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5.3 - Réalités de l’EPS dans nos lycées face aux besoins de l’adolescent :

Ces occasions d'apprentissages du domaine affectif, qui aident l'adolescent par exemple à exprimer ses émotions et à se socialiser, restent malheureusement très peu valorisées, pas seulement chez nous en Algérie d'ailleurs. Alors même que l'école peine à trouver les moyens de réalisation des objectifs éducatifs de ce domaine affectif, pourtant

considéré comme fondamental en théorie, on délaisse l'apport spécifique et qui semble irremplaçable de l'EPS.

Dans le système scolaire, on se préoccupe en fait non pas de l’expression des adolescents, mais beaucoup plus d’une discipline collective, perçue sous l’angle du silence absolu, propice au travail intellectuel, à plus forte raison au lycée, où il s’agit de préparer l’examen du Baccalauréat. Les manifestations de type émotionnel, comme pousser par exemple un cri de joie, ou montrer de la colère… sont durement réprimées et rejetées hors du champ des préoccupations de l’institution. Seules les Activités Physiques et Sportives offrent une sorte de « soupape de sécurité » permettant aux adolescents de souffler et de retrouver un équilibre par rapport au confinement en classe : pouvoir se dépenser, parler fort, rire…

D’aucuns voudraient imposer le silence même en EPS, faisant parfois des jugements subjectifs dirigés vers l’enseignant, dans le genre : « un tel est incapable de tenir ses élèves », parce que ceux-ci gênent par leurs manifestations bruyantes les salles de classe trop proches des "terrains" de Sport, généralement la cour de récréation de l’établissement. On a tendance ainsi à enfermer également l’enseignant dans un espace réduit, dans le silence et dans un rôle de transmission de savoirs et de savoir-faire, l'amenant ainsi à reproduire et suivre le moule des pratiques scolaires ambiantes, à dominante théorique.

De l’espace il y en a pourtant dans les lycées, mais très peu d’installations sportives obéissant aux normes officielles. Il n’existe aucune typologie pour des installations dans nos établissements scolaires; l’infrastructure se résume en général à un espace similaire à celui d’un terrain de hand-ball, aménagé de façon rudimentaire et accompagné au mieux d’une piste de course autour, et d’une aire avoisinante prévue pour les lancers. Quant il s’agit de petites cours d’établissements d’enseignement moyen transformés parfois en lycées, on y trouve généralement des terrains de basket-ball au milieu de la cour de récréation, sans plus. La plupart des APS ont besoin d’un espace plus grand, qui pourrait permettre aux adolescents de mieux se dépenser, mieux respirer et se défouler. Quant aux moyens matériels, ils restent insuffisants : quelques ballons, sifflets et chronomètres pour les enseignants, des poids de lancer, des haies, parfois un décamètre pour mesurer les performances de sauts et lancers.

L’Algérie possède par ailleurs des programmes officiels pour l’EPS, mais ils restent inappliqués à l’école primaire, inapplicables dans les enseignements moyen et secondaire parce que trop ambitieux par rapport à la réalité! Les derniers programmes de 2005 peuvent être d’ailleurs consultés dans tous les établissements concernés, où ils font plus partie du décor des bureaux ou bibliothèques que d’enseignements réels, en raison de la distance existant entre leur contenu et la réalité, notamment le manque d’infrastructures (par exemple la gymnastique fait partie intégrante d’un programme pour lequel il n’existe pas de salles et de matériel adéquats).

Dans ces conditions d’un système dominé par des enseignements à caractère intellectuel, d’un horaire et de moyens matériels réduits, les enseignants d’EPS qui arrivent à s’adapter tant bien que mal assurent l’apprentissage de quelques gestes techniques et règles de jeux sportifs. Ils se tournent la plupart du temps vers des

activités d’animation, où dominent le jeu, la compétition et les activités collectives, mais dans un nombre parfois très réduit d’activités, faute d’infrastructures, tels que un à deux sports collectifs, généralement du Basket-ball ou du Hand-ball. Dans des séances de deux heures suivies dans l’emploi du temps hebdomadaire, des activités athlétiques durant la première heure constituent une sorte de préparation physique avant de passer aux sports collectifs, généralement plus attendus par les élèves. Malgré les difficultés rencontrées, l’adaptation des enseignants semble ainsi suivre les besoins des élèves aux plans individuel et collectif, permettant l’expression et les interactions de groupe. Cela est surtout remarquable dans des établissements où les conditions sont favorables.

5.4 – L’ambiance d’un lycée " sportif " :

Il semble d’après l’exemple offert par certains lycées que c’est l’état d’esprit dominant et l’attitude pédagogique de l’encadrement en général, et des enseignants d’EPS en particulier, qui règlent l’efficacité de l’action éducative.

