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PARTIE I – L’OBTENTION D’UNE PROTECTION NATIONALE

1.3 La réinstallation régulière dans un autre État

1.3.2 Les obligations des juridictions internationales et la coopération des États

Dès que l’on comprend que les États sont souverains, et que : « Les étrangers ne sont pas des citoyens et les droits qui leur sont accordés dépendent entièrement de la bonne volonté <www.ukba.homeoffice.gov.uk_sitecontent_documents_policyandlaw_asylumprocessguidance_consideringa nddecidingtheclaim_guidance_exclusion> à la p 5 [UK, Asylum Instruction – Exclusion : Article 1F of the

Refugee Convention]. À ce sujet, voir aussi Michael Kingsley Nyinah, « Exclusion under article 1(F) : Some

Reflections on Context, Principles and Practice » (2000) 12 Int’l J. Refugee L. 295 à la p 302 [Kingsley

Nyinah].

337 Pour toute la question de la fermeture de Guantanamo Bay et des conséquences sur les détenus, voir : Lt.

C. Rex D. Lynne. Relocate GTMO Detainees to Stand Trial in the United States, Strategy Research Project, US Army War College (USAWC), 2011, en ligne : Defense Technical Information Center (DTIC) <http://www.dtic.mil/cgi-bin/GetTRDoc?AD=ADA553126> [Lynne].

de l’État souverain »339, il faut voir jusqu’à quel point les juridictions internationales elles-

mêmes peuvent jouer un rôle dans la recherche d’un État d’accueil pour les acquittés. La présence des acquittés sur le territoire des États hôtes découle de la décision de ces juridictions d’intenter des procédures et de faire arrêter ceux-ci, et de les détenir dans leurs établissements pénitentiaires. Par exemple, des acquittés du TPIR furent arrêtés alors qu’ils se trouvaient en France340, en Belgique341, au Cameroun342, en Afrique du Sud343, au Togo344, au Kenya345, en Tanzanie346 et en Namibie347. L’arrestation et le transfert de ces pays jusqu’au siège du TPIR, démarches entreprises à la demande des autorités du TPIR348, sont donc la cause de toute perte de statut de ces personnes dans leur État d’arrestation. De ce fait, certains auteurs disent que ces juridictions pénales internationales sont responsables de la situation des acquittés, et qu’elles sont ainsi également responsables de trouver une solution à long terme pour les sortir de ce marasme349. D’ailleurs : « As clarified in the two decisions of the Barayagwiza case, [les tribunaux ad hoc] exercise powers of supervision that go beyond human rights violations during proceedings »350, ce qui pourrait couvrir des pouvoirs sur la relocalisation des acquittés. Toutefois, malgré tout, la coopération des États reste impérative et cruciale, ce pour quoi les règles à ce sujet seront analysées dans les prochaines sections.

339 James F. Hollifield « Immigration et logiques d’États dans les relations internationales » (1993) 24:1

Études internationales 31 à la p34.

340 Notamment le cas de l’acquitté François-Xavier Nzuwonemeye (Ndindiliyimana, Arrêt, supra note 36).

Voir plus généralement Liste et situation des détenus du TPIR, supra note 32.

341 Notamment le cas des acquittés Augustin Ndindiliyimana (Ndindiliyimana, Arrêt, supra note 36) et Protais

Zigiranyirazo (Zigiranyirazo c Le Procureur, ICTR-01-73-A, Arrêt (16 novembre 2009) (TPIR, Chambre d’appel) [Zigiranyirazo, Arrêt]). Voir plus généralement Liste et situation des détenus du TPIR, supra note 32.

342 Jérôme-Clément Bicamumpaka (Le Procureur c Bizimungu et al., ICTR-99-50-T, Jugement (30 septembre

2011) (TPIR, Chambre de 1re instance II) [Bizimungu et al., Jugement]), Hormisdas Nsengimana (Jugement

Nsengimana, supra note 330), André Ntagerura (Ntagerura, Arrêt, supra note 189), Justin Mugenzi et

Prosper Mugiraneza (Mugenzi, Arrêt, supra note 35).

343 Ignace Bagilishema (Le Procureur c Bagilishema, ICTR-95-1A-A, Jugement (3 juillet 2002) (TPIR,

Chambre d’appel).

