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La promotion des spectacles

L’évolution de la fréquentation des spectacles de danse

2. La promotion des spectacles

Les logiciels de billetterie permettent de gagner en efficacité dans la connaissance des publics en permettant de garder en mémoire les sorties déjà effectuées par des spectatrices et spectateurs dans la structure mais aussi dans les autres établissements culturels ou festivals s’ils disposent du même outil mis en réseau. Un paramétrage du logiciel permet de s’appuyer sur la traçabilité des choix effec- tués dans le passé pour construire une segmentation des publics en s’appuyant sur l’hypothèse discutable d’une reproduction des pré- férences exprimées pour certain∙es chorégraphes ou des domaines artistiques. La communication est alors ciblée pour attirer en prio- rité l’attention des personnes qui ont déjà assisté à des spectacles antérieurs des chorégraphes qui sont programmé∙es au cours de la saison ou de temps forts.

Comme le confirment les entretiens, l’efficacité de la commu- nication est améliorée par la diversité des supports utilisés et la réflexion sur le type de public auxquels ils s’adressent afin d’adapter les contenus et les visuels choisis.

Les liens déclarés entre communication et fréquentation

Les réponses des structures à la question sur l’importance de différents moyens pour développer les publics indiquent une corré- lation positive entre le sens de l’évolution des représentations entre 2014-2015 et 2016/17 et le degré d’importance accordée à la meilleure adaptation de la communication. Les structures en expansion ont accordé plus d’importance que les autres à ce moyen (note moyenne de 2,26, au-dessus de la modalité « assez important ») tandis que les structures en recul ou ayant connu une évolution contrastée lui ont accordé le moins d’importance (notes moyennes de 1,57 et 1,55 entre les modalités « assez important » et « peu important »).

Les structures dédiées à la danse ont accordé plus d’importance aux ajustements de leur communication que les structures pluridis- ciplinaires. Leur programmation chorégraphique plus importante et a priori plus diversifiée suscite un besoin de développer une communication plus adaptée aux différents projets artistiques et publics visés.

Note d’importance moyenne de la communication adaptée pour développer les publics selon l’évolution des représentations et la nature des structures (2014-2017)

Evolution

des représentations Structure

hausse stable contrastée baisse spécialisée pluridisciplin. TOTAL

2,26 1,92 1,55 1,57 2,41 1,65 1,88

Parmi les structures pluridisciplinaires répondantes, les CDN se sont spécifiés par l’absence de croyance à l'adaptation de la com- munication comme moyen de développer les publics pour deux tiers d’entre eux, à la différence des établissements culturels dont presque les deux tiers l’ont classé comme un moyen assez important.

Sur le mobilier urbain on appose des Aquilux et on met le titre du spectacle. Ça, ça marque assez bien. Il y a une grosse photo généra- lement du spectacle et à côté un autre aquilux qui précise la date, l’heure et le genre du spectacle. ”

(Directeur, structure pluridisciplinaire 13)

La distribution des supports en papier requiert le tissage de relations de partenariat avec des lieux pour le dépôt des documents ou l’affichage en raison des limitations budgétaires pour les dépenses publicitaires. Les commerçants et commerçantes sollicitées pour la diffusion des informations de plusieurs organisations ne sont pas forcément disposées à apposer systématiquement les affichettes confiées. Il convient de cibler un certain nombre de lieux de dépôt en fonction des publics visés et des relations de coopération déjà tissées.

“ La communication papier est un outil qui est diffusé dans une cen- taine de lieux de culture de la métropole et de ses environs, mais ça cible quand même un public culture. Toutes les actions culturelles sont prétextes à distribuer la communication. Tous les lieux partenaires relaient ce qui se passe chez eux et j’arrive à faire en sorte qu’ils communiquent qu’il s’agit d’un festival itinérant. ”

(Directeur, structure dédiée 3)

La diffusion des documents en papier en dehors des réseaux publicitaires mobilise une partie du temps de travail de l’équipe en charge des relations avec les publics. Elle peut emprunter des formes commerciales en les adaptant à l’image de l’organisation. Ainsi les pratiques de street marketing, assez courantes dans le domaine du hip-hop, se diffusent pour la promotion d’autres styles chorégraphiques.

