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Perquisition et obligation de dépôt

Dans le document Journée 2010 de droit bancaire et financier (Page 99-102)

procédure pénALe : LA bAnque comme détentrice d’informAtions et de vALeurs

A. Perquisition et obligation de dépôt

La perquisition est réglée aux art. 241 ss CPP. Mesure d’exécution physique de la recherche de preuves et de valeurs patrimoniales, elle permet au mi-nistère public de pénétrer dans des lieux privés (art. 244 CPP). En ce sens, la perquisition porte atteinte à la sphère privée et notamment au droit au domicile, protégés tant par l’art. 8 CEDH14 que par l’art. 13 I Cst.

Le CPP prévoit à ses art. 246 à 248 des dispositions spéciales concer-nant la perquisition de documents et d’enregistrements. Il instaure une procédure de mise sous scellés (art. 248 CPP), qui existait déjà dans de nombreux codes cantonaux et dans l’ancienne loi fédérale sur la procédure pénale (PPF). Cette norme permet au tiers, ici la banque, de s’opposer à la perquisition de certains documents, notamment en faisant valoir un éven-tuel droit de refuser de témoigner. La majorité de la doctrine et, à sa suite, la jurisprudence considèrent que le détenteur doit demander la mise sous scellés mais qu’il ne peut y procéder lui-même. On doit cependant signaler un cas dans lequel le TPF a considéré que la documentation pouvait être remise sous scellés15. Concrètement, le CPP prévoit de façon catégorique qu’une fois la demande faite de mise sous scellés, l’autorité ne peut avoir accès aux documents. En effet, un effet suspensif s’attache au sort des do-cuments dont la mise sous scellés a été demandée16.

Il est difficile d’envisager une requête de mise sous scellés dans des si-tuations autres que celles où un secret d’affaires de la banque est concerné.

L’on peut toutefois imaginer que ce soit le cas lors d’une recherche indéter-minée de preuves ordonnée par une autorité pénale ou encore en présence d’un cas manifeste d’homonymie, voire si la mesure s’avère complètement disproportionnée.

Quoi qu’il en soit, la perquisition physique ne concernera que rare-ment la banque. En effet, cette mesure est particulièrerare-ment incisive car elle a des effets collatéraux très importants. Elle sera donc dans la plupart des cas remplacée par la notification d’un ordre de production ou “obligation de dépôt” selon la terminologie adoptée par l’art. 265 CPP17.

14 Convention du 4 novembre 1950 de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CEDH), RS 0.101.

15 BE.2008 8 du 10.9.2008, consid. 1. 5, cité par Keller (note 12) ad art. 248 CPP, N. 4.

16 Cf. CPP 248 I in fine et II ; également Commentaire romand Code de procédure pénale suisse, Bâle 2010, Chirazi ad art. 248, N. 7.

17 Chirazi (note 16) ad art. 244 CPP, N. 37.

L’obligation de dépôt (Herausgabepflicht ou Editionspflicht) est une perquisition “virtuelle”. Elle permet au ministère public de requérir de la banque détentrice18 la remise d’objets ou de valeurs patrimoniales dans un certain délai. Cette mesure peut être assortie de la menace des peines de l’art. 292 CP ou encore d’une amende d’ordre. L’art. 265 III CPP en fournit présentement la base légale. La peine-menace pour une violation de l’art. 292 CP, soit pour une insoumission aux actes de l’autorité, est l’amende qui peut s’élever jusqu’à Frs 10 000.– (art. 106 I CP).

L’obligation de dépôt, tout comme la perquisition, porte atteinte à la sphère privée (art. 8 CEDH, art. 13 I Cst.) du détenteur des documents dont l’apport est requis à la procédure. Dans le cas de la banque, ces documents contiennent des données soumises au secret bancaire qui sont susceptibles d’être portées à la connaissance du ministère public, des parties à la procé-dure, voire du public par la voie de la presse19 à l’occasion du procès.

L’obligation de dépôt étant une mesure plus proportionnée que la per-quisition et permettant d’atteindre de la même manière le but poursuivi (recherche de preuves ou de valeurs patrimoniales), elle devra être utilisée en priorité.

