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Carte 5 : La figuration du bassin hydrographique du Yangzi dans le monde

I.3. Les contraintes topographiques dans l’organisation de l’espace

I.3.5. La région des « bols de riz » : crues et fertilités

Le paysage de cette région est dessiné par les montagnes basses, les collines, les bassins et les plaines, qui font partie du troisième palier topographique de la géographie chinoise ; elle s’inscrit dans les cours moyen et inférieur du Yangzi. Il s’agit d’éléments tabulaires ne dépassant pas les 1 000 m d’altitude (à l’exception de quelques collines et montagnes basses, qui peuvent s’élever jusqu’à 1 500 m). En aval de Yichang, où commencent les terres basses

80 véritables, le Yangzi, quittant les montagnes disséquées aux parois rocheuses, rencontre les bassins lacustres de son cours moyen.

Dominées par des collines et des montagnes peu élevées, les plaines n’occupent qu’une proportion réduite soit environ 20 % de la surface totale du moyen Yangzi. En effet, les zones vitales de la « région lacustre » : la plaine du lac Dongting (Hunan), la plaine de Jianghan (Hubei) et la plaine du lac Poyang (Jiangxi) sont enveloppées de tous côtés par des montagnes et des collines (sauf dans l’ouest de la plaine de Jianghan, où se mêlent les basses montagnes, les zones de collines, les bassins et les vallées). Souvent, les montagnes du moyen Yangzi s’organisent en massifs discontinus d’orientation sud-ouest / nord-est et pénètrent des zones de collines et quelques bassins. Cette disposition permet la création d’un ensemble de paysages collinaires dit collines du Jiangnan. Sur une superficie d’environ 370 000 km2

, située au sud du Yangzi et au nord des monts Lingnan, à l’est des monts Xuefeng et à l’ouest des monts Wuyi, les collines du Jiangnan englobent la majorité du territoire du Hunan et du Jiangxi, le sud-ouest du Jiangsu et l’ouest du Zhejiang144.

Les collines du Jiangnan sont couvertes de terres rouges fertiles. Composées de grès schisteux stratifiés, elles sont souvent en pente douce. Entre les lignes de crête se trouvent fréquemment des bassins de taille réduite qui forment une sorte de ruban de terres basses, comme le bassin de Ganzhou au Jiangxi et celui de Changsha au Hunan. Ils s’étendent sur une longueur variant de 20 à 50 km (le plus grand atteint 100 km) suivant la direction nord-est / sud-ounord-est. Tous disposent d’un réseau hydrographique. En général, les bassins des collines du Jiangnan sont densément peuplés grâce à leurs terres fertiles qui favorisent les activités agraires. En outre, la culture en terrasses est très pratiquée dans les zones collinaires. L’ensemble de cette région offre une production agricole considérable, qui complète les rendements des plaines lacustres du Yangzi.

Regroupées sur une faible portion de cette région, les basses plaines lacustres, et leur prolongement le long des grandes vallées, constituent un cœur actif et peuplé. La riziculture prédomine au Hunan, au Jiangxi et dans le sud-est du Hubei grâce à l’abondance en plaines lacustres ; ainsi l’agriculture irriguée fondée sur le riz inondé produit un haut rendement. Le climat de la zone « subtropicale » offre deux récoltes de riz par an. La terre fertile sert également à la culture du coton, ainsi qu’à la culture de divers produits alimentaires comme les haricots et les céréales.

