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D ’ INSTRUMENTS DES POLITIQUES PUBLIQUES

Chapitre 3 Quelques exemples de typologies d’instruments issus d’autres champs disciplinaires d’autres champs disciplinaires

4.2 Combinaison des types d’instruments : évolution « téléologique » vers plus de contrainte ! contrainte !

(nous reviendrons sur ce point par la suite).

4.2 Combinaison des types d’instruments : évolution « téléologique » vers plus de contrainte !

Pour atteindre leurs objectifs, les Etats ont théoriquement la possibilité de combiner les instruments de manière synchronique (concomitante) ou de manière diachronique (séquentielle). Adhérer à cette hypothèse implique d’accepter le fait que l’introduction des instruments peut être chronologiquement séquencée et qu’une sélection doit alors être opérée pour la mise en place d’une combinaison adéquate dans le temps. Ainsi, dans une perspective

153 Notons d’ailleurs à ce propos que, selon nous, Morand (1999) n’est pas tombé dans ce piège. En effet, s’il part de l’hypothèse d’une modification « historique » du mode d’intervention de l’Etat et le passage d’un mode de régulation sociale de nature contraignante à un mode de plus en plus « soft », il se garde cependant d’en établir une réalité pratique. Ainsi, Morand (1999) souligne avec insistance le fait que les types d'Etat qu’il a définis, bien qu'étant apparus historiquement dans un ordre chronologique, coexistent dans la réalité actuelle.

Ainsi, le fait que « divers modèles se soient succédés dans l'histoire ne signifie pas qu'à chaque étape on ait fait tabula rasa de tout ce qui précédait » (p. 18). Nous pouvons d’ailleurs relever avec lui que le législateur mélange fréquemment plusieurs techniques et que si les types de modalité d'action de l'Etat ont pu « prévaloir » à un moment donné de l'histoire, ils ne sont en aucun cas exclusifs aujourd’hui. De plus, l’auteur souligne également avec insistance que les types d’Etat théorisés doivent être considérés comme des types idéaux au sens wébérien du terme. Comme le souligne Morand, les différentes formes d’Etat et de droit qu’il manipule à des fins heuristiques ne sont qu’un reflet imparfait de la réalité sociale ou juridique. Ce sont des décodeurs, des outils d’analyse. Ils ne sont pas la réalité mais servent plutôt à la « mesurer ».

à plus ou moins court terme, ce type de combinaison peut être illustré par les deux équations suivantes :

Combinaison instrumentale synchronique = Ia/t1 + Ib/t1 + … + In/t1

Combinaison instrumentale diachronique = Ia/t1 + Ib/t2 + … + In/tn

ou I = instrument

a, b … n = type d’instrument a, type d’instrument b … type d’instrument n t1, t2 … tn = temps 1, temps 2 … temps n

Une combinaison de ces deux possibilités peut également être envisagée :

Combinaison instrumentale synchronique et diachronique = Ia/t1 + Ib/t2 + Ic/t2 + … + In/tn ou

I = instrument

a, b … n = type d’instrument a, type d’instrument b … type d’instrument n t1, t2 … tn = temps 1, temps 2 … temps n

Or, si nous venons de constater dans le chapitre précédent que, dans le cadre d’une perspective analytique historique (approche diachronique du temps long), une évolution allant vers une diminution de la contrainte peut être esquissée (mais toutefois relativisée), une tendance inverse semble être soulignée par la littérature spécialisée dans une perspective temporelle et analytique à plus petite échelle.

Ainsi, comme le souligne Varone (1998), les premiers chercheurs ayant abordé la question du choix des instruments de manière diachronique (entendons par là à plus ou moins court terme) ont souligné (plus de manière hypothétique que par la démonstration) une « évolution (quasi)naturelle » dans leur utilisation qui suit une graduation de l’instrument le moins contraignant vers le plus contraignant.

Selon l’auteur, les exemples des typologies de Doern et Wilson (1974), ainsi que de Hood (1983), « illustrent la portée de telles hypothèses qui sont restées longtemps dominantes au sein de la recherche sur les instruments des politiques publiques » (Varone, 1998, p. 42).

En effet, le continuum établit par Doern et Wilson (1974, notamment cité en référence par Schneider et Ingram, 1990, Howlett, 1991, et Varone, 1998) est fonction du degré de contrainte des instruments et le choix des instances gouvernementales (canadiennes) semblent aller dans le sens d’une gradation de l’instrument le moins contraignant vers celui le plus contraignant :

Politicians have a strong tendency to respond to policy issues (any issu) by moving successively from the least coercive governing instrument to the most coercive. Thus they tend to respond first in the least coercive fashion by creating a study, or by creating a new or reorganized unit of government, or merely by uttering a broad statement of intent.

