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Le moment préasilaire : l’apparition de la maladie et des causes de l’internement

Vivre avec un proche atteint d’aliénation mentale est tout sauf une expérience facile, que ce soit de nos jours ou il y a de cela 150 ans. Ce que nous tenons à mettre en lumière ici, c’est l’environnement dans lequel ont vécu certains malades avant leur internement à l’Asile de Beauport. Le contenu de la correspondance de l’Asile entre 1865 et 1888 est riche en données qualitatives. Plusieurs lettres nous informent sur l’apparition des premiers symptômes d’aliénation mentale chez le malade et des circonstances sociales et économiques dans lesquelles ces symptômes ont pu influer sur la décision de contacter les autorités de l’Asile de Beauport. La suite de ce chapitre est fondée principalement sur un échantillon de quelque 148 lettres issues de la correspondance des autorités de l’Asile de Beauport concernant l’admission d’un malade à l’Asile169. Sur ces 148 lettres, 114 étaient adressées aux autorités

de l’Asile de Beauport et ont été répertoriées selon le type d’auteurs, comme on peut le voir dans le tableau à la page suivante.

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Tableau 13 - Lettres reçues par l’administration de l’Asile de Beauport selon le type d’auteur

Auteurs Nombre de lettres Membre de la famille 14 Membre du clergé 45 Système judiciaire (prison/police/cour) 15 Médecin 6 Secrétariat provincial 7 Municipalité 4

Bureau médical de l’Asile de Beauport

10

Inconnu 11

Milieu scolaire 2

Total 114

Source : Série documentaire Lettres d'affaires – correspondance (LAC)

Les auteurs de ces lettres envoyées aux autorités de l’Asile de Beauport agirent à titre d’intermédiaire pour un malade ou bien sa famille. Comme on pouvait s’y attendre, ce sont surtout des personnes vivant à l’extérieur de la ville de Québec qui entretinrent une correspondance avec les autorités de l’Asile de Beauport au sujet des malades internés et ce, tant lors du départ vers l’Asile, qu’au moment de son internement jusqu’à sa sortie (décharge). Pour l’Asile Saint-Jean de Dieu, l’historienne Marie-Claude Thifault en arrive au même constat, soulignant que « nombreuses étaient les familles ne pouvant se libérer ni payer le coût de la randonnée jusqu’à Longue-Pointe qui ont plutôt exploité les avantages de la poste pour demeurer en contact avec la personne internée pour troubles mentaux »170.

Il est à noter qu’un membre du clergé de la paroisse de provenance du malade et de sa famille, presque toujours le curé, a joué un rôle primordial dans le processus d’admission de plusieurs aliénés. En effet, près de 40% des lettres concernant une demande d’admission à l’Asile de Beauport ont été écrites par un membre du clergé. Le curé de paroisse joue un rôle

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primordial au sein de sa communauté, surtout auprès des plus nécessiteux. Comme l’indique René Hardy : « […] le curé conserve un rôle important en suscitant la générosité et en coordonnant les efforts de chacun. Il est le seul qui, par son autorité, son prestige et la sympathie qu’il inspire, peut toucher tous les paroissiens »171. De plus, considérant le niveau

peu élevé d’éducation de la population canadienne-française à l’époque étudiée172, il n’est

pas étonnant que les auteurs de ces lettres envoyées aux autorités de l’Asile de Beauport se soient d’abord adressés à leur curé.

Dans les cas illustrés ici à partir de notre échantillon de 148 lettres relatives à l’admission des malades, le milieu familial est l’endroit où sont le plus souvent diagnostiqués les premiers signes d’aliénation mentale. Dans cette partie, nous nous intéresserons principalement aux relations entre les familles et le processus d’internement à l’asile. À la lumière de des sources évoquées, nous verrons comme d’autres avant nous que : « les familles étaient les agents principaux de l’institutionnalisation et que la plupart du temps, les proches faisaient appel à l’asile une fois épuisée leur capacité à répondre au problème »173.

