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2-1- Protection des droits des actionnaires minoritaires

Suite à l’importance accordée à l’impact du degré de protection des actionnaires minoritaires sur le choix du mode de multicotation, nous avons jugé intéressant d’affiner notre analyse pour ce type d’actionnaires en oeuvrant à répondre à l’interrogation suivante : quel mode de multicotation choisie l’entreprise en fonction du degré de protection des actionnaires minoritaires ?

Pour mesurer le degré de protection des actionnaires minoritaires, nous nous appuyons sur deux variables : le taux de rendement en dividendes et l’indice « anti-director rights ».

2-1-1- Taux de rendement en dividendes

Dans un univers d’entreprises managériales caractérisées par l’asymétrie d’information entre les différents actionnaires, les dividendes permettent aux actionnaires de distinguer les entreprises performantes et celles qui ne le sont pas. Les dividendes jouent ainsi un double rôle :

- Ils permettent d’exercer un contrôle sur la performance des dirigeants, et par conséquent, sur les actionnaires de contrôle ;

- Ils permettent aux dirigeants de montrer leurs bonnes intentions vis-à-vis des actionnaires à qui ils s’engagent de verser une somme régulière.

Dès lors, les dividendes représentent un engagement de la part des dirigeants de ne pas investir dans des projets déficitaires. Ils impliquent une certaine diffusion de l’information concernant les bénéfices privés du contrôle. Dans cette perspective, une politique de dividendes équilibrée constitue un contrat implicite entre le dirigeant et les actionnaires minoritaires lorsque ces derniers peuvent révoquer, à tout moment, les dirigeants (Fluck, 1999). Étant donné que les revenus de l’entreprise peuvent être utilisés par les actionnaires de contrôle au titre de bénéfices privés du contrôle (usage privé, investissement dans des projets non rentables, …), les actionnaires minoritaires préfèrent la distribution des dividendes au maintient des recettes dans l’entreprise.

La politique de distribution des dividendes poursuivit par les entreprises multicotées nous renseigne sur le degré de protection des actionnaires minoritaires. À l’instar des travaux de La Porta et al., notre étude s’appuie sur « the outcome model of dividends » qui considère que les dividendes sont le résultat de la protection légale des actionnaires minoritaires. Toutes choses égales par ailleurs, mieux les actionnaires sont protégés plus élevé est le montant de dividendes versés par l’entreprise. Différentes mesures du ratio de paiement des dividendes se présentent, à savoir le taux de distribution des bénéfices94, le taux de distribution des cash

94 Le taux de distribution des dividendes, mesuré par le rapport entre le dividende par action et le résultat net par action, présente deux inconvénients sur le plan empirique. D’une part, il dépend du signe du bénéfice net. Une entreprise qui réalise un déficit mais distribue néanmoins des dividendes présente un taux de distribution négatif.

D’autre part, une entreprise qui réalise un faible résultat mais maintient ses dividendes d’une année à l’autre aura un taux de distribution plus élevé. Afin de remédier à ces deux inconvénients, nous retenons le taux de rendement en dividendes.

flows et le taux de rendement en dividendes. Nous retenons dans le cadre de cette étude comme mesure de la politique de distribution des dividendes, le taux de rendement en dividendes qui est égal au rapport entre le dividende par action et le cours de l’action. Ce ratio indique l’exigence de rémunération des actionnaires relativement à la valorisation de leur investissement sur le marché. L’avantage de cette mesure, c’est qu’elle est totalement indépendante de toute manipulation potentielle de la part des insiders. Cependant, elle ne reflète pas le niveau de répartition des revenus de l’entreprise et notamment l’importance respective des fonds versés aux actionnaires et des fonds retenus.

Taux de rendement en dividendes =

2-1-2- Indice « anti-director rights »

Pour contrôler le degré de protection offert aux investisseurs dans leurs pays d’origine, nous avons utilisé les mesures des droits des actionnaires et les pratiques légales de La Porta et al. (1998). L’indice « anti-director rights » 95 est utilisé comme variable caractérisant le degré de protection offert aux actionnaires minoritaires dans les pays d’origine. Cet indice englobe six différents droits des actionnaires minoritaires :

- Le vote par procuration est-il possible ou interdit ? - Y a-t-il obligation de dépôt des titres avant le vote ?

- Le « vote cumulé 96» est-il autorisé dans l’élection des membres du conseil d’administration ?

- Y a-t-il obligation de représentation de minorités au conseil d’administration ? Y a-t-il possibilité de contester certaines décisions devant les tribunaux ? Y a-t-il possibilité d’obliger à racheter la part des minoritaires à leur demande ?

- Le pourcentage de capital nécessaire à l’obtention de l’organisation d’une assemblée générale extraordinaire est-il supérieur à 10 % ?

95 Sous le terme « anti-director rights », la littérature anglo-saxonne recense diverses dispositions visant à offrir des protections légales contre les tentatives d’expropriation des actionnaires minoritaires, par la direction ou par les actionnaires majoritaires des entreprises. Ces dispositions concernent principalement les conditions d’exercice du droit de vote et les possibilités de recours.

96 « Cumulative voting », dans l’hypothèse où 5 membres sont à élire, le vote est autorisé si tout actionnaire a 5 voix, et s’il peut regrouper ses 5 voix sur un seul nom.

- Est-on obligé de consulter les actionnaires avant de supprimer leur droit de souscription préférentiel ?

L’indice « anti-director rights » varie entre 0 et 6, il s’obtient en ajoutant 1 dans les cas suivants : le vote par procuration est autorisé, le dépôt des titres avant le vote à une assemblée générale n’est pas obligatoire, le vote cumulatif ou la représentation proportionnelle des minoritaires au conseil d’administration est permis, il existe un dispositif légal permettant aux minoritaires lésés d’engager des actions en justice contre les dirigeants ou les membres du conseil d’administration, le pourcentage de capital nécessaire à l’obtention de l’organisation d’une assemblée générale extraordinaire est inférieure à 10 %, l’obligation est faite de consulter les actionnaires avant de supprimer leurs droits préférentiels de souscription. Nous mesurons pour chaque pays la moyenne de l’indice « anti-director rights » en divisant la valeur de cet indice par 6 pour chacune des 200 entreprises composant notre échantillon.