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Organismes scientifiques et environnementaux

Chapitre 4 Le parc en débats : analyse discursive

4.1 Audiences publiques de juin 2008

4.1.3 Organismes scientifiques et environnementaux

Le groupe des organismes scientifiques et environnementaux est celui regroupant le plus grand nombre de mémoires, mais très peu de contributions orales aux audiences publiques. Les scientifiques sont représentés par Michel Allard, du Centre d’études nordiques (CEN). Les groupes militants pour l’environnement ayant contribué au débat sont impliqués sur le territoire à l’étude à différents niveaux : la Société pour la nature et les parcs du Canada (SNAP) milite pour la création de grandes aires protégées ; Nature Québec s’implique dans plusieurs dossiers, dont la création d’aires protégées, la protection de la biodiversité et la refonte du système minier. L’IBC s’implique pour une exploitation responsable de la forêt boréale, alors que le RNCREQ est un regroupement de plusieurs conseils environnementaux.

4.1.3.1 Centre d’études nordiques

Le CEN a été fondé en 1961 par le géographe Louis-Edmond Hamelin. La construction de stations de recherche permanentes à partir de 1968 (station de Whapmagoostui-Kuujjuarapik) a facilité la mise en place de projets de recherche dans le Nord (Tremblay, 2011 : F2). Au moment des audiences publiques pour la création du Parc national des Lacs-Guillaume-Delisle-et-à-l’Eau-Claire en 2008, le CEN est un centre de recherche reconnu pour les travaux en sciences naturelles, et dont les infrastructures au Nord contribuent à faciliter la mobilisation de connaissances sur la région (Allard, 2008).

Dans le secteur du Parc national Tursujuq, les chercheurs du CEN ont mené des projets de recherche au village d’Umiujaq depuis 1980, mais s’installent de manière plus permanente entre 2008 et 2011 par la construction d’une station de recherche incluant un dortoir de trois chambres, une cuisine et un

laboratoire (Allard, 2008 ; CEN, 2019). De plus, à l’intérieur des terres sur le territoire du parc, une station de recherche a été construite au Lac-à-l’Eau-Claire en 2005 (CEN, 2019).

Le mémoire présenté au nom du CEN aux audiences publiques de 2008 est rédigé par Michel Allard, un géomorphologue, alors directeur intérimaire. Le texte pose deux questions principales : « La première concerne la poursuite de la recherche scientifique dans la région après la création du parc. La seconde pose la question des limites proposées pour le parc, lesquelles font défaut d’inclure les magnifiques paysages et les riches écosystèmes du bassin de la rivière Nastapoka » (Allard, 2008 : 3).

En présentant d’entrée de jeu les projets de recherche récents menés par des chercheurs du CEN sur le site du parc, M. Allard base son argumentaire sur la légitimité du centre de recherche et des chercheurs, d’une part pour établir la crédibilité du mémoire, en mentionnant que « la richesse et la haute qualité de l’état actuel des connaissances sur le parc projeté reposent en large partie sur les travaux produits par le CEN » (Allard, 2008 : 2). D’autre part, les projets de recherche menés jusqu’alors, « de portée universelle et qui sont de préoccupation à l’échelle internationale » (Ibid. : 4) justifient la poursuite des travaux de recherche suite à la création du parc. Or, l’auteur remarque qu’« [a]lors que les chercheurs scientifiques ont souvent contribué au savoir qui a favorisé la création d’un parc, ils réalisent souvent qu’une fois le parc instauré et doté d’une règlementation gérée de façon rigide, il devient excessivement ardu, administrativement lourd et, en conséquence, financièrement plus coûteux d’y poursuivre des travaux de recherche » (Ibid. : 4-5). La première partie du mémoire demande donc un protocole allégé par rapport à d’autres parcs nationaux canadiens, visant à faciliter la recherche scientifique plutôt que de remplir une fonction simplement bureaucratique, voire à l’appuyer par un appui financier ou matériel :

À notre avis un tel comité scientifique non seulement devrait voir à l’application intelligente des règles de recherche scientifique, il constituerait un organe d’échange entre les parties prenantes, de réflexion sur les besoins scientifiques et de promotion du savoir. Il contribuerait au plan de recherche avec une vision large, de portée élevée et de calibre international (Allard, 2008 : 5-6).

