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CHAPITRE V — RÉSULTATS

5.2 Expérience sur le terrain

5.2.1 PREMIÈRE SEMAINE

Dates : Mercredi 11 et samedi 14 juin 2014 Lieu : SFCGM.

Objectifs de la semaine

 Permettre à chacun de se présenter ;

 Encourager la discussion au sein du groupe ;  Installer une ambiance ludique et créative ;  Favoriser la spontanéité de chacun ;

 Susciter l’intérêt pour la création ;

 Apprendre à mieux se connaître soi-même.

La première semaine s’est avérée comme une phase d’initiation. Au cours de deux ateliers, il a fallu stimuler l’intérêt du groupe à la créativité, les guider et les encourager pour entrer dans un processus de création. Les ateliers se sont concentrés avant tout sur les présentations de chacun, du projet d’ateliers de photographie ainsi que les objectifs afin que tous comprennent les principes des ateliers. En tant qu’accompagnatrice et observatrice, il était essentiel d’être rapidement acceptée par le groupe, donc il a dû établir une confiance entre participants et moi-même les encourageant ainsi à faire connaissance de chacun des membres du groupe.

Au premier atelier, je me suis présentée aux participants en décrivant mon parcours de formation, ma situation actuelle, mes attentes pour le projet ainsi que le programme des ateliers. Puis, je me suis assurée que le groupe avait bien saisi le sens du projet ainsi que leur responsabilité et leur travail au cours de ces trois semaines. J’ai laissé chacun se présenter à travers la réalisation du jeu six dessins. L’exercice Mes impressions sur mon

voisin avait pour but de favoriser un premier échange au sein du groupe. Lors du deuxième

atelier, le groupe avait déjà acquis une certaine confiance par le jeu vrai ou faux, a été en mesure d’échanger plus d’information sur leur parcours, leur personnalité ou leur passion. Les participants étaient beaucoup plus naturels que dans le premier atelier et ils se sont intéressés davantage aux autres.

 Analyse descriptive Activités réalisées : 1) Présentation du projet. 2) Le jeu : les six dessins.

3) Mes impressions sur mon voisin par la photo. 4) Le jeu : vrai ou faux.

5) Les objets du quotidien en quelques photos.

6) Discussion sur les Chinois nés au Québec et sur leur identité. 7) Impressions du SFCGM en quelques photos.

8) L’autoportrait

Les ateliers ressemblaient à des jeux qui prenaient différentes formes comme le dessin, l’écriture ou la photographie favorisant un engagement dans les activités. Cette dimension ludique a conquis les participants et les a aidés à les rendre curieux envers les autres. Aborder par le jeu les éléments de leur vie quotidienne a créé un climat de détente. Toutefois, la qualité esthétique des réalisations n’était pas un élément qui faisait partie des attentes, le plus important consistait à favoriser l’expression de chacun et la discussion.

Des réactions aux activités révélatrices de profils variés

Lors du premier atelier, sur les treize personnes inscrites au projet, dix se sont présentées et seulement six d’entre elles ont participé aux ateliers suivants. Le groupe se composait en

majorité de femmes âgées entre 20 et 35 ans étaient pour la plupart des étudiants ou de nouveaux arrivants sans emploi. Parmi eux, certains ont immigré au Québec à l’âge de seize ou dix-huit ans. Ceux-ci semblaient moins timides et un peu plus confiants vis-à-vis de leurs réalisations. Ainsi, lors de l’activité des six dessins, ceux qui ont immigré tôt au Canada les ont réalisés et présentés facilement au groupe alors que ceux ayant immigré plus récemment n’ont produit que trois ou quatre dessins avec plus d’effort.

La représentation des objets du quotidien

À la fin de la première rencontre, j’ai demandé aux participants de faire des photographies en dehors de l’atelier. Ils ont présenté leurs réalisations la semaine suivante. Le but de l’exercice était de les encourager à s’exprimer et à évoquer quelque chose de leur vie quotidienne. À travers ces objets banals de leur environnement, la photographie servait de vecteur de communication et d’expression pour témoigner d’espaces de vie, d’animaux, de plantes, de moyens de transport, etc.

Liya, une des participantes, a présenté une série de plats chinois illustrant sa nostalgie de la Chine, son pays natal et celui de sa famille actuellement. Ce sont des mets qu’on ne trouve pas à Montréal et qui lui remémoraient ses racines et ses proches. Par exemple, les gâteaux dans la première photo à droite représentent des pâtisseries artisanales traditionnelles chinoises qui sont le symbole du temps des fêtes. Ses images ont eu un écho dans le groupe lors sa présentation et elles éveillaient beaucoup de souvenirs familiaux pour chacun.

