• Aucun résultat trouvé

La notion de professionnalisation

Dans le document UNIVERSITE DE REIMS CHAMPAGNE-ARDENNE (Page 43-53)

3. Profession, professionnalisation et professionnalité

3.2 La notion de professionnalisation

Dans le champ de la sociologie des professions, Dubar et Tripier soulignent que la concept de professionnalisation est issu de l’application directe des théories fonctionnalistes de la profession. Dans cette perspective théorique, « au fur et à mesure que l’idéologie libérale du professionnalisme se diffuse dans les sociétés modernes, des groupes professionnels toujours plus nombreux aspirent à se faire reconnaître comme des professions » (Dubar & Tripier, 1998, p. 90). Selon ces auteurs, c’est Wilensky, dans un article de 1964, qui va « proposer un schéma de ce qu’il appelle, après Merton, la professionnalisation de certains emplois (occupations), c’est à dire le processus historique à travers lequel un groupe professionnel quelconque se fait reconnaître comme profession » (ibid., p. 90). Dans ce sens la professionnalisation est donc un processus de reconnaissance sociale accessible aux activités professionnelles qui « peuvent se référer à des savoirs théoriques » (ibid., p. 91).

Dans son ouvrage sur la professionnalisation des enseignants, V. Lang (1999) relève que dans les discours officiels la professionnalisation revêt trois dimensions :

- la professionnalisation renvoie au développement de compétences d’ordre méthodologique, relationnel et communicationnel ;

- la professionnalisation, comme réponse à la nécessité de développer un nouveau métier, une nouvelle culture professionnelle, dans un contexte d’évolution rapide ; - la professionnalisation, pensée comme le moyen d’une revalorisation sociale du métier

d’enseignant.

R. Bourdoncle (2000) constate que dans le champ de l’enseignement, l’utilisation du terme de professionnalisation se rapporte à des objets différents : l’activité, le groupe, les savoirs, l’individu, la formation.

- « L’activité […], qui grâce à ce processus, passerait de l’état de métier à celui de profession ;

- le groupe qui exerce cette activité et qui, grâce à ce processus et plus encore à son action en faveur de ce processus, verrait son statut social et son autonomie

- les savoirs liés à cette activité, qui connaîtraient alors une croissance en spécificité, rationalité et efficacité en même temps qu’une diversification dans leur nature et une reformulation dans en termes de compétences ;

- l’individu exerçant l’activité, qui se professionnaliserait en adoptant progressivement les manières de faire, de voir, et d’être de son groupe professionnel ;

- la formation à l’activité, dont on dit qu’elle se professionnaliserait lorsqu’elle s’oriente plus fortement vers une activité professionnelle dans ses programmes, sa pédagogie, ses méthodes spécifiques, et ses liens plus forts avec le milieu professionnel » (Bourdoncle, 2000, p. 118).

Le terme de professionnalisation est donc très présent dans les discours, de toute nature, relatifs à l’enseignement. Si dans ces discours, il désigne toujours un processus, il semble qu’il ne renvoie pas aux mêmes réalités selon les contextes dans lequel on l’utilise et que différents sens puissent lui être attribués.

Dans la note de synthèse qu’il consacre à la professionnalisation des enseignants, R.

Bourdoncle présente les différentes significations que l’on peut attribuer à cette notion.

Citant les travaux de Hoyle (1980 et 1983), il précise que dans la sociologie des professions anglaise et américaine deux sens sont donnés à la notion de professionnalisation.

« Dans un premier sens, ce mot désigne le processus d’amélioration des capacités et de rationalisation des savoirs mis en œuvre dans l’exercice de la profession » (Bourdoncle, 1991, p. 75). Dans ce sens la professionnalisation, porte sur « les connaissances et capacités qu’exige la pratique » (ibid. p. 75), ce qui se rapporte à la professionnalité.

Bourdoncle ajoute que dans ce premier sens, le terme de professionnalisation « peut s’appliquer aussi bien à l’individu qu’au groupe professionnel » (ibid. p. 75).

Dans un second sens la professionnalisation désigne «La stratégie et la rhétorique déployées par le groupe professionnel pour revendiquer une élévation dans l’échelle sociale. La professionnalisation désigne alors ce processus d’amélioration du statut social de l’activité » (ibid., p. 75-76). Dans ce sens le terme « a toujours une dimension collective » (ibid., p. 76).

Il ajoute une troisième signification, en France, professionnalisation désigne « à l’échelle de l’individu, l’adhésion à la rhétorique et aux normes établies collectivement selon le sens précédent » (ibid., p. 76).

