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B. Régulation de l’activité Caspase

1. Régulation de l’activité des Caspases apoptotiques

1.2. Régulation par interactions protéines/protéines

En plus des modifications post-traductionnelles, de nombreuses protéines, de par la nature des interactions, peuvent moduler l’activité des Caspases au cours de l’apoptose.

1.2.1. Régulation par les inhibiteurs endogènes

Un autre niveau de régulation implique une inhibition spécifique des Caspases par des inhibiteurs endogènes. Les Inhibitors of apoptosis proteins (IAPs) régulent l’apoptose par une inhibition directe des Caspases.

Les gènes codant les IAPs ont été identifiés par Lois Miller et ses collègues chez le baculovirus puiqu’ils étaient capables de protéger les cellules infectées de la mort et parce qu’ils amélioraient la réplication du virus (Crook N.E. et al., 1993 ; Yang Y.L. et al., 2000). Des études génétiques et d’alignement de séquences ont ensuite permis l’identification d’un groupe de IAPs cellulaires chez la levure, C.elegans, Drosophilia ainsi que chez les vertébrés et dans de nombreux virus. Huit IAPs distincts sont identifiés chez l’homme : NAIP, c-IAP-1 et -2, Survivin, Bruce, ML-IAP, IPL2 ainsi que XIAP, les structures en domaines de ces IAPs sont présentées en Figure 18 A (Stennicke H.R. et al., 2002). Sur les huit IAPs seulement trois sont capables de se lier directement aux Caspases, cIAP1, cIAP2 et XIAP. En revanche, seulement XIAP peut inhiber l’activité Caspase tandis que les autres peuvent inhiber la mort cellulaire mais pas directement l’activité des Caspases (Troy C.M. et al., 2015). Ces inhibiteurs sont carcactérisés par la

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présence d’au moins un domaine de liaison au Zn2+appelé BIR - baculovirus IAP repeat - et certains membres peuvent également posséder un domaine RING qui leur confèrent une activité d’E3 ubiquitine Ligase (Figure 18A). Composé de trois domaines BIR et d’un domaine RING en C-ter, XIAP est l’inhibiteur le plus puissant des IAPs et il inhibe efficacement les CASP-3, -7 et -9 (Deveraux Q.L. et al., 1999).. Tandis que XIAP inhibe la CASP-3 par une interaction directe de son domaine BIR2 avec le site actif de l’enzyme, XIAP inhibe la CASP-9 en formant un hétérodimère avec le monomère de CASP-9 (Shiozaki E.N. et al., 2003). Plus précisément, Le domaine BIR3 de XIAP se lie à la pc-9 en interagissant avec le brin b6, hélice 5 et la longue boucle 6. Ainsi, XIAP inhibe la CASP-9 en empêchant l’insertion de la boucle L3 vers le brin b6 qui permet classiquement de former le site actif. XIAP stabilise ainsi l’état inactif par hétérodimérisation (Clark A.C. 2016) (Figure 18B).

Le mécanisme d’inhibition de CASP-3 et -7 par BIR2 résulte d’une restriction de l’accès au substrat conséquence d’une interaction entre la région N-ter flexible de XIAP et du site actif de la protéase. L’inhibition réversible tight binding est expliquée par le blocage du site actif par une structure hélicoïdale en forme de crochet. La région N-ter inter domaine de XIAP se divise en trois zones, la zone « hook », la région linéaire, et « sinker ». Les principales interactions ont lieu entre la région « hook » et la boucle L4 de CASP-3 qui forme le sous-site S4, cette interaction empêche donc la fixation du substrat. La zone « sinker » ainsi que le domaine BIR2 permettent la stabilisation du complexe (Figure 18C). Ainsi, la fonction primaire du domaine BIR est d’aligner et stabiliser l’interaction entre l’inhibiteur et la protéase. Ce mode d’inhibition de XIAP peut être contré par SMAC/DIABLO qui est libéré en même temps que le cytochrome c suite à la PMEM (Stennicke H.R. et al., 2002).

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Figure 18. Inhibition des Caspases-3, -7 et -9 par XIAP.

(A) Organisation en domaines des IAPs. Les IAPs sont caractérisés par la présence d’au moins un domaine BIR qui peut être associé à d’autre domaines au sein de la séquence. Le domaine UBC est un domaine ubiquitine E2 et le domaine RING est homologue à l’adpatateur ubiquitin E3. Le domaine NATCH est une unité de liaison à l’ATP. Les valeurs des nombres indiquent la taille de chaque membre de cette famille. Les structures de NAIP et Bruce ont été tronquées pour simplifier la représentation Stennicke H.R. et al., 2002. (B) Sur la droite est représentée la cavité centrale de la CASP-9 en rouge avec la longue boucle 6 (Code PDB : 1JXQ) tandis sur la gauche est représenté l’hétérodimère de CASP-9 et XIAP résultant de la fixation du domaine BIR3 au niveau de la cavité centrale de la CASP-9 (Code PDB : INW9) Clark A.C. 2016. (C) Inhibition de la CASP-3 par interaction avec le domaine BIR2 au niveau du site actif de l’enzyme. Pour les détails du mécanisme se référer au paragraphe ci-dessus.