The next least coercive governing instrument would be to use a distributive spending approach in which the resources could be handed out to constituencies in such a way that the least attention is given as to which taxpayers’ pockets the resources are being drawn from. At the more coercive end of the continuum of governing instruments would be a larger redistributive programme, in which resources would be more visibly extracted from the more advantaged classes and redistributed to the less advantaged classes. Also the more coercive end of the governing continuum would be direct regulation in which

the sanctions or threat of sanctions would have to be directly applied. (Doern et Wilson (1974, p. 339), cités par Howlett, 1991, p.12, et par Vedung, 1998, p. 40, citant également pour la première phrase Doern et Phidd (1983, pp. 128ss))

Cette idée (ou hypothèse) selon laquelle les gouvernements combineraient les instruments de manière séquentielle et graduellement plus contraignante (Vedung, 1998, Bemelmans-Videc et Vedung, 1998), ou en d’autres termes que les problèmes sont résolus en trois étapes : par l’information, puis par l’application d’incitations et finalement par une régulation/sanction, soit par l’utilisation successive d’instruments de plus en plus contraignants, peut être expliquée selon Vedung (1998) par le fait de la pus grande acceptabilité des instruments les moins contraignants et d’une plus grande acceptabilité générale d’un programme par étapes successives. Ainsi l’instrument le moins coercitif est appliqué dans une première étape afin de lever progressivement les réticences à une intervention de l’Etat qui, par la suite, si cela devient nécessaire, peut dès lors plus facilement utiliser des instruments plus coercitifs. Cette stratégie d’intervention graduelle serait ainsi selon les auteurs (Howlett, 1991, Vedung, 1998, Varone, 1998), l’expression d’une idéologie politique libérale – et de son « principe de contrainte minimale [The minimal constraint principle] »154 (Vedung, 1998, p. 41) – et de la difficulté à imposer des instruments contraignants à des groupes sociaux réticents face à la contrainte et défendant leurs intérêts. Dans cette perspective, même si les instruments sont substituables, les gouvernements vont préférer l’instrument le moins coercitif, à moins que son inefficacité avérée les pousse à l’utilisation d’instruments plus contraignants (Howlett, 1991).

Si nous reprenons l’équation que nous avons définie au départ, la stratégie d’intervention séquentielle et graduellement contraignante peut être illustrée de la manière suivante :

Combinaison instrumentale diachronique

=

Ia-c0/t1 + Ib-c1/t2 + … + In-cX/tn

ou I = instrument

a, b … n = type d’instrument a, type d’instrument b … type d’instrument n t1, t2 … tn = temps 1, temps 2 … temps n

-c0, -c1 … -cX = contrainte nulle (0), contrainte de niveau 1 … contrainte de niveau X

Cette stratégie instrumentale peut également être illustrée par la théorie des « trois E » de Paisley (1981, cité en référence par Van der Doelen, 1998) (cf. Figure 6 ci-après)

Comme le relève Varone (1998, faisant référence à Hood, 1983), cette hypothèse se retrouve également chez un auteur comme Hood (1983/1990) qui introduit une gradation du niveau de contrainte dans sa typologie. En effet, celle-ci introduit très schématiquement une augmentation de la contrainte en fonction des ressources utilisées qui va dans le sens nodality treasure authority / organisation, mais également au sein même de la catégorie autorité (low hight).

154 Selon Hood (1986), qui reprend les termes d’Adam Smith, le principe de la contrainte minimale signifie induire chez la population le moins possible de « trouble, vexation, and oppression » (Hood, 1986, pp. 190ss cité en référence par Bemelmans-Videc et Vedung, 1998, p. 264). Ainsi, selon Doern et Phidd (1983), « The minimal-constraint principle would dictate that lower-constraint instruments such as moral suasion and financial incentives be preferred to higher-constraint instruments like regulation, where all else is equal » (Doern et Phidd 1983, p.112 cité par Bemelmans-Videc et Vedung, 1998, p. 264).

Figure 6 : La stratégie des « trois E » de Paisley

L’hypothèse de l’augmentation graduelle de la contrainte dans le choix des instruments peut également être illustrée par la stratégie des trois E (Three E’s strategy : Education, Engineering, and Enforcement) de Paisley (1981) que l’on peut illustrer comme suit

Education Engineering Enforcement l’information, deuxièmement par l’application d’incitation puis en dernier par l’établissement de réglementations.