On peut lire dans cette première partie du mémoire une considération quant à la poursuite des activités de recherche des scientifiques, à une période où le CEN cherchait à se développer par l’ajout d’infrastructures – à Umiujaq notamment – ainsi que par un rayonnement sur la scène internationale (Harvey, 2011 : F5). La question de la notoriété internationale de la recherche scientifique, existante

ou à venir, est d’ailleurs bien présente dans le mémoire présenté par M. Allard. L’auteur voit dans une collaboration avec l’administration du parc une occasion de renforcer cette notoriété, et c’est d’ailleurs l’une de ses recommandations : « Ce comité scientifique devrait avoir aussi comme mandat de faire la promotion du parc comme haut-lieu de développement des connaissances scientifiques, incluant le savoir traditionnel autochtone, et de faire la promotion de ce savoir à des fins éducationnelles » (Allard, 2008 : 7-8).

La seconde partie du mémoire porte sur les limites proposées pour le parc national, et demande l’inclusion de la totalité de la zone d’étude dans le parc. L’argumentaire critique d’entrée de jeu la validité de la limite proposée :

À notre avis, le plan directeur provisoire ne développe pas une argumentation claire et fondée sur des motifs solides de conservation écologique pour justifier cette exclusion. Le texte ne fait que mentionner que le parc projeté sera le plus vaste du Québec, donnant à entendre qu’il s’agit déjà [d’]une concession majeure et suffisante à la protection des écosystèmes sur notre territoire national (Allard, 2008 : 6).

Selon M. Allard, la « valeur environnementale » de la rivière Nastapoka doit être considérée comme plus grande, à long terme, que sa « valeur commerciale », dans le cas de son aménagement hydroélectrique. Cette « valeur environnementale » est décrite pour son potentiel scientifique et écologique d’abord, soit par sa « haute valeur géomorphologique et écologique », la présence de phoques communs d’eau douce, « mais aussi le saumon de l’Atlantique captif dans ses eaux et les bélugas dans son estuaire au pied de la chute ». Autres éléments importants, « la transition écologique que représente la limite des arbres », « une concentration unique de formes de pergélisol dans les argiles de la mer de Tyrrell et dans les tourbières », paysage de « pergélisol en transition à surveiller dans le cadre des changements climatiques » (Ibid. : 6-7).

Enfin, la valeur esthétique des « magnifiques paysages » est également mentionnée : « [l]e caractère exceptionnel de la rivière Nastapoka, de ses chutes et de ses rapides, dans un paysage à couper le souffle avec, notamment, la splendide chute près du littoral ». Dans le contexte de la création d’un parc national, « la valeur financière liée à la beauté de la rivière pourrait éventuellement dépasser sa valeur en kilowatts ». De même, les éléments d’intérêt scientifique et écologique susmentionnés présentent un attrait certain pour les visiteurs pour l’observation de la faune ou du paysage : « Déjà on rencontre des touristes qui descendent la rivière en canot ou kayak tandis que la visite des chutes est devenue

ailleurs appuyée par la présentation de photographies de la chute Nastapoka à l’occasion des audiences publiques, à Umiujaq en juin 2008.

Ainsi, le mémoire présenté par Michel Allard au nom du CEN démontre en premier lieu une considération, par le groupe de recherche, à assurer la poursuite des projets de recherche sur le territoire du parc national, tout en bâtissant son argumentaire autour de la crédibilité des scientifiques qui en sont membres, ayant déjà largement contribué aux connaissances sur le territoire du projet de parc. Dans un contexte d’expansion du CEN et d’une certaine recherche de notoriété sur la scène internationale, la mise en protection du territoire apparaît comme une bonne opportunité pour appuyer la recherche. La protection de la rivière Nastapoka, vu son potentiel scientifique important, est donc à privilégier au profit du développement hydroélectrique et minier. Le caractère esthétique du paysage est d’ailleurs décrit comme ayant un « énorme potentiel d’attraction publique » et qui ne devrait pas être considéré comme une « concession » par les aménagistes. Cette section du parc pourrait par ailleurs contribuer à son rayonnement sur la scène internationale : « La société internationale serait reconnaissante envers le Québec si l’ensemble de l’aire d’étude était mis sous protection » (Allard, 2008 : 7). La conservation du territoire est par ailleurs décrite comme grandement bénéfique à la recherche scientifique, voire à toute la société :

