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Partie III – La perception de la maladie : approche dyadique

2. Influence de la perception de la maladie : approche dyadique patient-parents

En 1989, Perrin, MacLean et Perrin montraient de ja que le lien entre la se ve rite de l’asthme mesure e objectivement et l'ajustement psychosocial des enfants et des adolescents (a ge s de 5 a 16 ans) e tait me diatise par la perception que les parents avaient de la gravite de la maladie de leur enfant. Chateaux (2005) a examine les influences de la perception des enfants (8 – 12 ans) ayant de l’asthme et celles de leurs parents sur l’observance des enfants et leur qualite de vie. Elle a mis en e vidence que les enfants pre sentant une bonne observance des traitements (pas d’arre ts, ni d’oublis, ni de retard dans la prise des me dicaments) sont ceux qui perçoivent une bonne cohe rence de leur maladie (c’est-a -dire que la maladie a du sens et est comprise), un bon contro le par le traitement, et dont les parents ne perçoivent pas de conse quences ne gatives dans la vie quotidienne. De plus, elle a observe que la variance de la dimension « limitation des activite s » de la qualite de vie des enfants e tait en partie explique e par les repre sentations e motionnelles des enfants et de leurs parents. Par ailleurs, Salewski (2003) n’a mis en e vidence, aupre s de 30 adolescents souffrant d’ecze ma chronique, qu’une faible influence de la perception des parents sur leur bien-e tre. Elle rele ve en revanche que la cohe sion familiale perçue par les adolescents est un fort pre dicteur de leur bien-e tre, et sugge re des liens entre la similarite de la perception des parents et la cohe sion familiale perçue.

Dans le cadre du diabe te juve nile a l’adolescence, Pereira et collaborateurs (2011) ont souligne que plus les parents avaient des scores faibles de cohe rence (mauvaise compre hension du diabe te) et moins le contro le me tabolique des adolescents e tait bon. De me me, Gaston et collaborateurs (2012) ont eux aussi observe des liens corre lationnels entre la perception des aidants principaux (qui sont a 85 % les me res, 11 % les pe res et 4 % les grand-me res), l’observance et le contro le me tabolique des adolescents. Ainsi, ils rapportent que, plus les aidants perçoivent de fortes conse quences du diabe te et un fort contro le de la maladie par le traitement,

plus les adolescents suivent les recommandations concernant l’alimentation. En revanche, plus les aidants maximisent la menace du diabe te sur la sante (conse quences), moins les re sultats de l’he moglobine glyque e sont bons.

Toutefois, le ro le de la perception des parents sur la qualite de vie des adolescents diabe tiques n’est, quant a lui, pas toujours de montre et les re sultats de ces e tudes suscitent plusieurs questions. Dans une premie re e tude, Law (2002) s’est inte resse aux similitudes et aux divergences entre la perception du diabe te par les adolescents et leur me re et a leurs influences sur le bien-e tre des adolescents. Les re sultats sont pre sente s en termes de maximisation ou de minimisation par rapport a la repre sentation de l'adolescent. Si cet auteur met en e vidence l'existence de certaines divergences entre les repre sentations des me res et des adolescents, il n’observe cependant aucun lien significatif entre le score de divergence et le bien-e tre des adolescents. Olsen et collaborateurs (2008) ont eux aussi examine l’influence de la perception des adolescents et des me res sur leur ajustement respectif9. Afin de re pliquer les analyses de Law (2002) ils cre ent une variable issue de la diffe rence entre les scores moyens de la perception des me res et des adolescents. Bien que certaines corre lations entre cette nouvelle variable et l’ajustement des adolescents soient observe es 10, les analyses de re gression montrent que celle-ci ne pre dit pas mieux l’ajustement des adolescents que leurs propres perceptions. En revanche, pour les me res, les analyses de re gression ont montre qu’inde pendamment de leurs propres perceptions, les me res qui perçoivent plus de cohe rence que leur enfant, rapportent un moins bon ajustement e motionnel. Ainsi, de nouveau, aucun lien n’est observe entre la perception des me res sur le diabe te de leur enfant et l’ajustement de ce dernier. Comme nous l’avons souligne dans le Chapitre 1 (voir Partie I), l’adolescence est une pe riode de transition complexe dans laquelle la relation aux parents est sans cesse questionne e. Il apparaî t donc e tonnant que les adolescents ne soient pas influence s par la façon dont leurs parents perçoivent leur maladie. Dans ce contexte, la façon dont les perceptions des proches sont appre hende es et e value es doit e tre approfondie.

Olsen et collaborateurs (2008) ont d’ailleurs, dans leur e tude, re alise une deuxie me analyse prenant en compte l’e cart des re ponses entre les adolescents et leur me re inde pendamment du

9 La mesure de l’ajustement des adolescents inclut une mesure de qualite de vie.

10 Les adolescents rapportent un moins bon ajustement quand ils perçoivent moins de conse quences, moins de

sens de celui-ci. Ils ont montre que plus la diffe rence est grande entre la perception de l’adolescent et celle de leur me re, sur les dimensions contrôle de l’adolescent et cohérence, plus l’ajustement des adolescents est ne gatif, et cela me me en tenant en compte de leur propre perception11. Ainsi, c’est la taille de la diffe rence entre la perception des me res et des adolescents, quel que soit son sens, qui a un impact sur leur ajustement. Par exemple, sur la dimension contrôle, quelle soit positive ou ne gative, la discordance a une influence ne gative sur l’ajustement des adolescents. Les auteurs sugge rent que les conse quences de cette divergence sur la gestion du diabe te expliqueraient ces re sultats. Soit les me res seraient perçues trop comme intrusives, soit elles laisseraient trop to t leur enfant s’occuper seul de leur diabe te. Ainsi, ce n’est pas la perception des me res en elle-me me qui aurait une influence sur l’ajustement des adolescents, mais la discordance avec la perception des adolescents et ses conse quences sur la gestion de la maladie.

Finalement, ces auteurs mettent en e vidence la complexite de cette proble matique. Sans remettre en cause l'inte re t de l'e tude de la perception des proches, ils insistent tout de me me sur la ne cessite de ne pas ne gliger le ro le de la perception individuelle. En outre, ils invitent a se pencher sur les diffe rentes façons d’appre hender les divergences de perception de la maladie. Leur e tude ouvre alors de nouvelles perspectives de recherche quant a la me thodologie utilise e pour e tudier la perception du patient et de ses proches, observer leurs diffe rences potentielles et comprendre leurs influences sur l’ajustement.

A ce propos, Locke et Mitchell (2016) offrent un nouvel angle d’approche me thodologique pour l’e tude de la perception des proches. Ils se sont inte resse s a la perception dans la famille des capacite s interpersonnelles des adolescents ayant un trouble autistique. Ils ont pour cela interroge la perception des adolescents (ce que les adolescents perçoivent sur eux-me mes), la perception des parents (ce que les parents perçoivent sur leur adolescent), et la me ta-perception (ce que les adolescents imaginent que leurs parents perçoivent d’eux). Leurs re sultats mettent en e vidence un e cart entre la perception que les parents ont des capacite s interpersonnelles de leur enfant et ce que les adolescents imaginent que leurs parents leur attribuent comme capacite a ce niveau. Il peut donc exister une diffe rence entre ce que les parents pensent et ce que les adolescents imaginent que leurs parents pensent. Leur e tude se base sur la the orie de la perception

interpersonnelle de Kenny (1994) qui postule de l’existence de diffe rents niveaux de perception, dont la pre sentation conclura ce chapitre.