La pratique de la loi MOP aux Autoroutes Paris Rhin-Rhône

Mon interlocuteur a été Monsieur Philippe DE BECHEVEL (tél. : 04 72 60 11 17 –

philippe.debechevel@aprr.fr), responsable du service expertise et contrôle à la direction de l’innovation, de la construction et du développement (DICD) aux Autoroutes Paris Rhin- Rhône (APRR).

Il intervient au profit des conducteurs d'opérations sur des missions de contrôle de la cohérence dans le déroulement des procédures, les dossiers techniques, ainsi que les audits de sécurité routière de construction ou d'élargissement d'autoroutes.

La société APRR (Autoroutes Paris-Rhin-Rhône) est une société anonyme chargée de l’exploitation d’un réseau autoroutier français.

Avant 2005, c’était une société d’économie mixte de concession d’autoroute (S.E.M.C.A) qui assurait l’acquisition des terrains, la concession et l’entretien de son réseau autoroutier. Depuis le 20 février 2006, date de sa privatisation par l'État français, APRR appartient au consortium EFFARIE (composé d’EIFFAGE et de MACQUARIE, une banque d'investissement australienne).

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L’organisation de la maîtrise d’ouvrage :

Le directeur adjoint de la Direction de l’Innovation, de la Construction et du Développement (DICD) assure la fonction de « directeur de la maîtrise d’ouvrage ». Avec l’aide de son adjoint, il encadre les 6 conducteurs d’opération d’APRR qui traitent par an une dizaine d’opérations.

Les 6 conducteurs d’opérations reçoivent l’assistance du Service Expertise et Contrôle de M.DE BECHEVEL.

Conclusion partielle :

Le choix très fort fait par APRR d’avoir une équipe de maîtrise d’ouvrage la plus réduite possible engendre en contrepartie le fait que la majorité des opérations sont réalisées en maîtrise d’œuvre privée.

APRR s’entoure d’un très grand nombre d’assistants au maître d’ouvrage comme nous le ferons ci-après.

Autre choix fort à la fin des années 1980 / début 1990 : la société APRR, a élaboré un programme générique d’opération et une stratégie de conduite.

A partir de cet outil, les conducteurs d’opération rédigent le programme spécifique d’une opération.

Conclusion partielle :

Le choix fait par APRR de mettre à disposition des conducteurs d’opérations, un programme générique d’opération est le même que celui que j’ai fait en rédigeant le programme-cadre SCORPION pour la construction d’un zone technique neuve.

Ce programme-cadre est à disposition de tous les conducteurs d’opérations et maîtres d’œuvres internes de l’ESID de Lyon qui l’adapteront librement à leur opération SCORPION particulière.

Les différents types de maîtrise d’œuvre à disposition des Autoroutes Paris Rhin-Rhône

1/ - La Maîtrise d’œuvre Interne

Il existe au sein de la Direction de l’Ingénierie et des Systèmes d’Information une maîtrise d’œuvre interne de l’ordre de 50 personnes, dont une cellule de 10 personnes environ pour les petites opérations de génie civil.

Le restant de l’effectif a une grande expertise dans les équipements techniques (gare de péage notamment) et apporte également une assistance technique pointue pour la maintenance.

Conclusion partielle :

Comme pour le S.I.D, la société APRR possède une maîtrise d’œuvre intégrée pour les petites opérations de génie civil, mais également avec un très haut niveau d’expertise en matière d’équipements techniques.

2/ - Cas de recours à la maîtrise d’œuvre privée (externe) :

La conception et la maîtrise d’œuvre des autoroutes était assurée jusqu’au début 1980 par le Ministère de l’Équipement et des Transports, avant que l’État ne confie cette mission de maîtrise d’œuvre et d’assistance à maîtrise d’ouvrage à la société d’ingénierie SCETAUROUTE.

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Au début de l’année 2000, SCETAUROUTE devient l’une des filiales du groupe EGIS, groupe international d’ingénierie, de montage de projets et d’exploitation.

En ingénierie et conseil, EGIS intervient dans les domaines des transports, de la ville, du bâtiment, de l’industrie, de l’eau, de l’environnement et de l’énergie.

Dans les domaines routiers et aéroportuaires, EGIS élargit ses compétences au développement de projets, à l’investissement en capital, au « clé en main » d’équipements, à l’exploitation et aux services à la mobilité.

Comme le secteur de l’ingénierie est devenu concurrentiel dans les années 2000, APRR met en concurrence les maîtres d’œuvres privés au travers d’appels d’offres.

La majorité des opérations sont aujourd’hui réalisés en maîtrise d’œuvre privée par de gros bureaux d’études (EGIS, SETEC, INGÉROP, SISTRA, ARTELIA, NOX, etc.).

Nota : La société APRR a rarement recours aux marchés globaux (type Conception / Réalisation), c’est uniquement réservé aux très gros projets de génie civil telle la construction d’un viaduc autoroutier.

La société APRR n’est pas soumise au code des marchés publics, ni à la loi MOP. Néanmoins, les missions définies par la loi MOP sont appliquées dans le cadre des opérations.

Toutes les opérations réalisées en maîtrise d’œuvre privée sont articulées autour d’un groupement qui assure les missions suivantes :

- Les missions de maîtrise d’œuvre principale correspondant aux missions définies dans la loi MOP : AVP, PRO, ACT, VISA, OPC, DET, AOR et RECOLEMENT.