La professionnalisation recouvre donc trois processus qui conduisent à trois états qui sont désignés par : « professionnalité, “ professionnisme ” et professionnalisme » (ibid., p.

76).

Bourdoncle précise ensuite le sens qu’il donne à chacun des termes :

« La professionnalité renverra à la nature plus ou moins élevée et rationalisée des savoirs et des capacités utilisées dans l’exercice professionnel ». Elle est le produit d’un processus qui est qualifié de « développement professionnel ».

« Le “ professionnisme ” désigne l’état des militants et activistes de la profession qui, s’appuyant sur des stratégies et une rhétorique communes, cherchent à faire reconnaître à la hausse la valeur du service qu’ils rendent et à augmenter leur autonomie, leur contrôle et leur monopole d’exercice ». Cet état résulte de la professionnalisation (passage du métier à la profession).

Le terme de professionnalisme désigne « l’état de ceux qui manifestent leur adhésion aux normes résultant de cette transformation, telle que le respect des règles collectives, conscience professionnelle, exigence d’efficacité. On pourrait appeler le processus conduisant à cet état la socialisation professionnelle » (Bourdoncle, 1991, p. 76).

Professionnalité, « professionnisme » et professionnalisme, d’après R.Bourdoncle

PROFESSIONNALISATION

3 PROCESSUS 3 ETATS

Développement professionnel Professionnalité Professionnalisation : du métier à

la profession

Professionnisme

Socialisation professionnelle Professionnalisme

Ces processus, même s’ils peuvent être étudiés séparément ne sont pas sans liens.

C’est ce que souligne Bourdoncle, pour qui « le changement de nature de l’activité, qui, de métier, devient profession, va souvent de pair avec le premier, le développement professionnel, qui signifie l’augmentation des capacités professionnelles de l’enseignant ».

Il ajoute que toutefois, ils « peuvent aussi être indépendants » (Bourdoncle, 1991, p. 77).

Vincent Lang (1999) reprend les deux principaux sens attribués à la notion de professionnalisation, il revient sur le contenu de ces processus et aborde la question des

- des savoirs et savoir-faire spécifiques ;

- des savoirs transmissibles ; des savoirs objectivés de la pratique ; - l’acquisition d’une expertise ;

- la volonté de rendre les acteurs efficaces et efficients.

Ce processus concerne tout autant le groupe que l’individu. Il aboutit à la constitution d’une professionnalité.

Dans le deuxième sens, la professionnalisation renvoie à la place du groupe professionnel dans la division sociale du travail. Ainsi, le professionnisme désigne « les stratégies collectives de transformation de l’activité en profession » (Lang, 1999, p. 27). Ce second processus met en jeu la professionnalité du groupe. Dans ce processus, le groupe professionnel tente de « valoriser sa professionnalité spécifique dans le but d’en négocier la valeur d’échange » (ibid., p. 27). La professionnalité, via le professionnisme se trouve au cœur des « processus et stratégies par lesquels un groupe tente d’acquérir une position socialement désirable » (ibid., p. 27).

Ainsi, pour Vincent Lang, la « professionnalité » renvoie à une logique

« instrumentale » et le « professionisme » renvoie à une logique « communicationnelle ».

Ces deux états sont irréductibles, mais ils ne se comprennent pas l’un sans l’autre.

3.3 La notion de professionnalité Une origine italienne

Comme le soulignent Mathey-Pierre et Bourdoncle (1995), le vocable

« professionnalité » n’a pas d’existence officielle en français. Ce terme a été construit à partir du mot italien « professionalità ». Cette notion, forgée dans le monde du travail, et plus particulièrement dans celui des luttes sociales menées à la fin des années 1960 et début 1970 par les ouvriers italiens, contre l’organisation capitaliste du travail « a surtout été massivement utilisée par les syndicats italiens pour rendre compte des conflits centrés sur l’organisation du travail et les modes de reconnaissance de la qualification, des années 1960 à 1975 » (Dadoy, 1986, cité par Mathey-Pierre & Bourdoncle, 1995, p. 138).

Dans un contexte de luttes sociales, dans les discours syndicaux, la notion de

« professionalità » est devenue le pivot autour duquel se sont structurées les différentes formes d’actions et de revendications des mouvements ouvriers. A la fois « catalyseur de l’unification de la classe ouvrière » et aussi moyen pour « faire pression sur le patronat » (Barisi, 1982, cité, par Mathey-Pierre & Bourdoncle, 1995 p. 138), le terme de

professionnalità renvoie à l’idée de posséder « quelque chose » de son métier en commun, à un objet collectif et partagé. Un « patrimoine commun » que l’on veut défendre et aussi faire reconnaître.