“ On prend des gens d’ici ou du personnel d’agence qu’on va embau- cher. Parfois on travaille aussi avec une société qui va… c’est du street marketing en fait : des gens qui sont sur gyropode et vont avoir un habillage avec le visuel du spectacle. Ça donne une visibilité autre, c’est un petit plus en termes d’image. ”

(Secrétaire générale, compagnie avec lieu 5)

La mémorisation des adresses des spectateurs et spectatrices selon leur degré de fréquentation du lieu ou du festival et leurs centres d’intérêt artistique par les logiciels de billetterie constitue une base de données qui peut être utilisée dans le cadre d’une stra- tégie de géomarketing. Il s’agit de repérer les quartiers de plus fort peuplement des spectateurs et spectatrices de la structure pour en déduire, par une hypothèse d’homologie sociale, qu’il s’agit des zones d’habitation sans doute les plus réceptives à la communica- tion sur la programmation de la structure. Les dépôts ou envois de documents en papier seront alors centrés sur ces quartiers dont la composition sociodémographique de la population est supposée la prédisposer à la fréquentation de la structure. Toutefois l’exploitation de la base de données informatisée doit respecter les engagements du règlement général de la protection des données (RGPD).

La question du niveau de langue utilisé dans les textes four- nis par les compagnies aux structures a été peu abordée dans les entretiens. Le discours théorique des chorégraphes attendu a priori par les experts et expertes professionnelles en France requiert de se situer dans l’histoire de la danse, de se référer à des principes philosophiques et des symboles avec une part de mystère.

Note d’importance moyenne de la communication adaptée pour développer les publics selon le rayonnement dominant des équipes programmées par les structures (2014-2017)

Rayonnement dominant des équipes régional multirégional national international

1,76 1,86 1,89 2,2

L’importance accordée à l’adaptation de la communication pour développer les publics est assez voisine selon le rayonnement domi- nant des équipes chorégraphiques programmées, à l’exception des structures qui ont programmé plus de compagnies étrangères (note moyenne de 2,2 sur 3). Celles-ci estiment nécessaire de s’engager plus que les autres équipes administratives dans un plan de com- munication évolutif.

L’engagement d’une équipe administrative dans une structure pour diffuser les informations sur la démarche artistique d’une compagnie programmée peu connue par les différents canaux écrits, audiovisuels et numériques, parallèlement à l’implication des artistes dans des actions de sensibilisation, peut compenser en partie la faible notoriété de l’équipe chorégraphique.

“ Alors qu’on a vu, la structure X par exemple, où on était vraiment sorti∙es de nulle part. Et c’est une énorme salle, la jauge était à 550. Il y avait la scolaire le matin et le soir. Et parce qu’ils ont fait un boulot de comm’ de dingue, c’était plein alors qu’on n’est pas de la région, qu’on est hyper jeunes, qu’il y avait des grèves d’agriculteurs. […] Et ça c’est leur responsabilité, c’est leur réussite. Nous, l’objet n’a pas changé. ”

(Chorégraphe, compagnie 15)

Ce point de vue est largement partagé par les compagnies cho- régraphiques peu connues ; leur audience est dépendante de leur travail relationnel effectué avec la population locale avec le soutien de l’équipe du lieu ou du festival pour proposer des liens de parte- nariat, diffuser des informations incitatives auprès de leurs publics.

Les supports en papier

Les supports en papier communément utilisés sont les tracts qui articulent un visuel représentatif de l’esprit du spectacle, le logo de l’organisation et un texte présentant les orientations esthétiques. L’efficacité de la communication repose dans ce domaine sur le croisement de différents supports en complément des flyers avec des affiches de différents formats selon les réseaux publicitaires et les lieux ciblés, des plaquettes de saison, des cartes postales, des courriers informatifs sur les activités de la structure. Comme le résume la directrice de la structure pluridisciplinaire 5, « rien ne marche en soi ; il faut tout conjuguer ».

Des expérimentations ont été signalées dans quelques entre- tiens, soit dans le sens des économies en impression, soit dans le sens de la diversification des supports.

