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Morphe II versus morphe I

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Caractérisation des cristaux des deux formes cristallographiques de rÉtiracetam recristallisé

11.3 Nature racémique

11.3.3 Résultats et Discussion

11.3.3.3 Morphe II versus morphe I

If

i

É ' 1 <RS> + liquida ê \ ,* /

1

1 <R>+ ; ; ’m

i

; liquida ; ; ; liquide i « • • O ° \o! O ... ..."ïw"";'... 1 solide ^ ---- 1---1---^ A 1 ---1---i

Figure 11.12 - Diagramme binaire de phase présenté à la figure 11.11, complété des tempéra­ tures de fusion de l'eutectique déterminées expérimentalement pour des échantillons préparés à partir d'un mélange physique de cristaux de morphe II et de cristaux <S>.

Le remplissage du creuset est, dans ce dernier cas, plus hétérogène et l'échantillon présente des espaces vides entre les divers cristaux. Le coefficient de conductivité thermique apparent est dès lors réduit, et peut expliquer cette différence d'l°CP^J. Le pré-traitement de fusion- recristallisation permet, grâce à la fusion, d'augmenter l'homogénéité de l'échantillon, et grâce à la cristallisation, de combler le vide en créant une masse unique.

L'endset du pic de fusion étendu est difficile à déterminer précisément lorsque les échan­ tillons sont préparés à partir de cristaux broyés. En effet, la présence de l'hétérogénéité dans l'échantillon entraîne des perturbations dans l'évolution de la puissance calorifique devant être fournie à l'échantillon pour l'amener à fondre. Ceci conduit à des courbes DSC moins nettes que celles obtenues lors de l'utilisation d'échantillons ayant subi le pré-traitement de fusion- recristallisation. Ceci peut être observé en comparant les courbes DSC nettes sur la figure 11.10 (où les cristaux ont été fondus et recristallisés) et les courbes DSC pour les échantillons préparés à partir d'un mélange physique de cristaux broyés, à la figure 11.13.

11.3.3.3 Morphe II versus morphe I

La figure 11.13 met également en évidence une différence de l'ordre de quelques degrés (2.5‘’C) dans les températures de fusion de l'eutectique pour les échantillons présents sous forme d'un mélange physique de cristaux broyés et préparés à partir de cristaux de morphe II ou de morphe I.

Figure 11.13 - Comparaison entre les courbes DSC expérimentales obtenues pour les échan­ tillons préparés à partir d'un mélange physique de cristaux, de morphe I et de cristaux <S>, ou de morphe II et de cristaux <S>, pour des compositions énantiomériques de 60 %, 70 %, 80 % et 90 %. La vitesse de chauffe est de 2°C/min.

Figure 11.14 - Mise en évidence de la présence de deux pics de fusion d’eutectique sur les courbes DSC obtenues expérimentalement pour des échantillons préparés à partir d’un mélange physique de cristaux de morphe I et de cristaux <S>. La vitesse de chauffe est de l°C/min.

Le diagramme binaire de phase complet pour le morphe I n'est pas obtenu pour deux raisons principales. D’une part, il est extrêmement difficile de déterminer précisément l’endset du pic de fusion étendu lorsque les échantillons consistent en un mélange physique de cristaux comme cela est expliqué au point précédent. D’autre part, comme nous le déterminons dans les deux sections suivantes, le morphe I n’est stable qu’à des températures inférieures à 30°C ; dès que cette température est dépassée, la subsistance des cristaux de morphe I repose sur la lenteur des cinétiques de transition. Aucune interprétation thermodynamique rigoureuse du diagramme binaire de phase ne peut dès lors être tentée pour le morphe I au-delà de 30°C.

Ainsi, lors de leur chauffe, les cristaux de morphe I, étant de moins en moins stables, se transforment en phase solide ou liquide en des cristaux de morphe II. Ceci est mis en évidence à la figure 11.14. Les courbes DSC sont obtenues pour des échantillons constitués d’un mélange physique de cristaux de morphe I et de cristaux <S>. La vitesse de chauffe appliquée est de l°C/min (contrairement aux essais précédents réalisés à 2°C/min) sur la même gamme de températures (30°C - 130°C). L’utilisation de cette plus faible vitesse de chauffe met en évidence des phénomènes cachés lorsque les vitesses utilisées sont plus élevées.