En Italie, dans les années 1980, la professionnalité est comprise, du côté de l’entreprise, à la fois comme un état, une somme de différents éléments liés à l’exercice professionnel : « la professionnalité était entendue comme la somme des connaissances, capacités et expériences (assimilable, toute proportions gardées, au traditionnel concept de capacité de bien faire son propre métier) » (Weiss, 1983, cité par Mathey-Pierre &

Bourdoncle, 1995, p. 138), et aussi comme une construction personnelle : « une histoire (personnelle et sociale, technique et culturelle) dans laquelle se rejoignent étude et stages, caractère manuel et intelligence, projet et exécution, efficience et créativité » (ibid., p. 138-139).

Construite dans un contexte de lutte sociale et de transformations du monde du travail italien des années 1960-1970, la notion de profesionnalité (professionalità) est passée du monde ouvrier à celui de l’entreprise. Utilisée pour désigner un état, enjeu de reconnaissance sociale, la professionnalité est aussi comprise comme le produit d’une histoire individuelle au travail. C’est cette notion déjà très chargée de significations qui va être importée en France.

« Une acclimatation française » (Mathey-Pierre & Bourdoncle, 1995)

En France, comme dans d’autres pays européens, les conflits sociaux en Italie sont très suivis. C’est ce qui conduit, dans les années 1970, à l’importation en France de la notion de professionalità qui va être alors traduite par professionnalité. Si l’on suit Mathey-Pierre et Bourdoncle, on peut penser qu’il fallait, dans ces années de transformations du monde du travail en France, un mot nouveau pour « désigner ou faire croire à une réalité nouvelle » (Mathey-Pierre & Bourdoncle, 1995, p. 139). A l’appui de cette idée, ces auteurs rappellent que « si le mot professionnalité n’existait pas en français, celui de professionnalisme est ancien. Or, la professionalità italienne peut être traduite par professionnalisme, si l’on en croit la revue Economica e laboro, qui traduit

“ professionalità in transizione ”, par “ le professionnalisme en tansition ” » (ibid., p. 139).

Effet de mode, d’affichage ou nécessité réelle d’un concept nouveau pour désigner

en France, plus par ce qu’elle représentait, notamment sa connotation positive, que comme une nécessité lexicale.

« Ainsi la notion de professionnalité aurait pour premier rôle de se démarquer des notions de qualification et de métier, trop chargées de connotations anciennes, donc négatives. La notion de professionnalité véhicule explicitement une connotation fortement positive, en raison de sa référence aux notions de “ profession ” (haut niveau de connaissance, savoirs très spécialisés, technique élaborée, marché du travail fermé) et de professionnalisation (métier/profession, spécialiste, expert, maîtrise du procès de travail.) » (Dadoy M, 1986, cité par Mathey-Pierre & Bourdoncle, 1995, p. 140).

De quelques caractéristiques de cette notion

Pour Mathey-Pierre et Bourdoncle, la notion de professionnalité est « marquée » par deux caractéristiques fondamentales : l’ambiguïté et l’instabilité. Le caractère instable de la professionnalité tient au fait qu’elle est toujours en cours de construction, elle se construit dans l'acte de travail. « Elle est instable, toujours en cours de construction, surgissant de l’acte de travail lui-même ; elle facilite l’adaptation à un contexte de crise » (Trépos J.Y., 1992, cité par Mathey-Pierre & Bourdoncle, 1995, p. 142).

Suivant cette idée on peut donc considérer la professionnalité comme un état qui résulte d’un processus social. On remarque également que cet auteur l’associe à l’idée d’adaptation. La professionnalité serait ce qui est nécessaire pour qu’un travailleur s’adapte aux situations de changement. Dans ce sens la professionnalité renvoie à la dimension

« technique » du travail. Si l’on admet que la professionnalité est un état instable par nature cela autorise, dans une perspective de recherche, à essayer de mieux comprendre les dynamiques de la professionnalité.

L’ambiguïté de la notion de professionnalité est liée à plusieurs éléments. Son caractère instable fait que cette notion « évolue en fonction de l’histoire et des stratégies syndicales du moment. Elle évolue également en fonction des variations de tâches et d’associations d’individus » (Troussier, 1990, cité par Mathey-Pierre & Bourdoncle, 1995, p. 143).