Comme nous l’avons indiqué, que ce soit par la famille elle-même, par un intermédiaire la représentant, ou par la communauté de résidence de l’aliéné, les demandes d’admission sont habituellement accompagnées d’informations concernant le milieu de vie du malade lors de l’apparition des premiers symptômes. Comme l’a noté Geoffrey Reaume: « In short, there were as many circumstances leading to confinement as there were patients »174. Comme le

lecteur s’en doutera, nous n’avons pas l’intention ni les sources nécessaires pour traiter de l’ensemble des patients internés à l’Asile de 1845 à 1893, d’autant plus que James E. Moran a déjà dressé un portrait fort détaillé des différents processus d’admission à l’Asile de Beauport pour la période avant 1870175. Pour cette raison, nous nous attarderons sur certains

cas de figure tirés de notre corpus de sources pour les années 1872 à 1888, afin de donner un aperçu de ce à quoi pouvait ressembler l’expérience pré asilaire pour le malade et son entourage. Nous reviendrons sur le portrait que dresse Moran et d’autres autres auteurs en fin

171 René Hardy, Contrôle social et mutation de la culture religieuse au Québec 1830-1930, Montréal. Boréal, 1999, p. 90.

172 Andrée Dufour, Histoire de l’éducation au Québec, Montréal, Boréal, 1999, p. 34. 173 Nootens, Fous, prodigues et ivrognes, p. 167.

174 Reaume, op. cit., p. 24.

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de chapitre, dans le but d’examiner l’évolution des causes et des situations particulières menant à la décision de recourir à l’internement asilaire.

Les propriétaires de l’Asile de Beauport prirent note que la plupart des cas admis furent des hommes et des femmes touchées par l’aliénation mentale depuis nombre d’années. Ils affirment dans leur rapport de 1858 que : « La majeure partie de ces cas [incurables] nous a été envoyée après avoir épuisé les sympathies de leurs parents, lassé leur patience, et frustré de l’attente d’une mort qu’ils appelaient de leurs vœux »176. Ils affirmèrent aussi que :

Dans cette province, la population de nos campagnes est particulièrement exempte de la plupart des causes qui sont censées produire l’aliénation ; non seulement ils ne sont point indigents ni forcés de lutter pour subvenir à leur existence ; la plupart sont des propriétaires ; ils sont exempts de tous sentiments de dissensions religieuses, qui, dit-on, dans les États-Unis, sont une cause prolifique d’aliénation 177.

Cette opinion avait quelque peu changé lors de la rédaction du rapport de 1872-1873 dans lequel les propriétaires écrivirent :

Ce n’était qu’en dernière instance, soit sous l’étreinte de la pauvreté, ou devant les dangers imminents qu’offrait la garde d’un malade furieux, que l’on se décidait à faire application auprès de l’autorité pour y placer ce malade. Cependant, à mesure que la sympathie publique s’est prononcée en faveur des aliénés, l’organisation des asiles s’est perfectionnée, et le préjudice accrédité, jusque-là, dans les familles a fait place à une confiance croissante dans le dévouement des médecins placés à la tête de ces nouveaux établissements178.

Comment ces observations émises par les propriétaires peuvent-elles se vérifier sur le terrain ? C’est ce que nous examinerons à travers divers exemples qui nous sont parvenus de la correspondance de l’Asile de Beauport. D’abord, l’indigence ou une situation économique précaire était la raison la plus récurrente ayant mené une famille à demander l’internement d’un des siens atteint d’aliénation mentale. Le curé Prudent Dubé expose au mieux ce type de situations dans une lettre adressée au préfet de l’Asile de Beauport, Clément Vincelette, en exposant la précarité d’une famille et la mission charitable de l’Asile, tel qu’il le perçoit :

Monsieur, j’ai dans ma paroisse une famille bien affligée. Le chef est infirme, tout à fait incapable de subvenir aux besoins de ses enfants. La mère est presque dépourvue d’intelligence, les enfants, au nombre de six sont tous idiots de naissance. L’un d’eux est de plus rempli d’infirmités, tout à fait incapable de se porter sur les jambes. En ce moment, tout ce monde est logé dans une petite étable de douze pieds carrés. Voilà que les beaux jours d’été s’en vont, bientôt la saison de l’automne va arriver, puis ensuite l’hiver. Que vont-ils devenir? [...] Ne pourriez-vous pas recevoir ces 6 enfants à l’asile ? Veuillez donc me dire ce que vous pouvez faire en leur faveur,

176 Rapport annuel sur le service de l’Asile de Beauport, 1851, p.33. 177 Rapport annuel sur le service de l’Asile de Beauport, 1858, p. 58. 178 Rapport annuel sur le service de l’Asile de Beauport, 1872-1873, p.22.