L’observation de cas d’établissements "sportifs" et d’améliorations matérielles d’actualité, donnent l’espoir d’un renouveau dans la prise en charge d’adolescents qui montrent eux-mêmes leur adhésion quand ils sont bien encadrés : Il se crée en effet un climat humain particulièrement dynamique dans les établissements où règne une ambiance sportive.

Insistons d’abord sur l’avertissement préalable: il s’agit là de cas de lycées relativement bien équipés et encadrés, et que nous avons observés réellement sur le terrain. Ils existent, mais en nombre très limité. Parfois même il s’agit de lycées où l’espace est réduit et les moyens rudimentaires, mais où le dynamisme des enseignants se communique à leurs élèves, et crée une vie sportive qui va au-delà des horaires de cours.

En effet, non seulement les séances d’EPS, mais aussi l’animation sportive complémentaire sous forme de compétitions interclasses généralement, offrent la possibilité d’aller respirer en plein air, de crier sa joie ou sa colère à des occasions de réussite ou d’échec, et de se décharger ainsi des tensions dues à l’accumulation d’énergie physique et au stress du bachotage, ou des problèmes plus ou moins nombreux et complexes de la vie familiale et sociale. Les élèves qui en bénéficient dans certains lycées aux conditions particulières sont relativement calmes et témoignent une certaine confiance à leurs enseignants à travers leurs demandes ou leurs confidences. Les proviseurs des lycées où l’EPS et l’animation sportive fonctionnent bien, et que nous avons pu rencontrer, témoignent de la bonne conduite de leurs élèves, et l’attribuent à l’ambiance sportive de leurs établissements. Ils affirment que les élèves sont moins agressifs, plus disponibles dans leurs relations avec l’encadrement pédagogique. Mieux encore dans quelques cas, rares il faut le reconnaitre, mais disposant d’enseignants et de moyens matériels suffisants, les adolescents apprennent à aimer le lycée ; et cela se remarque à leurs participations à des activités complémentaires, comme des compétitions sportives, des excursions, ou leur simple présence dans l’établissement en dehors des cours… Il faut avoir vu des équipes

opposées dans des compétitions interclasses dans un établissement où l’EPS et le Sport sont valorisés, où les enseignants sont disponibles, où les surveillants ou adjoints d’éducation apportent parfois leur appui, pour comprendre et apprécier l’ambiance joyeuse de la confrontation. On n’imagine pas que les résultats puissent aller parfois au-delà d’une bonne ambiance de vie scolaire ; c’est pourtant le cas dans certaines situations où la paix revient, par exemple, dans un établissement ayant connu un climat de violence (lire les articles de M. Bensafi au sujet du lycée Chérif Tlemçani, dans le Quotidien d’Oran des 03 février 2011, p. 21, et 20 mars 2011, p.16).

Dans de tels établissements, habitués à une bonne ambiance sportive, se crée un climat de bonnes relations entre les individus, que l’on observe dans l’ensemble des activités, mais plus particulièrement en EPS : Même dispensés et ne pratiquant pas les activités physiques, les élèves viennent au cours, s’intègrent aux groupes, se confient à l’enseignant… Beaucoup d’élèves ont ainsi un rapport plus affectif que participatif à l’EPS ; bien entendu, pour certains d’entre eux, être présent au cours sans travailler constitue un refuge commode qui n’oblige pas à l’effort physique ou intellectuel, et peut être perçu comme une fuite des activités scolaires ; l’enseignant le ressent parfois et s’arme de plus de vigilance vis-à-vis des dispenses de complaisance.

Il faut reconnaitre que l’absentéisme existe aussi. Cependant chez la majorité des membres de l’institution scolaire, élèves et encadrement, la réinstauration des épreuves d’éducation physique au baccalauréat a suscité plus de détermination et de discipline, amenant à faire plus d’efforts dans la fourniture des moyens pédagogiques, l’organisation et le suivi des cours d’EPS. Les adolescents eux-mêmes participent parfois à creuser des fosses de réception au saut en longueur, à nettoyer des salles de gymnastique, à se solidariser pour l’achat de matériel ou tenues (les cas de cotisation pour acheter des ballons ou des maillots sont assez répandus)… Les résultats sont parfois étonnamment efficaces, certains chefs d’établissements et enseignants veillant jalousement à la réussite objective de leurs élèves : très peu de dispenses médicales [16], et pour des motifs de maladies plus ou moins graves.

5.5 – Complémentarité des APS dans le développement des capacités