La professionnalité peut aussi être mobilisée au profit de l’entreprise, et, dans le même temps, permettre une valorisation de l’individu. Vis-à-vis des salariés, elle est alors

« à double tranchant : elle peut être à la fois l’occasion d’une revalorisation de leurs tâches et de leur image d’eux-mêmes et un moyen d’une plus grande mobilisation au service de

l’entreprise, leurs compétences se développant autour de l’entreprise et de sa culture » (Dugué, 1993, cité par Mathey-Pierre & Bourdoncle, 1995, p. 143).

Ce caractère ambigu et instable donne à la notion de professionnalité une autre dimension : une dimension sociale. D’état individuel, elle devient un enjeu dans les relations sociales au sein de l’entreprise ; elle peut être requise, revendiquée, reconnue. La professionnalité dépasse alors la seule dimension technique dans le travail. « Malgré ou peut-être à cause de son caractère instable et ambigu, la professionnalité est parfois requise par les entreprises, revendiquées par les salariés et reconnues dans leurs accords collectifs.

C’est dire que, même si elle a pris son essor à la faveur de changements dans les techniques de production, cette notion vise une réalité plus sociale que technique » (Mathey-Pierre & Bourdoncle, 1995, p. 143).

Nous retiendrons la conclusion de Mathey-Pierre et Bourdoncle :

« Notion instable parce qu’elle veut dire le changement, ambiguë parce que née des luttes syndicales italiennes, elle a été largement reprise par les gestionnaires d’entreprise, la professionnalité nous laisse dans l’incertitude quant à son sens et sa fonction dans le discours social. Le succès des mots étant souvent à la mesure de la diversité des intérêts qui s’en saisissent, nul doute que ce mot ambigu connaîtra encore une belle fortune, malgré ou plutôt à cause de la multiplicité de ses connotations » (ibid., p. 147).

Cette incertitude quant à son sens se retrouve chez différents auteurs. Ainsi, pour Bourdoncle, la professionnalité « renverra à la nature plus ou moins élevée et rationalisée des savoirs et des capacités utilisés dans l’exercice professionnel » (Bourdoncle, 1991, p.

76). Barbier utilise ce terme en lui donnant une définition assez proche. Il désigne par professionnalité, « l’ensemble des savoirs, des compétences et des dispositions mobilisées par un individu dans l’exercice d’une activité professionnelle spécifique » (Barbier, 1996, p. 53). On remarque l’introduction des termes de compétences et de dispositions qui ne figuraient pas dans la définition de Bourdoncle.

Dans le cadre de sa réflexion sur la professionnalisation du travail social, M. Aballéa, propose une clarification du concept de professionnalité à la lumière de l’analyse sociologique. Il établit clairement le lien entre profession et professionnalité. Pour

d’une fonction de légitimation, enfin un système de contrôle d’accès à la profession » (Aballéa, 1992, p. 41). Le « système d’expertise » est défini comme un « agencement de savoirs complexes ». C’est une dimension importante de la profession.

Ce « système d’expertise » a une triple composante : technique et méthodologique ; sociale et gestionnaire. Pour M. Aballéa « l’insistance sur la dimension complexe de l’expertise conduit à faire référence à ce que l’on appelle la professionnalité » (ibid., p.

42). C’est dans ce contexte qu’il propose cette définition de la professionnalité : « j’appelle professionnalité, et j’attribue cette professionnalité à un individu et à un groupe, une expertise complexe et composite, encadré par un système de références, valeurs et normes, de mise en œuvre, ou pour parler plus simplement, un savoir et une déontologie, sinon une science et une conscience » (ibid., p. 47). Dit autrement, et toujours selon Aballéa, une professionnalité originale, est « une expertise spécifique et une déontologie, ou plus globalement un système de références propres garantissant l’efficacité et la finalité sociale de l’activité professionnelle » (ibid., p. 49). La professionnalité ainsi définie est bien au cœur d’une profession « il n’y a pas de profession sans professionnalité. En revanche, il peut y avoir professionnalité sans profession, c'est-à-dire notamment sans système de légitimation et de contrôle de l’accès à la profession » (ibid., p. 47).

Ainsi, selon cet auteur la professionnalité renvoie à une expertise (individuelle ou collective) au travail, elle ne peut exister qu’en relation avec une déontologie. C’est l’existence d’une déontologie qui constitue le cadre d’action et de pensée des acteurs au travail. En plus d’une dimension technique, cette dernière définition confère à la professionnalité une dimension éthique.

Au terme de ces analyses, quatre éléments sont à retenir de ces différentes définitions :

- la professionnalité peut être l’attribut d’un individu et / ou d’un groupe ; - la professionnalité est complexe et composite ;

- elle articule savoir et déontologie ;

- elle est liée à une profession (pas nécessairement dans le sens anglo-saxon).