1.2.2. Régulation de l’activité par des inhibiteurs naturels

En plus de ces régulateurs endogènes il existe des inhibiteurs viraux « Cowpox virus CrmA » et « baculovirus p35 » qui sont produits précocement dans le processus d’infection afin d’inhiber la réponse Caspase-dépendante chez l’hôte. P35 est une protéine de baculovirus qui bloque la réponse apoptotique dans les cellules d’insectes suite à une infection virale. Bien qu’il n’existe pas d’homologue dans les virus infectant les cellules de mammifères, les équipes de recherche ont employé des stratégies d’expressions ectopiques afin d’étudier les points de contrôle de l’apoptose. Ainsi, contrairement à l’action sélective de XIAP, les inhibiteurs appartenant à la famille p35 inhibent presque toutes les Caspases (Jabbour A.M. et al., 2002). Le mécanisme d’action de p35 permet une inactivation de l’enzyme basée sur le mécanisme. En effet, dans une première étape, p35 est reconnu comme un substrat par une enzyme cible telle que CASP-8 qui attaque au niveau d’un résidu Asp sur une boucle réactive semblable à

A B

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une boucle du site actif des Caspases. Cette attaque permet la formation d’un thioester et le clivage de p35 qui induit à son tour un réarrangement structural de p35 au niveau des résidus 88-102 de la boucle réactive. Ces changements de conformations permettent la libération du brin N-ter qui contient une résidus Cys-2 essentiel. En effet, dans la structure native, ce résidu est enfoui dans un sillon profond situé en surface de la protéine. Suite au clivage de p35 et à la libération du fragment N-ter, Cys-2 se place au niveau du site catalytique de CASP-8 et séquestre l’Histidine catalytique par établissement d’une liaison hydrogène, empêchant son accessibilité au solvant et abolissant ainsi l’activité catalytique de CASP-8 (Figure 19) (Riedl S.J.

et al., 2001).

La famille des Serpines englobe beaucoup de protéines dans le règne Eucaryote. Bien que le nom serpin fasse initialement référence à des inhibiteurs de protéases à Sérine, des effets inactivateurs sur des protéases à Cystéines ont également été rapportés. Un exemple de cette

cross-réactivité est CrmA qui bloque l’activité de quelques Caspases bien qu’il soit

physiologiquement actif contre les CASP-1 et -8 seulement. D’ailleurs, il se lie et inhibe très efficacement ces deux Caspases avec des constantes d’inhibition, illustrées par les valeurs de Ki, qui rendent compte de l’affinité de l’inhibiteur pour l’enzyme, de respectivement 10 pM et 300 pM. Par conséquent, CrmA peut prévenir du clivage et de la sécrétion d’IL-1b et d’IL-18 par CASP-1 et de l’apoptose induite par les récepteurs de mort régit par la CASP-8 (Callus B.A.

et al., 2007). En position P1, CrmA possède un Asp, ce qui en fait un très bon inhibiteur de

Caspases. CrmA accommode CASP-1 et -8 mais une insertion de neuf résidus au niveau de la boucle L4 dans les caspases exécutrices, empêche sa fixation au CASP-3 et -7. CrmA est également incapable d’inhiber la mort par la voie mitochondriale in vivo, bien qu’il soit capable d’inhiber CASP-9 in vitro, ceci pouvant être expliqué par des états conformationnels différents de la protéase en condition physiologique. Le mécanisme d’action de CrmA est similaire à celui observé pour l’inhibition des protéases à Sérines et semble également proche de celui observé pour p35 avec une inactivation irréversible basée sur le mécanisme. La séquence pseudo substrat de CrmA, LVAD, se lie au site actif des Caspases, la suite du mécanisme n’est pas encore totalement claire, mais une liaison thioester pourrait être formée et pourrait conduire à une dissociation des grandes et des petites sous-unités (Ekert P.G. et al., 1999 ; Stennicke H.R. et al., 2002;).

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Figure 19. Mécanisme d’action de l’inhibiteur naturel p35 sur la CASP-8.

(a) La boucle reactive du (RSL) de p35 (en rouge) s’étend en périphérie de toute la protéine, ce qui lui permet d’interagir avec le site actif de la CASP-8. Cette boucle est reconnu comme un substrat au niveau du site actif de CASP-8, le clivage résulte en un réarrangement structural qui permet le déplacement du brin N-terminal (représenté en rose). Les surface des larges et petites sous-unités de la CASP-8 sont respectivement colorées en gris et cyan. P35 se lie comme un inhibiteur classique au niveau du site actif avec une liaison hydrogène établie entre la Cys-2 de p35 et l’histidine catalytique de la CASP-8. D’après Stennicke H.R. et al., 2002 .