L’obligation de dépôt est une mesure mixte qui inclut tant la recherche de documents que le séquestre. Ceci explique l’emplacement de l’art. 265 CPP dans le chapitre consacré au séquestre.

Lorsque l’obligation de dépôt ne porte pas sur de la documentation dont l’autorité peut d’emblée ordonner le séquestre, on attendra de l’auto-rité le prononcé d’une mesure de séquestre distincte, une fois qu’elle aura pris connaissance des documents remis par la banque.

Selon le texte de l’art. 265 I CPP, l’obligation de dépôt vise des “objets ou des valeurs patrimoniales qui doivent être séquestrées”. Cette disposi-tion doit être lue en parallèle avec l’art. 263 I CPP qui délimite les objets et valeurs patrimoniales susceptibles d’être séquestrés20. On doit interpré-ter le interpré-terme “objet” comme englobant les documents qui seront utilisés comme moyens de preuve au sens de l’art. 263 I let. a CPP21.

18 ATF 6B_104/2007, consid. 3.4.

19 ATF 1P.223/2002, consid. 6.

20 Basler Kommentar Schweizerische Strafprozessordnung, Bâle 2011, Bommer / Gold-schmid ad art. 265 CPP, N. 6.

21 Schmid, Handbuch des schweizerischen Strafprozessrechts, Zurich 2009, N. 1125 ; Bommer / Goldschmid (note 20) ad art. 263 CPP, N. 25.

S’il entend refuser de produire les documents requis, fondé sur un autre motif que celui de ne pas s’incriminer, le détenteur devra requérir la mise sous scellés de la documentation, en application de l’art. 248 CPP.

B. Séquestre

Le séquestre est régi par les art. 263 ss CPP.

Il peut être défini comme “l’acte par lequel l’autorité compétente met un objet ou une valeur sous main de justice en acquérant sa maîtrise phy-sique ou en signifiant à son détenteur actuel une restriction au pouvoir d’en disposer”22.

C’est une mesure provisoire23 qui restreint le droit à la propriété ga-ranti par l’art. 26 Cst.

Comme le rappelle l’art. 263 CPP, le séquestre peut tendre soit à la sauve garde de moyens de preuve (séquestre probatoire ; art. 263 I let. a CPP), soit au maintien des valeurs sous main de justice afin de permettre, à l’issue du jugement de condamnation, leur restitution au lésé (art. 263 I let. c CPP), leur confiscation (art. 263 I let. d CPP et art. 71 CP), voire leur allocation (art. 73 CP), ou encore de garantir le paiement des frais de pro-cédure, des peines pécuniaires, des amendes et des indemnités (art. 263 I let. b CPP). Cette forme de séquestre est dite conservatoire24.

Le séquestre conservatoire peut également tendre à garantir le paie-ment de la créance compensatrice lorsque les valeurs patrimoniales à confisquer ne sont plus disponibles25. Ce type de séquestre n’est pas men-tionné à l’art. 263 CPP car il est prévu par l’art. 71 III CP qui complète donc cette disposition26.

22 Sträuli, “Territorialité de l’enquête pénale et garantie d’une activité irréprochable”, in Journée 1995 de droit bancaire et financier, Berne 1995, p. 126-127 et réf. citées ; dans le même sens, Matthey, “La gestion des avoirs saisis par le juge d’instruction”, SJ 1999 II 312.

23 ATF 135 I 257, consid. 1.5.

24 Matthey (note 22).

25 Rappelons que “la condamnation au paiement d’une créance compensatrice n’a qu’un caractère subsidiaire. Elle suppose l’existence d’une valeur patrimoniale confiscable, celle-ci étant toutefois devenue indisponible” (Bertossa, “Confiscation et corrup-tion : quelques réflexions sur la confiscacorrup-tion des avantages obtenus par le corrupteur actif”, SJ 2009 II 371 ss, p. 384).

26 Schmid (note 21), N. 1115.

IV. L’interdiction de communiquer au client l’existence d’une mesure

Dans le document Journée 2010 de droit bancaire et financier (Page 99-102)

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