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Le titre authentique exécutoire en droit international

procédure civiLe et exécution forcée, séquestre et Acte Authentique exécutoire

B. Le titre authentique exécutoire en droit international

Le titre authentique exécutoire, établi par hypothèse en Suisse où il est considéré comme exécutoire, peut fonder une exécution forcée dans tout Etat membre de la CL. A l’inverse, un titre authentique exécutoire établi dans un Etat membre de la CL peut fonder une procédure d’exécution for-cée en Suisse. C’est cette seconde hypothèse qui retiendra notre attention.

Le titre authentique exécutoire connaît selon la CL un régime à la fois proche mais aussi distinct de celui des jugements. Comme un jugement exécutoire, le titre authentique exécutoire ouvre la voie de l’exécution for-cée selon les art. 38 ss CL rév. (art. 57). Mais, à la différence d’un jugement, on ne parle bien que de l’exécution forcée du titre authentique exécutoire et non de sa reconnaissance59.

Les conditions de sa réception dans le champ de l’exécution forcée se-lon la CL sont : (i) qu’il porte sur une matière relevant de la CL rév.60, (ii) qu’il a été établi (“reçu”) dans un Etat lié par la CL rév. et (iii) qu’il y soit considéré comme exécutoire.

57 Visinoni-Meyer Cl. (n. 56), ad art. 352 no 3 ss.

58 Le créancier devrait avoir pour le moins accès à la protection que lui donnerait la mainlevée provisoire, soit la saisie provisoire ou l’inventaire.

59 Gaudemet-Tallon H. (n. 42), p. 389.

60 Ibidem.

Quel sera l’examen du juge de l’exequatur ? La procédure est identique à celle qui prévaut en matière d’exequatur d’un jugement (art. 57 ch. 1 CL rév.) : le juge de première instance statue au seul regard de l’acte au-thentique et de la déclaration exécutoire, qu’elle soit intégrée dans l’acte ou qu’elle figure dans un document annexe, tel le modèle décrit à l’Annexe V de la CL rév. (art. 57 ch. 4 CL rév.). Le juge de l’exequatur ne connaîtra évidemment pas les règles qui prévalent dans l’Etat d’origine en matière de forme et de contenu de l’acte authentique exécutoire, voire d’exclusion d’établissement de celui-ci61. Le juge sera ainsi captif des documents qui lui sont présentés. La procédure de recours permettra au débiteur – comme au créancier – de faire valoir tous les éléments de fait susceptibles de conduire à la confirmation ou à l’infirmation de la décision rendue par le premier juge (art. 327a al. 1 nouveau CPC).

Le champ d’examen de l’autorité de recours sera toutefois restreint puisque celle-ci “ne refuse ou ne révoque une déclaration constatant la force exécutoire que si l’exécution de l’acte authentique est manifestement contraire à l’ordre public de l’Etat requis” (art. 57 ch. 1 CL rév.). L’idée est que, par l’acte authentique exécutoire, les parties se sont mises d’accord et que cet accord de volonté rend inutile un contrôle du juge de l’exequatur qui aille au-delà de l’examen par celui-ci de la compatibilité de l’acte avec son ordre public : “Dès lors qu’il s’agit d’un acte exécutoire et authentique au regard de l’Etat d’origine et qu’il ne heurte pas l’ordre public de l’Etat requis, il doit être déclaré exécutoire dans ce dernier Etat.”62

La notion d’ordre public, qu’elle relève de son aspect formel ou maté-riel, s’apprécie restrictivement et ne saurait d’emblée faire obstacle à ce que le juge accorde l’exequatur à un acte authentique exécutoire établi dans un autre Etat membre, quand bien même, selon le droit interne suisse, il tomberait sur une des exceptions décrites à l’art. 348 CPC63.

Des difficultés peuvent toutefois naître. Le débiteur peut par exemple soutenir que, postérieurement à l’établissement de l’acte, il a satisfait à l’obligation de payer, ou que son obligation de faire a été suspendue ou est devenue caduque. Le débiteur nous paraît devoir bénéficier des moyens de

61 A l’image de l’art. 348 CPC.

62 Gaudemet-Tallon H. (n. 42), p. 391.

63 Sur cette discussion, cf. Schwander I., “Vollstreckbare öffentliche Urkunden – Rechtsnatur, Verfahren der Erstellung und Vollstreckung”, AJP/PJA 6/2006, p. 677 ; Naegeli G., in Kommentar zum Lugano-Übereinkommen (LugÜ), Berne (Stämpfli) 2008, ad art. 50 no 66.

défense que lui accordent la procédure de mainlevée définitive (pour l’obli-gation de payer) ou la procédure devant le tribunal de l’exécution selon l’art. 341 al. 3 CPC (pour l’obligation de faire).

En revanche, il ne nous paraît pas que le débiteur puisse contester de-vant le juge de l’exequatur la validité de l’acte authentique exécutoire au motif que celui-ci serait incompatible avec les règles qui prévalent dans l’Etat où l’acte a été dressé. On peut concevoir que, si l’action en invalida-tion de l’acte est d’ores et déjà ouverte devant les tribunaux de l’Etat d’ori-gine, l’autorité de recours, par analogie avec l’art. 46 CL rév., suspende la procédure d’exequatur jusqu’à droit jugé dans l’Etat d’origine, assortissant sa décision d’éventuelles mesures conservatoires.

IV. Conclusion

L’art. 1er al. 3 CPC vaudois disposait jusqu’au 31 décembre 2010 : “Le juge doit veiller à ce que l’égalité soit maintenue entre les parties, à ce que l’ins-truction soit sûre et autant que possible prompte et économique.” On voit la hiérarchie des valeurs : égalité des droits procéduraux, sécurité de l’ins-truction, promptitude et enfin économie de temps et de frais. La sécurité passait avant la promptitude.

Une telle hiérarchie avait sa clé de voûte dans l’art. 54 de la loi fédérale d’organisation judiciaire du 16 décembre 1943 qui conférait au recours en réforme devant le Tribunal fédéral un effet suspensif automatique : un ju-gement ne devenait exécutoire en Suisse qu’après épuisement de toutes les voies de recours.

Cette situation qui a caractérisé le droit judiciaire suisse durant un siècle s’est délitée par l’adhésion de la Suisse à la Convention de Lugano en 1990. Ce texte conventionnel était en réalité un cheval de Troie perturbant le droit suisse de l’exécution forcée.

Le “bouquet législatif” entré en vigueur le 1er janvier 2011 vise en fait à aligner le droit suisse sur les solutions qui prévalent dans l’espace judi-ciaire européen. A maints égards, l’impératif de célérité est porté au même rang que celui de la sécurité : conflit de valeurs qu’il appartiendra au juge d’arbitrer.

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