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Observation sociale et performance

La performance est au centre de la réflexion managériale, la gestion peut être considérée comme un discours sur la performance. Cette notion est complexe et multiforme (Louart P., 1996 ; Marmuse C., 1997)1. On mesure son importance par le nombre d’ouvrages qui lui sont consacrés (Bosquet R., 1989 ; Richard J., 1989 ; Ehrenberg A., 1991 ; Lorino P., 1995)2.

De manière générale, dans la littérature, tant au niveau des chercheurs que des praticiens, il existe une certaine confusion entre les termes de performance, d’efficacité, de succès (Gobeli D. et Larson W., 1987 ; Cameron K.S. et Whetten D., 1983)3 (que l’on parle de gestion de projet ou de théorie des organisations). Cependant, globalement toute analyse en terme de performance consiste à mettre un résultat face à un effort (Martory B. et Crozet D., 1986 ; Igalens J., 1991)4, des

1 Marmuse C. (1997), « Performance », in Simon Y. et Joffre P. (sous la direction), Encyclopédie de gestion, Article 118, Tome 2, 2ème édition, Paris : Economica, pp. 2194-2208.

Louart P. (1996), « Introduction. Enjeux et mesures d’une GRH performante », in Fericelli A-M. et Sire B. (eds.), Performance et ressources humaines, Paris : Economica, pp. 1-15.

2 Bosquet R. (1989), Fondements de la performance humaine dans l’entreprise, Paris : Les Editions

d’Organisation.

Richard J. (1989), Audit des performances de l’entreprise, Paris : La Villeguérin. Ehrenberg A. (1991), Le culte de la performance, Paris : Calmann-Levy.

Lorino P. (1995), Comptes et récits de la performance, Paris : Les Editions d’Organisation.

3 Gobeli D. et Larson W. (1987), « Relative effectiveness of different project structures », Project Management Journal, Vol. 18, n° 2, pp. 81-85.

Cameron K.S. et Whetten D. (1983), Organizational effectiveness : a comparison of multiple

models, New York : Academy Press.

4 Martory B. et Crozet D. (1986), Gestion des ressources humaines, Paris : Editions Nathan, p. 142.

intentions ou des attentes face à ce qui s’est réalisé (Louart P., 1996)1. Cette définition très large nécessite d’être précisée lorsque l’on cherche à effectuer des analyses plus spécifiques. En fonction des référentiels et des valeurs choisis, plusieurs aspects de la performance sont proposés.

La performance stratégique d’une entreprise a pour objectif d’assurer sa pérennité. Elle se détermine en fonction de la capacité de l’entreprise à déterminer et mettre en œuvre de bonnes stratégies (Bouquin H., 1989)2, autrement dit à trouver des sources de valeur créatrices de marge. Cette performance relève donc des préoccupations du haut de la hiérarchie. Elle exige une vision à long terme, et semble difficile à appréhender par des chiffres.

Il ne faut pas la confondre avec la performance concurrentielle qui consiste à apprécier la capacité de l’entreprise à s’accommoder, à s’approprier les règles du jeu concurrentiel dans un secteur (mesurée par exemple par la part de marché) (Porter M.E., 1981)3.

La performance économique est une évaluation du rendement de l’entreprise. Elle s’apprécie sur des périodes relativement courtes, et est exprimée principalement en termes comptables. Son niveau dépend de la capacité à :

- se procurer des ressources au moindre coût, - les préserver, ainsi que le patrimoine,

- les utiliser de la manière la plus productive possible (Bouquin H., 1989)4.

Lorsque l’unité de mesure est monétaire, et que l’on détermine alors la rentabilité pour l’entreprise ou pour l’actionnaire, on qualifie la performance de financière (Hirigoyen G., 1997)5.

La performance peut aussi être organisationnelle lorsqu’elle évalue la manière dont l’entreprise est organisée pour atteindre ses objectifs et la façon dont elle parvient à les atteindre (Kalika M., 1995)6.

