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Une prime de gestion visant à garantir la stabilité et la prévisibilité de revenu

conciliant les différents objectifs poursuivis

2) Une prime de gestion visant à garantir la stabilité et la prévisibilité de revenu

500. Dernier terme de la formule du complément de rémunération, la prime de gestion a pour objet de compenser les coûts de commercialisation de l’électricité et des garanties de capacité, ainsi que le coût des contrôles réalisés par les organismes agréés. Les coûts de commercialisation correspondent notamment aux frais d’accès aux marchés de l’électricité et de capacité ainsi qu’au coût des écarts facturés par RTE sur ces deux volets. Cette prise en compte des coûts de gestion est une nouveauté par rapport au système de l’obligation d’achat antérieur, dans lequel les frais de gestion administrative et de commercialisation de l’électricité achetée n’étaient pas compensés aux acheteurs obligés. Cette innovation se situe dans la continuité de plusieurs prises de position institutionnelles favorables à la compensation de ces coûts403, mais dont la mise en œuvre restait bloquée par la rédaction des dispositions des articles L.121-6 et suivants du code de l’énergie.

501. Cette prime de gestion est instituée par l’article R.314-41 du code de l’énergie, qui dispose que « la prime unitaire de gestion est représentative des coûts supportés par le

400 Arrêté du 13 décembre 2016 fixant les conditions d'achat pour l'électricité produite par les

installations utilisant à titre principal le biogaz produit par méthanisation de déchets non dangereux et de matière végétale brute.

401 Arrêté du 13 décembre 2016 fixant les conditions du complément de rémunération pour l'électricité

produite par les installations utilisant à titre principal l'énergie extraite de gîtes géothermiques.

402 DGEC, « Architecture du complément de rémunération », Atelier du 28 mai 2015.

403 Délibération de la Commission de régulation de l’énergie du 9 octobre 2012 portant proposition

relative aux charges de service public de l’électricité et à la contribution unitaire pour 2013 ; Cour des comptes, Communication, La contribution au service public de l’électricité (CSPE), juin 2012.

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producteur pour valoriser sa production sur les marchés de l'énergie et de capacité ». Cette

disposition précise notamment que le montant de la prime unitaire de gestion est versé mensuellement, sur la base de la production mensuelle, et est fixée pour toute la durée du contrat d'une installation sans pouvoir faire faire l'objet d'une variation rétroactive. Cette précision est essentielle, car elle intègre dans le fonctionnement de la prime de gestion l’objectif du complément de rémunération d’apporter la garantie d’un revenu fixe sur la durée de vie de l’installation, et améliore donc les conditions de financement des projets404. Cette

volonté de stabilité a également amené à écarter l’option d’une prime dégressive, défendue par la CRE qui y voyait un moyen de refléter les effets d’apprentissage et de tenir compte de l’amortissement des investissements nécessaires au développement de l’activité d’agrégation, notamment des outils de prévision de la production non commandable405.

502. La mise en œuvre de ce paramètre a soulevé deux questions, l’une portant sur l’opportunité de fixer une prime de gestion commune à l’ensemble des filières ou des primes spécifiques à chaque filière, et l’autre portant sur le niveau adéquat de la prime de gestion.

503. Relativement à la première question, la DGEC a opté pour la différenciation du niveau de la prime selon les filières, comme le prévoyait son projet initial406 et contre l’avis de

la CRE407. Celle-ci préconisait au contraire de fixer une prime de gestion commune à

l’ensemble des filières en vue de « neutraliser » ce facteur dans le choix des actifs par les agrégateurs, de manière à les inciter à constituer des portefeuilles d’installations les plus diversifiés possible et à limiter ainsi par foisonnement le volume global des écarts.

504. Relativement à la seconde question, la mise en œuvre de ce terme a été marquée par la vigilance de la CRE pour que le dimensionnement de la prime de gestion soit « strictement proportionné à son objet ». Afin d’évaluer cette proportionnalité, la CRE se fonde sur une mise en balance entre deux éléments. Elle considère d’une part les coûts pour les producteurs de l’équilibrage de leur production, c’est-à-dire en général le coût de la délégation de cette obligation à un responsable d’équilibre. Elle prend en compte d’autre part les profits que les agrégateurs peuvent tirer de la mise en place du complément de rémunération. En effet, premièrement, la définition normative de la valorisation sur les marchés de l’électricité et de capacité peut leur permettre de tirer des bénéfices de performances meilleures que la référence retenue dans la formule du complément de

404 Réponse de la Commission de régulation de l’énergie à la consultation de la DGEC sur l’évolution

des mécanismes de soutien aux installations sous obligation d’achat, p.2.

405 Délibération de la Commission de régulation de l'électricité du 9 décembre 2015 portant avis sur le

projet de décret relatif au complément de rémunération mentionné à l’article L. 314-18 du code de l’énergie.

