chauffeur de taxi choisisse systématique- ment de payer le policier qui l'a arrêté, afin de perdre un minimum de temps et/ou d'argent. Cette question d’endogénéité peut être miti- gée par une instrumentation de la production. Nous utilisons un chiffre d’affaires moyen par industrie et la situation géographique comme instrument de valeur ajoutée. Selon nous, cette mesure est une bonne donnée indirecte des coûts d’entrée d’une industrie particulière, dans un lieu particulier. Elle devrait également être une bonne indication indirecte de l’in- tensité de la demande. Ces deux données devraient influencer la valeur ajoutée de l’en- treprise, mais pas son expérience en matière de corruption.

Les colonnes 1, 2, 3 et 4 du tableau G5 (en annexe) présentent nos estimations des inci- dences de la corruption lorsque l’on augmente progressivement le nombre de variables indé- pendantes. En ce qui concerne les caractéris- tiques des entreprises, on voit que le niveau de valeur ajoutée a une influence positive et significative sur l’incidence des pots-de-vin, et que la valeur du capital fait augmenter la probabilité d’avoir à payer un pot-de-vin. Comme l’indiquait Svensson (2003), la pré- sence d’un capital élevé peut être considérée comme une diminution des options extérieu- res des UPI, et de leur pouvoir de dire non. Les résultats des estimations indiquent également que le nombre d’employés, l’âge ou le fait que l’entreprise informelle fasse du commerce international n’ont pas d’impact significatif sur l’incidence de la corruption. En outre, ces

résultats suggèrent que les UPI payant plus d'impôts sont plus propices à payer des pots- de-vin. Ce résultat peut sembler paradoxal, car on aurait pu s’attendre à un échange entre les pots-de-vin et le fait de respecter les régle- mentations fiscales. En effet, en Afrique sub- saharienne, les réglementations en matière d’impôts sont relativement peu transparentes et leur application est généralement très ar- bitraire. Les contacts avec les inspecteurs des impôts sont souvent des négociations, qui peuvent « s’arranger » en payant des impôts, mais aussi des pots-de-vin. L’appartenance à une association professionnelle est souvent liée à une plus grande corruption. Ici, la direction de la causalité n’est pas évidente : d’une part, les UPI affectées par la corruption semblent s’affilier à des associations de producteurs pour se protéger, mais d’autre part, l'appartenance à une association professionnelle accroît la probabilité d'être victime de la corruption. En ce qui concerne les directeurs des UPI, seuls le genre et le niveau d’éducation ont un impact significatif sur la probabilité de payer des pots-de-vin. En effet, le fait qu’une UPI soit gérée par une femme réduit la probabilité de devoir payer un pot-de-vin. A contrario, le fait que le gérant de l’UPI ait suivi des études secondaires (à l’opposé de ceux qui n’ont pas étudié du tout) augmente la probabilité de corruption. Notons également qu’aucune autre caractéristique personnelle du gérant de l’UPI (comme la richesse, le lieu de naissance ou les origines ethniques) n’a d’influence significative sur l’incidence des pots-de-vin.

La colonne 5 du tableau G5 (en annexe) permet de contrôler le biais potentiel d'en- dogénéité. Le test de Wald d'endogénéité confirme la simultanéité de la détermination de la production et du paiement de pots-de- vin. Les coefficients estimés par le modèle probit et le modèle pobit à variable instru- mentale diffèrent pour plusieurs variables indépendantes. Le logarithme du capital, les variables fictives dénotant que le gérant de l’UPI fait partie d’une association profession- nelle, est une femme ou a suivi des études secondaires deviennent non significatives. Au contraire, l'importance des effectifs, l’âge de l’UPI et la variable indicatrice indiquant que le gérant de l’UPI a suivi des études universi- taires sont significatifs lors des estimations de probit à variable instrumentale. Les signes estimés correspondent à nos attentes : ils in- diquent que les entreprises plus petites, plus jeunes et informelles et les UPI dont les gé- rants ont un diplôme universitaire sont moins susceptibles de payer des pots-de-vin. Enfin, le coefficient de prédicteur endogène – la valeur ajoutée – reste positif et significatif, et l’on estime que l'augmentation de la va- leur ajoutée de l’UPI augmente la probabilité d’avoir à payer un pot-de-vin. Il faut aussi noter que le calcul des effets marginaux moyens indique que l'effet marginal moyen du loga- rithme de la valeur ajoutée sur la probabilité de corruption est de 0,55. Ce chiffre peut sem- bler extrêmement élevé, mais n'oublions pas que la probabilité de devoir payer un pot-de- vin est très faible[ 50 ].

2.3.5. Le paiement

de pots-de-vin fait-il

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