Par opposition aux aspects économiques et financiers, on a aussi cherché à déterminer la performance sociale d’une organisation. Cette dernière est généralement définie à partir de l’attention portée aux relations sociales. Il s’agit alors d’établir le rapport entre l’effort social de l’entreprise et l’attitude de ses salariés (Martory B. et Crozet D., 1986)7. Elle peut se comprendre comme la réponse du personnel en termes de satisfaction ou d’insatisfaction aux différentes actions formelles ou non de l’organisation (Simon Y. et Tezenas de Montcel H., 1978)8.

1 Louart P. (1996), op. cit.

2 Bouquin H. (1989), « Audit », in Simon Y. et Joffre P. (sous la direction), Encyclopédie de gestion,

Article 10, Paris : Economica, pp. 193-211.

3 Porter M.E. (1990), Choix stratégiques et concurrence, Collection Gestion, Paris : Economica, p.

394.

4 Bouquin H. (1989), op. cit.

5 Hirigoyen G. (1997), « Stratégie et finance. Approche par la création de valeur », in Simon Y. et

Joffre P. (sous la direction), Encyclopédie de gestion, Article 162, Tome 3, 2ème édition, Paris :

Economica, pp. 3064-3092.

6 Kalika M. (1995), Structures d’entreprises. Réalités, déterminants performances, 2ème édition,

Paris : Economica.

7 Martory B. et Crozet D. (1986), op. cit., p. 142.

8 Simon Y. et Tezenas de Montcel H. (1978), Economie des ressources humaines dans l’entreprise,

D’autres indicateurs plus objectifs servent à évaluer cette forme de performance : la rotation du personnel et l’absentéisme par exemple (Bayad M. et Liouville J., 1994)1.

La performance recouvre de manière classique les notions d’efficacité et d’efficience.

2.1. Efficacité et efficience de l’observation sociale

L’efficacité est perçue comme l’art de « faire les bonnes choses » (Drucker P., 1974)2, ce qui implique une notion de désirabilité ou de réponse aux attentes (Anthony W. et Nicholson E., 1977)3. Le degré d’efficacité s’exprime donc par l’écart entre le but choisi et les faits produits (plus exactement, en raison des difficultés de mesure inhérentes à certaines situations, il conviendrait de dire : entre les effets mesurés ou estimés), par la capacité à atteindre des objectifs. L’observatoire social sera efficace s’il atteint les objectifs qui lui sont assignés, s’il réalise les résultats attendus. Il reste cependant à préciser ce que l’on entend par "objectifs" et "résultats".

Lorsque l’on parle "d’outputs, de résultats et d’impacts", on cherche plutôt à décrire les issues d’une action a posteriori. En revanche, les termes tels que "mission, objectifs, normes, standards" servent à décrire ou expliciter les références qui seront utilisées lors de l’évaluation de la performance.

Les "outputs" désignent en premier lieu ce qui sort du système de production. Ce terme pourrait être remplacé par "production" ou "produit", mais l’emploi de ce mot dans des activités tertiaires reste peu courant, les praticiens de ce secteur préférant les termes de "prestations" ou de "services". Notons par ailleurs que selon nous les termes "produits et services" et "outputs" sont légèrement différents, les premiers désignant des biens prêts à l’emploi (pour un client interne ou externe) alors que "l’output" peut n’être que le résultat d’une opération de transformation intermédiaire. Les termes de "réalisations" et "d’impact" sont plus spécifiques à la gestion publique (De Champris A., 1991 ; Demailly L., 1995)4. On distingue toutefois les réalisations qui constituent les résultats concrets et mesurables d’une action, et l’impact qui correspond plus à l’effet que cette action aura sur l’environnement, la société. Dans cette perspective, on peut considérer que les termes "outputs" et "réalisations" sont très proches.

