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Perception subjective du soutien apporté par le réseau 59 

Chapitre 4 Présentation et discussion des données 40 

4.3 Accouchement et phase postnatale 47 

4.3.5 Perception subjective du soutien apporté par le réseau 59 

 

La perception subjective du soutien dépasse le soutien reçu, cela englobe le contexte dans lequel l’aide est fournie - l’attitude de l’entourage, la confiance, la disponibilité, le soutien adéquat selon le contexte. Par exemple, les propos de Nora en entrevue individuelle illustrent l’insatisfaction quant à l’aide reçue : « Il [son mari] me dit : « je t’ai nettoyé ça, je t’ai fait ça ». S’il fait quelque chose ça veut dire qu’il le fait pour moi. Lorsqu’il le fait, il fait un scandale, donc ça vaut pas la peine ». Ou, même lorsque le conjoint s’implique, l’absence de réseau de soutien féminin est plus importante et laisse la participante insatisfaite : « Non, je n’ai pas eu assez de soutien à cette période, […], mais mon mari faisait tout, tout » (Myriam).

Un constat émerge du discours des répondantes, celui de la satisfaction d’être entourée par son cercle d’amies après son accouchement. Sur ce point, les femmes qui ont vécu leurs relevailles entourée d’amies semblent se sentir mieux soutenues comme le mentionnent certaines informatrices : « j’ai été bien entourée », « j’ai eu suffisamment de soutien », « j’ai eu tout ce que je voulais ». Selon ces mères, ce soutien, les conseils, la nourriture, et la présence physique arrivent dans un contexte où la femme est vulnérable, elle peut être anxieuse, épuisée, et à mobilité réduite. Une maman décrit la situation dans ces termes : « c’est la meilleure visite et le meilleur moment, car c’est un moment difficile et tu ne peux pas te déplacer ». Par ailleurs, les amies leur offrent

différents types de soutien durant la journée, moment pendant lequel les mamans sont le plus souvent seules (lorsque les maris travaillent).

Il a été observé que pour les femmes qui privilégiaient la famille et la parenté féminine, le soutien féminin est le plus satisfaisant malgré l’aide reçu du conjoint. Certaines s’expriment sur ce qu’elles ont préféré : « ce que j’ai préféré, c’est les repas amenés par mes amies, les deux premières semaines » ou pour une autre participante : « elles [les amies] sont là pour parler » ou bien « elles [les amies] donnent des conseils ». Pour les femmes qui sont peu soutenues par leur mari, l’aide de leurs amies prend toute son importance. L’étude de Kuster et ses collègues (2002) sur les couples algériens rapporte des observations similaires : « l’aide du conjoint n’est pas perçue par la femme comme une expression de maternage suffisant. L’absence de la famille engendre donc des sentiments de solitude, de fatigue et de tristesse chez la nouvelle mère » (2002:19). Ceci découlerait de l’exclusivité des rôles parentaux. C’est-à-dire, selon les auteurs, qu’« une fois immigrés au Québec, les nouveaux parents doivent assumer certains rôles qui incombent normalement aux femmes de la famille élargie. Il y a une transgression de l’exclusivité des rôles parentaux : la mère prend soin du nouveau-né et le père assume des tâches ménagères. Ces deux rôles sont assumés normalement par les femmes de la famille » (2002:17).

Lors des groupes de discussion, en réponse à la question, Qu’est-ce que vous apporte le fait de

côtoyer d’autres femmes?, les participantes ont répondu : « on peut allaiter ensemble », « parler

des problèmes » et « enlever le voile ». Donc, même le fait de côtoyer des femmes, qui ne sont pas nécessairement des amies proches, apporte du réconfort et du soutien.

Les raisons évoquées précédemment expliquent aussi que l’absence de la mère et de son soutien, spécialement lors de la première grossesse, est abondamment soulignée par les participantes. La maternité, surtout la première, est perçue comme une épreuve difficile sans l’accompagnement de la mère.

« Ici, C’est difficile pour une femme qui va avoir son 1er bébé, qui n’a pas sa maman ni sa famille » - une femme dans une entrevue de groupe. Ou bien, « Ici, ce qu’il me manque c’est le soutien de la famille » (Myriam) ou « Je commence à m’habituer au pays, le plus dur c’est la solitude, on se sent seule, sans famille. C’est ce qui me manque, c’est la famille » (Nora).