La figure 11.14 montre clairement la présence des deux pics de fusion d’eutectique. Le premier pic de fusion de l’eutectique, dont l’onset est de l’ordre de 104°C, traduit la fusion d’échantillons préparés à partir de cristaux de morphe I et de cristaux <S>. Les proportions de ces cristaux appelés à fondre sont telles que la concentration de l’eutectique en phase liquide soit satisfaite. Une partie de la phase liquide recristallise pour donner des cristaux de morphe II (composé racémique) encore stables sous forme solide à cette température. Ceux-ci fondent ensuite à la température de fusion de l’eutectique caractéristique d’échantillons préparés à partir de cristaux de morphe II et de cristaux <S> (ordre de 107°C). La littérature met en évidence des systèmes présentant le même type de comportement

Cette transformation en phase liquide des cristaux de morphe I en des cristaux de morphe II nous permet de supposer que le diagramme binaire de phase pour le morphe I a une allure très similaire à celui présenté pour le morphe II. Il est évident que, pour des compositions comprises entre la composition de l’eutectique et 100 %, les courbes du liquidus sont identiques, que les échantillons aient initialement été préparés à partir de cristaux <S> et de cristaux de morphe I ou de morphe II. En effet, une fois les deux températures de fusion des eutectiques dépassées, ne restent en phase solide que des cristaux <S>. Pour des compositions comprises entre 50 % et la composition de l’eutectique, par contre, des différences surviennent. Nous remarquons en effet sur la figure 11.13 que, pour une composition énantiomérique de 60 %, l’endset du pic de fusion étendu pour l’échantillon préparé à partir de cristaux de morphe I (courbe orange) est plus faible que l’endset du pic de fusion étendu pour l’échantillon préparé à partir de cristaux de morphe II (courbe bleue clair). En particulier, la température de fusion du morphe I pur (composition énantiomérique de 50 %) est de 112.3°C, tandis qu’elle est de 119.3°C pour le morphe II.

11.3.3.4 Equations de Prigogine-Defay et Van Laar

Prigogine et Defay ont déterminé une relation permettant d’estimer la température de fusion (courbe du liquidus) d’échantillons dont les compositions énantiomériques vont de 50 % à la composition de l’eutectique. Elle n’est donc utile que dans le cas d’échantillons comportant

des composés racémiques, pour lesquels la composition de l'eutectique est différente de 50 % (figure ll.8(b)). Van Laar a mis en évidence une relation permettant d'estimer la température de fusion d'échantillons dont les compositions énantiomériques vont de la composition de l'eutectique à 100 %. Ces relations sont maintes fois retrouvées dans la littératureP®’^^®). Ces équations sont données ci-dessous, où x est la composition énantiomérique de l'échantillon (g/g) et T est sa température de fusion (K), ce qui équivaut à l’endset du pic de fusion étendu déterminé sur les courbes DSC.

L’équation de Prigogine-Defay permet d'estimer la courbe du liquidus pour des échantillons de compositions énantiomériques comprises entre 50 % et la composition de l'eutectique. Elle est écrite à l'équation ll.l pour des solutions régulières préparées à partir de cristaux de morphe Il et de cristaux <S>.

,4.(1 - ,)] =

- iî est la constante des gaz parfaits (J/mol/K)

- Mm est la masse molaire de l'Étiracetam (170 g/mol)

- Tfji est la température de fusion des cristaux <RS> de morphe II (K)

- Ahfji{Tfji) est la variation d'enthalpie solide-liquide des cristaux <RS> de morphe II à leur température de fusion (J/g)

L'équation de van Laar permet d'estimer la courbe du liquidus pour des échantillons de compositions énantiomériques comprises entre la composition de l'eutectique et 100 %. Elle est écrite à l'équation 11.2 pour des solutions idéales préparées à partir de cristaux de morphe Il et de cristaux <S>.

R

(11.2)

- T/_s est la température de fusion des cristaux <S> (K)

- Ahf^s{Tf,s) est la variation d'enthalpie solide-liquide des cristaux <S> à leur tempéra­ ture de fusion (J/g)

La méthode de détermination de la température et l'enthalpie de fusion du morphe II est précisément décrite dans la section suivante. Une approche plus simple a été utilisée pour la détermination de ces grandeurs thermodynamiques relatives à l'énantiomère S pur. Étant donné qu'il ne s'agit pas de la partie la plus importante de ce travail, nous donnons simplement les valeurs utilisées au tableau ll.l ci-dessous :

Ces courbes du liquidus, déterminées sur base des équations ll.l et 11.2, sont tracées à la figure 11.15. Elles permettent une comparaison avec les points expérimentaux. Elles ne sont représentées que dans la partie droite du diagramme binaire de phase, mais subissent également la symétrie orthogonale.

Température de fusion Enthalpie de fusion

°C J/g

Morphe II 119.3 182.5 Enantiomère S 116.1 160

Table ll.l - Résultats expérimentaux des températures et enthalpies de fusion du morphe II (composé racémique <RS>) et de l'énantiomère S pur (conglomérat <S>).

