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Performance des entreprises et mode de multicotation

Performance boursière des entreprises cotées à

3- Performance des entreprises et mode de multicotation

En effectuant une série de tests sur l’effet de l’annonce de la multicotation, Miller (1999) trouve des taux de rendement anormaux significatifs et positifs autour du jour de l’annonce. Il n’observe aucun rendement anormal pendant la période pré-annonce.

L’augmentation de la valeur des titres est permanente. Miller (1999) passe en revue 181 entreprises, provenant de 35 pays, ayant annoncé l’émission de leur premier programme d’ADR entre l’année 1985 et l’année 1995. Il observe une performance post-muticotation de 1,15 % en moyenne. La valeur de l’action augmente tandis que le coût du capital diminue en réponse à la multicotation. L’auteur tente de mesurer l’effet de la multicotation sur la valeur des titres pour chaque type de programme d’émission des actions étrangères. Il examine les résultats pour les ADRs niveau 1, niveau 2, niveau 3 et les placements privés pendant 25 jours avant et après la multicotation. Il trouve dès le premier jour des taux de rendement anormaux positifs de 1,15 % et une moyenne des taux de rendement anormaux cumulés de 0,71 % sur la période [+ 2, + 25]. La moyenne des taux de rendement anormaux observée à partir de 125 jours après la multicotation est insignifiante de 0,3 %. Ces résultats sont en cohérence avec ceux de Jayaraman et al. (1993) et Domowitz et al. (1997), qui affirment que les entreprises réalisent des taux de rendement normaux aussitôt après la cotation à l’étranger.

En résumé, Miller (1999) montre que les entreprises qui accèdent aux marchés américains pour augmenter leurs capitaux par une offre publique éprouvent un changement positif dans les richesses des actionnaires. En revanche, celles qui pénètrent le marché par le biais d’une offre privée éprouvent un changement négatif dans les richesses des actionnaires.

Coffee (2002) explique ce résultat par les différences légales et les exigences strictes qu’impose la cotation dans les bourses américaines. En outre, Miller (1999) trouve que ces rendements anormaux sont plus élevés pour les entreprises qui inscrivent leurs titres dans des bourses américaines telles que NYSE ou NASDAQ et plutôt réduites pour celles qui accèdent

au marché en hors cote. En cohérence avec l’hypothèse de « segmentation des marchés », l’auteur montre que les entreprises originaires des marchés émergents enregistrent une augmentation en rendements anormaux plus importante que celles des marchés développés.

Ces deux dernières conclusions sont partiellement confirmées par les études de Foerster et Karolyi (1999, 2000). Lors de l’étude de la performance de 153 entreprises cotées aux États-Unis établies dans 11 pays (Canada, Royaume-Uni, l’Europe, l’Australie et l’Asie) pendant la période 1976-1992, Foerster et Karolyi (1999) observent des taux de rendement anormaux de 19 % pendant l’année qui précède la multicotation et de 1,2 % supplémentaires durant la semaine de la multicotation. Cependant, les entreprises subissent des pertes de 14 % au bout d’une année de multicotation. L’indice des marchés domestiques décline considérablement de 1,03 à 0,74 en moyenne. Les auteurs constatent que seules les ADRs niveau 3 permettent de réaliser des taux de rendement anormaux positifs pendant la période post-multicotation. Dans une étude ultérieure, Foerster et Karolyi (2000) étudient la performance à long terme des entreprises non-américaines qui augmentent leurs capitaux dans les marchés américains par émission des certificats d’actions étrangères pendant la période 1982-1996. Leur échantillon comporte 333 entreprises localisées dans 35 pays de l’Asie, l’Amérique Latine et l’Europe. Ces entreprises s’avèrent moins performantes que leurs consoeurs du marché domestique de 8 % à 15 % pendant les trois années post-multicotation.