Les résultats de nos travaux [sont] présentés dans des conférences et sont diffusés dans des revues de calibre international. Les thèmes étudiés débordent largement les seuls besoins de l’aménagement et de l’interprétation dans un parc national. Ils illustrent aussi qu’un territoire protégé a un potentiel extraordinaire de servir de base pour des études scientifiques de grande envergure et à haute visibilité et, par conséquent, permettant d’intégrer les chercheurs, les autorités gouvernementales et les communautés autochtones dans des réseaux de collaboration, en plus de répondre aux besoins spécifiques de connaissances pour l’aménagement et la gestion du parc lui-même (Allard, 2008 : 4).

À l’instar de la majorité des groupes environnementaux étudiés, la place prioritaire conférée aux projets d’exploitation du territoire par rapport aux projets de protection est dénoncée dans le mémoire : « Il ne peut que se dégager l’impression que les auteurs ont voulu laisser le champ libre à des développeurs de ressources, principalement dans les domaines des mines et de l’hydro-électricité » (Allard, 2008 : 6). Selon M. Allard, « [m]ême en appuyant l’idée du développement hydro-électrique comme source de revenu au Québec et comme approche privilégiée pour réduire la production de gaz à effet de serre, la valeur de la rivière Nastapoka est un cas où la valeur environnementale dépasse la valeur commerciale ». L’auteur remarque également que l’aménagement hydroélectrique de la Nastapoka

nécessiterait le passage d’une ligne de transport sur le territoire du parc, malgré la contradiction d’usages que cet aménagement impliquerait (Ibid. : 7).

Notons que l’aménagement hydroélectrique de la rivière Nastapoka n’est pas une question que M. Allard aborde pour la première fois en 2008. Le chercheur s’était en effet déjà exprimé publiquement au moment de la signature de l’entente Sanarrutik en 2002, critiquant le point de l’aménagement hydroélectrique :

Il en va autrement de ce qui constitue la pièce maîtresse de l’accord de Tasiujaq [entente Sanarrutik], à savoir le développement du potentiel hydroélectrique. Quoique aussi sujet à des règlements et des évaluations environnementales, la dimension même des projets en cause, s’ils se réalisent, ne pourra qu’entraîner des impacts majeurs pour lesquels nos sociétés blanche et inuite devront assumer une responsabilité conjointe et pour lesquels elles doivent s’attendre à être appelées éventuellement à rendre des comptes à la communauté internationale. […] Un secteur sensible sur les plans géomorphologique et écologique sera probablement la vallée de la rivière Nastapoka, qui contient des argiles marines à forte teneur en glace. Leur inondation en entraînerait la fonte ainsi que l’érosion thermique des berges du futur réservoir : […] l’impact serait important (Allard, 2002 : D5).

4.1.3.2 Société pour la nature et les parcs du Canada, section Québec (SNAP)

Le second mémoire analysé est remis par la SNAP, « un organisme à but non lucratif fondé en 1963 par des citoyens qui avaient à cœur la sauvegarde des espaces naturels » et ayant pour « mission la protection du patrimoine naturel en favorisant la création d’aires protégées ainsi que l’amélioration de la gestion des aires existantes » (SNAP, 2008 : 1). La division québécoise de cet organisme a été fondée en 2001 et a, depuis, été active sur les dossiers de création d’aires protégées au nord comme au sud du Québec, notamment par rapport aux dispositions du Plan Nord (SNAP, 2014). Son principal objectif est la mise en protection des territoires canadiens de manière permanente et sous la forme d’aires protégées, couvrant idéalement de vastes superficies : « Nous visons à protéger de grandes superficies de territoire qui soient à la fois représentatives des régions naturelles et capables de maintenir des écosystèmes viables » (SNAP, 2008 : 1). L’organisme travaille généralement de pair avec d’autres organismes environnementaux, de même qu’avec les groupes autochtones afin de favoriser une gestion collaborative des aires protégées avec ceux-ci (Idem).

