• Aucun résultat trouvé

Morphologie et structure cellulaire

Les trypanosomes africains sont des parasites monocellulaires extracellulaires qui vivent librement dans le sang ou d’autres liquides de l’organisme, notamment la lymphe et le liquide céphalo-rachidien (LCR). On peut les identifier par examen microscopique, en particulier après coloration au Giemsa, qui met clairement en évidence les deux principaux organites contenant l’acide nucléique, à savoir le noyau et le kinétoplaste (Figure 3.2). D’autres techniques de coloration, par exemple à l’orangé d’acridine pour la visualisation en microscopie par fluorescence, se révèlent également utiles pour la mise en évidence du parasite dans des échantillons cliniques. La cryoconservation permet de maintenir ces

48

rie de rapports techniques de l’OMS N°984, 2013

parasites viables pendant de longues périodes, soit dans le sang de patients ou de rongeurs inoculés, soit dans des cultures de laboratoire (Annexe 5).

Le trypanosome africain a environ 20 µm de longueur et 5 µm de largeur.

Il est porteur d’un flagelle caractéristique, un organe motile qui confère une certaine mobilité au parasite lorsque celui-ci ne se trouve plus dans le système vasculaire et qui semble également faciliter l’écoulement du liquide à la surface du microorganisme. Il part de la partie postérieure de la forme sanguine grêle appelée trypomastigote (Figure 3.2) au niveau d’un orifice, la poche flagellaire, qui est intimement associée au kinétoplaste.

Le flagelle reste accolé au corps cellulaire jusqu’à ce que sa partie libre émerge à l’extrémité antérieure du trypanosome. Le kinétoplaste constitue le génome mitochondrial du parasite et c’est du nom de cette structure que vient l’appellation de Kinétoplastidés donnée à l’ordre correspondant. Cette structure inhabituelle est sensiblement plus grande que le génome mitochondrial des autres cellules eucaryotes, d’où sa coloration marquée par les colorants spécifiques de l’ADN. Il contient une série de molécules d’ADN circulaire intercaténées, avec des maxi-molécules circulaires (dont la taille est d’environ 20 kb) qui contiennent les gènes codant pour les protéines mitochondriales et des mini-molécules circulaires (dont la taille est de 1 à 2 kb) qui contiennent les ARN guides. Ces derniers sont de petits ARN qui interviennent dans le remarquable processus d’édition de l’ARN (21) au cours duquel le code génétique de base qui se trouve dans les gènes des maxi-molécules d’ADN circulaire est modifié par insertion ( ou plus rarement délétion) de résidus U dans l’ARN encodé. Ce processus d’édition de l’ARN, au cours duquel le code génétique est modifié avant d’être traduit en protéines, est absolument extraordinaire ; dans quelques autres cellules (végétales, par exemple) il y a également un processus d’édition de l’ARN, mais à une aussi grande ampleur, c’est une caractéristique unique des kinétoplastidés.

La forme du trypanosome est comparée à celle d’un tire-bouchon (le terme « trypanosome » vient lui-même du mot grec trupanon qui désigne une sorte de tarière ou de trépan). Elle est maintenue par un ensemble de microtubules subpelliculaires constitués de protéines qui lui donne la forme d’une cage. La biologie cellulaire du trypanosome est unique à bien d’autres égards comparativement à celle des autres cellules eucaryotes, comme la cellule mammalienne en particulier (22), et elle a amené les biologistes cellulaires à considérer qu’on pourrait tirer parti de ces structures pour développer des médicaments contre la maladie. Dans la pratique toutefois, l’exploitation de ces données en vue de mettre au point de nouveaux médicaments n’a pas encore abouti.

Outre le kinétoplaste, qui est situé à l’intérieur de son unique mitochondrie, le parasite possède toutes sortes d’organites que l’on ne retrouve pas habituellement dans les cellules eucaryotes « types » comme les levures ou les cellules mammaliennes. Il s’agit notamment des glycosomes, qui sont apparentés aux peroxysomes mais contiennent les sept premières enzymes de

49

Figure 3.3

Cycle évolutif du trypanosome

Ingestion de parasites lors du repas de sang

Inoculation des parasites présents dans la salive

Le cycle évolutif commence par l’inoculation, lors de la piqûre d’une glossine, de formes métacycliques adaptées à la vie dans le courant sanguin. Ces formes métacycliques se différencient en donnant naissance à des formes sanguicoles prolifératives longues et grêles, qui se multiplient dans le sang et dans d’autres liquides de l’organisme. Elles peuvent également envahir le système nerveux central, conduisant au deuxième stade de la maladie. Les formes grêles se différencient également pour donner naissance à des formes trapues qui ne se reproduisent pas et sont déjà adaptées à l’environnement que va leur offrir la mouche tsé-tsé une fois que celle-ci les aura captées à la faveur d’un repas de sang. Dans l’intestin moyen de la mouche, ces formes courtes et trapues se différencient en trypomastigotes procycliques réplicatives qui sont capables de migrer vers divers sites anatomiques de l’insecte en se différenciant en d’autres formes pour aboutir finalement aux formes métacycliques dans les glandes salivaires.

50

rie de rapports techniques de l’OMS N°984, 2013

la glycolyse, principale voie génératrice d’énergie, outre diverses autres voies métaboliques biochimiques. Le fait que ces différentes voies soient séparées des autres éléments du réseau métabolique constitue un avantage pour le parasite, qui peut ainsi utiliser le glucose comme seule source d’énergie à un taux relativement élevé. Les acidocalcisomes jouent également un rôle dans d’autres fonctions cellulaires importantes, comme le maintien de l’équilibre du pH et des cations, de nombreuses protéines intracellulaires étant sensibles aux fluctuations de ces paramètres (23). Le flagelle lui-même, outre le rôle qu’il pourrait jouer dans la mobilité des parasites (lorsque ceux-ci se trouvent hors du système vasculaire où la force du courant sanguin est très supérieure à celle que peut exercer le flagelle), joue un rôle dans le balayage hydrodynamique de la surface (24). On estime que c’est particulièrement important lorsque des anticorps se sont fixés à la surface du parasite ; en effet, le flux qui est produit à ce niveau par le flagelle conduit à l’endocytose de ces anticorps, suivie de leur destruction par le système phagolysosomique, ce qui nettoie efficacement la surface du parasite (24). Le trait prédominant qui caractérise la surface du trypanosome, c’est la présence d’un revêtement de protéines, les VSG, qui protègent le parasite contre la lyse médiée par le complément et qui peuvent changer périodiquement, de sorte que les anticorps dirigés contre l’une des variantes du revêtement ne seront pas capable de détruire la suivante. Chez les formes sanguicoles du trypanosome, l’endocytose, c’est-à-dire le processus par lequel les substances qui se fixent de manière spécifique aux récepteurs présents à la surface de la cellule sont transportées à l’intérieur, atteint un taux supérieur à celui que l’on observe dans la plupart des autres types de cellules. Cela s’explique par la présence d’un riche système vacuolaire intracellulaire qui interagit avec la surface de la cellule au niveau de la poche flagellaire, le seul endroit de cette dernière non recouvert de tubules subpelliculaires et qui constitue donc une région où des vésicules endocytaires peuvent se former, s’extraire de la surface et pénétrer dans la cellule.