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Chapitre 2 Cadre théorique

2.1. L E DÉVELOPPEMENT DE L’ENFANT TOUT-VENANT

2.1.4. Le développement au stade opératoire

Le stade opératoire, qui débute lorsque l’enfant est environ âgé de sept ans, est marqué par le début des opérations et par la réversibilité des actions. Le développement de la théorie de l’esprit se poursuivra et se raffinera au fil des expériences de l’enfant. C’est vers l’âge de sept ans, à son entrée dans le stade opératoire, que l’enfant sera capable de tenir compte pleinement de la troisième personne. Il coordonne les points de vue, ce qui lui permet de se détacher de ses propres états mentaux pour se considérer lui-même comme une autre personne et se questionner sur sa façon de penser (Bradmetz et Schneider, 1999; Mounoud, 2000; Selman, 1981). C’est ce qu’on appelle tenir compte d’une troisième personne, ce qui se remarque dans le concept de fausse croyance de troisième ordre (Veneziano, 2010). L’enfant énonce une fausse croyance de niveau 3 lorsqu’il est capable de coordonner les points de vue. C’est-à-dire lorsqu’il peut affirmer que le personnage 1 entretient une croyance à propos du personnage 2 qui est divergente de celle du personnage 2 (Veneziano, 2002, 2005, 2010)37. Ainsi, il énonce les croyances des deux personnages, quoiqu’elles soient différentes, les coordonnent entre elles ainsi qu’aux siennes.

37 L’expression de la fausse croyance de troisième ordre se distingue de celle de deuxième ordre par le fait que, en

plus de se prononcer sur ce que le personnage 1 pense de ce que pense le personnage 2 (niveau 2), l’enfant coordonne maintenant sa propre pensée par rapport à la situation vécue par les personnages à celle du personnage 1 puis à celle du personnage 2. Par exemple, dans le test de fausse croyance présentant l’histoire de Sally (Baron- Cohen, Leslie et Frith, 1985), pour avoir une représentation de fausse croyance de troisième ordre, l’enfant doit être capable de dire que Sally ne sait pas que la bille est changée de place et qu’elle ne sait pas non plus que Anne est au courant de cette information. L’enfant doit aussi être capable de dire que Anne sait que la bille n’est plus au même endroit, mais qu’elle sait aussi que Sally n’est pas au courant puisqu’elle a quitté la pièce. À ces informations, l’enfant doit coordonner son propre point de vue extérieur de même que ses croyances, c’est-à-dire qu’il sait que Sally ne sait pas puisqu’elle était sortie et qu’elle ne sait pas que Anne sait. L’enfant sait aussi que Anne sait que la

Vers huit et neuf ans, les enfants, dans leurs récits monogérés, feront référence aux états internes des personnages pour expliquer leur comportement (Veneziano 2010, 2015a, 2015b, 2016). Ultérieurement, l’enfant laissera comprendre qu’un personnage entretient une fausse croyance, c’est-à-dire qu’il comprendra que toute personne peut interpréter différemment le monde (Veneziano, 2010). Il tiendra également compte de la pluralité des points de vue, en tirera des conclusions et fera la différence entre le « vrai » et le « faux » (Veneziano 2010). Par exemple, dans l’épreuve de fausse croyance, l’enfant sera capable de dire que le personnage A pense que le personnage B est dans l’erreur, et ce, même si l’enfant ne partage pas le même point de vue que le personnage A. Il sera capable de discuter de l’état interne de type épistémique des personnages (Veneziano, 2010, 2015b; Veneziano et Hudelot, 2006).

En ce qui a trait au développement de la structuration du récit, l’enfant, qui a développé une structure syntaxique complexe, est capable de produire les épisodes complexes de niveau 9. En effet, la production de phrases complexes favorise l’explication des liens causaux, notamment par l’emploi de marqueurs causaux à l’intérieur du discours. L’enfant peut produire des épisodes complexes dans lesquels des épisodes complets sont liés ensemble dans les différentes façons rapportées par Ilgaz et Aksu-Koç (2005). Il peut enchâsser les épisodes en séquences réactionnelles. Cela permet d’établir des liens et de relier les épisodes de façon à ce qu’un épisode soit la situation de départ d’un second. L’enfant peut également enchâsser des séquences épisodiques complètes de façon causale. Il peut également expliquer les différentes actions faites pour arriver au but fixé ou encore expliquer ces différentes actions comme différents épisodes complets qui permettent d’arriver au but fixé. La forme complète de la structure narrative est celle où le narrateur construit la séquence d’évènements en utilisant les liens causaux et chronologiques et en guidant l’interlocuteur vers l’apogée du récit pour ensuite le conclure (Ely, 2005). Pour ce faire, des relations causales intercomposantes et transcomposantes doivent être comprises et produites par l’enfant. Au niveau 10, non sans lien avec les développements de la bille est changée de place, qu’elle sait que Sally n’est pas au courant de cette information et, par le fait même, que Sally ne sait pas qu’Anne sait. Ainsi, en prenant en considération et en coordonnant ses croyances et celles des personnages, l’enfant est capable de se mettre à leur place et de comprendre et d’anticiper leurs actions et leurs réactions.

théorie de l’esprit, l’enfant fait une description de la séquence d’évènements selon deux perspectives possibles, c’est-à-dire en fonction de différents protagonistes ayant chacun leur but respectif à mener à terme (Ilgaz et Aksu-Koç, 2005). Ce niveau se nomme séquence interactive. L’enfant prend soin de nommer les buts de chaque personnage et l’influence que chacun peut avoir sur l’autre. Il met donc les différentes perspectives en interaction. Pour ce faire, l’enfant doit tenir compte des points de vue distincts des deux personnages, les différencier et les coordonner. Ainsi, il doit avoir développé, a proprement dit, la théorie de l’esprit dans sa forme complexe.

2.1.5. Synthèse théorique sur le développement de l’enfant tout-venant du stade sensorimoteur au