Le terme "résultat" se rapporte davantage au contrôle de gestion et à la finance. Par rapport à la notion de "produit" et de "réalisation", il présente une différence dans le niveau d’abstraction, de conceptualisation, de synthèse. Précisons, cependant, que,

1 Bayad M. et Liouville J. (1994), « Stratégies de gestion des ressources humaines et performances

dans les PME : résultats d’une recherche exploratoire », Cahier de Recherche n° 94.1, ICN Recherche, Université de Nancy II.

2 Drucker P. (1974), Management : tasks, responsabilities and practices, New York : Harper and

Row.

3 Anthony W. et Nicholson E. (1977), Management of human resources. A system approach to personnel management, Colombus (Ohio) : Grid.

4 De Champris A., (1991), « Impact et sens. L’évaluation de la communication publique », Revue d’Administration Publique, n° 58, pp. 287-295.

Demailly L. (1995), « Observer les pratiques d’évaluation », Cahiers Lillois d’Economie et de

pour nous, le résultat n’est pas nécessairement financier. Nous considérons que le résultat est le correspondant "réel" du ou des objectifs.

De manière plus précise, l’efficacité est qualifiée d’externe lorsqu’elle dépend d’un environnement relativisé, elle est interne lorsqu’elle dépend des objectifs des acteurs dominants. Dans le premier cas, il s’agit de recenser la gamme des objectifs possibles pour un système d’observation sociale1, pour ensuite déterminer parmi tous ces objectifs si on poursuit les "bons" (utilité, contribution de la structure à la performance de l’organisation). Or, ce travail n’a pas pour objet de déterminer si les objectifs assignés à l’observation sociale sont pertinents ou non, mais plutôt d’évaluer de quelle façon et dans quelle mesure l’observatoire social a atteint ces objectifs. On réfléchit à l’efficacité interne de l’observation sociale.

Mais un résultat apparemment satisfaisant peut avoir été obtenu au mépris de la procédure prévue, il peut l’être à un coût anormalement élevé, il peut l’être aussi à des conditions entraînant des risques pour la suite. Il y a donc lieu de prendre en compte, à côté de l’efficacité, une notion d’efficience, significative de la façon dont les moyens nécessaires ont été mis en œuvre et des voies par lesquelles les résultats ont été obtenus. L’efficience, c’est l’économie des moyens dans l’obtention des résultats ; c’est l’indice de l’optimisation du système qui produit l’effet attendu (Morin E.M., Savoie A. et Beaudin G., 1994)2. C’est l’indication de la mesure dans laquelle l’objectif a été obtenu au meilleur coût, aux moindres charges, à la meilleure qualité compatible avec ce coût, et aux moindres risques. A résultats identiques, l’observatoire social qui utilise le moins de ressources sera le plus performant. Le budget du service, sa taille, les salaires versés, le nombre de professionnels utilisés sont alors autant d’indicateurs qui permettent d’évaluer l’efficience. Pour envisager des comparaisons, il est utile de normaliser ces indicateurs, par exemple en rapportant le budget du service au budget de l’organisation, la taille du service à la taille de l’entreprise, les salaires versés aux employés du service à la masse salariale totale, le nombre de professionnels au nombre total d’employés, etc. (Guérin G. et Wils T., 1992)3. De telles mesures d’efficience sont intéressantes, mais elles ne peuvent être utilisées à des fins de comparaison que si les entreprises sont semblables et que si leur service fonctionnent avec la même efficacité. Sur ce point, et concernant les services de Gestion des Ressources Humaines, on note justement que l’efficience augmente avec le degré de syndicalisation et avec la taille de l’entreprise (Benimadhu P., 1989)4. Pour la même organisation par contre ces ratios peuvent être utiles, car si l’efficacité n’a pas changé, ils indiquent si les résultats ont été obtenus à des coûts moindres (c’est-à-dire si la productivité a augmenté).