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puis alors je solliciterai leur admission en suivant les formalités requises en pareil cas. S’ils ne peuvent être accueillis par nos institutions de charité, je suis convaincu qu’ils vont périr de misère avant l’arrivée de l’hiver179.

On perçoit également dans ce propos un indice de l’importance accordée à l’hérédité dans l’histoire de cette famille, un facteur qui fut considéré à partir de 1858 par les propriétaires de l’Asile de Beauport, comme élément important dans la transmission de l’aliénation mentale : « [… il y a une cause de la folie dans cette province qui, nous avons raison de croire, va en augmentant ; nous voulons parler de l’hérédité […] Nous avons maintenant dans l’asile, mère et filles ; frères ; sœurs ; frères et sœurs»180.

Une situation de détresse financière comme celle que nous venons d’observer, ajoutée aux problèmes de comportements violents d’un aliéné dans le milieu familial, eut des répercussions inattendues pour les propriétaires de Beauport, comme l’écrivait le Dr Landry au Secrétaire provincial à propos d’une situation survenue en juin 1866 :

Ce matin nous avons été forcément obligés d’admettre à l’Asile de Beauport une pauvre femme du nom de Modeste Personne venant de la paroisse de St Jacques de l’Achigan. La famille de cette infortunée est dans une si grande indigence que M. le Curé a été obligé de payer les frais de son transport ici. Cette femme est intraitable, elle a des accès de furie effrayante. Les personnes qui l’ont envoyé n’avaient point cru qu’il fut nécessaire d’obtenir préalablement un ordre du Gouvernement pour son admission à l’asile, et l’homme qui l’a conduite a eu tellement de difficulté dans le trajet qu’il a refusé de la ramener allégeant de plus qu’il n’avait même point d’argent pour payer son passage. Sous ces circonstances exceptionnelles, je vous prie de bien vouloir ordonner son admission à l’asile181.

Une situation de pauvreté et un sentiment de peur face à la dangerosité de leur malade comptent parmi les causes les plus fréquentes incitant plusieurs familles à avoir recours à l’internement d’un proche. L’histoire précédente, bien qu’exceptionnelle, vu l’urgence de la situation dans laquelle se trouvait la famille, et celle dans laquelle se retrouvent les propriétaires de l’Asile, marque les esprits considérant la lourdeur de ce cas. Elle permet aussi de voir comment la gravité d’un cas dut forcer la main des autorités de l’Asile de Beauport, puis celle du gouvernement pour outrepasser le cadre législatif en vigueur, pour prendre en compte de telles réalités.

179 Archives IUSMQ - CIUSSS de la Capitale-Nationale, série documentaire, LAC, volume 1874-1876, lettre #194, « Lettre du curé Prudent Dubé adressée à Clément Vincelette », le 27 août 1875.

Dans les cas de la correspondance de la série documentaire LAC, nous reprendrons l’orthographe originale des lettres telles qu’elles ont été écrites par leurs auteurs lorsque reproduites dans ce mémoire.

180 Rapport annuel sur le service de l’Asile de Beauport, 1858, p. 59.

181 Archives IUSMQ - CIUSSS de la Capitale-Nationale, série documentaire, LAC, volume 1865-1872, p.34, « Lettre du Dr J. E. Landry adressée l’honorable Hector Langevin secrétaire provincial », le 15 juin 1866.