344 Emmanuel Bagambiki (Ntagerura, Jugement, supra note 34).

345 Casimir Bizimungu (Bizimungu et al., Jugement, supra note 342)et Gratien Kabiligi (Le Procureur c

Bagosora et al., ICTR-98-41-T, Jugement (18 décembre 2008) (TPIR, Chambre de 1re instance I).). 346 Jean Mpambara (Jugement Mpambara, supra note 324).

347 André Rwamakuba (Jugement Rwamakuba, supra note 326). 348 Statut TPIR, supra note 197, art 28(2) (d) et (e).

349 Twagirayezu, supra note 42 aux pp 25-26.

Le fondement des démarches de remise des inculpés aux autorités des juridictions pénales internationales réside dans le fait que les États (les États parties au Statut de Rome pour la CPI) sont dans l’obligation, au sens du Chapitre IX du Statut de Rome351, et des articles 28 du Statut du TPIR352 et 29 du Statut du TPIY353, de coopérer avec ces juridictions. Sans coopération étatique, celles-ci n’auraient pas la capacité d’exercer la majorité de leurs pouvoirs. Pour les tribunaux ad hoc, le fondement même des obligations de coopération, en plus de se trouver dans les différents Statuts, constitue l’application de la Charte des Nations Unies354 laquelle, à son article 25, indique que : « Les Membres de l’Organisation conviennent d’accepter et d’appliquer les décisions du Conseil de sécurité conformément à la présente Charte »355. Considérant que le TPIY et le TPIR ont été fondés par des résolutions du Conseil de sécurité sur la base du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, les États membres des Nations Unies étaient, et sont toujours, dans l’obligation de coopérer avec les tribunaux ad hoc,356 et ce, même si cela les amène à violer leur législation interne357. Effectivement, le principe de coopération a une importance capitale, duquel ne devrait découler aucune exception358, considérant que : « The Tribunal is ‘like a giant who has no arms and no legs. To walk and work, he needs artificial limbs. These artificial limbs are the state authorities; without their help the Tribunal cannot operate »359. Il est donc important de déterminer si les normes de coopération entre les États et les juridictions

351 Statut de Rome, supra note 10, chapitre IX. 352 Statut TPIR, supra note 197, art 28. 353 Statut TPIY, supra note 197, art 29.

354 Charte des Nations Unies, Nations Unies, 24 octobre 1945, 1 UNTS SVI [Charte des Nations Unies]. 355 Ibid art 25.

356 Rachel Kerr, The International Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia : An Exercise in Law Politics

and Diplomacy, New-York, Oxford University Press, 2012 aux pp 117-118 [Kerr]. Voir aussi : Résolution TPIY, supra note 3 au para 4; Résolution TPIR, supra note 4 au para 2.

357 Stroh, supra note 245 à la p 266. Voir également : Convention de Vienne sur le droit des traités, 23 mai

1969, 1155 R.T.N.U. 331, art 27 [Convention de Vienne sur le droit des traités].

358 Dire Tladi, « The ICC Decision on Chad and Malawi : On Cooperation, Immunities, and Article 98 »

(2013) 11 Journal of International Criminal Justice 199 à la p 218 [Tladi]. Voir aussi United Nations

Diplomatic Conference of Plenipotentiaries on the Establishment of an International Criminal Court, Official

Records, Volume III, A/CONF.183/13 (Vol. III) (2002) [United Nations Diplomatic Conference of

Plenipotentiaries on the Establishment of an International Criminal Court].

359 Citation de l’honorable Antonio Cassese, lors de la présentation à l’Assemblée générale des Nations Unies

du Rapport du Tribunal international chargé de poursuivre les personnes présumées responsables de

violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie depuis 1991, Doc. off. AG NU, 50e année, 52e séance plénière, Doc. NU A/50/PV.52 (1995), repris dans Kerr, supra

