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TYPOLOGIES D ’ INSTRUMENTS POLITIQUES À UNE PROPOSITION DE TYPOLOGIE

Chapitre 5 Des « méthodes » de conception et d’utilisation des typologies d’instruments politiques à quelques typologies d’instruments politiques à quelques

5.2 Modalités de conception des typologies et leurs lacunes

A un niveau général, différents auteurs se sont penchés sur les « types » de modalités de conception (et d’application) des typologies des instruments politiques et en ont relevé certaines lacunes auxquelles étaient confrontées les typologies des instruments politiques (de protection de l’environnement).

Des auteurs tels que Varone (1998, 2001) et Kaufmann-Hayoz et al. (2001) distinguent par exemple deux démarches alternatives de « catégorisation » en opposant la démarche par catégories nominales de celle par les attributs. Vedung (1998) identifie quant à lui également de manière schématique deux approches fondamentales pour concevoir des taxonomies : l’approche du choix vs par les ressources et l’approche maximaliste vs minimaliste. Enfin, Kaufmann-Hayoz et al. (2001) distinguent également trois approches très semblables aux distinctions faites par Varone (1998) et Vedung (1998).

5.2.1 L’approche par les catégories nominales vs par les attributs

Dans leurs ouvrages respectifs Varone (1998, 2001) et Kaufmann-Hayoz et al. (2001) distinguent deux démarches alternatives de « catégorisation ». Une première façon consiste à produire des catégories nominales d’instruments (les typologies) et une seconde porte son centre d’intérêt sur les attributs fondamentaux de ces derniers.

Cependant, à bien lire Varone (1998), nous percevons que, selon l’auteur, seule la première approche permet d’établir des typologies en tant que telles, au contraire de la seconde qui ne semble pas être « perçue » comme une démarche « typologisante »171, alors même que nous verrons par la suite que l’on peut tout à fait dresser une typologie sur la base de cette démarche.

L’approche par les catégories nominales consiste selon Varone (1998, 2001) à distinguer, en fonction d’un ou plusieurs critères analytiques, des classifications d’instruments de nature exclusives. Or, selon l’auteur, « l’application par divers chercheurs de critères alternatifs conduit inévitablement à la construction de typologies/catégorisations divergentes » (Varone, 1998, p. 33).

Ainsi, les différentes typologies établies par les chercheurs se différencient et/ou se confondent inévitablement suivant les critères utilisés. Ces critères (Varone, 1998, Kaufmann-Hayoz et al., 2001) peuvent par exemple faire référence aux ressources engagées lors de la mise en œuvre des instruments (Hood, 1983), à leur degré de contrainte légitime (Doern et Phidd, 1983), à leurs effets attendus (McDonnell et Elmore, 1987b) ou encore aux aptitudes comportementales des groupes visés par les instruments (Schneider et Ingram, 1990a) (cf.

Tableau 23 ci-après).

171 Comme le laissent par contre entendre Kaufmann-Hayoz et al. (2001).

Tableau 23 : L’approche par les catégories nominales, quelques exemples

Instruments de conseils, d’information et de persuasion (nodality) / Instruments financiers (treasure) / instruments

Mandats (mandates) / Incitations financières (inducement) / Capacité de production d’infrastructure (capacity-building) / Capacité de

Instruments prescriptifs ((reliance on) Authority Tools) / Instruments d’incitation (Incentive Tools) / Instruments de stimulation/fourniture des capacités (Capacity Tools / Capacity-building) / Instruments de persuasion (Hortatory (and Symbolic) Tools) / Instruments

d’apprentissage institutionnel (Learning Tools)

Source : adapté de Varone, 1998, p. 34

A l’opposé, l’approche par les attributs fondamentaux (Varone, 1998, 2001, Kaufmann-Hayoz et al., 2001), qui a notamment été suggérée par Salamon (1981), ne vise pas à établir des typologies sous la forme de catégories exclusives mais plutôt à identifier les caractéristiques fondamentales (ou attributs) des instruments afin de rendre compte des dimensions multiples de ces derniers et de les comparer systématiquement en fonction de leurs attributs (efficience, efficacité, etc.). Elle débouche donc sur une approche comparative ayant pour étalon de mesure les attributs pris en considération (cf. Tableau 24 ci-dessous).

