Une étude de la littérature prouve que les quaterthiophènes sont de meilleurs
semi-conducteurs que les terthiophènes (mobilité des charges supérieure d’un
ordre de grandeur [111])- Nous avons donc décidé de synthétiser une série ho
mologue de quaterthiophènes 14, tout en conservant le même but : l’obten
tion d’un composé présentant une mésophase cristal liquide à température
ambiante. La première étape a été de synthétiser des dérivés symétriques
du quaterthiophène 6a-h. Pour cette synthèse, nous avons, dans un premier
temps, tenté d’adapter les conditions utilisées dans le cas des dialkylter-
thiophènes, c’est-à-dire l’alkylation du quaterthiophène avec des halogénures
d’alkyles en présence de n-BuLi et t-BuOK (voir figure 2.8). Le résultat de
la synthèse du 5,5’”-dioctylquaterthiophène 6b, dans ces conditions, est re
pris dans le tableau 2.2. Il faut cependant préciser que pour une question
de solubilité, le volume de solvant pour l’alkylation du quaterthiophène 14 a
dû être triplé [91] par rapport à celui utilisé dans le cas des autres oligothio
phènes. Le spectre RMN du 5-5’”-dioctylquaterthiophène 6b, figure 2.15,
montre que le composé est relativement pur après le work up. Ce spectre
de la molécule 6b montre dans la partie aromatique ; un doublet à 6.68
ppm qui correspond au signal des protons aromatique 4 et 4’”, ce doublet
est élargi à cause du couplage des protons avec les protons des CH2
connectés en 5,5”’ (comme observé pour le 5,5”-dioctylterthrophène 5c) ; à
6.98 ppm deux doublets qui se chevauchent pour donner un massif résultant
des signaux pour les protons 3’,3”,4’, 4”, enfin un doublet à 7.03 ppm qui
correspond aux signaux des protons 3 et 3’”. Après le work up, on observe
l’excès d’iodooctane attendu et des traces d’autres impuretés. L’iodooctane
2. Synthèse
est facilement éliminé par recristallisation, malheureusement les autres im
puretés co-cristallisent avec le 5,5”’-dioctylquaterthiophène 6b. Grâce à la
RMN du et à la spectrométrie de masse, nous pouvons conclure que ces
impuretés sont probablement des traces du quaterthiophène 14 de départ.
La purification par chromatographie sur colonne de silice est à proscrire dû
à la faible solubilité du 5,5”’-dioctylquaterthiophène 6b dans la plupart des
solvants organiques.
Fig. 2.15 - Spectre RMN du (300MHz, CDCh à 25 °C) 5-5’”-
dioctylquaterthiophène 6b brut c’est-à-dire sans autre purification que le
Work up.
Nous avons donc mis au point une autre voie de synthèse qui fait intervenir
la réaction d’hétérocouplage de Suzuki. Cette réaction a l’avantage de mettre
en présence des réactifs de solubilité très différente de celle des produits. Les
réactifs en excès qui seront à éliminer pendant la purification sont des esters
boriques, soit dérivé du bithiophène 30b, soit dérivés du thiophène 33b-h.
Ces derniers sont solubles dans les solvants polaires tels que l’éthanol ou le
méthanol, donc facil à séparer des 5,5”’-dialkylquaterthiophènes 6a-h finaux
complètement insolubles dans ce type de solvant.
La figure suivante 2.16 décrit le couplage de Suzuki qui mène à la for
mation du 5,5”’-dihexylquaterthiophène 6a. Les produits utilisés dans cette
réaction ont l’avantage d’être soit disponibles commercialement, comme le
composé 30b, soit facilement accessibles à partir du produit commercial,
comme le réactif 34a, qui résulte de la bromation de 5-hexylbithiophène 35.
On obtient facilement, grâce à ce couplage le 5,5’”-dihexylquaterthiophène
6a avec un rendement de 70%. Ce produit 6a bien connu dans la littérature
sera par la suite utilisé comme composé modèle dans les études sur les pro
priétés physiques. Malheureusement, seuls les synthons 30b et 34a portant
une chaîne alkyle latérale n-hexyle sont commerciaux. Pour varier aisément
la longueur des chaînes alkyles greffées sur le quaterthiophène, nous avons
mis au point une voie de synthèse qui peut être appliquée à toute une sé
rie de chaînes alkyles. Cette voie de synthèse est décrite dans la figure 2.17,
elle comporte trois étapes : 1) l’alkylation du thiophène en position 2 ; 2) la
formation de l’ester borique ; 3) le double couplage de Suzuki.
