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Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant création d'un Bureau européen d'appui en matière d'asile (EASO)

L’idée de la création d’un bureau européen d’appui en matière d’asile, formulée en 1999 par le Traité d’Amsterdam puis reprise par la Commission dans son plan d’action en matière d’asile de 200857, a reçu un large soutien auprès des parties concernées. Ce soutien s’est notamment exprimé dans les nombreuses réponses au Live vert de la Commission58, qui prônaient un renforcement de la coopération pratique entre Etats membres dans le domaine de l’asile.

En 2008, afin de préparer l’analyse d’impact du futur Bureau, la Commission a fait réaliser une étude de faisabilité externe sur la création d’une telle structure d’appui pour la coopération pratique en matière d’asile ; cette étude s’est notamment basée sur une large consultation des acteurs concernés.

La Commission rappelle dans son analyse d’impact que la création du Bureau doit permettre de résoudre les trois problèmes majeurs affectant la coopération pratique liée au RAEC que sont : les distorsions dans les pratiques et échanges de bonnes pratiques se révélant non optimaux au niveau européen; les pressions sur les systèmes d'asile des États membres et surcharge pour certains États membres; et la coopération et coordination limitées en ce qui concerne la dimension extérieure du RAEC.59

L’analyse d’impact conclut sur la nécessité de créer un tel Bureau qu’elle envisage comme un « centre européen indépendant d'expertise en ce qui concerne l'asile » qui « aidera les États membres à se familiariser avec les systèmes et les pratiques des autres États membres, à développer des relations de travail plus soutenues entre les services chargés de l'asile au niveau opérationnel, à renforcer la confiance entre les différents systèmes et à atteindre une plus grande cohérence en pratique ».60

3.1. Création et missions du bureau européen d'appui en matière d'asile

La proposition de la Commission précise que le Bureau a pour objectifs de contribuer à améliorer la mise en œuvre du RAEC et de renforcer la coopération pratique entre Etats membres en matière d’asile (article 1). Un certain nombre de tâches lui sont affectées pour la réalisation de ces objectifs. Les trois principales sont de soutenir la

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Communication de la Commission, Plan d’action en matière d’asile, op.cit.

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Commission européenne, Livre vert sur le futur régime d'asile européen commun, op.cit.

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Commission européenne, Document de travail des services de la commission accompagnant la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant création d'un Bureau européen d'appui en matière d'asile, Résumé de l'analyse d'impact, 18 février 2009, SEC(2009) 154, p. 4.

coopération pratique en matière d’asile, de fournir un appui aux Etats membres soumis à des pressions particulières et de contribuer à la mise en œuvre du RAEC.

3.1.1. Appui à la coopération pratique en matière d'asile

Le futur Bureau européen d’appui en matière d’asile devra fournir un appui à la coopération pratique en matière d'asile. Pour ce faire, il coordonnera l’identification et l’échange de bonnes pratiques entre les Etats (article 3), l’échange d’informations (article 3), sur les pays d’origine notamment (article 4), et le transfert intracommunautaire de personnes bénéficiant de la protection internationale dans un Etat membre (article 5). Le Bureau sera en outre chargé de la formation des personnels de toutes les administrations et juridictions nationales ainsi que des services nationaux des Etats membres compétents en matière d’asile. Il devra également développer un curriculum européen en matière d’asile comprenant une formation sur le droit international des réfugiés, l’acquis communautaire en matière d’asile et les droits de l’homme (article 6 tel qu’amendé par le Parlement). Enfin, le Bureau doit fournir son appui aux aspects extérieurs de la politique d’asile en favorisant les échanges d’information et en encourageant éventuellement le renforcement des capacités des Etats tiers dans le cadre de programmes de protection régionale (article 7 tel qu’amendé par le Parlement).

3.1.2. Appui aux Etats membres soumis à des pressions particulières

En 2008, dans son Plan d’action en matière d’asile, la Commission s’était engagée à proposer dans le cadre de la seconde phase du RAEC une solution pour réduire la pression que subissaient certains Etats membres « surchargés61 » et ce notamment en raison de leur situation géographique. Entre autres missions, la Commission confie donc au Bureau celle de fournir un appui opérationnel à ces Etats. La proposition précise que les pressions auxquelles sont soumises certains Etats peuvent résulter de leur situation géographique ou démographique ou encore de situations d’afflux massif et soudain de ressortissants d’Etats tiers pouvant avoir besoin d’une protection internationale (article 8). Sur ce dernier point, pour prévenir les difficultés qui en résultent et préparer les Etats membres, il est prévu que le Bureau mette en place un système d’alerte précoce pour notifier les Etats membres et la Commission des risques d’arrivées massives de demandeurs de protection internationale dans l’Union (article 10(a), tel qu’amendé par le Parlement).

