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La gestion du diabe te induit de nouvelles contraintes et implique un remaniement de l’organisation familiale. Cette gestion ne cessite l’acquisition d’une somme importante de connaissances et de compe tences face a laquelle parents et enfants se sentent souvent submerge s (Hoey, 2004). Cette charge incombe totalement ou en partie aux parents dans des proportions de pendantes de l’a ge du diagnostic, de la possibilite et du de sir de l’enfant de ge rer son diabe te, de sorte que cette re partition e volue au cours des anne es. Dans une e tude bre silienne re alise e aupre s de plus de 1 000 parents, les re sultats ont montre que 78.5 % d’entre eux mentionnent des modifications du fonctionnement familial (principalement sur la routine quotidienne, les repas, et lie es a l’apparition d’une nouvelle forme de stress lie e a la gestion de la maladie), et 62.8 % des parents disent se sentir submerge s par les soins lie s au diabe te (Malerbi, Negrato, Gomes, & The Brazilian Type 1 Diabetes Study Group, 2012). Moore, Hackworth, Hamilton, Northam et Cameron (2013) soulignent e galement que les parents rapportent des niveaux de conflits familiaux importants et un impact notable de la maladie sur le fonctionnement familial et sur le stress parental. Comparativement aux parents sans enfant malade, les parents ayant un enfant diabe tique font e tat d’une moins bonne cohe sion familiale et se disent plus anxieux et stresse s (Moreira, Frontini, Bullinger, & Canavarro, 2014). Ainsi, outre les sentiments de culpabilite , tristesse, cole re ou injustice que peuvent ressentir les parents et que nous avons e voque dans le pre ce dent chapitre (voir Chapitre 1. Partie I), ils doivent e galement inte grer les connaissances ne cessaires a la gestion du diabe te et faire face aux questionnements qu’elle suscite, ce qui est susceptible d’alte rer leur qualite de vie. Faulkner et Clark (1998) se sont d’ailleurs spe cifiquement inte resse es a la qualite de vie des parents ayant un enfant ou un adolescent diabe tique. Le Tableau

Tableau 7. Les cinq facteurs ayant le plus d’influence sur les dimensions de la qualité de vie des

parents ayant un enfant atteint de DT1. Résultats issus de Faulkner et Clark (1998). Dimensions de la qualité de vie des parents, mesurée avec le Parents Diabetes

Quality of Life Questionnaire (PDQOL) de Vandagriff, Marrero, Ingersoll et

Fineberg (1992) (échelle de Likert allant de 1 à 5, plus le score est élevé moins la qualité de vie est bonne)1.

Moyenne (Écart-type)

Satisfaction de la vie

Satisfaction liée au poids que le diabète de l’enfant représente pour la famille Satisfaction liée au temps passé par l’enfant à faire de l’exercice

Satisfaction liée au temps passé pour la gestion du diabète de l’enfant Satisfaction liée au temps passé à la planification des soins de l’enfant

Satisfaction liée à la manière dont les enseignants traitent le diabète de l’enfant

2.30 (1.11) 2.20 (1.29) 2.04 (1.01) 1.84 (0.80) 1.84 (1.10) Impact

Fréquence de discussion avec les autres à propos du diabète de l’enfant Fréquence du sentiment de surprotection vis-à-vis de l’enfant qui a le diabète Fréquence d’explication de ce qu’est signifie avoir un diabète

Fréquence du sentiment que le diabète est sa propre maladie Fréquence des mauvaises nuits liées au diabète de l’enfant

3.07 (0.90) 2.97 (1.08) 2.75 (0.96) 2.75 (1.44) 2.23 (0.87) Inquiétudes

Inquiétude que leur enfant ait des complications liées au diabète Inquiétude que leur enfant se voit refuser par les assurances Inquiétude que leur enfant s’évanouisse

Inquiétude à l’idée que le diabète puisse perturber la scolarité de leur enfant Inquiétude pour les enfants qu’aura son enfant

3.46 (1.04) 3.23 (1.35) 2.98 (1.21) 2.54 (1.24) 2.46 (1.22) 1. Notre traduction.