Il ressort que les différences de performance sont liées à l’ampleur des barrières d’investissement qui segmentent les marchés financiers dans le monde. En particulier, les auteurs constatent que les entreprises émettrices des placements privés sont typiquement moins performantes que leurs consoeurs. Les investisseurs tendent à pénaliser celles qui viennent aux États-Unis des pays avec des normes de comptabilité inefficaces. En revanche, les entreprises qui émettent publiquement des certificats d’actions américaines (ADRs) dans la majorité des bourses des États-Unis sont légèrement plus performantes que leurs consoeurs, en particulier, les entreprises provenant des marchés émergents ayant des normes de comptabilité peu efficaces. Les auteurs trouvent aussi que la performance est en relation avec le type de marché, la taille de l’entreprise, le montant de l’augmentation de capital et le volume des transactions. En support à l’hypothèse de « segmentation des marchés », leur étude révèle que la performance des entreprises multicotées est positivement liée à leur capacité d’attirer un grand volume des transactions des titres aux États-Unis.

En mettant en évidence l’évaluation des entreprises multicotées aux États-Unis, Doidge et al. (2004) observent un ratio Q Tobin excédant celui des entreprises non multicotées de 16,5 % en moyenne. Cette différence d’évaluation est appelée « prime de multicotation »75. Cette prime dépend significativement de la forme de multicotation choisie.

La différence d’évaluation augmente lorsque l’entreprise choisit un mécanisme de cotation sélectif et coûteux. Les dirigeants des entreprises dont les intérêts sont alignés avec ceux des actionnaires minoritaires vont choisir une grande transparence associée à la cotation aux États-Unis. En particulier, lorsque ces dirigeants ne se soucient pas vraiment de leur capacité à exproprier les actionnaires minoritaires et ils s’intéressent plutôt à la maximisation de la valeur actionnaire.

En cohérence avec les recherches antérieures, Lel et Miller (2008) constatent, pour un échantillon composé de 18 742 entreprises provenant de 42 pays durant la période 1992-2003, que l’effet de la multicotation sur la performance des entreprises est plus intense pour les entreprises cotées en bourses américaines offrant une bonne protection des minoritaires, par comparaison avec celles dont les titres sont inscrites en hors cote ou bien cotées par placements privés. En support à ses résultats précédents76, O’Connor (2009) trouve que seules les entreprises, caractérisées par une bonne divulgation, cotées par le biais des certificats américains d’actions étrangères niveau 2 et niveau 3, réalisent des gains. Ces gains ne sont pas immédiats mais se concrétisent durant les cinq ans suivant la multicotation. À long terme, l’auteur constate un gain de valeur pour les entreprises provenant des pays caractérisés par un environnement de divulgation moins exigeant et qui sont cotées par le biais des certificats américains d’actions étrangères niveau 1. Quant aux placements privés, aucun effet n’est observé sur la valeur de l’entreprise.

En se basant sur les études théoriques et empiriques présentées se rapportant à la valorisation des entreprises multicotées, nous émettons les deux hypothèses suivantes :

75 La « prime de multicotation » est mesurée sur la seule année 1997 pour un échantillon composé de 713 entreprises.

76 En examinant un échantillon comportant 4 563 entreprises non multicotées et 583 entreprises multicotées dont 260 par ADRs niveau 1, 142 par ADRs niveau 2 et niveau 3 et 181 par des placements privés (la règle 144A) qui sont établies dans 20 pays émergents durant la période qui s’étend de l’année 1990 jusqu’à l’année 2003, O’Connor (2005) montre que les ADRs niveau 2 et niveau 3 procurent des gains qui ne sont pas immédiats mais produits après trois ans de multicotation et que les gains des placements privés sont transitoires.

H7-1 : Le choix d’une cotation directe ou par le biais des certificats d’actions étrangères niveau 2 ou niveau 3 en tant que mode d’entrée dans les bourses américaines affecte positivement la valeur de marché de l’entreprise.

H7-2 : L’impact du mode d’entrée dans les bourses américaines (cotation directe ou par le biais des certificats d’actions étrangères niveau 2 ou niveau 3) est plus élevé chez les entreprises provenant des pays de droit civil que celles provenant des pays de droit commun.