Afin d’évaluer les besoins des Etats membres soumis à des pressions particulières, le Bureau réunit et analyse les informations pertinentes fournies par les Etats

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mêmes, le HCR et d’autres organisations concernées (article 9). Sur la base de ces informations et compte tenu des structures, personnels et capacités d’accueil disponibles dans les Etats membres, le Bureau met en place et coordonne les actions nécessaires pour aider les Etats concernés à faire face aux difficultés qu’ils rencontrent. Les actions entreprises visent à faciliter la première analyse des demandes d’asile reçues par les autorités nationales compétentes et à aider l’Etat membre concerné à mettre rapidement en place les facilités d'accueil appropriées (logement d'urgence, moyens de transport et assistance médicale notamment).

Pour fournir l’appui opérationnel nécessaire pour la mise en œuvre de ces actions, le Bureau dispose notamment d’équipes d’experts qu’il peut dépêcher sur place (articles 13 à 21). Ainsi que le prévoit le Parlement dans le projet de refonte du règlement Dublin62, le Bureau est en effet chargé de constituer des « équipes d’appui asile » et d’en coordonner le déploiement dans les Etats membres soumis à des pressions particulières auxquels elles apportent leur expertise technique en matière d'interprétation, d’informations sur les pays d’origine, et de traitement et gestion des dossiers d'asile notamment. L’UNHCR, favorable à la constitution de ces équipes qu’il avait lui-même suggérée dans sa réponse au Livre vert de la Commission, propose qu’elles soient habilitées à fournir un soutien encore plus diversifié aux Etats. Elles pourraient ainsi assister les Etats dans le cadre de la réception et de l’accueil des DPI, en étant présentes aux points-frontières en particulier. Elles pourraient également aider à réunir les informations sur les nouveaux arrivants, à les informer sur la procédure d’asile et à identifier les personnes ayant des besoins particuliers. Le HCR précise que ces activités seraient menées préalablement et indépendamment de l’examen au fond des demandes de protection internationale qui relèverait toujours exclusivement de la compétence des Etats.63

Les équipes d’appui asile sont constituées d’experts nationaux « de réserve », désignés par les Etats membres, et dont les profils et spécialisations sont variés. Lorsque le déploiement d’une équipe d’appui asile s’avère nécessaire, le Bureau demande aux Etats de lui communiquer la liste des experts qu’ils sont en mesures de mettre à disposition dans un délai de cinq jours (article 15). Le HCR précise que ces équipes devraient inclure des personnes spécialisées dans la prise en charge des enfants, des membres du personnel de santé ainsi que des membres d’organisations

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Voir 1.3.

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internationales et non-gouvernementales.64 Sa proposition est reprise sur ce dernier point par le Parlement qui prévoit que lorsque les Etats membres ne sont pas en mesure de fournir l’expertise jugée nécessaire par le Bureau, ce dernier peut la rechercher à l’extérieur des Etats, auprès d’organisations (article 16(1)bis).

Comme il l’avait fait lors de l’examen de la proposition de la Commission de refonte du règlement Dublin (article 31(9)bis, amendement 39), le Parlement a également amendé le texte de la Commission pour y ajouter une disposition prévoyant la mise en place par le Bureau d’un programme de relogement des bénéficiaires de protection internationale se trouvant dans les Etats membres dont le régime d’asile est soumis à des pressions spécifiques et disproportionnées (article 10(a)bis).

3.1.3. Contribution à la mise en œuvre du Régime d'asile européen commun

En septembre 2008, le Conseil européen adoptant son Pacte européen sur l’immigration et l’asile se félicitait des progrès que la mise en œuvre de normes minimales communes avait permis de réaliser sur la voie de la mise en place du Régime d'asile européen commun. Il déplorait toutefois le manque de cohérence observé entre les régimes d’asile nationaux des Etats membres et le défaut d’uniformité de la protection octroyée au sein de l’Union. Fort de ce constat, le Conseil européen était alors convenu de mettre en place un bureau européen d’appui qui aurait notamment pour mission de « faciliter les échanges d’informations, d’analyses et d’expériences entre Etats membres » et qui, ce faisant favoriserait « sur le fondement d’une connaissance partagée des pays d’origine, la mise en cohérence des pratiques, des procédures et, par voie de conséquence, des décisions nationales ».65

Le même raisonnement a été suivi par la Commission qui confiant au Bureau européen d’appui en matière d’asile la tâche de contribuer à la mise en œuvre du RAEC le charge d’organiser, coordonner et favoriser les échanges d'information entre les autorités nationales d'asile, ainsi qu'entre ces autorités et la Commission, relatifs à la mise en œuvre de l'ensemble des instruments relevant de l'acquis communautaire en matière d'asile (article 11). Les informations échangées concernent les législations et jurisprudences nationales ainsi que le traitement des demandes de protection internationale par les Etats.