“ Dans les premiers temps, on faisait une plaquette de saison plus des flyers, des affiches pour annoncer les spectacles et la rentrée des abonnés. Maintenant, ça fait deux ans que c’est devenu un pro- gramme/affiche/saison avec derrière tout ce qu’il faut. Alors c’est sûr qu’on y gagne en termes de coûts ; après on réinvestit cette somme sur du partenariat médias. ”

“ Les filles à la comm’, elles ont développé Facebook, Instagram. On avait un blog et on ne l’a plus parce que ça ne sert à rien. […] On a fait une étude cette année par rapport au blog justement ; elles ont décidé d’arrêter parce qu’il fallait le réactiver à chaque fois, et qu’il n’y avait pas le temps de le faire. ”

(Directrice, structure pluridisciplinaire 19)

“ On a refait deux ans après un site Internet complet, qui était trop compliqué finalement à gérer. Il est beaucoup plus simple, facile d’accès. À l’époque on avait fait le site Internet, le blog, là tout est réuni en un quasiment. Il n’y a plus besoin de blog maintenant avec les réseaux sociaux ; on ne l’alimente plus. ”

(Administrateur, compagnie avec lieu 4)

Face à la multitude des flux informationnels électroniques, un mode de captation essentiel de l’attention des internautes passe par la vue des photographies et des vidéos. Les sites Internet des organisations sont ainsi alimentés par des représentations visuelles des répétitions, d’extraits de spectacles, de l’ambiance du lieu si un objectif organisationnel est de projeter une image plus convi- viale, ainsi que par des entretiens filmés avec des artistes ou des habitants, habitantes impliquées dans des activités culturelles ou pédagogiques. Ces mises en ligne sont susceptibles d’améliorer la visibilité de l’organisation et de réduire la perception des risques de fréquentation par les spectateurs et spectatrices potentielles en offrant une expérience informationnelle sur les dimensions positives des spectacles et du lieu64.

Les compagnies sont ainsi sollicitées pour fournir des teasers de leurs spectacles en plusieurs versions pour les relances et des entretiens filmés des chorégraphes ajustés éventuellement au type de public visé par l’opération de communication. Cela accroît la charge du travail de communication des équipes chorégraphiques programmées dans les lieux.

“ Les théâtres ont des sites, il faut aussi produire plus de contenus qu’avant. Ce qui est compliqué c’est plus d’être en capacité de pro- duire 3, 4, 5 teasers puis de redynamiser le truc. C’est comme ça que ça se passe maintenant. ”

(Directeur délégué, compagnie 7)

“ Les lieux nous demandent de plus en plus des petites vidéos des artistes, des petits messages à l’attention de leur public, des messages courts d’une minute. Envoyez-nous un message du chorégraphe pour annoncer le festival qui aura lieu dans quelques mois. Ça veut dire que, moi, je le filme avec un petit speech. Alors quand c’est la fin de journée, qu’il a donné des ateliers, etc., je le soûle avec sa vidéo. Il faut qu’il ait une certaine tenue, il ne peut pas être en jogging. Il faut des temps où il soit posé, réfléchir ce qu’il va dire, choisir un décor, c’est du boulot ! Des petits trucs mis bout-à-bout qui nous demandent de plus en plus de temps en termes de comm’. ”

(Administratrice, compagnie 6)

“ Je sais qu’il y a des façons de présenter [un spectacle] qui sont différentes d’un pays à l’autre. Les français aiment bien que ça phi- losophe un peu, les anglais sont plus pragmatiques. ”

(Administratrice, compagnie 6)

Le niveau de langue utilisé spontanément par des chorégraphes peut être perçu comme trop abstrait par des équipes de structures pour des spectateurs et spectatrices occasionnelles ayant une culture chorégraphique ténue. Le besoin de traduction en un langage plus accessible semble peu souvent exprimé. La nécessité de ne pas déformer le degré de complexité des spectacles dans cet exercice requiert des compétences pédagogiques.

“ Les établissements culturels prennent en charge la distribution des supports. Nous envoyons les informations et relisons les textes. Il n’y a pas de rédaction avec un langage accessible sauf au X avec une personne qui sait bien simplifier les propos artistiques. Nous avons repris ses propos car ils expriment une vision pertinente et distanciée, ils apportent une autre perception de la pièce. ”

(Chorégraphe, compagnie 16)

À l’opposé, les adresses des artistes aux publics, par exemple sous la forme intimiste de lettres, peuvent engager une mise en relation chaleureuse avec les spectateurs et spectatrices par des directions de structure.