Faulkner et Clark (1998) ont observé que la satisfaction de la vie des parents est principalement affectée par la charge que représente le diabète de l’enfant pour la famille, en ayant des retentissements à différents niveaux. Sullivan-Bolyai, Deatrick, Gruppuso, Tamborlane et Grey (2003) soulignent à ce propos que les éléments les plus fréquemment rapportés par les aidants concernant la charge liée au DT1 sont le manque de sommeil (les nuits et les siestes de l’enfant sont des moments angoissants car ils présentent un risque plus élevé qu'une hypoglycémie passe inaperçue)28, le manque d'opportunités de socialisation et/ou le manque de

temps personnel. En outre, il apparaît que l'essentiel de la charge des soins repose majoritairement

sur les mères (Dashiff, Morrison, & Rowe, 2008 ; Houdan, 2006 ; Özyazicioḡlu, Avdal, & Saḡlam, 2017 ; Sullivan-Bolyai et al., 2003), qui est, dans 50.5 % des cas, le seul parent impliqué dans la gestion du diabète de l’enfant (Malerbi et al., 2012).

Par ailleurs, Nardi et collaborateurs (2008) observent que, globalement, les parents qui ont

28 C’est pourquoi il est parfois recommande de faire un contro le glyce mique dans la nuit et donc de re veiller les enfants

(cette pratique est toutefois de moins en moins recommande e, car elle impacte ne gativement le sommeil des enfants et des parents). La crainte des hypoglyce mies nocturnes pousse parfois les parents, principalement les me res a dormir avec leur enfant, ce qui semble d'ailleurs e tre une information souvent cache e a l'e quipe me dicale, par peur du jugement

un enfant diabe tique rapportent significativement plus d’inquie tudes que les parents dont les enfants ne sont pas malades. Des auteurs attirent notamment l’attention sur le fait que les inquie tudes sur les complications a long terme sont parmis les plus importantes (Faulkner & Clark, 1998). Ce re sultat e tait de ja observe par Vandagriff et collaborateurs (1992) et a e te plus re cemment confirme par Malerbi et collaborateurs (2012) qui ont souligne que 96.4 % des parents de leur e tude rapportaient des inquie tudes lie es aux complications a long terme de la maladie. Comme nous l’avons pre sente dans le pre ce dent chapitre, les complications a long terme de pendent en majeur partie de la bonne observance des traitements qui vise au maintien d’une normo-glyce mie (voir Chapitre 1. Partie II). Or, nous avons insiste , au de but de ce chapitre, sur les difficulte s d’observance a l’adolescence et avons pre cise que celles-ci sont notamment la conse quence du transfert de responsabilite qui s’ope re a cette pe riode. Ainsi, les inquie tudes des parents lie es aux complications a long terme peuvent e tre exacerbe es, pour les parents, a cette pe riode au cours de laquelle ils perdent progressivement le contro le de la gestion de la maladie. Ils doivent e galement accepter que la prise de risque avec le diabe te repre sente pour les adolescents, une pe riode d’appropriation de la maladie. Cette remarque permet, peut-e tre, d’expliquer en partie le constat e tabli par Faulkner et Clark (1998) dans le contexte du diabe te juve nile, d’une moins grande satisfaction de la vie chez les parents d’adolescents comparativement aux parents ayant des enfants plus jeunes.

Par ailleurs, Barnard, Thomas, Royle, Noyes et Waugh (2010) rapportent que la peur des hypoglyce mies est assez commune et fre quemment e voque e par les parents, et plus spe cialement par les me res, car elles peuvent e tre dangereuses (coma) et source de ge ne sociale (ex. perte de connaissance). Ils soulignent me me la pre sence de certaines strate gies contradictoires avec les recommandations me dicales, mises en place par les parents afin de les e viter (par exemple, maintenir une glyce mie le ge rement haute, prendre un encas avant d’aller se coucher, etc.). Cette peur aurait un effet ne gatif sur la qualite de vie des parents, qui serait cependant relativement limite (Barnard et al., 2010). Toutefois, il a e te observe re cemment que les parents qui ont le plus peur des hypoglyce mies pre sentent un sommeil de moins bonne qualite (Jaser et al., 2017).

