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Chapitre 4 Analyse de la lecture interactive Les oreilles du roi

4.3. DISCUSSION ENTRE L’ENFANT ET L’ADULTE AUTOUR DU RÉCIT

4.3.1. Questions auxquelles l’enfant répond

« Est-ce qu’i’ sort de sa maison lui? »

La première question cœur à laquelle l’enfant a répondu est « Est-ce qu’i’ sort de sa maison lui? ». Cette question a été soulevée en début de lecture alors que l’adulte avait lu : « Le roi Boyan ne sortait jamais de son château. Oh non! Jamais, jamais, il ne sortait de son château. Lorsqu’il voulait se faire couper les cheveux… ». L’adulte a interrompu sa lecture et voici l’échange qui a eu lieu entre l’adulte et l’enfant :

Extrait 1 :

1. A. Qu’est-ce qu’on fait nous quand on a besoin de faire couper nos cheveux? Où on va? Tu le sais! Tu y es allée avec Mamy la dernière fois. Où on va?

2. E. À un coiffeur.

3. A. On va à un coiffeur. On sort de notre maison et on va chez un coiffeur. Le roi lui, est-ce qu’il sort de sa maison? Le roi très très triste… 4. E. (Silence.)

5. A. Est-ce qu’i’ sort de sa maison lui?

74 Il est à noter qu’il s’agit de la quatrième lecture interactive de ce livre que l’adulte a fait avec l’enfant.

75 Les catégories d’interactions, de même que le procédé menant à leur identification, ont été définies dans la

6. E. Non.

7. A. Alors, quand il veut faire couper ses cheveux, il appelle un coiffeur pour qu’il vienne chez lui dans sa maison.

Dans l’extrait 1, on remarque que la question cœur est une question fermée de type oui/non qui a été posée à la ligne 5. Plusieurs questions ont été posées et l’adulte a utilisé les connaissances sur le monde de l’enfant pour affirmer que le roi ne fait pas la même chose que l’enfant lorsqu’il désire aller chez le coiffeur. Dans cet échange, l’enfant dit : « [On va] à un coiffeur » (ligne 2) et « Non, [il ne sort pas de chez lui] » (ligne 6). On remarque que l’adulte amène l’enfant à nommer partiellement la situation initiale, puisque c’est l’adulte qui l’énonce en grande partie dans ses questions. L’adulte, dans la discussion, nomme l’émotion négative du roi (ligne 3) et les prémisses de la tentative d’action 1, c’est-à-dire le fait qu’il fait venir les coiffeurs chez lui (ligne 7).

L’adulte crée les liens causaux intercomposantes pour l’enfant et explicite, à la ligne 7, le fait que le roi fait venir les coiffeurs à la maison puisqu’il ne sort pas de chez lui.

On remarque également, à la ligne 3, que l’adulte nomme l’état interne émotionnel du roi, soit le fait qu’il est très triste. Cette tristesse est causalement liée à son problème, problème qui n’a pas été soulevé par les questions. Pour cela, il aurait fallu demander à l’enfant « Comment ça se fait? ».

« Le roi a des oreilles de ch… »

La seconde question cœur est un énoncé à compléter où l’enfant a eu à terminer la phrase « Le roi a des oreilles de ch… ». La question est posée à l’enfant alors que l’adulte a lu la tentative d’action 1, le sous-problème 1 et la tentative d’action 2 : « En vérité, le roi Boyan ne voulait pas

que les coiffeurs retournent chez eux. Il les retenait prisonniers dans son château et leur confiait différentes tâches. Certains devaient traire les vaches, d’autres barater le beurre et d’autres encore prendre soin des cochons. ». Voici ce que l’adulte a demandé à l’enfant :

Extrait 2 :

1. A. « Le roi a des oreilles de ch… » 2. E. de chèvre!

L’adulte, à la ligne 1, amorce une énonciation simple où l’enfant n’a qu’à compléter la phrase. Cette phrase clé, qui reviendra plus tard dans la lecture du livre, présente la problématique du récit. La façon dont la question a été formulée est plus simple, puisqu’il s’agit d’une énonciation fermée rétrospective où l’adulte amorce l’énonciation du problème, réduisant ainsi l’inférence à construire par l’enfant pour énoncer le problème par soi-même. Le fait que l’enfant, en énonçant que « [Le roi a des oreilles] de chèvre », ait terminé l’énoncé de l’adulte, démontre qu’elle est en train de construire la problématique, mais ne démontre pas qu’elle l’ait vraiment comprise. Ainsi, on considère ici que c’est principalement l’adulte, et non l’enfant, qui a énoncé le problème du roi.