81 Des millions de gens vivent sur les rives des lacs en profitant du sol enrichi par le limon des lacs qui y est très fertile. Mais cette fertilité est autant un problème qu’un avantage. Certaines années, les régimes d’anomalies pluviométriques, dus à la conjonction d’un printemps particulièrement arrosé, qui contribue à saturer les sols et à une mousson estivale du Nord-Est qui provoque les « pluies des prunes » d’une durée plus longue qu’à l’accoutumée, entraînent des précipitations qui peuvent atteindre jusqu’à 200 % par rapport à une saison normale. Les grands lacs de Dongting et de Poyang, qui devraient jouer leur rôle d’amortisseurs et de régulateurs de crues (autrefois, ils servaient de déversoirs pour absorber le trop plein de débits des crues), sont eux-mêmes régulièrement envahis par les crues du Yangzi et de ses affluents du fait du colmatage naturel et de la poldérisation anthropique qui ont fortement réduit la surface de ces lacs. En effet, depuis des années, les terres agricoles ont gagné sur les grands lacs, des milliers d’hectares ont été récupérés, et la zone est sillonnée de plusieurs milliers de fossés d’irrigation et de drainage. Dans le Hunan, le lac Dongting a vu sa superficie réduite de deux tiers depuis 1950. Sa surface de 6 000 km2 en 1825 n’est plus que de 2 625 km2 aujourd’hui145

. L’assèchement du lac est l’une des principales menaces qui pèsent sur l’équilibre naturel du moyen Yangzi.

145

YANG Zaitian, dir., Hunan xiangtu dili [La géographie du Hunan], Pékin, Zhongguo wenshi chubanshe, 2005, pp. 68-69.

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Illustration 2 : L’évolution du lac Dongting du XIVe au XXe siècles

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I.3.6. La région deltaïque : le cœur du Yangzi

Dans le cours inférieur du Yangzi, les terres planes de l’Anhui, du Jiangsu et de Shanghai, qui ne dépassent jamais 50 m d’altitude, se succèdent en suivant l’écoulement du Yangzi vers la mer. Le bassin du bas Yangzi est composé en grande partie par la plaine du lac Cao (appelée aussi plaine de l’Anhui central) et les terres deltaïques du grand fleuve. Ces dernières sont d’autant plus importantes, qu’elles concentrent une population considérable d’une densité très forte.

Du fait de la turbulence de la mer et de la forte charge en alluvions charriées au cours des siècles par le Yangzi et le fleuve Qiantang, les dépôts sédimentaires se sont accumulés dans l’embouchure du fleuve en formant la plus grande avancée de terre triangulaire chinoise sur la mer : le delta du Yangzi. Chaque année, le Yangzi déverse près de 1 000 milliards de mètres cubes d’eau dans la mer de Chine orientale et charrie des milliers de tonnes de limon au large des côtes en formant deux amas sédimentaires nord et sud. S’étendant de Yangzhou jusqu’à Rudong, l’amas septentrional forme la plaine de Lixiahe (plaine alluvionnaire créée par les dépôts sédimentaires lors des crues du fleuve Huai et du Yangzi), qui s’étale sur une superficie d’environ 140 000 km2. L’amas méridional débute à Jiangyin et s’allonge vers le sud-est jusqu’au district de Caojin de Shanghai. Il s’agglomère avec l’amas sédimentaire déposé par le fleuve Qiantang, pour former la plaine du lac Tai (30 000 km2), qui s’abaisse de tous les côtés vers le centre146.

Concernant la délimitation du périmètre du delta du Yangzi, il existe trois façons possibles de la déterminer. D’abord, morphologiquement, le delta du Yangzi englobe un espace d’environ 50 000 km2

et son extrémité occidentale se situe à Yizheng (une ville qui appartient à la municipalité de Yangzhou). Traditionnellement, les géographes chinois considèrent que le delta est délimité au nord par l’axe Yangzhou-Jiangdu-Taizhou-Haian-Pincha, à l’ouest par l’axe Zhenjiang-monts Mao, au sud par l’axe monts Tianmu-baie de Hangzhou, et à l’est, par la mer Jaune et la mer de Chine orientale147.

146 Changjiang liuyu dituji [Atlas du bassin du Yangzi], op. cit., p. 248.

147

REN Meiè, Zhongguo de sanda sanjiaozhou [Les trois grandes régions deltaïques chinoises], Pékin, Gaodeng jiaoyu chubanshe, 1994, p. 126.

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