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2. Le Plan Rhône, une nouvelle dynamique de gestion ?

« Le plan Rhône, par l’étendue du territoire ainsi couvert et par la diversité du partenariat réuni, contribue à donner une existence, perceptible par tous, à la notion de bassin. Nous donnons ainsi à un territoire de projets une dimension nouvelle, répondant à des problématiques qui dépassent le seul cadre de chacune des régions et impli-quent donc une approche nouvelle, interrégionale » (Lacroix 2007, p. 4). Cet extrait du discours du préfet coordonnateur de bassin témoigne d’une nouvelle optique de gestion dite intégrée du Rhône. Le Plan Rhône s’inscrit dans une volonté ancienne d’appréhender le fleuve dans son ensemble. Il développe une logique de contractualisation, illustrant le basculement d’une logique dite de gui-chet à une logique dite de projet (Alvergne et Taulelle 2002).

Suite aux inondations de 2002 et de 2003 dans la partie médiane et aval du Rhône français, des Etats généraux du fleuve Rhône, qui réunissaient les conseils régionaux de Languedoc-Roussillon, de Rhône-Alpes et de Provence-Alpes-Côte d’Azur, ont été organisés en 2005 pour diminuer la vulnérabilité des populations riveraines. Les partenaires initiaux lors de la proposition du Plan Rhône sont l’Etat, le Comité de Bassin Rhône Méditerranée, les trois conseils régionaux déjà cités auxquels s’ajoutent les conseils régionaux de Bourgogne et de Franche-Comté et la Compagnie Nationale du Rhône (CNR). Ce projet global a été approuvé par le Comité Intermi-nistériel à l’Aménagement et à la Compétitivité des Territoires (CIACT) du 6 mars 2006. Le Con-trat de Projets Interrégional Etat-Région Plan Rhône (CPIER) 2007-2013, signé le 21 mars 2007, regroupe les partenaires déjà évoqués ainsi que les Voies navigables de France (VNF) et l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie (ADEME). Jean-Pierre Lacroix, préfet coor-donnateur du bassin Rhône-Méditerranée, lors de la signature du Plan Rhône, dans son discours, dresse la genèse du projet en insistant à deux reprises sur les crues de novembre et de décembre 2003 : cette rupture est donc questionnée par le choix des bornes chronologiques de cette re-cherche. En effet, si les crues voire les inondations sont récurrentes pour le Rhône, celles de 2003 (mais aussi de 2002) semblent à l’origine d’une nouvelle trajectoire du corridor rhodanien.

En outre, l’originalité de la démarche du Plan Rhône réside dans sa prise en compte du conti-nuum fluvial en s’émancipant des maillages administratifs au profit d’une logique concertée, parti-cipative et intégrée.

est fermé en 2013 (http://www.eptb-rhone.fr) car l'Institution Interdépartementale est dissoute (Echange personnel du 13/03/2013 avec le directeur de l’EPTB Territoire Rhône).

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C. Bilan. Le Rhône français entre Etat et vallée

La période d’étude varie selon l’échelle spatiale considérée, quand l’analyse plus thématique partage les mêmes traits.

A l’échelle nationale, la deuxième génération d’aménagements du Rhône naît dans l’entre-deux-guerres avec la loi de 1921 et la création de la CNR. Néanmoins, la première réalisation Génissiat est mise en eau en 1948, dans la période de l’Après-guerre dans un contexte de recons-truction. La principale période couverte à cette échelle s’étend de 1945 à 2013. A l’échelle régio-nale, l’étude présentée débute le 1er janvier 2002. Ce choix permet d’observer le Plan Rhône de sa création à sa mise en pratique ainsi que ses facteurs, c’est-à-dire l’entre-deux entre les crues de 2002 et celles de 2003 qui seraient le moteur de la construction du Plan Rhône. Ainsi, à l’échelle du linéaire, l’étude vise à embrasser la période de genèse et de mise en place du Plan Rhône au-tour de ses six volets. L’étude se clôt en 2013, à l’heure de la fin du premier Plan Rhône. Ces bornes temporelles s’expliquent par un questionnement sur l’émergence de la gestion intégrée du fait d’une rupture.

Thématiquement, à l’heure d’une gestion intégrant les différents enjeux rhodaniens, toutes les questions en lien avec le fleuve Rhône sont jugées dignes d’intérêt : l’alimentation en eau (l’approvisionnement et l’assainissement), les grands ouvrages transversaux (les barrages), la bio-diversité, l’éducation à l’environnement, l’entretien voire la restauration du cours d’eau, les inon-dations, l’irrigation et l’agriculture, les loisirs (à la fois les pratiques récréatives et touristiques), la navigation fluviale, le patrimoine, la pollution, les reconquêtes fluvio-urbaines, la sécheresse ou le réchauffement des eaux et les traversées.

D.Perspectives. Le Rhône, un fleuve international ou une nouvelle

discontinuité ?