Dans l’extrait, la réponse formulée ainsi ne démontre pas clairement que l’enfant ait fait des relations causales. On verra, par la suite, que la complétion de cette phrase énoncée par l’adulte prendra une forme de ritournelle dans les échanges à venir. Pour s’assurer que l’enfant ait bien construit le problème, l’adulte aurait dû questionner l’enfant davantage en lui demandant « Qu’est-ce que ça lui fait d’avoir des oreilles de chèvre? ».

En ce qui a trait à la théorie de l’esprit, dans cet extrait, ni l’enfant ni l’adulte n’ont fait ressortir d’état interne.

« Est-ce qu’i’ veut que tout le monde sache son secret le roi? »

La troisième question a été posée à la suite de la précédente. La question cœur posée ici est en lien avec le but : « Est-ce qu’i’ veut que tout le monde sache son secret le roi? ». Celle-ci a été extraite de cette discussion entre l’adulte et l’enfant :

Extrait 3 :

1. E. (En chantant.) « Le roi a des oreilles de chèvre. »

2. A. Ça là, c’est son grand grand grand secret. Nous on le connait : le roi a des oreilles de chèvre. Est-ce qu’i’ veut que tout le monde sache son secret le roi?

3. E. Non.

4. A. Hein? Un secret est-ce qu’on le dit à tout le monde ou on le garde pour soi?

5. E. (En chantant.) « Le roi a des oreilles de chèvre. »

6. A. Chut! C’est un secret. Est-ce que les secrets on les dit à tout le monde… 7. E. Oui.

8. A. … ou on les garde pour soi? 9. E. On les garde pour soi.

10. A. Oui. C’est un secret. Le roi est-ce qu’i’ veut que tout le monde le sache qu’il a des oreilles de chèvre?

11. E. Hum, hum.

12. A. Pas du tout. Alors, quand les coiffeurs viennent à la maison… 13. E. Il est content.

14. A. Il est content de voir les gens. P’is là, les coiffeurs ils viennent couper ses cheveux. Est-ce qu’ils les voient ses oreilles de chèvre?

15. E. Hum.

16. A. Est-ce qu’i’ veut, le roi, que les coiffeurs i’ retournent dans le village p’is qu’i’ disent à tout le monde que le roi a des oreilles de chèvre? 17. E. Non.

On remarque que l’adulte a posé à la ligne 2 la question à l’enfant, mais a senti le besoin de contextualiser ce qu’est un secret en mobilisant ses connaissances sur le monde. Cette question fermée de type oui/non vise à faire ressortir le but du roi, c’est-à-dire son désir de cacher ses oreilles, et ce, après avoir explicitement nommé le problème du roi, soit ses oreilles de chèvre (lignes 1, 2 et 5). Si on extrait les réponses de l’enfant, on remarque qu’elle dit : « Non [il ne veut pas que tout le monde sache son secret.] » (ligne 3), « [Les secrets] on les garde pour soi. » (ligne 9) et « Non, [il ne veut pas que les coiffeurs retournent dans le village et disent à tout le monde que le roi a des oreilles de chèvre.] » (ligne 17). On peut remarquer qu’à la question « Est- ce que les secrets on les dit à tout le monde? » (ligne 6), l’enfant répond, de prime abord, « oui » (ligne 7), puis, sous l’insistance explicite de l’adulte (ligne 8), se ravise à la ligne 9. Les réponses

de l’enfant nous permettent de croire qu’elle circonscrit le secret sans toutefois l’envisager réellement comme un but, c’est-à-dire comme une conséquence causale du problème qui dirigera les actions à venir.

Dans cette unité de sens, c’est davantage l’adulte, par ses questions, qui crée le lien causal intercomposantes entre le problème et le but.