- Les missions de maîtrise d’œuvre complémentaire comprenant :

o Des missions préliminaires permettant d’affiner la définition des besoins et du programme précis,

o Des missions d’accompagnement permettant d’établir les dossiers administratifs nécessaires à la préparation de l’exécution des travaux (déclaration d’utilité publique, ICPE, loi sur l’eau, archéologie, bruit de chantier…).

- Les missions de maîtrise d’œuvre générale portant sur la coordination et le contrôle du projet, l’analyse de la valeur et de la gestion des risques, la communication interne et externe, ainsi que les bilans d’opération.

- Les missions d’assistance à maîtrise d’ouvrage en matière de gestion de l’opération, d’aide aux opérations foncières, d’assistance aux études des prestataires extérieurs (désignation, avis technique, suivi), d’assistance à la réception des travaux.

Déroulement d’une opération en maîtrise d’œuvre privée :

Dans tous ces contrats de maîtrise d’œuvre privée, APRR demande un groupement constitué des personnes suivantes :

- Un directeur de projet, interlocuteur principal du conducteur d’opération, - Un responsable des études,

- Un directeur des travaux,

- Un responsable de toutes les missions d’assistance au maître d’ouvrage. Ces personnes ne peuvent être remplacées en cours d‘opération sans avis d’APRR.

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Pour les opérations de bâtiment (gare de péage, centres de services autoroutiers, aires de service), l’architecte et les bureaux d’études spécialisés sont intégrés dans le groupement de maîtrise d’œuvre privée.

Etant donné que les opérations autoroutières durent longtemps (4 à 6 ans), elles sont jalonnées par de nombreuses réunions, dont les principales sont :

- Réunion de coordination de la maîtrise d’œuvre privée sur le pilotage du projet (tous les 2 mois),

- Réunion de suivi technique entre le conducteur d’opération et le maître d’œuvre privé (environ 1 fois par mois),

- Réunion de recalage budgétaire (2 fois par an),

- Réunions spécifiques sur les équipements (fréquence variable).

La présence insuffisante du maître d’œuvre privée sur le chantier est parfois constatée. APRR a donc recours à du contrôle extérieur en conception et en travaux.

En travaux, il y a 2 types de contrôles extérieurs :

- Sur les terrassements / structures des chaussées (laboratoires routiers), - Sur les matériaux (CEREMA, CEBTP, …).

La réception des ouvrages est confiée au groupement de maîtrise d’œuvre privée, mais pour les équipements, APRR est présente avec sa maîtrise d’œuvre interne qui possède toutes les compétences.

Mode de consultation des maîtres d’œuvre privés ?

Les consultations sont réalisées en procédure négociée après mise en concurrence. Les offres sont découpées de la manière suivante :

- 25% pour le coût d’objectif,

- 15% pour le prix des missions de maîtrise d’œuvre, - 60% pour la valeur technique.

La négociation est menée par la conduite d’opération (équipe de 4 personnes) face à l’équipe de maîtrise d’œuvre privée au cours d’une séance d’une 1h30 découpée en 20-30 minutes de présentation de l’offre, puis 1h00-1h10 de questions / réponses.

Il n’y a jamais plus de 2 tours de négociation et cela se solde par un nouvel acte d’engagement signé entre le groupement de maîtrise d’œuvre privée et APRR.

La négociation ne porte pas que sur le prix, mais également sur le respect du coût d’objectif de l’opération et sur l’organisation de l’équipe de maîtrise d’œuvre (planning, phasage…).

Dans l’appel d’offres, APRR demande aux candidats de remplir un calendrier de mise en

place des moyens humains en liaison avec le planning prévisionnel.

Ce document permet aux candidats de présenter selon le calendrier de déroulement des missions de maîtrise d’œuvre, les moyens humains déployés (directeur d’études, ingénieur expérimenté / confirmé / débutant, technicien expérimenté / confirmé / débutant, dessinateur, secrétaire tout au long de l’opération.

Associé à la décomposition du prix global et forfaitaire de l’ensemble des missions de maîtrise d’œuvre privée, le calendrier de mise en place des moyens humains permet à APRR d’identifier très rapidement les carences des offres des candidats pour chaque mission de maîtrise d’œuvre privée.

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Conclusion partielle :

A l’instar de ce que mon Service pratique pour les marchés de contrôle technique ou pour les marchés de coordination sécurité et protection de la santé, il me semble possible d’adapter aux marchés de maîtrise d’œuvre privée une sorte de calendrier de mise en place des moyens humains au fil de l’enchainement des missions de maîtrise d’œuvre privée dans le déroulement d’une opération.

Retour d’expérience de la pratique de la loi MOP chez APRR au travers de la vision du chef du service Expertise et Contrôle (M.DE BECHEVEL) :

« Il faut être présent aux côtés d’un maître d’œuvre privé, mais surtout pas pendant les échanges avec les entreprises. Cela a tendance à déresponsabiliser le maître d’œuvre privé et l’entreprise joue alors sur la présence trop fréquente du maître d’ouvrage pour faire passer ses solutions techniques au détriment du respect du CCTP du maître d’œuvre privé et parfois du programme de l’opération.

Les contrats de maîtrise d’œuvre privée doivent être considérés comme des partenariats entre un maître d’ouvrage et un maître d’œuvre privé et non comme une relation client / prestataire.

Il faut arriver à créer une équipe de projet avec beaucoup de transparence et d’échanges entre le maître d’ouvrage et son maître d’œuvre privé. »