1 On peut, par exemple, identifier les objectifs fixés à un système d’observation sociale en analysant

les documents ayant servi à la justification de l’implantation de la structure. Sur ce point, voir le travail d’analyse relatif à l’implantation d’un système de planification des ressources humaines effectué par Wils T., Labelle C. et Le Louarn J-Y. (1988), « Human resource planning at Québec- Téléphone », Human Resource Planning, Vol. 11, n° 4, pp. 255-269.

2 Morin E.M., Savoie A. et Beaudin G. (1994), L'efficacité de l'organisation. Théories, représentations et mesures, Collection HEC, Montréal : Gaëtan Morin éditeur, p. 80.

3 Guérin G. et Wils T. (1992), op. cit., pp. 195-196.

4 Benimadhu P. (1989), « Industrial relations update : consultation, co-operation and confrontation », Canadian Business Review, Vol. 16, n° 3, automne, pp. 42-44.

De notre point de vue, parler de performance sous-entend efficacité et efficience, et l’efficacité n’inclut pas l’efficience1. Or, étant donner la difficulté à trouver des organisations dont les observatoires sociaux seraient comparables (même secteur, même taille, même outils, même position dans la structure hiérarchique…), nous nous contenterons d’étudier l’efficacité de l’observatoire social, et nous n’irons pas jusqu’à l’efficience.

De la même manière, l’observatoire social sera efficace lorsqu’il répondra aux attentes de ses clients, il sera efficient si il y répond de la manière la plus optimale een terme d’allocation de ressources.

2.2. L’évaluation de l’observation sociale

Dès lors que l’on met en place un dispositif de gestion, on doit concevoir de manière quasi-simultanée la manière de l’évaluer.

Le terme "évaluation" se retrouve en matière de politique d’entreprise (évaluation de la performance globale de l’entreprise afin de déterminer les rentabilités réelles des actions engagées et d’orienter les décisions futures), dans le domaine financier (évaluations d’actifs, d’options, d’actions ; Glais M. et Sage E., 1997)2, dans le cadre de la gestion du personnel (évaluations des performances individuelles, souvent liées à la fixation des rémunérations ; Lapra J-P., 1992 ; Sire B., 1993 ; Levy-Leboyer C., 1996)3 et dans le domaine de la gestion publique (évaluation de programmes, de projets ; Bach L., Cohendet P., Lambert G. et Ledoux M.J., 1991)4.

De manière classique, on entend par évaluer le fait de porter un jugement sur la valeur, le prix. Faire appel à la notion de jugement suppose que, dans un processus d’évaluation, on retrouve deux étapes : la mesure du résultat obtenu et l’appréciation de celui-ci (par rapport à une norme, une référence).

La mesure fait appel à des éléments objectifs (en général, l’échelle de mesure est fixée, connue) alors que l’évaluation est subjective en ce sens qu’elle se réfère plus ou moins formellement à des critères implicites ou explicites permettant une comparaison entre le résultat et la "norme". La mesure des performances ou de

1 Nous nous distinguons sur ce point de Fitz-Enz J. (1984) pour qui l’efficacité consiste à faire les

bonnes choses d’une manière efficiente. Fitz-Enz J. (1984), How to measure human resources

management, New York : Mc Graw Hill.

2 Glais M. et Sage E. (1997), « Evaluation des actifs incorporels », in Simon Y. et Joffre P. (sous la

direction), Encyclopédie de gestion, Article 64, Tome 2, 2ème édition, Paris : Economica, pp. 1291-

1309.

3 Lapra J-P. (1992), L'évaluation du personnel dans l'entreprise, un nouveau dynamisme dans la gestion des ressources humaines, Paris : Dunod.

Sire B. (1993), Gestion stratégique des Rémunérations, Collection Option Gestion, Paris : Editions Liaisons, Chapitre 4, Section 2.

Levy-Leboyer C. (1996), Evaluation du personnel. Quels objectifs ? Quelles méthodes ?, Paris : Les Editions d’Organisation.