“ On sait que ceux qui parlent le mieux au public, ce sont les artistes eux-mêmes. Et dans le dispositif X, on leur a demandé s’ils étaient prêts à écrire directement au public. Donc, durant cette opération, ils écrivent ce qu’ils veulent et on envoie cette lettre au public. Ils parlent de leur spectacle et ils finissent avec un mot tendre souvent. C’est leur vocabulaire, leurs mots. Ça fait trois, quatre ans qu’on fait ça. Ça aussi, c’est une autre façon de faire. ”

(Secrétaire générale, structure pluridisciplinaire 10)

La communication numérique

La communication numérique tend à se développer en réduisant les dépenses d’impression de documents promotionnels, sans que cela ne soit plus spécifique aux programmations chorégraphiques. Elle s’organise d’une part par le biais du site Internet de l’organi- sation, dont la configuration visuelle a été souvent améliorée pour la lisibilité et le classement des informations, d’autre part par la participation aux échanges sur les réseaux sociaux.

Les newsletters sur les activités de la compagnie ou de la structure peuvent être adressées par voie électronique aux publics fidélisés ou aux participants et participantes à des actions artistico-péda- gogiques dont la curiosité pour les spectacles chorégraphiques a été avivée par l’expérience vécue au contact des artistes. Le suivi électronique des ouvertures permet de repérer les personnes inté- ressées par l’actualité chorégraphique de l’organisation.

La participation spontanée des internautes pour commenter les qualités des spectacles sur un blog institutionnel est généralement très faible, ce qui requiert un travail important de la part de l’équipe de communication pour l’alimenter avec un résultat incertain pour influencer les processus de décision des lecteurs du blog. De plus, les interactions des internautes se sont développées plus massive- ment dans les réseaux sociaux. Cela a incité plusieurs structures à interrompre l’entretien d’un blog.

64. Renaud Legoux, Yannick St-James, “A Taste of What’s to Come: The Appetitive Value of Sequential Product Launches”, International Journal of Arts Management, 13 (1), 2010, p. 4-11.

Le directeur de la structure 1 a indiqué que « l’embauche d’un community manager a été décisive ; nous avons observé une hausse de la fréquentation de 12 % depuis ». La corrélation temporelle entre l’engagement d’un community manager et la progression de la fré- quentation ne peut néanmoins être interprétée dans cet exemple sous la forme d’un lien de causalité directe. La structure s’est engagée aussi dans un travail protéiforme de développement des publics, notamment par une politique d’accueil d’artistes en résidence.

Le temps nécessaire pour alimenter en informations imagées les réseaux sociaux est un obstacle au développement des outils numériques quand le budget de la structure et la conduite du projet artistique de la direction ne permettent pas de dégager au moins une personne dédiée. Il s’agit d’un pan du travail de communication qui peut être peu ou non rémunéré dans une organisation.

“ Très honnêtement, on a pu dégager un peu de temps de travail pour l’alimentation du Facebook et c’est bien fait, sur le site, sur l’actuali- sation. Mais on n’a pas de webmaster et si on voulait vraiment aller plus loin, je pense que ça veut dire un poste, un temps de travail dédié, et ce n’est pas la priorité. La priorité, elle sera peut-être plus sur la relation publique, l’action sur le territoire. Peut-être bientôt sur l’administratif parce qu’à force de gonfler de tous les côtés, l’ad- ministratif aussi gonfle. ”

(Directeur, structure pluridisciplinaire 8)

Plusieurs entretiens ont témoigné ainsi d’un retard des équipes des structures ou de compagnies dans le développement des plans de communication numérique.

“ Au mieux c’est un peu hasardeux la communication à mon avis [rires]. Je pense qu’on est un peu dans cette zone. Et je pense qu’il y a plein de compagnies où c’est comme ça, c’est « espérons que ça marche », ou alors on le fait parce qu’il faut faire comme tout le monde. ”

(Administrateur, compagnie 17)

Le désengagement observé dans la lecture des journaux et de livres au profit d’une culture de l’écran pour une partie de la population lors de la dernière enquête nationale sur les pratiques culturelles des français66 se prolonge par un intérêt accru pour les

images, ce qui conduit à une montée en puissance d’Instagram par rapport à Facebook.

“ Aujourd’hui plus personne n’est sur Facebook ; tout le monde est sur Ins- tagram. Donc j’ai compris qu’il fallait que je change de business plan. ”

(Chorégraphe, compagnie 3)

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