Le mémoire soumis par la SNAP aux audiences publiques de juin 2008 appuie généralement la création du parc national des Lacs-Guillaume-Delisle-et-à-l’Eau-Claire, dans un texte s’appuyant fortement sur la notion de superficie des aires protégées : se présentant d’abord comme ayant « déjà

contribué à la protection de plus de 400 000 km2 du patrimoine naturel du Canada », l’organisme accueille favorablement « le plus vaste [projet de parc national] du Québec » (SNAP, 2008 : 3). En considérant les principaux objectifs de l’organisme, il est cohérent que le projet de parc national proposé soit félicité, vu sa grande superficie et l’implication des populations locales :

Une étape importante est franchie aujourd’hui alors que deux des sites mis en réserve au début des années 90, le lac Guillaume-Delisle et le lac à l’Eau Claire, font l’objet d’une consultation publique dans le but de leur attribuer la désignation de parc national. Non seulement ce territoire pourrait-il devenir le plus grand parc national du Québec, avec 15 549 km2, mais aussi l’une des plus vastes aires protégées au Canada. Ce site est parmi les plus remarquables du Québec nordique avec ses paysages de cuestas, son double impact météoritique, sa diversité floristique et faunique ainsi que son incomparable richesse archéologique. […] Le projet de parc national des Lacs-Guillaume-Delisle-et-à- l’Eau-Claire a été élaboré en étroite collaboration avec deux nations autochtones, les Inuits et les Cris. […] Nous saluons cette étroite collaboration de tous les instants sans laquelle le projet n’aurait pu se concrétiser. […] C’est donc avec enthousiasme que la SNAP accueille ce projet de parc national, le plus vaste au Québec (SNAP, 2008 : 2-3). Les auteurs nuancent cependant cette notion de superficie, mentionnant que le pourcentage de territoire protégé « n’a rien d’exceptionnel si on le compare à d’autres juridictions canadiennes », en donnant l’exemple du Nunavut et des Territoires-du-Nord-Ouest, où respectivement 14% et 16% du territoire sont protégés. Par ailleurs, « [u]n total de sept parcs nationaux du Canada dépassent en superficie le projet des Lacs-Guillaume-Delisle-et-à-l’Eau-Claire tandis qu’en Ontario, le parc provincial Polar Bear, avec 23 552 km2, le dépasse lui aussi amplement » (SNAP, 2008 : 4). Dans ses discours plus récents, l’organisme s’appuie d’ailleurs sur la superficie du Parc national Tursujuq (à la suite de son agrandissement) comme un succès et pour asseoir sa crédibilité : « Depuis sa création en 2001, la section Québec de la SNAP a contribué à la protection de milliers d'hectares de milieux sauvages, incluant la création du Parc Tursujuq au Nunavik, la plus grande aire protégée de l'est de l'Amérique du Nord » (SNAP, 2014 : 3).

La SNAP émet également une série de questions à travers son mémoire, classées sous six recommandations portant sur la mise en place du parc, l’agrandissement de ses limites pour y inclure la totalité de la zone d’étude, le zonage, les cuestas en terres de catégorie I, la recherche scientifique et, enfin, suggère au Ministère d’amender la Loi sur les Parcs.

D’abord, certaines recommandations portent sur des aspects logistiques de la création ou de la gestion du parc national. La première recommandation suggère d’inaugurer le parc « dans les meilleurs

délais », puisqu’un délai trop long risquerait selon les auteurs de « miner le sérieux de la démarche gouvernementale et contribuer à la désaffection des communautés impliquées » (SNAP, 2008 : 4). La troisième recommandation porte sur un zonage plus strict dans certaines zones fréquentées par des espèces rares ; enfin, la cinquième appuie la poursuite de la recherche scientifique sur le territoire du parc. Cette recommandation, à travers laquelle l’organisme soutient – volontairement ou non – le mémoire remis par le CEN, laisse entrevoir une compréhension du territoire comme vulnérable, nécessitant une étroite surveillance par des scientifiques.