4 Bach L., Cohendet P., Lambert G. et Ledoux M.J. (1991), « Problématique d’évaluation des effets

induits d’un programme de R&D. Une application au programme spatial européen », in De Bandt J. et Foray D. (eds), L’évaluation économique de la recherche et du changement technique, Paris : Editions du CNRS, pp. 233-262.

l’efficacité est souvent associée à une réflexion en contrôle de gestion. Dans certains cas, elle est définit comme « l’évaluation ex-post des résultats obtenus » (Bouquin H., 1997)1, dans d’autres, les termes de suivi ou de mesure des résultats désignent les

processus de suivi budgétaire, d’analyse des écarts (Bescos P.L., Dobler P., Mendoza-Martinez C. et Naulleau G., 1991)2. Ces nuances relatives aux termes de "mesure" et d’"évaluation" semblent se retrouver dans la littérature anglo-saxonne à travers les termes de "performance evaluation", "performance appraisal" ou "performance measurement" (Bernardin H.J., 1986 ; Mohrman A.M., Resnick-West S.M. et Lawler III E.E., 1989 ; Holloway J., Lewis J. et Mallory G., 1995)3.

Trois acceptions du terme "évaluation" se dégagent.

- Soit l’évaluation est assimilée à une mesure du résultat ; celui-ci est caractérisé par des attributs quantifiables, sur lesquels se fait la mesure. Dans cette option, le résultat d’une action est caractérisée par un certain nombre d’attributs. Pour chaque attribut, on choisit un indicateur de mesure, qui permettra de savoir comment chaque action se situe par rapport à une norme éventuelle.

Une telle perception de l’évaluation présente quelques inconvénients : . seul l’attribut du résultat est mesuré, le processus est laissé dans l’ombre, . lorsque le résultat ou l’un de ses attributs est difficile à mesurer, on a tendance

à le négliger,

. le risque existe de confondre l’attribut et l’indicateur de mesure (par exemple, de décrire l’intelligence d’un individu par son seul QI).

- Dans une seconde acception, évaluer peut signifier comparer un objectif et une performance réelle. L’hypothèse sous-jacente est alors que l’on dispose d’une définition claire des objectifs et des performances, ce qui n’est pas toujours le cas dans la pratique.

Cette seconde acception est dynamique car elle permet un contrôle "en cours de route" du résultat, et des ajustements périodiques. Elle correspond à la conception qui est largement répandue dans la littérature française. Dans ce cadre, la confrontation des résultats obtenus à des objectifs définis ex ante constitue le mécanisme fondamental du contrôle par les résultats (Fiol M., 1991)4. Soulignons

ici que cette approche "comparative" de la performance nous paraît quelque peu restrictive, en particulier dans un environnement instable où l’adaptation et la réaction sont des critères valorisés par les entreprises tout autant que le respect d’un engagement pris dans un contexte qui a pu évoluer.

1 Bouquin H. (1997), Le contrôle de gestion, 3ème édition, Paris : PUF, p. 173.

2 Bescos P.L., Dobler P., Mendoza-Martinez C. et Naulleau G. (1991), Contrôle de gestion et management, Paris : Montchrestien, pp. 207-345.

3 Bernardin H.J. (1986), « A performance appraisal system », in Berk R.A. (ed.), Performance assessment. Methods and applications, Chapitre 10, London : The Johns Hopkins University Press,

pp. 277-304.

Mohrman A.M., Resnick-West S.M. et Lawler III E.E. (1989), Designing performance appraisal

systems. Aligning appraisals and organizational realities, San Francisco : Jossey-Bass Publishers.

Holloway J., Lewis J. et Mallory G. (1995), Performance measurement and evaluation, The Open University, London : Sage Publications.