Tableau 24 : L’approche par les attributs – quelques exemples Exemples d’auteur(s) Attributs des instruments

Sabatier et Pelkey (1987)

Intensité des ressources investies et coûts économiques (economic cost) / Risque et coûts politiques induits (political cost) / Efficacité, degré de réalisation des objectifs de la coalition politique (efficacy)

Salamon (1989)

Faisabilité et coûts administratifs (administrative feasability) / Efficacité des acteurs administratifs vs vis-à-vis du groupe cible (supply vs targeting effectiveness) / Efficience des ressources investies (efficiency) / Effets redistributifs entre les groupes (equity) / Coûts politiques (political support)

Linder et Peters (1989)

Intensité des ressources et des coûts administratifs (resource intensiveness) / Qualité du ciblage selon sélectivité et flexibilité (targeting) / Risque politique selon visibilité et échec potentiel (political risk) / Degré de contrainte, connotation idéologique (constraint)

Trebilcock (1994)

Efficience des ressources investies (technical or efficency considerations) / Effets redistributifs entre les groupes (distributive consideration) / Implication pour le soutien partisan (political constraints)

Source : adapté de Varone (1998)

L’opposition de ces deux approches permet selon nous de souligner l’importance que semble revêtir la « dimension caractérisante » des (types) d’instruments dans la démarche

« typologisante » (identifications des caractéristiques fondamentales des (types) d’instrument). De même, l’approche par les attributs a le mérite selon nous de souligner un point important dans la perspective qui est la notre, à savoir la « dimension comparative », même si ce n’est pas dans le but de construire une typologie d’instrument. Elle est d’ailleurs sans doute la réponse (implicite, puisque non dirigée à résoudre ce problème) à une des lacunes qui n’a été que « partiellement » identifiée jusqu’à présent, à savoir l’impossibilité d’utiliser une typologie à des fins de classement, lacune qui, jusqu’à présent, s’est exprimée chez les auteurs par le constat de l’impossibilité apparente que les typologies ont à

« appréhender » des instruments complexes aux multiples facettes.

Ainsi, souligne Varone (1998), l’approche par les catégories nominales souffre d’un inconvénient majeur face à l’approche par les attributs :

compte tenu des dimensions multiples de tout instrument et de l’importance relative accordée à l’une ou l’autre de celles-ci selon des intérêts de recherche particuliers (Doern et Phidd, 1992, p. 110), aucune classification n’apparaît aujourd’hui comme unanimement acceptée, ni même comme dominante. Quelques recoupements entre ces différentes classifications sont certes possibles. Pal (1992, pp. 142-144) propose ainsi une taxinomie des instruments qui combine la typologie de Doern et al. avec celle de Hood.

Une véritable convergence entre les classifications ne peut cependant être envisagée. A notre avis, les typologies proposées par la littérature ne répondent pas adéquatement à la question de l’opérationnalisation du concept d’instrument. En effet, selon cette approche, il faudrait expliquer pourquoi au moment Ti on a retenu dans la politique publique Pi l’instrument Ii classé dans la catégorie Cx, plutôt que l’instrument Ij classé dans la catégorie Cy. Comme il n’y a cependant d’accord ni sur les critères de classification, ni sur la répartition des instruments dans les multiples catégories, la variance de la variable dépendante serait différente selon chaque typologie, respectivement selon chaque auteur.

Les conclusions d’études empiriques se basant sur des typologies alternatives ne seraient donc pas comparables et ne favoriseraient pas un développement cumulatif des connaissances, développement indispensable à l’élaboration d’un modèle causal du choix des instruments de l’action publique. (Varone, 1998, pp. 35-36)

En des termes plus synthétiques (Varone, 2001) :

aucune classification ne semble unanimement acceptée, ni même dominante. Les différentes typologies proposées par la littérature s’avèrent donc insatisfaisantes pour opérationnaliser le concept d’instrument. En effet, comme il n’y a d’accord ni sur les critères de classification ni sur la répartition des instruments dans les multiples catégories, la variance de notre variable dépendante est différente selon chaque typologie.