Au-delà de ces échanges d’informations, le Bureau doit préparer annuellement un rapport sur la situation de l’asile dans l’Union européenne. Dans son rapport annuel, le Bureau évalue les résultats des actions menées dans le cadre du règlement, et en fait

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Ibid.

65

Pacte européen sur l'immigration et l'asile, doc. 13440/08, approuvé par le Conseil Justice et Affaires Intérieures le 25 septembre 2008 et adopté par le Conseil européen le 16 octobre 2008, p. 11.

une analyse comparative globale. Ce rapport permet au Bureau d’identifier les bonnes pratiques, dont il informe les Etats membres, et concourt à l’amélioration de la qualité, de la cohérence et de l'efficacité du RAEC (article 12(1)). Le Parlement précise dans un amendement à cette disposition (amendement 25) que le rapport doit lui être communiqué ainsi qu’à la Commission européenne afin que les informations qu’il contient soient exploitées de façon optimale.

Enfin, le Bureau est habilité a rédiger, sur demande de la Commission et avis du comité exécutif, des documents techniques relatifs à la mise en œuvre des instruments communautaires en matière d'asile, tels que des manuels opérationnels ou des lignes directrices (article 12(2)). Faisant sienne une recommandation du Haut Commissariat pour les Réfugiés dont il reconnaît l’expertise et le savoir-faire dans le domaine de l’asile, le Parlement a amendé la disposition suscitée en précisant que l’UNHCR devrait être « un participant prépondérant dans le développement des lignes directrices de l'UE pour veiller à la compatibilité avec les normes internationales. » Et le Parlement d’ajouter que « [pour] les thèmes sur lesquels il existe déjà des lignes directrices de l'UNHCR, ces dernières devraient servir de base à la coopération afin de réduire les divergences qui apparaissent dans la pratique » (amendement 26).

3.2. Organisation et financement du Bureau

Le Bureau européen d’appui en matière d’asile se compose de quatre organes : un Conseil d'administration, un directeur exécutif et son personnel, un comité exécutif et un forum consultatif (article 22). De plus, le Bureau a la possibilité de créer des groupes de travail composés d'experts nationaux, tels que des juges spécialisés ; ces groupes peuvent eux-mêmes inviter à participer à leurs travaux toute personne dont l’avis pourrait être intéressant, et notamment des représentants d’organisations non gouvernementales.

Ainsi que l’annonce le préambule du texte, une large part est faite à la participation de l’UNHCR aux travaux du Bureau (paragraphe 9.) Le Haut Commissariat est en effet membre du Conseil d'administration, sans droit de vote toutefois (article 23(4)) et du Forum consultatif (article 32) ; il peut participer sans droit de vote aux travaux du Comité exécutif sur demande de ce dernier (article 30), ainsi qu’aux réunions des groupes de travail (article 31). Compte tenu du rôle qui lui est dévolu au sein du Bureau, la proposition de la Commission prévoit la possibilité pour le Bureau d’octroyer au HCR des subventions.

Concernant le budget du Bureau, celui-ci se voyant affecter un certain nombre des tâches qui étaient préalablement financées au titre du Fonds européen des réfugiés

(FER), la Commission prévoit de transférer une partie du budget alloué au FER au titre des actions communautaires en matière d’asile au bénéfice du Bureau.

Conclusion

A la veille de la présidence suédoise de l’Union européenne, la Commission a approuvé une communication66 dont le texte servira de base aux premières discussions du Conseil sur le Programme de Stockholm. Ce programme, qui devrait être adopté lors du Conseil européen de décembre 2009, définira les priorités politiques pluriannuelles de l’Union européenne dans le domaine de la justice, de la liberté et de la sécurité à compter de 2010. Sur la base de ce programme, la Commission proposera un plan d’action déterminant l’agenda à suivre pendant la période 2010-2014 pour le mettre en œuvre.

La Commission y encourage l'Union à « continuer le travail entrepris afin de devenir un véritable espace commun et solidaire de protection basé sur le respect des droits fondamentaux, des standards élevés de protection et l'amélioration générale de la qualité des systèmes nationaux, tout en renforçant la lutte contre les abus ». Les deux axes prioritaires autour desquels doivent s’articuler les actions de l’Union sont d’une part la mise en place d’un espace unique de protection, et d’autre part le partage des responsabilités entre États membres et le développement de la solidarité interne et externe.