406 DGEC, « Architecture du complément de rémunération », Atelier du 28 mai 2015.

407 Délibération de la Commission de régulation de l'électricité du 9 décembre 2015 portant avis sur le

projet de décret relatif au complément de rémunération mentionné à l’article L. 314-18 du code de l’énergie.

171 rémunération des installations de leurs périmètres. Deuxièmement, la qualité de la prévision de la production des installations de leurs périmètres et le foisonnement des écarts au sein de ceux-ci peuvent leur permettre de limiter le coût de leurs écarts. Troisièmement, un surplus de revenu est potentiellement accessible aux agrégateurs, s’ils sont en mesure de faire participer les installations de leurs périmètres au mécanisme d’ajustement. Compte tenu de tous ces éléments, la CRE a, dans sa délibération du 9 décembre 2015, situé le montant adéquat de la prime de gestion dans une fourchette allant de 0,5 à 1 €/MWh408. Cependant, en pratique, les niveaux retenus dans les arrêtés tarifaires sont plus élevés, et varient entre 1 et 2,8 €/MWh selon les filières. Dans ses décisions, la Commission européenne a toutefois estimé que ces niveaux peuvent être considérés comme raisonnables, dans la mesure où ils ont été calculés sur base des coûts moyens d'équilibrage observés409.

II/ Une mise en œuvre de la valorisation des garanties d’origine révélatrice de la difficulté à concilier les différentes finalités poursuivies

505. La LTECV prévoyait dans sa rédaction initiale que la formule du complément de rémunération intègre un quatrième terme, celui de la valorisation des « garanties d’origine ». Cet instrument, mis en place par les directives relatives à la promotion de la production d’électricité renouvelable, a pour objet de prouver au client final l’origine renouvelable de l’électricité achetée. Si sa délivrance aux producteurs qui en font la demande est une obligation, le fonctionnement du mécanisme d’obligation d’achat, dans lequel le bénéfice de la valorisation de ces garanties est déduit du tarif d’achat, aboutissait dans les faits à la quasi- inexistence d’un marché dédié. Le législateur a donc souhaité tirer parti de la mise en place d’un second mécanisme de soutien et du fait que l’électricité produite reste la propriété du producteur qui bénéficie du complément de rémunération pour rendre possible le développement d’un tel marché.

506. Cependant, le système des garanties d’origine se distingue des autres termes de la formule du complément de rémunération par son fondement juridique et par sa finalité spécifique. Celle-ci venait donc s’ajouter à l’équilibre établi par le législateur entre les différents principes directeurs de la LTECV. En outre, le législateur n’a pas jugé opportun de préciser les modalités de prise en compte de la valorisation des garanties d’origine, ni même les objectifs précis poursuivis par l’intégration de ce paramètre dans la formule du complément de rémunération.

408 Délibération de la Commission de régulation de l'électricité du 9 décembre 2015 portant avis sur le

projet de décret relatif au complément de rémunération mentionné à l’article L. 314-18 du code de l’énergie.

172 507. Il en a résulté une longue hésitation sur les finalités à donner à ce terme de la formule dans la mise en place du complément de rémunération, processus compliqué par la prise de conscience que le cadre de la LTECV rendait impossible la conciliation des différents objectifs envisagés (A). Cette situation a mené à la modification des termes de la loi, en vue de permettre la valorisation des garanties d’origine par l’Etat lui-même (B).

A/ L’existence d’un « triangle d’incompatibilité » entre les objectifs poursuivis dans la valorisation des garanties d’origine

508. Etant donné les termes de la LTECV, l’intégration de la valorisation des garanties d’origine dans la formule du complément de rémunération était de nature à recevoir diverses interprétations, tant au niveau des objectifs poursuivis qu’au niveau des modalités pratiques. La disposition prévoyant cette intégration a en effet été votée par le Parlement sans que son objectif ne soit clairement tranché, ni dans la loi elle-même, ni même dans les travaux préparatoires et les débats. Si, d’un côté, était mis en avant l’objectif de mettre fin à la situation de quasi-inexistence d’un marché des garanties d’origine en France, qui était une conséquence du fonctionnement de mécanisme de l’obligation d’achat, d’un autre côté l’objectif de réduire par le moyen de la valorisation des garanties d’origine le coût des mécanismes de soutien était également envisagé.

509. Or, dans la phase de mise en œuvre des dispositions de la loi, la conciliation de ces objectifs, auxquels s’est en outre ajouté celui d’assurer la traçabilité de la production d’électricité renouvelable, est rapidement apparue impossible du fait même de la rédaction de la LTECV.

510. L’incertitude laissée par la LTECV sur la finalité de la valorisation des garanties d’origine dans le cadre du complément de rémunération laissait donc la porte ouverte à diverses options (1). Il est cependant apparu, au fur à et mesure des tentatives successives de mise en place d’un régime de valorisation de ces garanties, qu’il existait dans le cadre législatif mis en place par la LTECV un « triangle d’incompatibilité » entre la poursuite simultanée des trois objectifs envisagés (2).

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