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Nature du système polymorphe

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Caractérisation des cristaux des deux formes cristallographiques de rÉtiracetam recristallisé

11.4 Nature du système polymorphe

Dans cette section, nous présentons les notions d'énantiotropie et de monotropie caractéri­ sant la stabilité thermodynamique relative de différentes formes cristallographiques en fonction de la température 1^1. Nous détaillons alors un certain nombre d’expériences réalisées ou de faits observés nous permettant de trancher sur la nature du système polymorphe étudié.

11.4.1 Introduction

Deux types différents de natures d'un système polymorphe, et en particulier dimorphe, peuvent être envisagés : l'énantiotropie et la monotropie

Dans le cas d’un système énantiotrope (du grec enantios : opposé et tropos : direction), chacune des deux formes cristallographiques possède un intervalle de températures défini, dis­ tinct et borné supérieurement par la plus faible des températures de fusion des deux morphes, au sein duquel il est stable sous forme solide. Dans cet intervalle de températures, la forme cristallographique non stable est souvent caractérisée de métastable et parfois qualifiée familiè­ rement d’instable. La température séparant les domaines de stabilité respectifs de chacune des deux formes cristallographiques est appelée la température de transition solide-solide, notée Ttr. Celle-ci est inférieure aux températures de fusion des deux morphes. Ce premier type de système permet des transitions solide-solide réversibles entre les deux morphes, l’une étant un phénomène exothermique et l’autre endothermique.

Dans le cas d’un système monotrope, l’une des deux formes est stable dans tout le domaine de température au sein duquel elle est présente sous forme solide tandis que l’autre est partout métastable dans ce même domaine. Le changement ne peut se faire que dans une seule direction (du grec mono : seul) : de la forme métastable vers la forme stable. Cette transition solide-solide s'accompagne d'un dégagement de chaleur.

Afin de déterminer la nature d’un système polymorphe, il s’agit de démontrer expérimentale­ ment la persistance d’une forme ou sa transformation en fonction de la température appliquée. La détermination des diagrammes enthalpiques ou des courbes de solubilité sur une vaste gamme de températures pour les deux formes cristallographiques est un moyen sûr mais par­ fois fastidieux pour la détermination de la nature des systèmes polymorphes. La figure 11.17 présente de façon schématique les courbes de l’énergie libre de Gibbs et les courbes de solubilité en fonction de la température, pour les deux morphes, dans le cas d’un système polymorphe énantiotrope (figure Il.l7(a)) et monotrope (figure Il.l7(b)). Nous y observons que, dans le cas d’un système polymorphe énantiotrope, les courbes de l’énergie libre de Gibbs et les courbes de solubilité pour les deux formes cristallographiques en phase solide se coupent à la température de transition solide-solide.

11.4.2 Matériel et Méthode

La détermination complète de ces diagrammes pouvant s’avérer longue, voire difficile selon les substances étudiées, Burger et Ram berger ont proposé un certain nombre de règles simples, semi-empiriques et de bonnes pratiques pour la détermination de la nature du système polymorphe. Ces règles reposent, entre autres, sur l’analyse de l’évolution de l’enthalpie et de

(a) Système polymorphe énantiotrope.

(b) Système polymorphe monotrope.

Figure 11.17 - Présentation schématique des courbes de l'énergie libre de Gibbs (g) et courbes de solubilité (x) pour les deux formes cristallographiques en fonction de la température dans le cas d'un système polymorphe énantiotrope (a) ou monotrope (b).

Figure11.18 - Diagrammes enthalpiques schématiques (courbes de l'enthalpie, h, et de l'éner­ gie libre de Gibbs, g, pour la substance d'intérêt en phase solide (s), les deux formes cristallo­ graphiques, le morphe I et le morphe II, étant considérées, et en phase liquide (I) en fonction de la température) dans le cas d'un système polymorphe énantiotrope (a) ou monotrope (b).

l’énergie libre de Gibbs avec la température pour la substance d'intérêt en phase solide d'une part, les diverses formes cristallographiques étant considérées, et en phase liquide d'autre part. Les diagrammes enthalpiques sont présentés de façon schématique à la figure 11.18 pour un système polymorphe énantiotrope (figure Il.l8(a)) et monotrope (figure Il.l8(b)). Les règles semi-empiriques de Burger sont au nombre de trois et consistent en la règle de l'enthalpie de transition solide-solide, la règle de l'enthalpie de fusion et la règle de la masse volumique. Elles sont détaillées l'une après l'autre ci-dessous. Bien qu'appelées règles, celles-ci peuvent présenter des exceptions.