Par conséquent, les conclusions d’études empiriques se basant sur des classifications alternatives demeurent peu comparables, ce qui ne favorise pas un développement cumulatif des connaissances. (p. 5)

La question de l’opérationnalisation de la variable instrument est ainsi posée, mais non résolue dans l’optique de dresser une typologie puisque l’auteur (Varone, 1998) tire de ce constat sa préférence pour l’approche par les attributs (qui rappelons-le n’est pas perçue comme une démarche typologisante) qui s’avère a priori plus fructueuse que l’élaboration de typologies qui tendent à ne mettre en évidence que les similitudes ou les différences relatives

à une unique dimension des instruments172. L’approche par les attributs ne vise donc plus l’élaboration de catégories exclusives mais se focalise sur les caractéristiques fondamentales (les attributs) des instruments, permettant ainsi de prendre en compte les multiples dimensions des instruments (efficience, efficacité, etc.) et de les comparer de manière systématique.

Ainsi, selon l’auteur (Varone, 1998), l’approche par les attributs offre une piste pour opérationnaliser la variable instrument :

Cette démarche de définition permet ensuite de structurer la conduite de premières études empiriques sur la nature des instruments retenus dans une politique particulière et sur les raisons de ces choix. Il est ainsi suggéré de définir et de comparer les instruments Ii et Ij d’une politique Pi en fonction de leurs attributs Ai-l et d’expliquer le choix de l’instrument Ii plutôt que de l’instrument Ij en fonction de l’attention accordée par les acteurs d’une politique à ces quatre attributs (Varone, 1998, p. 40).

Or selon nous, cette démarche, certes très intéressante (dans son optique comparative), ne fait aucunement disparaître la nécessité d’élaborer au préalable une typologie d’instrument pouvant seule constituer selon nous une rationalisation de la variable dépendante permettant une généralisation des résultats. Par ailleurs, l’approche par les attributs n’enlève en rien la nécessité d’identifier au préalable les instruments et donc de débuter par une démarche conceptuelle (définir des types).

Ainsi, les défauts attribués à la démarche typologisante par Varone (1998, 2001) ne sont selon nous pas levés par la démarche par les attributs qui est également soumise à une définition et à un choix – par essence non unanimes – des critères à prendre en considération, plaçant par conséquent le véritable enjeux du point de vue de l’opérationnalisation de la variable instrument sur le plan de la méthode (d’analyse), à savoir, par conséquent, sur l’impossibilité pour la démarche typologisante d’aboutir à répartition unanime des instruments dans les catégories.

Or, nous remarquerons que l’auteur ne remet pas en question la pratique « classificatrice » de l’approche par les catégories nominales qui est pourtant la raison principale pour laquelle il rejette d’emblée cette approche. D’ailleurs, typologies et classifications semblent être des synonymes pour ce dernier (et d’ailleurs pour la très grande majorité des auteurs). Or c’est bien sur ce point qu’il nous semble possible de « réconcilier » approche typologisante et par les attributs afin de dépasser les défauts (méthodologiques) inhérents à une approche typologisante (de nature classificatrice). Mais nous reviendrons sur ces différents points méthodologiques ultérieurement173 et préférons nous occuper pour l’instant à identifier quelques autres démarches « typologisantes » et lacunes.

5.2.2 Choix vs ressources vs continuum vs max/minimalisme

A l’image de Varone, Vedung (1998) identifie également de manière très schématique deux approches fondamentales pour concevoir des taxonomies (entendons typologies) :

1. « l’approche choix vs ressources [choice versus resource approach] » (p. 22) ;

172 Nous verrons par la suite que nous proposons une méthodologie qui associe la construction d’une typologie et la possibilité de mettre en évidence les multiples dimensions des instruments.

