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Organisation sociale et politique

Carte 2 : Situation géographique de la Haute Guinée

1.2.3. Organisation sociale et politique

Contrairement à la Basse Guinée et Guinée Forestière qui se caractérisent par la multiplicité de groupements ethniques, la Haute Guinée est la région par excellence de l‟ethnie Manika ou Malinké (Devey, 1997 ; Camara, 2008 ; Béavogui, 2004). Cette

37 homogénéité ethnique est le résultat d‟un long processus d‟intégration de petits groupements à l‟ethnie Manika.

Selon ces auteurs, les premiers occupants de la Haute Guinée furent les Korogba, ce groupement à caractère pygmoïde (petite taille, mode de vie primitif). Après les Korogba, les plus anciens occupants de la Haute Guinée furent les Bambaras. Anciennement établis dans l‟empire de Ghana, les Bambaras ont essaimé vers les régions de l‟est et du sud après la prise de Kumbi Saleh par les almoravides en 1077. En Haute Guinée leur zone d‟extension allait de Niani jusque dans le Sankaran en passant par le Wassoulon.

Plus tard, le territoire de la Haute- Guinée a enregistré l‟arrivée des Djallonka. Leur migration est également consécutive à la chute de l‟empire de Ghana. C‟est à cette époque (XIème et XIIème siècles) qu‟ils occupèrent le Siby (République du Mali, cercle de Katy). Mais, selon la tradition, les Djallonka étaient installés dans le Bidika (Sous-préfecture de Franwalia) et dans le Bouré (Sous-préfecture de Kintinian) dans la préfecture de Siguiri. Plus tard avec la désintégration du royaume de Soumaoro Kanté en 1235, les Djallonka accentuèrent leur migration au sud et à l‟est où ils formeront les provinces de Balèya (Kouroussa), de Solima et de Firia (Faranah), de Toumanya et Tamba (Dinguiraye). L‟expansion Diallonka sera particulièrement accentuée dans le Fouta où ce peuple sera dominant jusqu'à l‟arrivée des Foulbhè surtout les musulmans.

Outre les Djallonka, il faut signaler l‟arrivée des Foulbhè par trois (3) vagues successives. La première vague de peuplement peulh qui fit souche au Wassoulon est contemporaine à l‟expansion Manika des XIIème

et XIIIème. Cette vague venue du Macina à la recherche des pâturages serait la plus importante. La seconde vague de peulh migrants est celle des compagnons de Kolly Ténguella. Leur installation en Haute Guinée est consécutive à la décadence de l‟empire du Mali au XVème siècle. La troisième et dernière vague serait venue du Fouta Djallon dans la seconde moitié du XVIIIème siècle vers 1760 fuyant les troubles consécutifs lié au Djihad. Ces Foulbhè iront grossir les rangs de leur frère du Wassoulon. À la longue, les fulbés vont s‟intégrer à la société Manika, ne se distinguant plus que par leur patronyme (Diallo, Diakité, Sidibé et Sangaré) et certains traits culturels et physiques (teint, cheveux, taille et corpulence).

En dehors des Diallonka du Firia et de Solima, les différents groupes de population que nous venons d‟énumérer constituent aujourd‟hui avec les Manika une seule et même société :

38 la société Manika. La langue, les coutumes, les mœurs et les traditions Manika sont adoptées du moins pour l‟essentiel par l‟ensemble des communautés constitutives de la société Manika.

Plus tard, dans la seconde moitié du 19ème siècle, on assiste à l‟arrivée d‟une vague migratoire de toucouleurs en provenance du Fouta Toro. Cette population était conduite par un chef religieux propagateur de l‟islam : Elhadj Oumar Tall. Les Toucouleurs se tailleront un territoire au dépend des Diallonka de Toumanya et de Tamba, dans l‟actuelle préfecture de Dinguiraye.

De nos jours, on peut distinguer fondamentalement trois entités en Haute Guinée : le grand ensemble manika, les Diallonka du Firia et de Solima (rive gauche du Niger à Faranah) et les Toucouleurs de Dinguiraye. À ces grands groupes ethniques s‟ajoute une minorité de peulhs et de forestiers (Kissi, guerzé…).

Sur le plan socio-politique, les Manika ont développé un pouvoir politique fortement centralisé et une société profondément hiérarchisée caractérisée par une double stratification : horizontale et verticale (Camara, 2008).

La stratification horizontale fait ressortir deux classes fondamentales : les hommes libres (Hörö) et les esclaves (Dyön). Les hommes libres sont également divisés en deux catégories essentielles : les Tontigui ou porteurs de carquois constitués de tribus guerriers (Camara, Keïta, Kourouma, Condé, Sacko) et les Tontan, constitués par les familles maraboutiques (Touré, Bérété, Diané, Souaré et Cissé).

Quant à la classe des esclaves, elle était constituée de prisonniers de guerre ou d‟hommes acquis par achat ou par endettement ou encore dans une certaine mesure des individus issus d‟ascendants esclaves.

À côté de cette stratification en classes sociales, on distingue une autre stratification horizontale. Celle-ci divise la société en hommes non castés et en hommes de castes. On distingue les groupements castés suivants : les forgerons (Numu) avec une sous caste, les bijoutiers (Siaki), les cordonniers (Garanké), les griots (Dyéli) avec une sous-classe (les Fina). Il faut citer également les pêcheurs (Bozo et Somono).

Si de nos jours la stratification de la société en hommes non castés et en hommes de castes persiste, celle qui divisait la société Manika en hommes libres et en esclaves n‟existe plus, car tous les esclaves ont été affranchis par leurs maitres.

39 Par ailleurs, la société dans son ensemble est soumise à un régime patrilinéaire. La famille patriarcale étendue « lu » constitue l‟unité de base. Plusieurs familles forment un lignage et plusieurs lignages forment un clan « kabila » dirigé par un chef appelé kabilakunti. Celui-ci assure non seulement l‟autorité religieuse et judiciaire mais également représente le clan à toutes les instances de décision. Il siège surtout autour des problèmes qui se situent au- delà des compétences d‟une famille élargie comme les questions de mariage, de terre et de conflits sociaux (Touré, 2013).

Sur le plan religieux, la société Manika dont l‟islamisation a débuté au XVIIIème

siècle est essentiellement constituée de musulmans. Cependant, on note certains groupes restreints qui continuent à pratiquer l‟animisme surtout par l‟existence des sociétés sécrètes (chasseurs, féticheurs…). Un petit noyau de chrétiens existe à Saint Alexis, la banlieue de la commune urbaine de Siguiri (Camara, 2008).

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