internationales se limitent aux questions d’enquête, d’arrestation de fugitifs, de collecte et conservation de la preuve et de service des peines ou si au contraire elles vont au-delà360. La CPI a un cadre législatif fondamentalement différent des tribunaux ad hoc, qui ont été établis par le biais de résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies sous le Chapitre VII alors qu’elle est une organisation conventionnelle créée par statut, soit le Statut de Rome. Celui-ci renferme le Chapitre IX361, qui traite spécifiquement de la question de la coopération entre les États membres (de même que certaines règles sur les États non membres) et la CPI. L’Article 86 définit la norme principale de la coopération et se lit comme suit : « Conformément aux dispositions du présent Statut, les États Parties coopèrent pleinement avec la Cour dans les enquêtes et poursuites qu’elle mène pour les crimes relevant de sa compétence »362. Cette formulation nous permet d’observer que la coopération des États semble se limiter aux questions des « enquêtes » et « poursuites ». L’article 93363 raffermit ce pressentiment, en ce que toutes les « autres formes de coopération » ne visent que des questions procédurales avant et pendant le procès, et n’octroient aucune obligation de coopération pour des questions qui pourraient découler du statut des acquittés. Ces restrictions semblent d’ailleurs affirmées par certains auteurs, qui définissent le principe de coopération en vigueur à la CPI par des termes restrictifs364. Dans les statuts des tribunaux ad hoc, on retrouve des dispositions donnant une liste non limitative365 des types de demandes de coopération pouvant être présentées à un État par les juridictions ad hoc. Le Statut du TPIY indique :

1. Les États collaborent avec le Tribunal à la recherche et au jugement des personnes accusées d’avoir commis des violations graves du droit international humanitaire.

360 Kerr, supra note 356 aux pp 117-118. 361 Statut de Rome, supra note 10, Chapitre IX. 362 Ibid art 86.

363 Ibid art 93.

364 Tladi, supra note 358 aux pp 202, 212-213. Voir aussi : Rita Mutyaba, « An Analysis of the Cooperation

Regime of the International Criminal Court and its Effectiveness in the Court’s Objective in Securing Suspects in its Ongoing Investigations and Prosecutions » (2012) 12 International Criminal Law Review 937 à la p 944, et Hans-Peter Kaul et Claus Kreß, « Jurisdiction and Cooperation in the Statute of the International Criminal Court : Principles and Compromises » (1999) 2 Yearbook of International Humanitarian Law 143, à partir de la p 157.

365 Les auteurs ont, à raison, interprété l’utilisation des termes « sans s’y limiter » comme ouvrant la porte à

2. Les États répondent sans retard à toute demande d’assistance ou à toute ordonnance émanant d’une Chambre de première instance et concernant, sans s’y limiter :

a) l’identification et la recherche des personnes;

b) la réunion des témoignages et la production des preuves; c) l’expédition des documents;

d) l’arrestation ou la détention des personnes;

e) le transfert ou la traduction de l’accusé devant le Tribunal366.

Non seulement le deuxième alinéa exprime-t-il l’aspect non limitatif de cet article, il prévoit également qu’une Chambre peut rendre « toute ordonnance », à laquelle les États doivent répondre promptement. Ce faisant :

In practice, the establishment of the tribunal on the basis of a Chapter VII decision meant that States were under a binding obligation to cooperate and assist with all stages of the proceedings: both to comply with requests for assistance with the gathering of evidence and locating and interviewing witnesses, suspects, and experts, and the service of documents; and to give effect to orders issued by the Trial Chambers such as warrants of arrest, search warrants, warrants for surrender or transfer of persons, and any other orders necessary for the conduct of the trial367.

Considérant que les tribunaux ad hoc ont été fondés sur la base du maintien et du rétablissement de la paix et de la sécurité internationales du Chapitre VII, tout refus de coopérer peut être considéré par le Conseil de sécurité comme constituant une menace à la paix et à la sécurité368. Il est d’ailleurs envisageable, dans le cas d’un État violant gravement les demandes de coopération des tribunaux, que le Conseil de sécurité intervienne pour « take any measure under Article 41, short of the use of force, or Article

366 Statut TPIY, supra note 197, art 29 (nos soulignés). La disposition est similaire, sur le fond, au TPIR :

Statut TPIR, supra note 197, art 28.