Dans cette perspective, l’Etat se doit d’utiliser des instruments de plus en plus contraignants par étapes successives. Ceci permet notamment de lever graduellement la résistance de certains acteurs pour permettre l’introduction d’instruments plus contraignants.

Ainsi, les politiques publiques se doivent de résoudre les problèmes à travers le temps selon trois voies : first by the provision of information (education), subsequently by the application of selective incentives (engineering), and lastly by the establishment of rules and regulation (enforcement).

The underlying notion is that in solving social problems the authorities apply tools of increasing strength in successive stages. (Bemelmans-Videc et Vedung, 1998, pp. 263-264 citant en référence Van der Doelen, 1998, p.123)

Source : adapté de Van der Doelen (1998), Bemelmans-Videc et Vedung (1998)

Cette évolution fait d’ailleurs supposer à Hood (Hood, 1983, notamment cité en référence par Howlett, 1991 et Varone, 1998) l’existence d’un phénomène de « re-instrumentalisation à travers le temps [re-tooling : change over time] » (p.126) qui caractérise les choix successifs des instruments. Cependant, l’évolution n’est toutefois pas totalement égale à celle esquissée auparavant. En effet, le phénomène constaté par Hood (1983, cité en référence par Howlett, 1991 et Varone, 1998) comprend un double mouvement155 qui souligne certes le passage des instruments d’information aux instruments basés sur les autres ressources – et donc des instruments moins contraignants aux plus contraignants – mais également un passage des instruments coercitifs aux instruments basés sur les ressources financières et d'organisation – passage qui ne correspond pas entièrement à l’hypothèse esquissée jusqu’à présent.

L’explication avancée par Hood (1983, cité en référence par Howlett, 1991) est celle d’un choix des décideurs établi plus sur la base des expériences passées et des erreurs commises (processus d’essais erreurs), qui se rapproche plus d’un choix fondé sur l’intuition et la tradition ainsi que découlant du changement technologique. Mais les raisons exactes ne sont

155 « A shift from information-based instruments to those based on other resources, and a shift from reliance on coercition to the use of financial and organisational resources » (Howlett, 1991, p. 10, faisant référence à Hood, 1986, pp. 126-131)

pas analysées plus en détail. Cependant, dans tous les cas, pour Hood (1986, cité en référence par Howlett, 1991), même si les instruments sont substituables, les gouvernements se doivent de faire un choix qui est dû notamment aux contraintes inhérentes aux ressources à disposition, aux pressions politiques (notamment à celles émanant des groupes-cibles), au cadre légal et aux leçons tirées des expériences passées. Ainsi, le choix des instruments est défini par des forces identifiables qui influencent les gouvernements dans leur stratégie d’intervention. Une de ces forces importantes est le groupe-cible qui va fortement influencer le choix des instruments156. Par ailleurs, les gouvernements semblent préférer les instruments d’information et autoritaires du fait que ces ressources soient « inépuisables » (par opposition aux ressources financières et organisationnelles). Ainsi, les instruments les plus privilégiés semblent être les instruments nodaux (d’information), fondés sur une ressource informationnelle et une contrainte minimum à l’égard des citoyens. Cependant, lorsque la contrainte est rendue nécessaire, la préférence semble aller à l’intervention autoritaire dans la mesure où cette ressource est moins intensive, notamment par rapport aux ressources organisationnelles.

Vedung (1998, également cité en référence par Bemelmans-Videc, 1998) souscrit également à une classification qui soit caractérisée par le degré de contrainte des instruments (ou le degré de la force autoritaire) comme l’ont également fait Doern et Willson et Hood, avec dans l’idée que les décideurs choisissent en premier l’instrument le moins coercitif, pour ensuite, si nécessaire, aller vers le plus coercitif :

decision makers will always choose first the least coercive instrument, moving over time from least coercive to most coercive in any given policy area (Bemelmans-Videc, 1998, p. 9)

En résumé, cette stratégie (étapes successives de plus en plus contraignantes) est sans doute la résultante de deux phénomènes (Bemelmans-Videc et Vedung, 1998) :

une certaine recherche de légitimité (legitimacy) et d’acceptabilité (public

confidence) : l’instrument le moins coercitif est introduit dans une première étape pour tenter de lever les résistances des acteurs(-cibles) réticents à une intervention ; dans un second temps, si nécessaire, l’Etat introduit alors des instruments plus contraignants pour atteindre ses objectifs et si de nouvelles résistances apparaissent, il peut

s’appuyer sur le fait qu’il est intervenu en premier de la manière la plus douce possible mais qu’il n’a pas obtenu de résultats ;

• une certaine cohérence avec une philosophie politique de nature (néo)libérale qui veut éviter le recours à l’interventionnisme étatique pour laisser le plus de liberté possible aux acteurs (liberté du marché efficient) ; néanmoins, si l’intervention est jugée nécessaire, c’est le principe de la contrainte minimale qui s’applique (cf. Encadré 11 ci-après)157.