Enfin, a notre connaissance, peu d’e tudes se sont inte resse es aux de terminants de la qualite de vie des parents ayant un enfant diabe tique. Faulkner et Clark (1998) apportent tout de me me plusieurs e le ments d’informations sur ce point. Tout d’abord, notons qu’elles n’observent pas de

lien significatif entre le genre de l’enfant, le niveau d’e tude des parents ou la dure e du diabe te, et la qualite de vie des parents. En revanche, elles rapportent des liens corre lationnels significatifs entre le contro le me tabolique des enfants et des adolescents et la qualite de vie des parents : moins le contro le me tabolique est bon (he moglobine glyque e haute), moins les parents rapportent de satisfaction. Ces re sultats ont e galement e te plus re cemment observe s, et il apparaî t que, lorsque le contro le me tabolique ne correspond pas aux attentes me dicales et que la gestion du diabe te par les adolescents est faible, les parents disent sentir une charge e motionnelle plus forte, e voquent des activite s familiales re duites et une dynamique familiale moins positive (Moore et al., 2013). Par ailleurs, Faulkner et Clark observent un lien corre lationnel significatif avec le statut marital des parents, en soulignant que les parents marie s ou en couple ont une satisfaction plus importante que les parents ce libataires. Une autre e tude met e galement en e vidence que les me res seules rapportent des niveaux de bien-e tre physique et psychologique moins hauts que les me res en couple (Streisand, Mackey, & Herge, 2010). Il semble, en effet, que les parents seuls pre sentent plus de difficulte s dans la gestion du diabe te de leur enfant que les parents en couple (Whittemore, Jaser, Chao, Jang, & Grey, 2012). Smaldone et Ritholz (2011) notent eux aussi l'importance de prendre soin de l'enfant ''en e quipe'' qui atte nue le sentiment de responsabilite , la charge de celle-ci e tant partage e. Les parents seuls pourraient alors ressentir des difficulte s face au manque de soutien social perçu et a la charge de supporter seul la responsabilite du traitement.

Synthèse et conclusion de la partie II

Cette pre sentation a e te l’occasion de mettre en e vidence que la qualite de vie des adolescents ayant un DT1 e tait susceptible d’e tre alte re e. Par ailleurs, de façon similaire a ce que nous avons e voque lors de l’analyse des de terminants de l’he moglobine glyque e des adolescents, le ro le des facteurs individuels (a ge et genre) et familiaux (implication parentale, gestion des conflits lie s au diabe te et communication intra-familiale) ont e te souligne s. Ainsi, les scores de qualite de vie sont, de manie re ge ne rale, moins bons chez les adolescents plus a ge s, les filles, et pour les adolescents dont le fonctionnement familial est marque par des conflits nombreux ou qui se re solvent difficilement, une communication faible ou ne gative, et une implication parentale non ade quate (trop faible ou intrusive) des parents dans la gestion de la maladie. Enfin, nous avons indique que la qualite de vie des parents pouvait, elle aussi, e tre alte re e. A cette occasion, la place pre ponde rante des me res dans la gestion du diabe te a e te aborde e et la charge lie e a cette gestion

ainsi que les inquie tudes des parents qui y sont associe es ont e galement e te e voque es. Par ailleurs, il est apparu que l’e tude de ses de terminants devrait e tre approfondie. En effet, a notre connaissance, peu d’e tudes, s’y sont inte resse es. Une e tude sugge re des expe riences de stress diffe rentes entre les pe res et les me res ayant un enfant diabe tique (Mitchell et al., 2009), et pose alors la question de de terminants diffe rents pour expliquer leur qualite de vie respective. L’e tude de la qualite de vie des parents pre sente, de plus, un inte re t a double titre car il a re cemment e te mis en e vidence que les scores de qualite de vie des enfants et des adolescents ayant un DT1 e taient corre le s a ceux de leurs parents (O zyaziciog lu et al., 2017).