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TROISIEME PARTIE : ANALYSE DU TRAVAIL D’EDUCATION DANS LES LIEUX DE VIE DE LA PROTECTION DE L’ENFANCE

Chapitre 7 : Présentation de l’échantillon

7.2 Moniteur-éducateur (FRA).

Le terme de moniteur éducateur apparaît pour la première fois le 13 août 1936, dans un contexte marqué par une hostilité montante contre l’existence des bagnes d’enfants et dans le cadre de la réforme de la maison d’éducation surveillée de Saint Maurice, que fait voter Marc Rucart, alors Garde des Sceaux. Il y est précisé que le personnel éducateur ne sera plus recruté au sein de l’administration pénitentiaire, mais dans le cadre des Ministères de l’Éducation Nationale et du Travail. Ces personnels prendront, jusqu’à la guerre, la dénomination de moniteur éducateur.

(Dumont, 2011 : 18)

L’ancêtre du titre de ME est celui de « maître d’internat du premier degré ». Dispensé par les Centres d’Entraînement aux Méthodes d'Éducation Active (CEMEA : association nationale d’éducation nouvelle et populaire), ce cursus forme les encadrants d’internats d’enfants. Cette dénomination se poursuivra jusqu’en 1970, date de création du Certificat d’Aptitude aux fonctions de Moniteur Éducateur (CAFME). Historiquement concentrés sur l’accompagnement quotidien des enfants (repas, toilettes, couchers…), les ME sont alors subordonnés aux ES, sans que la répartition des tâches ne soit parfaitement claire. Le diplôme est alors réformé en 1990, afin d’y introduire des notions juridiques et économiques, de nombreuses critiques ayant dénoncé un enseignement uniquement psychologique faisant fi des contextes légaux et socio- économiques. La notion de subordination hiérarchique est bannie, le ME devant travailler « de concours » avec l’ES, comme avec les autres professions médico-sociales.

128 En 2007, le CAFME devient diplôme d’État, avec un référentiel de compétences dédié, celui- ci étant organisé comme le référentiel des ES (domaines de compétences et de formation). Le DEME est de niveau IV, et selon l’INSEE, il s’agit d’une :

Activité exercée concernant principalement un travail technique qui peut être exécuté de façon autonome et comporter des responsabilités d’encadrement et de coordination.

Avec la réforme de 2007, les ME ont été positionnés sur des fonctions spécifiques d’accompagnements des publics au quotidien, pendant que les ES ont évolué sur des fonctions de coordination et de pilotage de projets.

7.3 Psychoéducateur (QUE).

A l’origine, le terme de « psychopédagogie » était employé pour désigner le premier programme de formation à l’Institut de Psychologie de Montréal. Ce terme devient « pyscho- éducation » à la fin des années 1960, puis le trait d’union disparaît complètement dans les années 1990. En 2000, les psychoéducateurs entrent au sein de l’ordre des conseillers d’orientation, puis le 8 décembre 2010, peuvent créer leur propre ordre. La psychoéducation est ainsi une discipline spécialisée en prévention et en intervention dans le domaine de l’inadaptation, particulièrement auprès des jeunes. Le président de l’ordre des psychoéducateurs donne la définition suivante de la profession :

Un psychoéducateur est avant tout un intervenant direct en relations humaines. Sa formation lui permet de bien cerner les difficultés et les besoins d’adaptation et ensuite de mettre en place un plan d’intervention pour corriger la situation. Mais il est aussi formé pour reconnaître les capacités adaptatives des personnes. Ce sont sur ces capacités adaptatives que reposera le plan d’intervention, car notre approche est de toujours s’appuyer sur les forces d’un individu. Par contre, ce qui nous distingue particulièrement des autres professionnels des relations humaines, c’est que nous nous situons à l’intersection de l’individu et de son environnement. Évidemment, nous tenons compte des contraintes individuelles, mais nous tenons aussi compte des contraintes environnementales, puisque nous croyons qu’il y a interaction entre l’individu et son

environnement.

(Vallée, 2014 : paru sur le site ledevoir.com)

En 2017, 4450 psychoéducateurs travaillaient dans le secteur public et la pratique privée (12% au sein des centres jeunesse). Cette profession est propre au Québec, et se voit confier des activités réservées, condition indispensable pour la constitution en ordre. Pour pouvoir exercer,

129 les professionnels doivent valider un master en psychoéducation, et être membres de l’ordre des psychoéducateurs. La formation est de plus obligatoire tout au long de la vie.

Les programmes de formation incluent également des cours sur la méthodologie scientifique et l’analyse des données, la déontologie et l’éthique professionnelle. A cette formation théorique s’ajoutent des stages dans les milieux d’intervention […] la norme d’exercice sur la formation continue de l’OPPQ – l’ordre ndlr – sous-tend que tous les professionnels doivent consacrer 40 heures à des activités de formation par période de deux ans.

(Alain et al., 2017 : 36)

Rappelons ici qu’un ordre sert avant tout à protéger le public et à créer des redevabilités et des responsabilités à propos de certaines actions professionnelles. Ces compétences sont situées sur l’évaluation des difficultés des personnes accompagnées, et l’établissement d’un plan d’intervention. Ce dernier paramètre a d’ailleurs conduit les psychoéducateurs à refuser la proposition faite par les éducateurs spécialisés de créer un ordre commun. Aujourd’hui de nombreux psychoéducateurs évoluent vers la pratique privée et l’expertise-conseil, et ont pris certaines distances avec leur héritage fondateur autour du vécu partagé (Le Blanc, 2004). Parmi les professions rencontrées, celle de psychoéducateur entretient les liens les plus proches avec la recherche scientifique et la formation, de par l’obligation de formation universitaire avancée. C’est ainsi que nous avons décidé de faire de ces affinités une variable d’étude, pour en apprécier les liens potentiels avec certaines spécificités des pratiques d’éducation des psychoéducateurs. Nous tenterons d’étudier si la qualification scientifique amène une distanciation, ou une conscientisation des valeurs et représentations culturelles nourrissant l’activité.