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Cette peur devant certains symptômes de l’aliénation mentale frappe d’une part en raison de la méconnaissance de ce type de maladie à l’époque dans la communauté, mais aussi en raison de l’insécurité qu’entraîne l’entretien d’un aliéné à la maison. Le facteur de dangerosité était à ce point important que certaines familles en venaient à avoir littéralement peur pour leur vie. Avant de se tourner vers le secours de l’Asile, certaines familles vivaient ou essayaient tant bien que mal de s’adapter pour vivre avec leur aliéné. Pour certaines familles, l’entretien d’un aliéné devenait un fardeau beaucoup trop lourd. C’est ce qu’expose en 1876 M. Casault, curé de Tadoussac, concernant Joseph, âgé d’une trentaine d’années :

De ce temps ici il est fou furieux, il veut tuer tout le monde, ses parents en sont effrayés, ils craignent fortement pour leur vie. […] C’est le même dont M. le curé Bérudé mon prédécesseur nous avait parlé y a deux à trois ans je crois. Ses parents ont patienté jusqu’à ce jour, mais il n’y a plus de moyen. Il faut absolument qu’il aille à l’asile si c’est possible. Il a les menottes aux mains de ce temps-ci et on doit lui faire faire une chaine pour l’enchainer […] c’est un garçon pauvre, incapable par conséquent de payer. Son père est un pauvre homme qui a à peine de quoi se sustenter. On est réduit à le veiller jour et nuit182.

Un aliéné agissant de manière dangereuse pouvait devenir plus qu’inquiétant pour son entourage, mais aussi pour lui-même. C’est ce que constate en 1881 le curé de St-Guillaume d’Upton au sujet d’un homme ayant pris des habitudes jugées dangereuses envers la communauté, mais surtout envers lui-même :

Cet homme n’est point voyageur jusqu’à présent, mais il a pris l’habitude de s’éloigner de la maison paternelle, il passe deux et même trois jours sans revenir, il se cache et n’entre nulle part, paraît-il. Il passe le temps sans manger beaucoup, il devient maigre. Par deux à trois fois, il a été trouvé des longueurs de bois jeté sur la voie du chemin de fer qui traverse une des terres de Mr Lefevre, son père ; personne n’a vu qui les plaçait, mais la famille même soupçonne que ce doit être le travail du dit Alphonse Lefevre et ainsi il deviendrait dangereux pour la Société, et afin d’éviter tout malheur qu’il pourrait occasionner et de lui faire donner les soins que son état requiert et le guérir de son affliction, si possible, la famille a décidé de le faire entrer à l’asile et le mettre sous les soins habiles des hommes expérimentés qui prennent charge de ces pauvres affligés, plutôt que de travailler à le renfermer dans une cellule qui lui serait faite à la maison paternelle. […] L’intéressé s’attend d’avoir à payer cinq à six piastres par mois, pour le cas auquel l’affligé serait beaucoup mieux traité et soigné183.

La peur qui ressort de cet extrait est, contrairement aux autres cas présentés, mise d’abord sur la vie du malade lui-même et sur la volonté de sa famille à contribuer à sa guérison et à son bien-être. Contrairement à certaines familles, comme celle de Joseph, qui ont patienté

182 Archives IUSMQ - CIUSSS de la Capitale-Nationale, série documentaire, LAC, volume 1874-1876, lettre # 311, « Lettre du curé de Tadoussac adressée à Clément Vincelette », le 8 février 1876.

183 Archives IUSMQ - CIUSSS de la Capitale-Nationale, série documentaire, LAC, volume, 1881-1885, lettre #47, « Lettre du prêtre O. Bellemare adressée à Clément Vincelette », le 20 juillet 1881.

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quelques années avant de se résoudre à l’internement asilaire, celle de M. Miville agit plus rapidement, comme l’indique M. Roy dans sa lettre datée de 1876 à Clément Vincelette :

Je suis dans la nécessité de vous expédier le nommer Albert Miville. Il souffre depuis 8 à 10 jours, nous avions l’espoir de le rétablir sans le déplacer, mais depuis hier tout espoir est perdu. Les crises de la nuit dernière ont été telles que personne ne veut maintenant aider à en prendre soin. Les gardes malades font défaut même en les payant, il ne reste d’autre alternative que de vous l’envoyer 184.