Depuis les trois dernières décennies, les chercheurs du Centre d’études nordiques, entre autres, y ont accumulé un impressionnant corpus de connaissances. Il serait extrêmement important de mettre à profit ces connaissances pour instituer un solide programme de suivi à long terme de l’évolution du parc. […] Il serait en outre très pertinent dans le contexte des changements climatiques actuels et de leurs impacts en milieux nordiques. […] Il nous apparaît donc primordial que les ressources monétaires et techniques adéquates soient mises à la disposition du milieu scientifique afin de parfaire nos connaissances scientifiques du territoire et mettre en place un solide programme de surveillance continue (monitoring) de l’état du parc (SNAP, 2008 : 9).

La question de la vulnérabilité du territoire et des écosystèmes, d’abord comprise comme naturelle puisqu’induite par les processus liés aux changements climatiques, est vue comme amplifiée par l’augmentation prévue des activités industrielles en territoire nordique. En introduction du mémoire, les auteurs réfèrent à ce contexte d’accélération du développement :

Cette mise en réserve, il y a près de deux décennies, est d’autant plus importante que le Nord du Québec a connu, depuis, une vague sans précédent d’exploration minière et qu’il pourrait être voué à un développement accéléré dans les prochaines années. Dans son discours de clôture, lors du 30e congrès du Parti libéral du Québec, le 9 mars 2008, le premier ministre Jean Charest ne mentionnait-il pas « Mon rêve, mon ambition est d’ouvrir le Nord québécois. La nouvelle économie est une occasion rêvée de développer nos ressources énergétiques, notre secteur minier, le secteur du tourisme, le transport. » (Lessard, 2008). Devant cette perspective, il est impératif que le développement nordique se fasse par une planification intégrée de l’exploitation et de l’utilisation des ressources, en partenariat avec les communautés locales, tout en faisant une large place à la conservation et aux multi-usages du territoire (SNAP, 2008 : 2).

L’usage d’expressions telles que « extrêmement important », « primordial », « vague sans précédent » et « impératif » dans les deux derniers extraits cités montre l’urgence, pour les auteurs, d’instaurer des structures de suivi scientifique et d’aménagement du territoire pour faire face aux menaces que peuvent représenter les changements climatiques et l’industrie minière.

Dans le même ordre d’idées, la première et la quatrième recommandations de la SNAP portent sur des zones exclues de la zone du parc proposé, mais dont les éléments sont présentés comme menacés. D’abord, à l’instar de plusieurs autres mémoires analysés, les auteurs demandent l’ajout de la totalité de la zone d’étude – dont le bassin versant de la rivière Nastapoka – au territoire du parc national. Il est mentionné que « les secteurs exclus du projet final comprennent plusieurs thèmes uniques et irremplaçables auxquels il aurait été important d’accorder une protection » (SNAP, 2008 : 6). L’argumentaire est principalement basé sur la présence d’espèces uniques ou menacées, dans un discours de perte qui concorde avec la notion de vulnérabilité, ici appliquée aux écosystèmes. Les auteurs réfèrent d’abord à la population de bélugas se rassemblant aux estuaires de la rivière Nastapoka et de la Petite rivière de la baleine :

La protection du bassin versant de la rivière Nastapoka peut apporter une contribution à la protection du béluga de la côte est de la baie d’Hudson. Par exemple, les projets de développement hydroélectrique, par les modifications hydrologiques qu’ils entraînent dans les estuaires, constituent une menace sérieuse aux mammifères marins (SNAP, 2008 : 6).

Dans ce cas-ci, les projets hydroélectriques constituent une nouvelle « menace » au territoire décrit comme vulnérable, par la précarité du béluga. Il en va de même pour un certain nombre d’espèces uniques à l’aire du bassin versant de la Nastapoka, dont une espèce de saumon atlantique vivant en eau douce (ouananiche) et le phoque commun d’eau douce. Le caractère unique de ces espèces les rend encore plus vulnérables aux « menaces » susmentionnées, justifiant des mesures de protection d’autant plus grandes : « L’unicité de cette population ajoute à l’intérêt de la rivière Nastapoka et à la nécessité d’en assurer une protection adéquate » (SNAP, 2008 : 6). Dans le cas du phoque commun