En ce qui a trait à la théorie de l’esprit, l’adulte, par ses questions qui tournent autour du but, amène à réfléchir sur l’état interne de type intentionnel du roi, soit son intention de garder son secret pour lui et de cacher ses oreilles. L’adulte, en demandant à l’enfant si les coiffeurs, lorsqu’ils viennent couper les cheveux du roi, voient ses oreilles, soulève l’état physique qu’est le fait de voir (ligne 14). En questionnant l’enfant, aux lignes 2 et 10 de l’extrait 3 sur l’état intentionnel du roi de préserver son secret, l’adulte visait une discussion (ligne 14) sur ce que pense le roi à propos des coiffeurs et de son secret, l’adulte vise l’état interne de type épistémique, c’est-à-dire la connaissance ou la non-connaissance de la pensée des coiffeurs à propos du roi. Il s’agit ici d’une fausse croyance de premier ordre puisque, même si le lecteur sait le secret, les personnages de l’histoire, les coiffeurs, ne le savent pas encore. Finalement, l’enfant, en affirmant à la ligne 13 « il est content », amène un état interne de type émotionnel du roi. Cette réponse de l’enfant permet toutefois de penser qu’elle n’a ni construit l’état interne de type intentionnel du roi de vouloir se cacher (comme le soulignera également l’extrait 4 suivant), ni l’état interne de type épistémique marquant la non-connaissance des coiffeurs du secret du roi avant d’avoir été conviés au château.

« Est-ce que le roi i’ veut que les coiffeurs aillent dire son secret à tout le monde? »

La quatrième question cœur analysée est celle où l’adulte demande à l’enfant « Est-ce que le roi i’ veut que les coiffeurs aillent dire son secret à tout le monde? ». Cette question vise le but du

roi, soit le fait de cacher ses oreilles. La question a été posée lors d’une longue discussion portant sur le premier sous-problème et la tentative d’action 2, c’est-à-dire le fait que les coiffeurs aient vu les oreilles du roi, alors ce dernier est dans l’obligation de les séquestrer. La pénurie de coiffeurs n’a pas encore été énoncée. Voici l’unité de sens présentant la discussion entre l’adulte et l’enfant :

Extrait 4 :

1. A. Est-ce que le roi i’ veut que les coiffeurs aillent dire son secret à tout le monde?

2. E. Oui.

3. A. I’ veut? Non! Un secret on garde ça pour soi. Alors, i’ garde tous les coiffeurs prisonniers dans son château.

On peut remarquer que la question cœur a été posée à l’enfant est une question fermée de type oui/non. La question sert la construction du but. Cependant, la réponse de l’enfant à la ligne 2 : « Oui, [le roi veut que les coiffeurs aillent dire son secret à tout le monde] », nous laisse croire que la construction du but n’est pas réalisée. À la ligne 3, l’adulte reprend l’enfant en énonçant la bonne réponse.

C’est à la ligne 3 que l’adulte crée un lien causal transcomposantes unissant la problématique du roi et l’émotion négative qui en découle avec son but et la tentative d’action 2. Le roi a un secret (problème), ce qui le rend honteux (émotion négative à inférer), alors il décide de le cacher (but) et de séquestrer ceux qui le voient (tentative d’action 2).

En ce qui a trait à la théorie de l’esprit, en énonçant sa question, l’adulte met de l’avant l’état interne intentionnel du roi, c’est-à-dire son intention de garder son secret (lignes 1 et 3).

« Les coiffeurs, i’ veulent plus aller chez le roi. Comment ça se fait? »

La cinquième question cœur qui a été posée à l’enfant est « Les coiffeurs, i’ veulent plus aller chez le roi. Comment ça se fait? ». La question a été posée à la suite de la lecture d’un extrait de l’album qui met de l’avant le sous-problème 2, c’est-à-dire la pénurie de coiffeurs. Voici l’extrait : « Puis arriva le jour où le roi exigea une nouvelle coupe de cheveux. Un coiffeur fut convoqué, mais personne n’est venu. ». Immédiatement après, l’adulte a entamé la discussion comme suit :

Extrait 5 :

La question cœur est une question ouverte de type rétrospective qui vise la tentative d’action 2, c’est-à-dire le fait que le roi séquestre les coiffeurs. On remarque que l’adulte a décidé de décortiquer la question en posant deux questions fermées (lignes 1 et 3) dans le but de construire la cause, de manière rétrospective, qui permet de comprendre pourquoi les coiffeurs ne veulent plus aller chez le roi. En décortiquant la question, l’adulte empêche l’enfant de faire les liens causaux intercomposantes puisque, dans le récit, la tentative d’action 2 (la séquestration des coiffeurs) est la cause de la pénurie de coiffeurs, qui est le sous-problème 2 venant tout juste d’être lu et que l’adulte nomme à la ligne 1 (« Les coiffeurs, i’ veulent plus y aller chez le roi. »). Aux questions, l’enfant répond « [Les coiffeurs sont mis en] prison. » (ligne 2) et « Non [un nouveau coiffeur ne va pas venir]. » (ligne 4).