156 Un groupe-cible conséquent et bien organisé va pousser le gouvernement à intervenir via les ressources informationnelles et financières ; suivant la taille du groupe-cible, le gouvernement va également passer des instruments actifs (plutôt destinés à des petits groupes) à des instruments passifs (plutôt destinés à des grands groupes).

157 Le pendant du principe de la proportionnalité bien connu des juristes.

Encadré 11 : Le principe de la contrainte minimale

Dans le cadre de la conception des politiques publiques ou de leur évolution, ce principe commande de faire le choix de l’instrument le moins contraignant possible pour atteindre un objectif (toutes choses étant égales par ailleurs) et de procéder ensuite, si nécessaire, par étapes successives vers l’introduction d’instruments de plus en plus contraignants.

Cependant, cette graduation instrumentale vers la contrainte peut être :

prévue dès la phase de conception de la politique publique qui prévoit ainsi des étapes successives dites subsidiaire ; nous parlons dans ce dernier cas de la subsidiarité des instruments contraignants (instruments subsidiaires) principe choisi

non prévue dans la phase de conception, mais procéder de l’évolution historique de la politique publique principe subi

Source : l’auteur

C’est ainsi sur cette base, remarque Van der Doelen (1998), que les chercheurs ont développé des stratégies pour mettre en place des politiques faisables et efficaces qui font appel à un séquençage en trois étapes.

Cependant, notent Varone (1998) et Bemelmans-Videc et Vedung (1998), ces hypothèses ne sont pas discutées de manière explicite par les auteurs, restent difficilement opérationnalisables et donc difficilement testables empiriquement. Les réponses ne sont donc de loin pas établies et requièrent encore des recherches approfondies. Nous irons notamment dans ce sens dans le cadre de notre recherche.

4.3 Un paradoxe ?

D’un côté, avec les études sur l’évolution (historique) de l’intervention de l’Etat dans la société et celles insistant sur l’apparition de « nouveaux » instruments d’une nature sensiblement différente que celle des instruments dits « traditionnels », nous avons pu souligner une tendance vers l’utilisation d’instruments d’action de moins en moins contraignants (de plus en plus flexibles, indirects, etc.).

Cette tendance peut certes être relativisée – et n’est pas empiriquement démontrée – elle n’en reste pas moins une bonne hypothèse de travail qu’il faut néanmoins manier avec précaution.

En effet, selon nous, les études actuelles ne permettent pas de définir si l’évolution (si tant est qu’il y en ait vraiment une) mise en exergue se pose en des termes absolus ou relatifs. Le tableau ci-après (cf. Tableau 22 ci-après) illustre ainsi différentes « configurations » d’évolution instrumentale pour lesquelles la conclusion peut être identique : une augmentation des instruments non-contraignants et une diminution des instruments contraignants durant le XXe siècle (de t1 vers t2)… mais en des termes absolus et/ou relatifs.

Tableau 22 : Quelques exemples de configuration de l’’évolution dans l’utilisation des modalités d’intervention qui permettent de tirer les mêmes conclusions générales en termes relatif mais pas en terme absolu !

Légende :

EvAbsInc : évolution en terme absolu des instruments non-contraignants [évolution barres rouges] ; EvAbsIc : évolution en terme absolu des instruments contraignants [évolution barres jaunes] ;

EvRelInc/Ic : évolution des instruments non-contraignants et contraignants en terme relatif [évolution barres rouges/barres jaunes] ; t1 t2 : évolution temporelle du temps 1 vers le temps 2

Nombre total croissant d’instruments Nombre total croissant d’instruments Nombre total croissant d’instruments

t1 t2 t1 t2 t1 t2

EvAbsInc : augmentation EvAbsIc : diminution

EvRelInc/Ic : augmentation relative des Inc par rapport au Ic et diminution relative des Ic par rapport aux Inc