11.4.2.1 Règle de l’enthalpie de transition solide-solide

Considérons un système dimorphe et une des deux formes cristallographiques. Si, lorsqu'une des deux formes est soumise à une analyse thermique en phase solide, nous observons, à une certaine température, sous sa température de fusion, un effet endothermique que l’on puisse associer à une transformation solide-solide, il est admis que cette forme examinée est stable à basse température et est en relation d'énantiotropie avec l'autre forme cristallographique métastable à basse température. Ceci découle de l'analyse de la figure 11.18. La température de transition est alors inférieure et bornée supérieurement par la température à laquelle cette transformation solide-solide est observée

Considérons le même système dimorphe et une des deux formes cristallographiques. Si, lorsqu'une des deux formes est soumise à une analyse thermique en phase solide, une transition exothermique (que l’on puisse associer à une transformation solide-solide) est observée à une certaine température, deux possibilités doivent être envisagéesl^l :

- la forme examinée est métastable et est en relation de monotropie avec l’autre forme stable sur tout le domaine de températures,

- la forme examinée est métastable à basse température et est en relation d’énantiotropie avec l'autre forme stable à basse température. La température de transition solide-solide est supérieure à celle à laquelle le phénomène exothermique est observée.

Expérimentalement, cette information est obtenue en soumettant les cristaux de morphe I et de morphe II à une analyse thermique par DSC^^®). A cette fin, les creusets sont remplis d'environ 6 mg de cristaux broyés sous forme de mélange physique. Ils sont soumis à un programme de température allant de SO'^C à 130°C avec des vitesses de chauffe allant de l°C/min à 10°C/min (l°C/min, 2°C/min, 5°C/min et 10°C/min).

11.4.2.2 Règle de l'enthalpie de fusion

Considérons le même système dimorphe. La règle de l’enthalpie de fusion énonce que si la forme cristallographique ayant la température de fusion la plus haute possède l’enthalpie de fusion la plus faible, le système polymorphe est énantiotrope (figure Il.l8(a)). Dans le cas contraire, les deux formes cristallographiques présentent entre elles une relation de monotropie (figure Il.l8(b))l^l.

Afin de déterminer la nature du système polymorphe constitué des deux formes cristallo­ graphiques de l’Étiracetam recristallisé, il convient donc de déterminer les températures et les enthalpies de fusion du morphe I et du morphe II. Dans le cadre de ce travail, une démarche

originale et expérimentale, utilisant l'Analyse Calorimétrique Différentielle a été considérée. Elle est détaillée ci-dessous.

a. Température de fusion

Conventionnellement, la température de fusion est déterminée à l'onset du pic de fusion, sur des courbes DSC ayant été obtenues avec un programme de température de chauffe adéquat. L'option d'ajustement par le taulag (correction interne de l'appareil de mesure qui permet de tenir compte de l'inertie thermique des creusets pouvant devenir conséquente lors de variations rapides de température (Annexe A)), généralement activée, assure que la détermination du point de fusion soit identique quelle que soit la vitesse de chauffe appliquée à l'échantillon Bien que couramment utilisée, notamment dans l'industrie pharmaceutique, cette méthode simple n'assure pas des grandes exactitudes et précisions sur les mesures.

Dans ce travail, nous nous intéressons dès lors à une méthode permettant une mesure exacte et plus précise de la température de fusion. Divers creusets sont remplis d'environ 6 mg de cristaux de morphe I ou morphe II broyés et présents sous forme d'un mélange physique de cristaux. Chacun des creusets est soumis à un programme de température allant de 30°C à 130°C pour le morphe I et 150°C pour le morphe II. Diverses vitesses de chauffe, allant de l°C/min à 40°C/min (l°C/min, 2°C/min, 5°C/min, 10°C/min, 20°C/min et 40°C/min) sont utilisées. L'option taulag de la DSC est désactivée pour ces essais expérimentaux.