173 Voir notamment un peu plus loin le chapitre 4.1.3.

2. et « l’approche maximaliste vs minimaliste [maximalist versus minimalist approach] » (p. 22) que nous avons déjà entrevue dans la première partie de notre thèse.

A) Approche par le choix vs par les ressources

En opposant choix étatique et ressources à mettre en œuvre, la première approche pose la question de savoir si la classification doit se faire en fonction du point de vue du choix de l’Etat d’intervenir ou de ne pas intervenir ou si elle doit se restreindre à ne considérer que les outils (les ressources) dont l’Etat dispose lorsqu’il a choisi d’intervenir.

Vous en conviendrez, répondre à cette question revêt une certaine importance méthodologique dans la perspective de dresser puis d’appliquer une typologie d’instruments politiques.

Or, pour Vedung (1998) – qui reprend ici la distinction faite par Howlett entre approche par le continuum (continuum approach) et approche par les ressources (resource approach) et qui substitue donc le terme de continuum par la notion de choix (cf. Encadré 12 ci-après) – si l’approche par le choix mène à des classification très complètes174 qui mettent en exergue l’opposition entre les deux pôles d’un continuum (fondé sur l’élément de contrainte exercée par le gouvernement) que sont d’un côté l’interventionnisme étatique et de l’autre le laisser-faire175, cette distinction entre « non-interventionniste » et « interventionnisme » souffre de deux inconvénients majeurs.

Premièrement, pour l’auteur, ne pas intervenir n’est pas synonyme de laisser-faire et la société civile ainsi que les ménages ne sont donc pas compris dans cette perspective analytique.

Deuxièmement, et c’est peut-être une remarque plus fondamentale, selon lui, la décision de ne pas intervenir ne doit pas être considérée comme un instrument en soi mais plutôt comme une stratégie politique dans la mesure où l’on définit les instruments politiques comme étant une décision étatique d’agir (importance de l’action, de l’intervention). La décision d’intervenir de la part de l’Etat constitue donc un « pré requis » au concept d’instrument qui est ainsi plus à même d’être capté par les ressources que l’Etat devra dès lors mobiliser pour agir.

Encadré 12 : L’approche par les ressources et l’approche continuum chez Howlett

La distinction entre choix et ressources a été faite initialement par Howlett (1991) qui, en des termes très semblables, oppose quant à lui l’approche par les continuums (continuum approach) de l’approche par les ressources (resource approach).

Pour Howlett, il existe deux méthodes pour traiter des instruments : l’approche par les ressources à travers laquelle les instruments sont classifiés en fonction de la nature des ressources employées par l’Etat (ressources fiscales, ressources organisationnelles, etc.) et l’approche dite du continuum qui organise les instruments en fonction du choix des modalités de leur mise en œuvre et notamment en fonction de l’opposition faite entre Etat et Marché. La première approche met en évidence les différences existantes entre les instruments et suggère implicitement que les instruments ne sont pas substituables et que pour un problème bien défini un instrument particulier est à retenir (exemple typologie de Hood) alors que la seconde souligne les similitudes et la substituabilité technique des instruments (exemple : le continuum de Doern et Phidd (1983)).

Source : adapté de Howlett, 1991, pp. 3-4, Varone, 1998, pp. 34-35

174 Par exemple les typologies de Doern et Phidd (1983) et la typologie d’Anderson (1977).

175 Soit le « le continuum contrôle – liberté [the continuum from freedom to control] » (Vedung, 1998, p. 22 citant Anderson, 1977) dans les termes d’Anderson.