367 Kerr, supra note 356 à la p 3 (nos soulignés).

368 Ibid à la p 138. Il est compris que vu que la commission des crimes internationaux constitue une menace à

la paix et à la sécurité internationales, et que la poursuite des responsables de ces crimes favorise la paix et la sécurité internationales, alors l’absence de coopération dans les procédures visant la poursuite de ces allégués responsables constitue une menace à la paix et à la sécurité internationales. Voir : Hemi Mistry et Deborah Luz Verduzco. The UN Security Council and the International Criminal Court, Chatham House, International Law Meeting Summary, with Parliamentarians for Global Action, 16 mars 2012, en ligne : Chatham House ˂http://www.pgaction.org/pdf/activity/Chatham-ICC-SC.pdf˃, aux p. 4 et suivantes. Ce faisant, et comme on l’a vu plus tôt, l’absence de relocalisation des acquittés des juridictions pénales internationales peut mettre en jeu la stabilité de certaines régions, notamment de l’Afrique des Grands Lacs : Amoussouga, supra note 31 au para 41.

42, involving the use of force against a recalcitrant State »369. Bien entendu, cette perspective ne fait que mettre la table pour une coopération volontaire des États, la seule perspective de sanctions pouvant décourager tout État récalcitrant à ne pas répondre aux demandes de coopération. Malgré tout, il demeure que : « The obligation to cooperate and assist the Tribunal stemmed directly from the UN Charter […]. The legal framework was important, but the nature and extent of cooperation was a product of political will »370. L’absence de coopération des États a été soulignée dans la position du Groupe de travail sur la détention arbitraire des Nations Unies, qui a déjà été confronté à la situation d’un acquitté qui demeurait détenu malgré son acquittement371. En effet, durant la période entre l’acquittement et la relocalisation d’Ignace Bagilishema en France, celui-ci fit une plainte devant le Groupe de travail sur la détention arbitraire en vertu de sa garde en détention malgré son acquittement, que le TPIR justifiait par l’absence d’États voulant l’accueillir372. Bien que le Groupe de travail ne se soit pas prononcé sur le fond de la question, considérant que M. Bagilishema avait pu être relocalisé au moment de rendre son jugement, il fit un commentaire fort pertinent :

The Working Group, which might have remained competent if the person concerned had been kept in detention as a result of the failure of States to cooperate with the ICTR, notes with satisfaction that Ignace Bagilishema has been finally acquitted after having been released and taken in by a third country. Should the Working Group ever receive another similar case, it would remain competent, since the continued detention is attributable not to the International Criminal Tribunal, but to non-cooperation on the part of States. The Working Group considers that States should cooperate in either case373.

Considérant l’absence de décision sur le fond, il est impossible de déterminer comment le Groupe de travail aurait abordé la question. On peut se demander si le Groupe de travail

369 Kerr, supra note 356 à la p 138. Le même principe est reconnu par d’autres auteurs, qui indiquent que les

tribunaux ad hoc et la CPI peuvent se fier au Conseil de sécurité en cas de manquement à des obligations de coopération des États. Le Conseil de sécurité pourrait alors imposer des sanctions économiques ou autres. Voir : Lana Ljuboja, « Justice in an Uncooperative World : ICTY and ICTR Foreshadow ICC Ineffectiveness » (2010) 32:3 Houston Journal of International Law 767 aux pp 802-803.

370 Kerr, supra note 356 aux pp 145-146.

371 Report of the Working Group on Arbitrary Detention, E/CN.4/2003/8, 16 décembre 2002, Conseil

économique et social, Commission des droits de l’homme, 59e session [Report of the Working Group on

Arbitrary Detention].

372William A Schabas, UN International Criminal Tribunals, The: The Former Yugoslavia, Rwanda and

Sierra Leone, Cambridge, Cambridge University Press, 2006 à la p 543.

aurait pu être également compétent pour rendre toute opinion sur les acquittés qui ne sont pas détenus, mais qui restent malgré tout en « semi-détention » dans leur safe-house.

Considérant cette absence de coopération volontaire des États, il faut se questionner sur le rôle des juridictions internationales et leur capacité à imposer une demande de coopération à un État récalcitrant. Cette situation a été analysée par la Chambre d’appel du TPIR dans une décision suite à une requête de l’acquitté André Ntagerura qui demandait que le greffe du TPIR soit plus proactif dans ses demandes à certains États, dont le Canada374. Au paragraphe 4 de cette Décision, la Chambre d’appel en est venue à la conclusion que :

4. L’article 28 du Statut met à la charge des États membres de l’Organisation des Nations unies l’obligation de coopérer avec le Tribunal à toutes les étapes de la procédure. S’agissant du cas particulier d’espèce, la Chambre est d’avis que le Greffier a une compétence spécifique pour requérir la coopération d’un État. De l’avis de la Chambre, cette compétence découle à la fois du mandat du Greffier pour l’exécution des décisions des Chambres, et de l’accord de siège qui suppose qu’une personne acquittée ne demeure pas sur le territoire tanzanien. Par ailleurs, la Chambre considère que l’obligation de coopération ne saurait, en tout état de cause, impliquer pour le Canada qui n’est ni l’État d’origine ni celui de résidence au moment de l’arrestation, de devoir accorder la résidence ni de traiter de façon préférentielle une telle demande375.