Les courbes DSC obtenues à l'issue de ce travail expérimental pour les deux morphes à chacune des vitesses de chauffe utilisées sont analysées. La désactivation de l'option taulag entraîne inévitablement un déplacement de l'onset du pic de fusion vers les plus hautes tempé­ ratures au fur et à mesure de l'augmentation de la vitesse de chauffe. Un travail expérimental similaire décrit dans l'articlemontre que l'onset du pic de fusion évolue de façon linéaire et croissante envers la vitesse de chauffe. Il montre également, par une confirmation expéri­ mentale, que l'extrapolation de cette relation linéaire pour une vitesse de chauffe de 0°C/min correspond à la température de fusion thermodynamique recherchée.

b. Enthalpie de fusion

La méthode la plus couramment utilisée afin de déterminer l'enthalpie de fusion consiste à calculer, sur base d'une courbe DSC expérimentale, l'aire générée par le pic endothermique de fusion entre une température initiale légèrement inférieure à l'onset du pic de fusion et une température finale légèrement supérieure à l'endset du pic de fusion. Différents types de baselines bornant supérieurement le domaine d'intégration sont proposés par le logiciel. Les trois plus courantes d'entre elles sont présentées à la figure 11.19. Les axes sont omis sur ces représentations schématiques. La méthode par défaut consiste à rejoindre la courbe DSC entre la température initiale et la température finale par une droite (figure Il.l9(a)). Il est également possible de borner supérieurement le domaine par un segment de droite horizontale. L'origine de ce segment est situé sur la courbe DSC soit au niveau de la ligne de base de la phase solide, nous parlons de horizontale gauche (figure Il.l9(b)), soit au niveau de la ligne de base de la phase liquide, nous parlons alors de horizontale droite. Ces deux premières approches sont très

approximatives. La troisième approche, par un spline (figure Il.l9(c)), permet de calculer plus exactement l'enthalpie de fusion.

"^InillalB ^llnalB ^inltlalB ^finale ^Initiale "^finale

Figure 11.19 - Présentation schématique des trois types de baselines d’intégration les plus courants pour la détermination de l'enthalpie de fusion sur base d’une courbe DSC ; par défaut (a), horizontale gauche (b) et spline (c).

Cette méthode, quoique couramment utilisée telle qu’elle, principalement dans l’industrie pharmaceutique, est largement imprécise. En effet, comme cela peut être observé, l’aire sous le pic de fusion varie avec la vitesse de chauffe : plus celle-ci est élevée, plus le pic est étalé et plus il présente une aire élevée. En pratique, bien que travaillant avec la pente de température la plus faible qu'il soit, le pic de fusion garde un étalement sur une certaine plage de tempé­ ratures. Tant que celle-ci n’est pas nulle, la DSC fournit non seulement l’énergie nécessaire au changement de phase, ladite enthalpie de fusion recherchée, mais également l'énergie, liée aux capacités calorifiques, nécessaire pour élever la température de l'échantillon sur cette gamme de températures.

Ainsi, une méthode plus exacte et plus précise pour la détermination de l’enthalpie de fusion (énergie devant être fournie à un composé solide pour passer sous forme liquide) est proposée ci-dessous. Cette démarche, selon nous totalement originale, peut être expliquée en deux temps.

Considérons une courbe DSC expérimentale typique présentant un pic de fusion telle que présentée à l'Annexe A (figure A.2) et reprise ci-dessous (figure 11.20). Les axes ne sont pas repris sur cette représentation schématique.

Dans un premier temps, il s'agit de calculer l’aire générée par le pic de fusion selon une méthode bien précise, expliquée dans la suite. Celle-ci consiste en la partie hachurée sur la figure 11.20. Elle est bornée à gauche et à droite respectivement par les températures initiale et finale. La température initiale est choisie inférieure de quelques degrés à l’onset du pic de fusion et la température finale est choisie supérieure de quelques degrés à l’endset de ce même pic. La région hachurée est bornée en bas par la courbe DSC obtenue pour l'échantillon. En haut, elle est bornée par un segment de droite horizontale ayant pour origine le point de la courbe DSC à la température initiale de la zone d'intérêt. Cette droite représente la courbe DSC qui

serait obtenue en élevant la température de l'échantillon si celui-ci ne changeait pas de phase et était caractérisé par une capacité calorifique constante et égale à la capacité calorifique à la température initiale. Tel que cela est évoqué précédemment, cette aire est fonction, non seulement de l'enthalpie de fusion recherchée, mais également de l'énergie, liée aux capacités calorifiques, nécessaire à élever la température de l'échantillon depuis la température initiale Jusqu'à la température finale.

Température initiale Température finale Cp du solide Cp du liquide

1

enthalpie de fusion à la température de fusion

Figure 11.20 - Principe schématique de la méthode d'intégration adoptée dans ce travail pour la détermination de l'enthalpie de fusion.

Ainsi, et dans un deuxième temps, afin de déterminer l’enthalpie de fusion unique­ ment, nous réalisons un bilan enthalpique, associé à l'aire calculée sur base de la courbe DSC expérimentale, entre les températures initiale et finale. Celui-ci est détaillé ci-dessous, où l'aire est exprimée en J.

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