Notons pour l’anecdote que suite à ces deux reproches, l’auteur propose donc d’amender une typologie existante (celle d’Anderson, 1977), en y introduisant les « boîtes » société civile et ménages. Il en profite d’ailleurs pour distinguer clairement l’approche par le choix de l’approche par les ressources qui est conçue comme une stratégie d’intervention (cf. Figure 7 ci-dessous)

Figure 7 : Approche par le choix vs approche par les ressources chez Vedung Public Policy Choices (Public Policy Strategies)

Non intervention (Market mechanisms vs Civil society vs Household)

Choice approach Resources approach

Intervention (Structured options vs Biased options vs Regulation)

Source : adapté de Vedung, 1998

B) Intermède : l’approche par les continuums (contrainte)

Selon Howlett et Ramesh (1995), les politologues canadiens Doern et Phidd (1983/1992) ont

« révolutionné » les classifications des instruments en les arrangeant le long d’une échelle mesurant le degré de contrainte légitime (legitimate coercion) délimitée, d’une part, par le pôle de l’autorégulation (self-regulation), l’instrument le moins contraignant (coercive), et, d’autre part, par le pôle « propriété publique » (public ownership), l’instrument le plus contraignant (coercive).

Bien que cette taxonomie soit confrontée à des difficultés telles que l’opérationnalisation du concept de contrainte ou le placement des divers instruments le long du continuum, elle a fourni, selon ces auteurs, les bases fondatrices pour les futures classifications en établissant la nécessité d'analyser des instruments dans le contexte du rapport existant entre l'Etat et la Société (effets de l’Etat sur la Société).

Cependant, c’est un peu vite oublier les pères fondateurs de l’analyse instrumentale des politiques publiques, Dahl et Lindblom (1953/1992), qui, bien avant Doern et Phidd (1983/1992), avaient déjà utilisé la méthode du continuum, et notamment celui de la contrainte, comme élément fondateur de leur(s) typologie(s)176.

Or en procédant de la sorte, Dahl et Lindblom (1953/1992) dressent en réalité cinq typologies différentes définissant elles-mêmes deux types d’instruments antinomiques, représentés par les deux pôles de chaque continuum. Ces continuums, dont la méthode de construction n’est pas explicitée par les auteurs et ne fait donc pas l’objet d’un développement théorique, servent donc de cadre d’analyse appliqué aux instruments des politiques publiques.

Pour rappel, pour Dahl et Lindblom (1953/1992) :

• ces continuums ne sont que d’une nature illustrative et doivent être considérés comme des « systèmes compréhensifs [comprehensive systems] » (p. 9) ;

176 Voir le chapitre 2, point 2.1.1, de la première partie de notre recherche dans lequel nous avons constaté que Dahl et Lindblom (1953/1992) ont classé différents instruments le long de cinq continuums, dont celui de la contrainte.

• par ailleurs, les différentes techniques que les auteurs positionnent sur les différents continuums doivent être considérées comme des « types » à l’intérieur desquels des gradations peuvent également exister (cf. Annexe 1) ;

• ce positionnement peut d’ailleurs être parfois arbitraire et donc remis en question puisqu’il découle d’un jugement subjectif plus que d’une démonstration factuelle.

Nous noterons ainsi que la méthode des continuums revêt une importance dans la mesure où elle permet de comparer les instruments à des pôles qui sont censés caractériser les instruments et que la notion de contrainte semble prendre une certaine importance – récurrente pourrions-nous dire – qu’elle soit d’ailleurs (plus ou moins explicitement) définie en termes de coercition, d’autorité, de niveau d’engagement de l’Etat, de niveau d’interventionnisme ou de niveau de propriété publique (voir plus loin nos développement sur la notion de contrainte).

Par ailleurs et pour revenir sur les propos de Howlett (voir Encadré 12 ci-avant), nous noterons également que la distinction entre approche par les ressources et approches par les continuums semble perdre sons sens si l’on considère que les deux pôles d’un continuum peuvent être définis par la différentiation de deux ressources.

Notons enfin qu’en ce qui nous concerne, nous avons pu remarquer que la méthode du continuum est souvent utilisée par les auteurs soit comme élément fondateur de la typologie – les deux pôles définissant en soi deux types d’instrument (cf. par exemple Dahl et Lindblom, 1953/1992 ou Bressers et O’Toole, 1998 – ou une gradation sur ce pôle définissant plusieurs types d’instruments (cf. par exemple Howlett et Ramesh, 1995), soit comme simple élément analytique supplémentaire/additionnel utilisé pour placer des types d’instruments déjà prédéfinis. C’est le cas de la typologie dressée par Hood (1983/1990).

