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La notion de nationalité appliquée aux personnes morales au même titre qu’aux individus

« NATIONALITÉ » EN DROIT INTERNATIONAL

A. La notion de nationalité appliquée aux personnes morales au même titre qu’aux individus

328. Les rédacteurs des traités de protection des investissements étrangers réservent généralement le terme « national » aux seuls individus. A titre d’exemple l’article 1.2 du modèle de traité bilatéral d’investissements français de 2006 prévoit que :

« Le terme d’ « investisseur » désigne

a) Les nationaux, c’est-à-dire les personnes physiques possédant la nationalité de l’une des parties contractantes

b) Toute personne morale constituée sur le territoire de l’une des parties contractantes, conformément à la législation de celle-ci et y possédant son siège social »457

329. De manière semblable, la majorité des traités bilatéraux d’investissements conclus par les Pays-Bas prévoient que

« the term “investor”shall comprise with regard to either Contracting

Party:

i. natural persons having the citizenship or the nationality of that Contracting Party in accordance with its laws;

ii. legal persons constituted under the law of that Contracting Party; »458

       

457

La même formulation est reprise par les traités bilatéraux d’investissements entre la France et le Djibouti du 13 décembre 2007, entre la France et la Chine du 26 novembre 2007, ou encore entre la France et la République des Seychelles du 29 mars 2007.

458 La liste des traités bilatéraux d’investissement signés par les Pays-Bas peut être consulté sur le site de

la CNUCED: http://investmentpolicyhub.unctad.org/IIA/CountryBits/148#iiaInnerMenu. Voir aussi pour un autre exemple ne retenant que le critère du lieu de constitution de la société les traités bilatéraux conclus généralement par le Royaume-Uni. La liste de ces accords peut être consultée sur le lien: http://investmentpolicyhub.unctad.org/IIA/CountryBits/221#iiaInnerMenu. Voir enfin l’article 201.1 de l’Accord de libre échange nord-américain (ALENA) qui définit le terme « personne d’une Partie » comme « un ressortissant ou une entreprise d’une Partie », en précisant que le terme « ressortissant » ne concerne que les personnes physiques et désigne celles qui ont la nationalité de l’un des Etats parties. Quant aux entreprises couvertes par le champ d’application de l’accord, il s’agit de celles qui sont « constituée(s) ou organisée(s) aux termes de la législation d’une Partie », le texte de l’accord est disponible en langue française sur le site de l’ALENA : https://www.nafta-sec- alena.org/Default.aspx?tabid=124&language=fr-CA.

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330. La Convention de Washington de 1965 prévoit quant à elle que les tribunaux arbitraux constitués sous les auspices du CIRDI peuvent connaître des différends qui sont en relation directe avec un investissement, et qui opposent l’un des Etats parties à la Convention à un « ressortissant » d’un autre Etat contractant de cette dernière. En vertu de l’article 25.2 du même instrument:

« Ressortissant d’un autre Etat contractant signifie » :

(a) toute personne physique qui possède la nationalité d’un Etat contractant autre que l’Etat partie au différend […]

(b) toute personne morale qui possède la nationalité d’un Etat contractant autre que l’Etat partie au différend […] ».

La question pouvait alors se poser de savoir si une société capable de se prévaloir des droits prévus en sa faveur par un traité de protection des investissements étrangers conformément à la définition d’ « investisseur » retenue par cet instrument, pouvait être assimilée à une société possédant la nationalité d’un tel Etat au sens des termes de la Convention de Washington.

331. A l’occasion de l’affaire Rompetrol c. Roumanie459, une requête arbitrale avait été déposée devant le CIRDI par une société constituée en vertu de la législation des Pays- Bas sur la base du traité bilatéral d’investissement conclu entre ce dernier pays et la Roumanie. La demanderesse n’avait pas été explicitement qualifiée de « nationale » des Pays-Bas par le traité applicable. En examinant si les conditions requises par l’article 25.2.b) de la Convention de Washington avaient été réunies pour que la compétence du tribunal puisse être établie les arbitres ont malgré cela estimé, sans même considérer pour nécessaire de justifier davantage leur conclusion, que:

« within the framework of Article 25(2)(b) of the Convention, it is open to

the Contracting Parties to a BIT to adopt incorporation under their own law as a necessary and also sufficient criterion of nationality for purposes of ICSID jurisdiction »460.

Dans le même sens, à l’occasion d’une affaire plus récente - Tenaris et Talta c.

Venezuela de 2016 – le tribunal arbitral avait été saisi par des requêtes fondées sur deux

traités bilatéraux, le premier signé entre l’Union économique belgo-luxembourgeoise et

       

459

CIRDI, The Rompetrol Group N.V. c. Roumanie, décision sur la compétence et la recevabilité du 18 avril 2008, Aff. n° ARB/06/3.

 

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le Venezuela et le second entre le Portugal et le Venezuela461. Ces deux accords employaient le terme « national » pour désigner uniquement les personnes physiques capables de se prévaloir de ces accords, et qualifiaient les sociétés constituées conformément à la législation de l’un des Etats contractants et ayant leur siège sur le territoire de cet Etat comme des « investisseurs » protégés par ces mêmes instruments. En dépit de cette différence de formulation le tribunal saisi a considéré que :

« […] the requirements in question here are, in substance, nationality

requirements. The criteria of « siège social » and « sede » [siège social en

portugais] are both mechanisms to determine the nationality of a company,

and as such whether or not the company qualifies for coverage by a Treaty »462.

332. Si les critères du lieu de constitution ainsi que du lieu du siège social de la société qui lui permettent de se prévaloir d’un traité de protection des investissements ont été ainsi assimilés aux éléments constitutifs de sa nationalité sur le plan international, la signification exacte du critère du lieu du siège social prête à controverses.

B. L’interprétation des critères du lieu de constitution et du lieu du siège social de

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