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RÉSULTATS DE L’ANALYSE CORPS HANDICAPÉ ET CORPS SAIN :

La classification normative des athlètes prothétiques.

Introduction

Le corps handicapé qu’il soit de naissance ou de cause accidentelle passe sous la loupe de la science médicale52. L’évaluation de la condition du handicap est comprise et mise de l’avant par la médecine en ces termes, cela signifie que le corps handicapé est souvent conceptualisé par les classifications médicales et ce, d’après une opposition entre le corps malade53, le « corps sain », et le « corps normal ». Ce qui nous paraît intéressant d’observer sur cette question est que :

« D’un point de vue socio-anthropologique, les représentations du corps sain et du corps malade, en tant qu’elles se trouvent façonnées par le contexte social et culturel, connaissent des évolutions et transformations. Les pratiques et usages du corps, les réalités du corps souffrant, malade ou handicapé, la manière dont le corps est vécu, sa valeur intrinsèque (pour le sujet) et extrinsèque (sur un certain marché) ainsi que le regard porté sur lui par ceux qui en font le métier et par la société en santé se caractérisent par de constants bouleversements » (Bourquin 2015 : 394).

S’ajoute à cela le fait que la science médicale cherche dans sa pratique, à identifier l’anormalité ou l’incapacité et à pallier vers la norme (Mus 2013 : 36). Dans cette optique, la norme est une condition de santé, or, la notion de santé est relative à la fois au bien-être et à des valeurs biologiques, physiologiques et physiques (Andrieu 1999 : 2).

Le corps handicapé est en règle générale, nous l’avons vu, pris en charge par la science médicale, qu’y lui appose un diagnostic et lui inscrit une condition (Delcey 2002 : 4). Cette condition insère l’individu dans un canevas, dans une case qui ne lui convient pas

52 « Le corps humain est l’objet privilégié d’action de la médecine, mais aussi réalité vécue, image, symbole, représentation et l’objet d’interprétation et de théorisation. Tous ces éléments constitutifs du corps influencent la façon dont la médecine le traite » (Saraga 2015 : 394).

53 « Or, la maladie, censée définir la santé, est déjà en elle-même une objectivation du corps, car elle considère la pathologie comme extérieure au sujet malade. D’autre part, le pathologique est de l’ordre de la normalité, puisqu’il est continuation de la vie sous une autre forme, et répond comme l’état normal, à une normativité propre. La médecine caractérise un état pathologique, en interprétant la baisse quantitative de certaines performances comme un insuccès » (Carrive 2008 :135).

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nécessairement54. Cette remise en question de la condition médicale que l’on verra

graduellement apparaître, émerge avec l’avancement des droits et de l’émancipation des personnes handicapées55, ainsi qu’avec les avancées technologiques56. Cette progression de la technologie et l’amélioration des performances induite par les nouveaux matériaux57

composant les prothèses, vont non seulement permettent à ces paralympiens de se rapprocher des normes de la performance humaine, et de même dépasser les « capacités moyenne ». De cette manière, les athlètes en viendront à questionner à la fois, la légitimité de ces normes, mais aussi leurs objectivités 58 . Puisque lorsque nous observons l’élaboration du système de classification qui chapeaute les compétitions paralympiennes et qui permet une légitimité à ses compétitions, nous remarquons que le point d’ancrage de ce système de classification est le corps « dit » normal. Observons la question de la

54 « Ce sont ces difficultés conceptuelles et ce souci de ne pas réduire le handicap à un diagnostic qui ont conduit à l’élaboration de la première CIH (Classification Internationale des handicaps (1980) (…) » (Delcey 2002 :4).

55« Dans les années 70, la notion de droits fondamentaux des personnes handicapées commence à être plus largement admise sur le plan international. L’Assemblée générale a adopté, en 1971, la Déclaration des droits du déficient mental, puis, en 1975, la Déclaration sur les droits des personnes handicapées, qui définit des normes pour l’égalité de traitement de ces personnes et leur accès à des services leur permettant d’accélérer leur insertion sociale. L’Année internationale des personnes handicapées (1981) a débouché sur l’adoption, par l’Assemblée générale, d’un Programme d’action concernant les personnes handicapées, ensemble d’orientations visant à promouvoir l'égalité et les droits des personnes handicapées et leur entière participation à la vie sociale. La Décennie des Nations Unies pour les personnes handicapées (1983-1992) a donné lieu à l’adoption des Règles pour l’égalisation des chances des handicapés. Chaque année, un rapporteur spécial contrôle l’application de ces Règles et rend compte de ses travaux à la Commission du développement social, organe subsidiaire du Conseil économique et social (ECOSOC). Dans son article 23, la Convention relative aux droits des enfants (1989) reconnait tout particulièrement la vulnérabilité des enfants handicapés et prône la non-discrimination »

(http://www.un.org/fr/rights/overview/themes/handicap.shtml).

56« Cela serait dans sa nature : « L’expansion de notre potentiel est justement la principale distinction de notre espèce ». À leurs yeux, l’hybridation entre l’humain et la machine est légitime, voire nécessaire, mais elle est également naturelle. Cette assertion se voit renforcer par l’idée selon laquelle une relation existe entre l’avancement technologique et le progrès humain. De ce point de vue, les avancées technologiques ne peuvent être que fortement encouragées, d’autant plus si elles conduisent à la convergence tant espérée des NBIC (domaines qui associent les nanotechnologies, les biotechnologies, l’informatique, les sciences cognitives) » (Robitaille 2011 : 33).

57 « Tabi King, spokeswoman for RGP Prosthetics, a San Diego-based prosthetics research firm. "Today, it's

all about carbon fiber, titanium and suspension. They certainly allow athletes to excel." » (Meyer, The

Associated Press, 19 août 1996).

58 L’avènement d’une médecine d’amélioration, orientée vers la finalité d’optimiser les performances humaines grâce aux technosciences, autant que le développement d’un imaginaire du « posthumain » porté par les militants du mouvement transhumaniste questionnent plus que jamais les frontières entre l’humain, la société et la vie. Les avancées technoscientifiques et biomédicales font entrer inexorablement le vivant en société » (Le Dévédec 2016 : 8).

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classification d’un peu plus près et tentons de voir comment la place du concept de corps « normal », oriente et influence cette classification.

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