EvAbsInc : augmentation EvAbsIc : augmentation EvRelInc/Ic : idem

EvAbsInc : augmentation EvAbsIc : constant EvRelInc/Ic : idem

Nombre total constant d’instruments Nombre total décroissant d’instruments Nombre total décroissant d’instruments

t1 t2 t1 t2 t1 t2

EvAbsInc : augmentation EvAbsIc : diminution EvRelInc/Ic : idem

EvAbsInc : constant EvAbsIc : diminution EvRelInc/Ic : idem

EvAbsInc : diminution EvAbsIc : diminution EvRelInc/Ic : idem

Notes : le terme d’instrument contraignant est ici utilisé de manière générale pour illustrer la catégorie des instruments de type command and control et le terme d’instrument non-contraignant pour définir a contrario la catégorie opposée (instrument de type information et communication ou de type volontaire). Notons cependant que la place d’autres types d’instruments, notamment les instruments économiques (taxes vs subventions), est ambiguë et reste à définir (elle est cependant souvent comprise sous les types d’instruments incitatifs (soit non-contraignants) par opposition aux instruments traditionnels de type command and control) et qu’il est sans aucun doute nécessaire de pouvoir mesurer de manière adéquate la variable [type d’instrument] pour pouvoir aller plus en avant de l’analyse de l’évolution des modalités d’intervention, ce qui n’est pas le cas actuellement.

Source : l’auteur

Aussi, pour pouvoir tester une telle hypothèse, il nous semble nécessaire, avec Varone (1998) de disposer d’une « mesure »158 adéquate de la variable types d’instruments (notamment compte tenu de la nature contraignante/coercitive vs non-contraignante/non-coercitive des instruments) et de pouvoir ainsi identifier cette évolution en des termes absolus ou relatifs et dépasser la mise en évidence de tendances générales ambigües et impossibles à vérifier. Par ailleurs, nous pensons également qu’une telle hypothèse n’est que difficilement testable empiriquement si ses contours temporels et géographiques, voire sectoriels, ne sont pas clairement définis.

De l’autre côté, les études basées sur le séquençage des instruments dans le cadre des politiques publiques tendent à identifier une stratégie d’intervention allant dans le sens d’une augmentation graduelle et téléologique de la nature contraignante des instruments.

Résumée sous la forme du principe de la contrainte minimale, cette stratégie semble se positionner de manière paradoxale avec la première tendance esquissée.

Il découle de ces deux types d’analyse – qui peuvent paraître à première vue contradictoire : évolution vers moins de contrainte/coercition vs vers plus de contrainte/coercition – des hypothèses prospectives concernant l’évolution future des modalités d’intervention. Parmi ces hypothèses, nous noterons la possibilité que :

1. la tendance vers l’utilisation d’instruments non-contraignants se confirme dans le futur159 ;

2. cette tendance s’inverse ; nous assistons alors à un retour des modalités plus

contraignantes160 via la mise en œuvre de la stratégie de séquençage de l’utilisation des instruments (principe de la subsidiarité instrumentale).

Nous reviendrons sur ces hypothèses à la lumière de notre analyse de la politique climatique suisse161.

158 Ce point est pour nous central car sans une telle possibilité de mesure, il ne sert à rien de développer plus en avant l’étude de l’évolution des modalités d’intervention qui pose par ailleurs la question de l’unité d’analyse : une taxe est-elle vue comme un instrument au même titre que l’ensemble d’un programme d’éducation et de sensibilisation ? ou chaque mesure informationnelle, de même qu’éducationnelle, est-elle identifiable en tant que telle comme instrument non-contraignant ?, etc.

159 Cela pourrait par exemple s’expliquer par a) l’efficacité des instruments non-contraignants, qui permettrait à l’Etat de ne pas agir de manière plus contraignante et/ou b) une impossibilité de lever les réticences de certains acteurs clés du processus décisionnel vis-à-vis de l’introduction des instruments contraignants prévus de manière subsidiaire qui engendrerait l’introduction d’instruments supplémentaires mais de nature non-contraignante.

160 Cela pourrait par exemple s’expliquer par a) l’inefficacité des instruments non-contraignants qui permettrait à l’Etat d’introduire les instruments contraignants prévus de manière subsidiaire et/ou b) la possibilité de lever les résistances vis-à-vis de l’introduction d’instruments contraignants. Ensuite, compte tenu de la nature de la stratégie de combinaison des instruments envisagée, l’introduction d’instruments contraignants viendrait soit remplacer les instruments non-contraignants, soit de manière complémentaire.

161 Voir nos développements consacrés à l’évolution probable de la politique climatique suisse (et des autres politiques publiques de protection de l’environnement) dans le cadre de la dernière partie de notre recherche (voir 3e partie, chapitre 13, point 13.6.3).

II

E

PARTIE

D ES LACUNES MÉTHODOLOGIES DANS LA

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