L’adulte, à la ligne 1, fait un lien causal intercomposantes entre la tentative d’action 2 et le sous- problème 2. De plus, les réponses de l’enfant aux lignes 2 et 4 permettent de croire qu’elle a compris la tentative d’action 2 et on remarque qu’elle fait un lien causal intracomposante (un nouveau coiffeur ne va pas venir parce que les coiffeurs sont mis en prison). Le fait de poser la

1. A. Les coiffeurs, i’ veulent plus y aller chez le roi. Comment ça se fait? Qu’est-ce qui est arrivé à tous les autres coiffeurs?

2. E. Prison.

3. A. Ils sont prisonniers. Alors là, si j’appelle un nouveau coiffeur et que je lui demande de venir, est-ce qu’il va venir?

question cœur telle que rapportée ici, c’est-à-dire de façon ouverte, aurait possiblement permis à l’enfant de faire le lien causal intercomposantes, du moins si la question ouverte « Les coiffeurs, i’ veulent plus aller chez le roi. Comment ça se fait? » avait été posée de nouveau à la fin de l’échange.

En ce qui a trait à la théorie de l’esprit, la question de l’adulte aux lignes 1 et 3 touche directement un état interne de type intentionnel des coiffeurs, soit leur intention de ne pas aller chez le roi et l’enfant semble manifester sa compréhension de cet état interne conséquente à la tentative d’action 2 énoncée d’ailleurs quand elle dit, à la ligne 2, « prison » et qu’elle affirme, à la ligne 4 de l’extrait, « Non [un nouveau coiffeur ne va pas venir]. ». Cependant, l’énonciation directe de l’état interne de type intentionnel est faite par l’adulte dans ses questions.

« Pourquoi il s’est évanoui? »

La sixième question cœur posée à l’enfant est « Pourquoi il s’est évanoui? ». Cette question a été posée en cours de lecture de la tentative d’action 3. L’adulte a lu : « L’émissaire découvrit qu’il ne restait qu’un seul coiffeur dans tout le royaume. C’était Miro… En voyant arriver l’envoyé du roi, Miro devint blanc comme de la crème à raser et… ». L’adulte interrompt ensuite sa lecture pour poser les questions suivantes :

Extrait 6 :

1. A. Qu’est-ce qu’i’ a fait? 2. E. Évanoui.

3. A. Il s’est évanoui. Est-ce que tu t’évanouis toi aussi? 4. E. (Silence.)

5. A. Pourquoi il s’est évanoui?

6. E. C’est promis qu’on écoute le DVD?

7. A. Et i’ a quelqu’un du château qui lui a demandé de couper les cheveux du roi et il s’est…

8. E. Évanoui.

9. A. Est-ce qu’i’ voulait y aller dans le château couper les cheveux du roi lui?

10. E. Où est le mot évanoui?

11. A. S’évanouir. Est-ce que tu penses qu’il voulait y aller dans le château couper les cheveux?

13. A. Il avait tellement peur qu’il s’est évanoui.

La question cœur, posée à la ligne 5, est une question ouverte rétrospective (« Pourquoi il s’est évanoui? »). Elle visait la mise en relation de la tentative d’action 3 et de l’état physique explicitement nommée (s’évanouir) pour la mise en relief de l’état interne de type émotionnel qu’est la peur et l’état interne de type épistémique à inférer, c’est-à-dire que Miro ne sait pas ce qui se passe au château avec les coiffeurs qui n’en reviennent jamais. Elle a été posée à l’enfant, mais cette dernière a posé, à la ligne 6, une question qui n’était pas en lien avec la lecture. Cette question, « C’est promis qu’on écoute le DVD? », a été retirée des phrases énoncées par l’enfant puisqu’elle n’est pas en lien avec le récit, mais elle apparait tout de même dans cet extrait puisqu’elle influe sur la façon dont la question cœur a été reformulée. En effet, l’adulte a ensuite décortiqué la question ouverte en posant une question fermée de type oui/non à la ligne 9 (« Est- ce qu’i’ voulait y aller dans le château couper les cheveux du roi lui? »). L’adulte a ensuite affirmé, à la ligne 13, « Miro a tellement peur qu’il s’est évanoui ». Il faut aussi mentionner que l’enfant a fait ressortir quelques éléments en mentionnant, à propos de Miro, « [Il s’est] évanoui. » (ligne 2) et « Non, [il ne voulait pas aller dans le château couper les cheveux.] » (ligne 12).