On peut tirer plusieurs conclusions de cet extrait. Premièrement, contrairement à ce qu’on pourrait comprendre par le biais d’une interprétation purement textuelle et assez conservatrice de l’article 28 du Statut du TPIR (et par truchement, aux articles correspondants du TPIY et de la CPI), les obligations de coopération des États avec le TPIR ne se limitent pas à la « recherche et au jugement »376 des individus, mais vont au- delà, avec une coopération « à toutes les étapes de la procédure »377. La Chambre poursuit en indiquant spécifiquement que : « S’agissant du cas particulier d’espèce [la relocalisation d’un acquitté], la Chambre est d’avis que le Greffier a une compétence spécifique pour requérir la coopération d’un État »378. C’est donc le Greffier, en sa qualité d’exécutant des décisions de la Chambre et de son obligation de respect des accords du TPIR, incluant

374 Le Procureur c Ntagerura, ICTR-99-46-A28, Décision relative à la requête d’une personne acquittée aux

fins de la coopération du Canada (15 mai 2008) (TPIR, Chambre d’appel) [Ntagerura, Décision relative à la requête d’une personne acquittée aux fins de la coopération du Canada].

375 Ntagerura, Décision relative à la requête d’une personne acquittée aux fins de la coopération du Canada,

supra note 374 au para 4.

376 Statut TPIR, supra note 197, art 28(1).

377 Ntagerura, Décision relative à la requête d’une personne acquittée aux fins de la coopération du Canada,

supra note 374 au para 4.

l’accord de siège379, qui a la compétence de régler cette question. Cela dit, bien que la Chambre d’appel confirme que le greffier possède la compétence de demander la coopération d’un État sur la question de la relocalisation d’un acquitté, elle ne définit pas ses obligations et ne lui octroie pas la responsabilité de régler le problème. Le greffier a donc une entière marge de manœuvre dans la détermination de ce qu’il peut ou ne peut pas faire dans la recherche de solutions.

De plus, la fin de ce paragraphe nous en apprend beaucoup sur l’éventualité de la remise en état de l’acquitté par le Tribunal. Effectivement, la Chambre d’appel indique que : « […] l’obligation de coopération ne saurait, en tout état de cause, impliquer pour le Canada qui n’est ni l’État d’origine ni celui de résidence au moment de l’arrestation, de devoir accorder la résidence ni de traiter de façon préférentielle une telle demande »380. Par une interprétation a contrario de ce que la Chambre d’appel dit, on peut comprendre qu’un État qui est soit l’État d’origine ou celui de résidence au moment de l’arrestation, serait responsable de devoir accepter une demande de coopération et d’accorder le retour sur son territoire à l’acquitté. Dans le cas spécifique d’André Ntagerura :

5. André Ntagerura, une fois acquitté, n’a pas souhaité retourner au Rwanda ni au Cameroun où il a été arrêté. Il a choisi de demander l’asile au Canada, en saisissant à plusieurs reprises les autorités canadiennes. Jusqu’à ce jour, il dit n’avoir eu aucune suite à sa demande. Le Greffier du Tribunal a, lui aussi, engagé des consultations avec les mêmes autorités dans le même sens. Le Greffier a conclu que le Canada a effectivement coopéré avec le Tribunal, en s’engageant dans ces consultations. Aujourd’hui, le Greffier a entamé des consultations avec un autre pays pour la relocalisation d’André Ntagerura.

6. Dans ces conditions, la Chambre ne saurait conclure qu’une ordonnance requérant la coopération du Canada soit nécessaire, et conclut, au contraire, que le gouvernement canadien s’est conformé à ses obligations, dans ses rapports avec le Greffier381.

D’un point de vue pratique, le TPIR a donc jugé que Ntagerura, s’il avait voulu retourner