Un élément important à rappeler est la frontière internationale qui traverse le Rhône, fron-tière entre la France et la Suisse, mais aussi entre l’Union Européenne (UE) et un pays hors zone UE. Les sources du Rhône se trouvent dans le massif du Saint-Gothard : après un linéaire de 160 kilomètres, le Rhône suisse devient un tributaire du Lac Léman dans la localité du Bouveret (commune de Port-Valais). Le lac Léman ne fait pas partie de la zone d’étude : certains enjeux du système lacustre semblent différents de ceux du système fluvial, même si ce dernier contribue au Lac Léman à 68% pour les eaux et les sédiments en suspension (Olivier et al. 2009). La gestion du Lac Léman est assurée par la Commission internationale pour la protection des eaux du Lé-man (CIPEL) qui est une commission transfrontalière franco-suisse qui travaille depuis 1962 à l’amélioration de la qualité des eaux du lac127. De même, la portion du Rhône du Lac Léman à la frontière n’est pas prise en compte. Ce statut international a un impact sur le Rhône français en termes de législation : la loi dite pêche de 1984 sur le débit réservé supérieur au dixième du mo-dule ne s’applique ni sur le Rhône, ni sur le Rhin du fait de leur caractère « international » (Bar-thélémy et Souchon 2009).

Le Rhône suisse et le Rhône français ont souvent été jugés chacun de leur côté, même s’ils partagent des enjeux communs, notamment les questions de gestion sédimentaire face aux

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vrages transversaux plus couramment appelés « chasses » du Rhône ou de la diffusion de pollu-tions et de contaminants. En effet, depuis la fin du XIXème siècle, le Rhône qu’il soit suisse ou français est très fortement aménagé (Olivier et al. 2009), ces aménagements multifonctionnels ont pu être vus comme des solutions face aux difficultés économiques ou aux extrêmes hydrolo-giques. Comme le Rhône français, le Rhône suisse est utilisé pour l’hydroélectricité. Différents opérateurs produisent de l’hydroélectricité à partir du Rhône. A l’aval du Lac Léman, les Services Industriels de Genève gèrent les barrages du Seujet, de Verbois et de Chancy-Pougny. Au Seujet, barrage de 1995, la puissance totale est de 5,6 MW et la production s’élève à 20 GWh par an, soit près de 1% de la consommation du canton de Genève128. A Verbois, dont la construction date de 1944, la puissance totale est de 100 MW pour une production de 466 GWh par an, soit 15% de la consommation du canton de Genève129. La centrale de Chancy-Pougny construite en 1925 est exploitée par la Société des Forces Motrices de Chancy-Pougny (dont les Services Industriels de Genève et la Compagnie Nationale du Rhône sont actionnaires) et produit 230 GWh, soit 7,6% de la consommation du canton de Genève130. L’objectif est alors double : produire de l’hydroélectricité et contrôler le niveau du Léman (Bréthaut et Pflieger 2013). Les quatre paliers existants (Ernen, Mörel, Chippis, Lavey) produisent 1,1 milliard de kilowattheures, soit la con-sommation annuelle de 250 000 ménages. La centrale d’Ernen présente une puissance totale de 34 MW et une production annuelle moyenne de 185 GWh. La centrale de Chippis-Rhône est une centrale au fil de l’eau d’une puissance totale de 40 MW pour une production annuelle moyenne de 240 GWh131. La centrale de Lavey, fondée sur un barrage au fil de l’eau près d’Evionnaz, une galerie d’amenée et une centrale souterraine132, a une production moyenne de 400 millions de kWh par an, soit un tiers des besoins du réseau électrique lausannois133. L’hydroélectricité a favo-risé la mise en place d’industries comme Lonza, Ciba et Alusuisse (Canton du Valais - Départe-ment des transports, de l’équipeDéparte-ment et de l’environneDéparte-ment, Service des routes et des cours d’eau 2008).

Des travaux scientifiques sur la comparaison entre le Rhône français et suisse sont dévelop-pés. Le projet GOUVRHONE, financé de 2012 à 2015 par la Confédération suisse, la Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL) Rhône-Alpes, l’Agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse, les Services Industriels de Genève, EDF ainsi que les cantons de Vaud et de Genève, porte sur la gouvernance transfrontalière du Rhône, du Lé-man à Lyon, autour de cinq axes : hydroélectricité et coordination amont-aval, gestion des ex-trêmes et coordination amont-aval, prélèvements de la ressource (irrigation, refroidissement des centrales nucléaires, alimentation en eau potable), gestion sédimentaire du fleuve et renaturation et niveau du Lac Léman134. Toutefois, ce travail se focalise sur le Rhône français.

128 http://www.sig-ge.ch/echo-citoyen/decouvrir-le-patrimoine-sig/connaitre-et-visiter-les-sites-sig/le-barrage-du-seujet, consulté le 04/06/2014. 129 http://www.sig-ge.ch/echo-citoyen/decouvrir-le-patrimoine-sig/connaitre-et-visiter-les-sites-sig/le-barrage-de-verbois, consulté le 04/06/2014. 130 http://www.sig-ge.ch/echo-citoyen/decouvrir-le-patrimoine-sig/connaitre-et-visiter-les-sites-sig/le-barrage-de-chancy-pougny, consulté le 04/06/2014. 131 http://www.fmv.ch/fr/metiers_producteur_electricite.htm, consulté le 04/06/2014. 132 http://www.silnativa.ch/fileadmin/documents/silnativa.ch/Lavey.pdf, consulté le 04/06/2014. 133 http://www.aqueduc.info/Lavey-amenagement-hydroelectrique, consulté le 04/06/2014. 134 http://www.unige.ch/environnement/polet/research/gouvress/gouvrhone.html, consulté le 04/06/2014.

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