Sur le premier point, la Commission se félicite des progrès importants réalisés sur la voie de la création du RAEC, notamment grâce à l’adoption d’un socle commun de normes, et encourage vivement l’adoption rapide des propositions législatives décrites ci-dessus, celles-ci étant les instruments essentiels à la mise en place, avant 2012 et conformément au Programme de La Haye, d’une procédure d’asile unique et d’un statut uniforme pour les bénéficiaires d’une protection internationale. Lors des débats sur le texte de la communication, le Vice-président de la Commission M. Barrot faisant référence à ces règles communes dont l’Union doit, à terme, se doter, parle de véritable « code de l’immigration ».67

La Commission insiste sur le rôle essentiel du Bureau européen d’appui en matière d’asile. Pour que ce dernier puisse remplir efficacement sa mission et afin d’éviter que son travail ne soit inutilement ralenti, il est nécessaire que l’Union lui donne les moyens d’agir notamment en dispensant une formation commune à tous les agents

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Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil, Un espace de liberté, de sécurité et de justice au service des citoyens, 10 juin 2009, COM (2009) 262 final.

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Commission européenne, Procès-verbal de la mille huit cent septante-septième réunion de la Commission tenue à Bruxelles, 17 juin 2009, PV(2009) 1877 final.

responsables du traitement des demandes d’asile dans les Etats membres et en leur fournissant des informations pertinentes sur les pays d’origine.

Ainsi que le souligne le HCR, améliorer l’efficacité du système ne doit pas se faire au détriment des garanties procédurales ni des droits des personnes concernées.68 La Commission ne néglige d’ailleurs pas d’encourager l’Union à prendre les mesures nécessaires pour améliorer en particulier l’intégration des bénéficiaires de protection internationale et la situation des personnes déboutées mais qui ne peuvent être éloignées compte tenu de circonstances spécifiques.

Afin de rendre compte des progrès réalisés en vue du rapprochement des systèmes nationaux d’asile et la création d’un régime européen commun, des mécanismes d’évaluation détaillée des pratiques nationales ainsi que de la transposition et mise en œuvre des instruments législatifs de la seconde phase pourraient être mis en place. La Commission souhaite que, compte tenu de ces progrès et comme le suggérait l’UNHCR, l’Union consacre le principe de reconnaissance mutuelle des décisions individuelles d’octroi d’une protection internationale par un Etat membre. La formalisation de ce principe – qui devrait intervenir avant 2015 – faciliterait les transferts de protection au sein de l’Union, sans que la mise en place préalable d’une procédure spécifique ne s’impose.

Sur le second point, la Commission estime qu’un réel partage des responsabilités pour l'accueil et l'intégration des demandeurs et bénéficiaires de protection internationale doit être mis en place entre les Etats membres. Dans son Livre vert de 2007, elle rappelait que le système de Dublin n’avait pas été conçu comme un instrument de partage équitable des charges entre Etats membres mais comme un outil permettant de déterminer rapidement l’État membre responsable de l’examen d’une demande d’asile soumise sur le territoire de l’Union, sur la base de critères objectifs, et d’éviter les mouvements secondaires entre États membres.69 On l’a vu, le CERE encourage l’Union à penser de nouveaux mécanismes et critères pour la détermination de l’Etat responsable.70 De même, la Commission estime que, bien que l’Union ait choisit de conserver dans la seconde phase du RAEC le même principe fondateur pour le système Dublin, des voies nouvelles doivent être envisagées en vue d’un véritable partage des responsabilités entre Etats membres.

Dans le sens d’une répartition des charges plus équitable entre Etats membres voire d’un allègement des charges reposant sur certains Etats membres, la Commission

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Voir par exemple UNHCR, Comments (Eurodac), op.cit., p. 25.

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propose ainsi le développement d’un mécanisme de réinstallation interne, au sein de l’Union, au profit des bénéficiaires de protection internationale, et la mise en place d’une procédure de traitement commun des demandes de protection internationales au sein voire hors de l’Union.

S’agissant enfin du renforcement de la solidarité avec les pays tiers dans lesquels transitent ou séjournent nombre de réfugiés ou de personnes déplacées, la Commission encourage l’Union à soutenir le renforcement des capacités de ces pays pour leur permettre de développer leurs propres systèmes d’asile, au sein desquels l’accès à la protection et le respect du principe de non-refoulement seraient garantis. Dans le cadre d’une stratégie globale de gestion des mobilités, elle doit également envisager de développer une collaboration avec de nouveaux acteurs, à l’extérieur de l’Union, auxquels seraient confiées de nouvelles formes de responsabilité de protection (délivrance de visas humanitaires, avec l’aide des représentations diplomatiques par exemple).

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