Dans cette unité de sens, l’adulte crée pour l’enfant le lien causal intercomposante unissant la tentative d’action 3 et les états internes émotionnel et épistémique qui sont liés par l’inférence : « Miro a tellement peur qu’il s’est évanoui » (ligne 13). Les réponses de l’enfant laissent croire qu’elle a compris que Miro s’est évanoui et qu’il ne voulait pas aller chez le roi, mais il est impossible de dire si elle a créé un lien causal entre les composantes récurrentes qui lui aurait permis de comprendre la trame narrative de l’histoire, c’est-à-dire que Miro s’est évanoui parce qu’il a peur de ne jamais revenir de chez le roi comme ce fut le cas pour les autres coiffeurs avant lui.

Si l’enfant avait manifesté la compréhension que Miro s’est évanoui et qu’il ne voulait pas aller chez le roi, il aurait été possible de dire, en ce qui a trait à la théorie de l’esprit, qu’elle a identifié un état interne de type épistémique. Cependant, les questions posées par l’adulte permettent à l’enfant d’exprimer l’état physique qu’est le fait de s’évanouir (ligne 2). L’état interne de type intentionnel de Miro, c’est-à-dire son intention de ne pas aller chez le roi (ligne 11) est nommée par l’adulte. L’état interne de type émotionnel de Miro est aussi exprimé par l’adulte (ligne 13).

« Dans le village, est-ce que les gens ils le savent que le roi a des oreilles de chèvre? »

La septième question cœur est « Dans le village, est-ce que les gens ils le savent que le roi a des oreilles de chèvre? ». Cette question qui vise le but du roi, c’est-à-dire l’intention de cacher ses oreilles, a été posée alors que l’adulte venait de lire le sous-problème 3 : « Igor était effrayé à l’idée que les gens du village apprennent ce qu’il avait découvert au sujet du roi. ». Voici la discussion qui a suivi :

Extrait 7 :

1. A. C’est qu’il a des oreilles de chèvre. Dans le village, est-ce que les gens ils le savent que le roi a des oreilles de chèvre?

2. E. Non.

3. A. Personne ne le savait. 4. E. De lion.

5. A. De lion? Tu préfères de lion? 6. E. Oui.

7. A. De lion! Mais lui, maintenant, il le sait. Est-ce qu’il peut le dire aux autres? C’est un secret.

8. E. Non.

9. A. Regarde comment ça a l’air difficile de garder son secret. 10. E. De chèvre.

11. A. De chèvre, ok.

La question cœur est une question fermée de type oui/non qui aurait visé à construire le but du récit si la question « Pourquoi? » y avait été jointe. En l’absence de la demande d’explication qu’aurait pu susciter le « pourquoi », l’adulte exige de l’enfant qu’elle énonce la problématique hiérarchiquement première dans la structure du récit. Cependant, par ses réponses, l’enfant ne parvient pas à en faire ressortir sa compréhension, et ce, même si avec énormément de soutien de l’adulte elle énonce partiellement et indirectement le problème, à la ligne 2, en disant : « Non [les

gens ne savent pas que le roi a des oreilles de chèvre]. » et, à la ligne 8, « Non [il ne peut pas le dire aux autres]. ». Le but identifié dans le récit est que le roi veut cacher ses oreilles de chèvre. Pour que l’enfant réussisse à nommer entièrement et explicitement le but du roi, l’adulte aurait dû demander à l’enfant d’expliquer pourquoi les gens ne savent pas qu’il a des oreilles de chèvre.

La formulation de ses réponses, ainsi que le type de questions posées ne permettent pas