Aussi, un auteur comme Hood (1983/1990) ne prend pas directement un continuum comme point de départ pour établir sa typologie mais va l’introduire par la suite (de manière ex-post) pour ne pas trop déroger avec « l’air du temps ». Ce continuum contrainte est connu sous l’acronyme N-T-A-O. En effet, selon Hood, les quatre ressources qu’il a défini, si elles sont différentes dans leur modalité d’exécution (certaines sont par exemple auto-renouvelantes alors que d’autres non), introduisent surtout un niveau de contrainte différent. Très schématiquement, Hood souligne ainsi que le niveau de contrainte des ressources utilisées augmente dans le sens Nodalité – Trésor – Autorité/Organisation. Notons également qu’il introduit également une distinction du degré de contrainte interne à sa catégorie autorité (Hood, 1983/1990, p. 55).

C) Approche maximaliste vs minimaliste

La seconde approche soulignée par Vedung (1998) met quant à elle en opposition les classifications de type maximaliste aux classifications de type minimaliste (maximalist vs minimalist approach)177, approches qui, au demeurant, peuvent également être « croisées » avec l’approche opposant choix et ressources.

177 Exemples donnés par l’auteur de typologies de type maximaliste : U.S. Office Management and Budget, (1981), Chelf, C. P. (1981), Kirschen et al. (1964) ; exemples données par l’auteur de typologies de type minimaliste : Bernard (1939), Brigham et Brown (1980) et Etzioni (1975)

Pour rappel, l’approche minimaliste consiste à créer un petit nombre de catégories génériques de base dans le but de classer les instruments (deux voire trois catégories) et l’approche maximaliste consiste à dresser de longues listes d’instruments (qui se rapprochent plus d’un inventaire « exhaustif » que de catégories générales).

Nous soulignerons ici que, selon l’auteur, les désavantages des approches maximaliste et minimaliste sont, pour la première, le manque de structure et d’organisation, et pour la seconde, à l’instar de la typologie dichotomique de Brigham et Brown (1980) qui différencient pénalités et incitations, les quelques points suivants :

1) l’impossibilité de classer explicitement certains instruments qui semblent toutefois importants de ne pas oublier dans le contexte de notre société postindustrielle

(notamment en rapport avec la dimension informative/persuasive de l’action étatique : transfert de connaissance, éducation, conseils, persuasion (y compris émotionnelle), propagande, argumentation, etc.) ;

2) l’impossibilité d’appréhender les coûts économiques qui sont par nature souvent rattachés à la catégorie des sanctions et punitions, alors qu’ils ne sont pas de même nature ;

3) le fait que les coûts et les subventions sont ici opposés, alors qu’ils sont très apparentés et semblent relevés d’une même logique.

Vedung conclut ainsi qu’une classification devrait contenir trois catégories pour être fructueuse. Il proposera dès lors d’amender une typologie existante, celle d’Etzioni (1961/1971), pour remédier à ce problème (voir nos développements ci-après).

Notons d’ores et déjà que par rapport aux typologies bicéphales, Etzioni introduit, en plus de ces deux catégories que sont le pouvoir de contrainte (coercive power) et le pouvoir rémunérateur (remunerative power), une troisième dimension : la dimension normative (pouvoir normatif (normative power)). Or, selon Vedung, cette troisième catégorie revêt une grande importance dans les débats sur les instruments étatiques, car si la dimension coercitive est l’aspect central du pouvoir de l’Etat, la persuasion et les moyens de communication sont

Notons d’ores et déjà que par rapport aux typologies bicéphales, Etzioni introduit, en plus de ces deux catégories que sont le pouvoir de contrainte (coercive power) et le pouvoir rémunérateur (remunerative power), une troisième dimension : la dimension normative (pouvoir normatif (normative power)). Or, selon Vedung, cette troisième catégorie revêt une grande importance dans les débats sur les instruments étatiques, car si la dimension coercitive est l’aspect central du pouvoir de l’Etat, la persuasion et les moyens de communication sont

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