Ces plats manquaient à Liya tout comme sa famille surtout lors des périodes de fêtes traditionnelles chinoises : la fête de la Lune ou encore le Nouvel An chinois. Ces nourritures sont un lien entre Liya et sa famille. Le ravioli n’est pas seulement un plat populaire, il est considéré comme un symbole culturel en Chine. Il a une signification particulière pour le peuple en tant que plat incontournable lors de fêtes traditionnelles en compagnie d’amis ou de la famille. On trouve différentes sortes de raviolis à Montréal, mais le goût ne peut être comparé à celui des plats cuisinés en famille. Liya nous a raconté les traditions de sa famille. Par exemple, si l’un des siens part loin de la maison, sa mère lui

prépare des raviolis pour lui souhaiter bon voyage et bonne chance, une manière de saluer son départ.

Les photos de Liya illustrent l’absence de sa famille et en particulier de sa mère à qui elle pense souvent. Elle nous a également raconté le dernier repas que sa mère lui avait préparé avant qu’elle quitte la Chine qui reste gravée dans sa mémoire et a une signification particulière. Désormais elle devrait apprendre à être indépendante en vivant loin de ses parents. Sa mère lui répétait souvent que « la vie est courte et qu’il faut en profiter tant qu’on est en vie ». Liya le comprend très bien aujourd’hui et elle est venue à Montréal pour

profiter de la vie. Malgré tout, le fait de savoir que ses parents vieillissent loin d’elle l’a fait énormément souffrir et l’a fait se sentir coupable de ne pas pouvoir rester auprès d’eux pour en prendre soin.

La présentation de Liya a provoqué des émotions dans le groupe, car elle n’est pas la seule qui se sent coupable d’être loin de ses proches. À la suite à cette présentation, les participants ont l’un après l’autre raconté leur propre histoire, en particulier leur relation familiale. Ici la photographie a agi donc comme médiation où les participants ont révélé différentes dimensions de leur vie. Ainsi, ce travail individuel et les réactions collectives qu’il a suscitées ont favorisé un sentiment d’appartenance à une communauté et un rapprochement entre les participants.

 Analyse réflexive

L’exercice de l’autoportrait

« Une photographie est réussie lorsque l’observateur s’approprie l’image et construit sa propre symbolique, sa narration personnelle. »36 (Vincent Fillon)

Deux ateliers ont eu comme objectif la construction d’un autoportrait. Par le biais des exercices proposés, les participants devaient parvenir à comprendre la part de la « narration personnelle » et la part « symbolique » de chacun, c’est-à-dire ce qui touchait davantage le résultat d’un processus de création ou d’imagination. Ainsi, la production photographique dévoilait des perceptions jusqu’ici enfouies à l’intérieur d’eux-mêmes.

Autour de questions essentielles comme qui êtes-vous ? Que ressentez-vous ? Il ne s’agissait pas d’esquisser le portrait de chacun, mais ce qu’ils percevaient de leur essence (Jobin, 2010, p. 284), en d’autres termes, ouvrir les cœurs et être honnêtes avec soi-même. Après tout, l’autre n’est-il pas notre miroir ?

La dimension ludique

Dès le départ, nous avons proposé des jeux créatifs et ludiques pour favoriser la communication et détourner des situations qui auraient pu être gênantes. Lors de la première rencontre, l’aspect ludique a révélé son importance. Les participants se montraient de plus en plus ouverts et libérés dans le jeu, ils commençaient à avoir un réel intérêt pour les ateliers. Cette dimension ludique aura aussi contribué à stimuler leur créativité et leur imagination.

L’ouverture à la communication par la démonstration/l’exemple

Au départ, les échanges au sein du groupe étaient plutôt limités. Les participants ne discutaient pas vraiment entre eux bien que cela ait fait partie des consignes. Au cours des activités, ils sont se sont dégênés et se sont ouverts progressivement à la discussion. Par exemple, quand je leur demandais de venir en avant pour faire l’activité, tous restaient silencieux. Pour contourner la situation, il a fallu commencer par leur faire une démonstration, ce qui a permis d’établir une ambiance plus chaleureuse. Ces démonstrations les ont amenés à participer de façon plus active, et leur engagement s’est fait plus en douceur.

Exemples de réalisations des participants : première semaine

Figure 14 : La réalisation de Zhi pour les six dessins Figure 13 : La réalisation

de Xue pour les six dessins