Le temps qui passa entre le moment de la déclaration de la maladie mentale et la décision d’avoir recours à l’institutionnalisation asilaire dépend bien souvent de la gravité de la maladie et des moyens de la famille ou de la communauté qui a la charge d’un aliéné. C’est ce que les propriétaires de l’Asile observèrent, à savoir que bien des familles attendirent d’arriver au bout de leurs ressources pour procéder à l’internement d’un des leurs. Par contre, certaines familles, en dépit d’une aisance financière leur permettant de s’occuper de leur proche aliéné à la maison, décidèrent de privilégier l’internement.

J’ai dans ma paroisse un jeune homme de 22 ans qui est troublé depuis quelque temps. Ses parents désirent le conduire à l’Asile de Beauport pour le faire soigner. Or, afin de n’éprouver aucune difficulté en menant ce jeune homme chez vous, les parents me chargent de vous écrire pour avoir les renseignements suivants : « La famille est à l’aise, riche même et paiera tous les frais de pension. Dans ce cas, faut-il s’adresser à Québec pour obtenir son admission, ou se rendre chez vous directement sans permis du gouvernement ? »185

L’aliénation mentale frappait toutes les classes de la société. L’aisance financière d’une famille aux prises avec un aliéné ne la protégeait pas contre l’apparition d’une maladie mentale, mais pouvait lui permettre d’opter pour obtenir de l’aide à domicile ou choisir le placement à l’Asile. En effet, comme nous le verrons dans la prochaine partie, l’internement d’un malade aux frais de la famille était assurément facilité puisqu’il nécessitait moins de formalités, l’autorisation d’une admission privée ne requérant pas l’accord du Secrétaire provincial.

L’Asile n’était pas le seul environnement dans lequel étaient internés certains aliénés considérés dangereux. Un grand nombre, du moins avant 1870, venait des prisons comme

184 Archives IUSMQ - CIUSSS de la Capitale-Nationale, série documentaire, LAC, volume, 1881-1885, lettre #307, « Lettre de M. Roy à Clément Vincelette », le 2 février 1876.

185 Archives IUSMQ - CIUSSS de la Capitale-Nationale, série documentaire, LAC, volume, 1881-1885, lettre #100, « Lettre du curé de Sherrington adressée à Clément Vincelette », en mars 1882.

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nous l’avons vu précédemment186, d’autres étaient envoyés dans les hôpitaux généraux. Dans

une lettre à Clément Vincelette en 1887, Georges Grenier nous explique une situation dangereuse dans laquelle fut impliqué un patient aliéné hébergé à l’Hôpital du Sacré-Cœur à Québec :

Je vous envoie ce soir monsieur Yves Pelletier épileptique de l’Hôpital du Sacré-Cœur. Ce monsieur a voulu tuer avec un couteau, puis une hache. Heureusement que je me trouvais sur les lieux sans cela nous aurions peut-être à enregistrer un meurtre. L’hôpital ne peut certainement pas le garder, c’est un sujet pour l’asile sans en douter187.

Outre une situation familiale précaire et des comportements dangereux, l’abus de consommation de boissons alcoolisées fut également un facteur dominant dans les demandes d’admission à l’Asile de Beauport. Selon Forcier, ce rapport entre l’alcool et le développement de la maladie mentale avait été soulevé par des médecins au moment de la Commission Gugy188. Dans une lettre que Clément Vincelette doit garder confidentielle,

l’abbé Chevrefils de La Malbaie demande en 1881 à ce que son frère soit interné :

Il est sous l’influence de la boisson depuis deux mois. Il est menacé du délire tremblant et de mourir bien tristement si on ne lui ôte pas les moyens de se procurer ce triste liquide. Le raisonnement, la jouer morale ne peuvent rien sur lui. Il faut la jouer physique. […] Si on pouvait le mettre dans l’impossibilité de se procurer de la boisson pendant quelques semaines, je suis persuadé qu’il reviendrait à son état normal et la religion qui a coutume d’avoir tant d’emprise sur lui le ramènerait de nouveau dans le sentier de la tempérance189.

En plus de parler du vice de la consommation de boisson190, cet extrait nous fait voir

aussi combien la religion était importante et considérée comme étant d’une aide précieuse