4 Fiol M. (1991), La convergence des buts dans l’entreprise, Thèse de Doctorat en Sciences de

- Enfin, une troisième acception du terme évaluation consiste à le rapprocher du terme "jugement". Evaluer consiste alors à porter un jugement sur une action, un programme. Cette pratique est plus facile à mettre en œuvre et quasi immédiate, elle permet de tenir compte autant de critères qualitatifs que de critères quantitatifs. Cependant, ce type d’évaluation peut manquer d’objectivité et de fiabilité lorsque les données aussi bien que les critères restent ambigus.

On peut se demander pourquoi face à une telle confusion dans le contenu des termes, nous avons choisi de travailler sur "l’évaluation de l’efficacité". En fait, le recours au terme d’évaluation révèle qu’intuitivement il nous semble que parler de "mesure des performances" pour une activité telle que l’Observation Sociale est présomptueux et fait espérer une rationalité et une objectivité qu’elle ne permet pas.

Mettre en place l’évaluation d’une activité telle que l’observation sociale ne va pas sans difficulté. L’ensemble du processus et, particulièrement l’évaluation de l’efficacité qui compare les résultats aux objectifs, est fondé sur la définition des objectifs. On constate que dans de nombreuses situations, il est difficile de définir les objectifs ou de les décrire précisément. De plus, les objectifs annoncés lors de la création de la fonction d’observation sociale peuvent s’avérer inadéquats et être modifiés une fois l’observatoire social en fonctionnement. Ceci est aggravé par l’environnement instable et incertain dans lequel évoluent les entreprises, qui peut remettre en cause leurs objectifs.

L’évaluation des résultats et donc des performances pose, quant à elle, le problème de l’autonomie du service. Pour que ce dernier puisse être jugé sur ses résultats, il faut qu’il maîtrise la plupart des paramètres ayant une influence sur ceux-ci. Or, cette condition n’est pas toujours réalisée : l’environnement bouscule les conditions d’exercice de l’activité (référence aux conflits de novembre 1995 en réaction au Plan Juppé) et les liens avec d’autres services ou d’autres secteurs sont nombreux. La complexité des processus de transformation tend d’ailleurs à rendre ces liens de plus en plus nombreux et donc la maîtrise d’un domaine d’activité de plus en plus contestable.

Cette réflexion montre l’intérêt de se baser sur du qualitatif pour évaluer la performance de l’observatoire social. Les clients de l’observation sociale intègrent les événements externes face auxquels l’observatoire social ne peut rien. Une approche qualitative permet d’apporter un jugement qui intègre des valeurs relatives au contexte.

L’évaluation de l’efficacité de l’observation sociale peut donner lieu à différentes approches.

Etant donné les liens qui peuvent exister entre l’efficacité de l’observation sociale, l’efficacité du service des ressources humaines et l’efficacité organisationnelle, la première approche suggère d’utiliser les méthodes relatives à l’évaluation de la performance organisationnelle. Cependant, cette perspective ne permet pas de déduire des bases de réflexions pour des décisions spécifiques en matière de relations sociales. De plus, des facteurs environnementaux peuvent influer sur l’efficacité organisationnelle alors que le fonctionnement de l’observation sociale n’a pas été modifié.

Une seconde approche consiste à mesurer l’efficacité de l’observation sociale à partir d’objectifs précis (projets, études). Ceci est réalisable si un consensus peut être trouvé sur les objectifs essentiels et sur la façon de mesurer et d’interpréter le niveau de réalisation de ces objectifs. Un objectif comme la réalisation d’une étude prospective sur l’aménagement du travail, par exemple, risque de négliger la qualité de cette enquête. On doit aussi faire face au problème lié à la façon de juger la réponse donnée à des évènements qui ne constituaient pas des objectifs.

La troisième approche utilise des indicateurs quantitatifs comme le nombre d’études réalisées, le nombre et la durée des grèves, etc. Ces chiffres sont intéressants mais difficiles à interpréter. Une grève peut avoir des origines indépendantes de la politique de l’entreprise, et donc difficilement contrôlable par l’observatoire social. Trop d’éléments extérieurs au fonctionnement de l’observatoire social peuvent