Deux participantes ont mentionné avoir planifié l’arrivée de leur mère pour leur accouchement et les relevailles, toutefois, elles ont accouché avant terme. L’absence de leur mère à leur côté a été vécue difficilement surtout pour l’une des deux mamans. Elle raconte : « Donc elle n’est pas venue. J’ai accouché toute seule. C’était dur, je pleurais tout le temps. Je me disais; qu’est-ce que je vais faire avec ça, un petit garçon, est-ce que je vais être capable de m’en occuper toute seule? J’étais vraiment paniquée. Je ne savais pas quoi faire. Le mari part travailler et je reste seule avec le bébé » (Nora).

Pour l’autre participante qui n’a pas pu avoir sa mère à ses côtés lors du premier accouchement, elle s’attendait à un plus long séjour de sa part pour le second : « La première fois, c’était mon ex qui s’occupait de moi, parce que c’était un imprévu et je préparais les papiers pour ma mère et j’ai accouché avant la date. […], elle est restée trois mois et demi. Elle est repartie, elle avait six mois mais elle ne pouvait pas rester, elle avait autre chose. […], moi je programmais six mois mais c’était pas…assez, mais elle pouvait pas » (Salima).

Une autre participante mentionne que ses sœurs sont venues l’aider une semaine après son accouchement, mais que cela n’était pas suffisant : « Non, je n’ai pas eu assez de soutien à cette période, j’aurais aimé avoir des amies, même mes sœurs sont venues une semaine et sont reparties, ça n’a pas été assez long » (Myriam).

« J’attends le week-end que mon mari prenne la petite. Parce que lui, il travaille de soir, le matin, il dort, la nuit il revient à minuit. Ça été dur. À l’époque, je n’avais pas d’amies pour venir m’aider » (Nora).

En résumé, l’importance du soutien et de la présence de la mère ou d’une parente féminine a été clairement exprimée par les femmes rencontrées. Celles-ci peuvent trouver ce soutien à distance par les divers systèmes de communication ou certaines font les démarches pour faire venir une de leur parente. Dans les cas où il y a absence de parenté féminine aux côtés de la future maman, celle-ci peut transférer ses attentes et ses demandes envers son réseau d’amies. Un devoir culturel et d’obligations mutuelles semblent sous-tendre le soutien apporté par le réseau féminin. Les participantes s’expriment : « C’est culturel d’aider, toutes les Algériennes le font » ou « je l’ai fait et elles le font pour moi ». Le système d’entraide du réseau féminin se poursuit après les relevailles de la maman en prenant la forme de rencontres quotidiennes et d’activités. Parallèlement à

l’importance du réseau féminin, la présence et le soutien du conjoint sont aussi primordiaux pour les mamans immigrantes. Lorsque la famille et le conjoint des participantes ne sont pas disponibles, celles-ci se tournent vers les professionnels de la santé et les organismes communautaires.

4.3.6 Les professionnels de la santé

 

Les professionnels de la santé sont une source importante de soutien aux yeux des mères immigrantes. Précisément, plusieurs femmes mentionnent que la contribution des infirmières en période postnatale équivaut à celle des conjoints.Toutefois, il faut nuancer, car le soutien apporté par les infirmières est plus souvent cité chez les femmes qui ont peu d’amies et aucun membre de leur famille au Québec, donc qui n’ont aucune autre possibilité de soutien. Les infirmières sont aussi citées lors de la première grossesse et sont remplacées par les amies chez les participantes qui ont, par la suite, l’opportunité de s’être reconstruit un réseau de soutien. Ainsi, le soutien apporté par l’infirmière vient pallier, en partie, l’absence d’aide de la part du réseau féminin. Pour Amina, « Pour mon premier, il n’y avait que mon mari et l’infirmière, ensuite je me suis fait des amies » ou pour Myriam, « Les infirmières sont très gentilles, elles te donnent du soutien, car j’ai eu de la difficulté la première semaine (après l’accouchement) ». Une autre participante en entrevue de groupe indique : « c’est le CLSC qui m’a le plus aidée ».

Les réponses des répondantes en entrevues individuelles et de groupe soulignent l’appréciation du soutien informatif, moral et instrumental que les infirmières leur procurent. Par exemple,

« j’ai demandé à l’infirmière du CLSC, s’il y avait des ressources pour moi ici, elle m’a répondu que je devais appeler une infirmière et lui dire que j’étais enceinte. Eux, font le suivi avec les femmes, et j’ai fait un suivi avec une infirmière à tous les deux mois, c’est la même qui est venue chez moi, pour enlever les agrafes car c’était une césarienne. […] mais niveau santé c’est mieux ici [à Montréal]. Moi je trouve que le personnel, ici, est plus attentif, plus doux » (Myriam).

En entrevues de groupe, les participantes ont souligné la perte ou la diminution du soutien de la part des infirmières du CLSC lorsque celles-ci apprenaient que la belle-famille ou le mari de la