• -♦ • endset fusion symétrique - ■■ • endset fusion expérimental ---Prigogine-Defay ---Van Laar

Figure 11.15 - Diagramme binaire de phase présenté à la figure 11.11, complété des courbes du liquidus estimées sur base des relations de Prigogine-Defay et de Van Laar.

Nous y observons que les courbes expérimentales et déterminées par les équations sont très proches les unes des autres. En particulier, la composition énantiomérique et la température de l’eutectique sont très similaires.

11.3.3.5 Confirmation par DRX

Afin d'apporter une preuve supplémentaire confirmant que les cristaux de morphe I et de morphe II sont des composés racémiques, nous effectuons une analyse par DRX sur de la poudre de cinq échantillons : morphe I (cristaux <RS>), morphe II (cristaux <RS>), énantiomère S (cristaux <S>), énantiomère R (cristaux <R>) et un mélange isomassique physique des deux énantiomères pour terminer. Ce dernier échantillon permet de simuler un échantillon racémique composés de conglomérats (cristaux <R> et <S>). Les résultats sont présentés à la figure 11.16.

Les cristaux <S> et <R> ainsi que leur mélange isomassique physique présentent des franges similaires comme cela est visible à la figure Il.l6(a). En revanche, le morphe I et le morphe II (composés racémiques <RS>) présentent des franges d'interférence différentes des trois autres échantillons et en particulier du mélange isomassique physique des deux énantio­ mères, simulant un échantillon racémique de conglomérats (figure Il.l6(b)). Cette analyse nous permet dès lors de renforcer la conclusion menant à la détermination de la nature racémique pour les deux formes cristallographiques de l'Étiracetam : le morphe I et le morphe II sont des composés racémiques <RS>. Les énantiomères R et S sont donc présents en nombre égal au sein des réseaux cristallins des deux formes cristallographiques.

200000

150000

100000

50000

-Motph» Il_________— Mélmg» phy»iqu«

(a) Comparaison entre les clichés de diffraction DRX (b) Comparaison entre les clichés de diffraction DRX des deux énantiomères et de leur mélange physique, des deux formes cristallographiques (composés racé­

miques) et du mélange isomassique physique des deux énantiomères.

Figure11.16 - Franges d’interférences obtenues par DRX sur de la poudre de morphe I (rouge), de morphe II (vert), de l’énantiomère R (orange), de l’énantiomère S (bleu) et d’un mélange isomassique physique des deux énantiomères (noir).

11.3.4 Conclusion

Au vu des diagrammes binaires de phase déterminés pour les deux formes cristallographiques ainsi que de la comparaison de leurs clichés de diffraction DRX (sur poudre) par rapport au cliché de diffraction DRX d’un mélange isomassique physique des deux énantiomères, nous pouvons confirmer que les cristaux de morphe I et de morphe II sont des composés racémiques <RS>. Les cristaux sont dès lors composés d’un nombre identique de molécules de l’énantio­ mère R et de l’énantiomère S. La possibilité d’une différence dans l’arrangement cristallogra­ phique de ces deux énantiomères au sein du cristal est en partie responsable de l’existence des deux formes cristallographiques : le morphe I et le morphe II. Nous n’allons pas plus loin dans l’investigation de la structure cristalline de ces deux morphes, laquelle nécessite l’obtention de monocristaux ce qui n’est pas couvert dans le cadre de ce travail.

La détermination complète du diagramme binaire de phase apporte de plus des informations importantes pour la réalisation du diagramme ternaire <R>, <S> (et <RS>) et le solvantl^^K Ce diagramme ternaire nécessite la connaissance de la composition énantiomérique de l'eutec- tique. Le diagramme ternaire revêt une importance particulière pour l’étape de recristallisation du Lévétiracetam (step 6 dans la chaîne de production du principe actif du Keppra : figure 1.2). Cette étape suit la cristallisation de purification de l'Étiracetam et la séparation chirale en colonne MCC. En effet, ce diagramme ternaire permet l'optimisation de l'opération de cris­ tallisation chirale (augmentation de la pureté énantiomérique, comme cela est expliqué dans le chapitre d'introduction de ce travail).

Ayant identifié que le morphe I et le morphe II sont bel et bien des polymorphes au sens de la définition, il convient dès lors de définir le domaine de stabilité de chacune de ces deux formes cristallographiques. La détermination de la nature du système polymorphe (énantiotrope ou monotrope) est réalisée grâce à l'utilisation de l'Analyse Calorimétrique Différentielle et fait l'objet de la troisième section.

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