Dans le champ de l’enseignement, la notion de professionnalité a également fait l’objet de définitions. Elles sont liées aux modèles d’enseignants tels qu’ils ont été présentés précédemment. Ainsi, une professionnalité enseignante qui se rattacherait au modèle de l’enseignant « professionnel, praticien-réfléchi » et au champ sémantique susmentionné, pourrait être caractérisée « certes par la maîtrise de « savoirs

professionnels » divers (les savoirs enseignés, les grilles d’analyse des situations, les savoirs quant aux procédures d’enseignement, etc.) mais également par des schèmes de perception, d’analyse, de décision, de planification, d’évaluation…qui lui permettent de mobiliser ses « savoirs » dans une situation donnée. Et sans doute faudrait-il ajouter les

« attitudes » nécessaires au métier, telles que la conviction de l’éducabilité, le respect de l’autre, la connaissance de ses propres représentations, la maîtrise de ses émotions, l’ouverture à la collaboration, l’engagement professionnel » (Paquay, Altet, Charlier &

Perrenoud, 1996, p. 15).

Aux « savoirs professionnels » et à l’éthique professionnelle, cette définition apporte un élément nouveau à la notion de professionnalité : un ensemble de schèmes qui vont permettre « à l’action du sujet d’être opératoire » (Vergnaud, 1990, cité par Perrenoud, 2001, p. 38).

Conclusion

Objet d’enjeux sociaux, la notion de professionnalité apparaît comme étant une notion « malléable » en fonction des époques, des types de discours et des contextes dans lesquels elle s’inscrit. Selon les auteurs qui la mobilisent, le sens qui lui est attribué et les attributs qui la spécifient varient. Toutefois, il est possible de retenir que trois dimensions essentielles caractérisent la notion de professionnalité: la dimension « technique », qui renvoie au pôle des savoirs, la dimension éthique, qui renvoie aux principes et valeurs, et une dimension sociale, qui renvoie à la fois à la construction de la professionnalité dans la formation et le travail, et, aussi, à la place de la professionnalité dans les processus de reconnaissance sociale des individus mais également du groupe professionnel.

La professionnalité est donc très clairement un état, ordinairement on parle de la professionnalité de l’individu ; mais cet état peut être attribué à un groupe professionnel.

Elle est spécifique dans le cadre d’une activité professionnelle. C’est en quelque sorte une photographie, qui présente pour un individu, à un moment donné de sa carrière, une configuration professionnelle par nature instable dans la mesure où elle évolue au cours du temps. Configuration qui se structure selon trois dimensions : une dimension technique, une dimension sociale et une dimension éthique.

La professionnalité d’un enseignant sera alors l’état instable d’une configuration professionnelle qui articule : des savoirs professionnels, un habitus professionnel et une éthique professionnelle.

Le résultat de ces analyses permet d’envisager la professionnalité comme un état qu’on est en droit de mobiliser pour caractériser un groupe professionnel, ici les enseignants. Dans ce sens, l’expression de « professionnalité enseignante » est tout à fait admise. Cependant, cette professionnalité ne peut être saisie et décrite que dans son exercice qui est toujours individuel. Dans cette perspective, la nécessité de considérer des professionnalités singulières s’impose.

C’est à ce prix que peut être considéré comme légitime un travail qui partant de la caractérisation de professionnalités singulières veut contribuer à une meilleure compréhension de la professionnalité d’un groupe professionnel, celui des enseignants du premier degré.

La professionnalité qu’il est possible de caractériser, à partir des modèles de l’enseignant et des textes officiels, est une professionnalité pensée « par le haut ». Prendre comme référence cette professionnalité pour analyser ce qui se joue en termes de savoirs dans le quotidien de la classe, risque de nous conduire à porter un regard normatif et prescriptif sur les situations professionnelles étudiées ; à penser des écarts par rapport à une norme : la professionnalité prescrite et requise.

A l’inverse de cette perspective, Tardif et Lessard proposent de « penser l’enseignement, en partant du travail des enseignants » (Tardif & Lessard,1999, p. 9). Ils ajoutent que « l’étude de l’enseignement exige un dépassement des visions normatives et

A l’inverse de cette perspective, Tardif et Lessard proposent de « penser l’enseignement, en partant du travail des enseignants » (Tardif & Lessard,1999, p. 9). Ils ajoutent que « l’étude de l’enseignement exige un dépassement des visions normatives et

Dans le document UNIVERSITE DE REIMS CHAMPAGNE-ARDENNE (Page 43-53)