Les méthodes de synthèse mises au point précédemment, à savoir, l’al
kylation du thiophène et le couplage de Suzuki sont d’application dans le
cadre de la synthèse des 5,5”’-diaIkÿrquafeidhîôphènës“6a^ir. ■Nousm-vons ap=
porté une modification à la formation de 2-alkylthiophène 38b-h par rap
port à la section précédente, ici nous utilisons comme produit de départ du
2-bromothiophène 32 à la place du thiophène 22 (voir tableau 2.3). Cela
limite la formation du dialkylthiophène. 11 est important de signaler que
2. Synthèse
34a
Fig. 2.16 - Exemple de réaction de Suzuki menant à la formation de 5,5”
dihexylquaterthiophène 6a.
6b-h
Fig. 2.17 - Voie de synthèse des 5,5”’-dialkylquaterthiophènes 6b-h. La
structure des substituants R est définie dans le tableau 2.4 X= I ou Br.
nous avons observé une baisse de réactivité lors de l’utilisation du 1-iodo-
2-éthylhexane ; réaction 19, à température ambiante, la réaction donne un
rendement de 5%. Cela s’explique par l’encombrement stérique dû à la pré
sence du groupement éthyle en position 2, qui est défavorable à une réaction
de substitution nucléophile [108]. Ce manque de réactivité a été compensé
par une augmentation de la température de réaction.
N° Réactifs Résultats (rdt%)
15 C12H25I 38c (90)
38d (86)
38e (83)
38f (82)
17 ' ^ ^ ^ ^ ^ ^ 38g (82)
19
*réaction mise à reflux dans le THF après addition du l-iodo-2-éthylhexane
Tab. 2.3 - Alkylations : léq. de 2-bromothiophène 32, 1.5éq. n-BuLi/3éq.
t-BuOK, léq. d’iodure d’alkyle (par site réactif).
La deuxième étape consiste à synthétiser Tester borique des 2-alkylthiophènes
33b-h. La sjmthèse de Tester borique se fait en présence de 2-isopropoxy-
4,4,5,5-tétraméthyl-l,3,2-dioxaborolane 36 après déprotonation de la posi
tion 5 du 2-alkylthiophène 38b-h par le n-BuLi [112] [113] avec des rende
ments proches des 100%. Le produit après work up peut être utilisé directe
ment. Finalement un double couplage de Suzuki est réalisé à partir de Tester
borique 33b-h et du 2,5’-dibromobithiophène 37, et ce avec des rendements
compris entre 30 et 65% (voir tableau 2.4).
La réaction secondaire principale du couplage de Suzuki est un honiocou-
plage, cette réaction est illustrée dans la figure 2.18. Le rendement de cette
2.Synthèse
N° Réactifs Résultats (rdt%)
20 6b (65)
21 6c (45)
21 6d (56)
22 6e (43)
23
-j-i 1 1
6f (40)
24 v_r 6g (31)
25 6h (10)
Tab. 2.4 - Couplage de Suzuki afin d’obtenir les dialkylquaterthiophènes :
(a) K2CO3 (19éq.), Pd{PPhz)i et 2,5’-dibromobithiophène 37 (léq.) dans
toluène/éthanol/7720 (2:1:1) 75 °C.
réaction est d’environ 10%, cette réaction secondaire est attendue et connue
dans la littérature [114],
Fig. 2.18 - Réaction secondaire d’homocouplage se produisant lors de l’hé-
térocouplage de Suzuki.
Malgré l’inconvénient de cette réaction secondaire, le couplage de Su
zuki présente l’avantage d’avoir des produits aux propriétés de solubilité très
différentes des réactifs. La recristallisation à partir d’un mélange méthanol-
toluène est idéale pour la purification. Les esters boriques 33b-h sont solubles
dans le méthanol, tandis que les 5,5’”-dialkylquaterthiophènes 6b-h sont par
tiellement solubles dans le toluène. Une autre impureté mineure présente à
ce stade de la synthèse est le 2,5-dialkylthiophène 29 qui est un produit se
condaire de l’alkylation du thiophène (voir figure 2.12). La recristallisation
permettra aussi l’élimination de cette impureté.
Avec cette voie de synthèse, nous avons donc une méthode de synthèse fa
cile à mettre en oeuvre avec un rendement global compris entre 9 et 40% pour
trois étapes à partir du 2-bromothiophène 32. Cette voie de synthèse permet
aussi l’obtention des produits cibles avec une pureté élevée. Les températures
de transition du 5,F’’-dlhéxÿIqüâlbrEhîbphenë""6a obtenues après cette“syn^
thèse sont plus élevées de 5°C que celles décrites dans la littérature [115], ce
qui prouve une pureté plus élevée que celle décrite précédemment. Effective
ment, il est connu que la présence d’impureté même en faible concentration
diminue fortement les températures de transition des matériaux cristaux li
2. Synthèse
quides [72]. La pureté du produit a aussi été prouvée par RMN du proton,
(voir figure 2.19) et par chromatographie sur couche mince.
Fig. 2.19 - Spectre RMN (300MHz, dans CDCk à 25 °C) du 5,5’”-
dihexylquaterthiophène 6a synthétisé par un couplage de Suzuki.
Dans le document
Disponible à / Available at permalink :
(Page 86-93)