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5.4 Origine du flambage

5.4.3 Modélisation générale

cri = πp3 (3 − νc)(1 + νc) E Ec 1 3 (5.6) Ce modèle décrit lui aussi correctement le fait que la taille des bandes varie linéairement avec l’épaisseur de la monocouche. Déterminons les ordres de grandeur des modules élastiques du film E et de la sous-phase Ec. Posons que la rigidité de flexion D du film est du même ordre de grandeur que κc la rigidité de courbure et que h l’épaisseur de la monocouche est donnée par une brosse osmotique (100 nm pour N=1730 maillons), dès lors :

E= D/h3 ∼ 4 103P a (5.7)

Pour des bandes de taille caractéristique 30 µm, le module élastique de la sous-phase déduit vaut alors Ec = 10−4Pa. L’élasticité de la sous-phase, nécessaire au flambage est bien très réduite. Ce modèle permet ainsi de rendre compte du flambage de la monocouche en fonction de la quantité de de copolymère présent dans la sous-phase. L’existence et la détermination d’un seuil de pression de surface reste un sujet délicat à trancher car la monocouche n’est pas très homogène et la description de la répartition des contraintes de la monocouche par un unique paramètre Π, la pression de surface est peu réaliste.

5.4.3 Modélisation générale

La modélisation du flambage des monocouches de copolymère n’est pas chose aisée, en parti-culier il est difficile de rendre compte de toutes les propriétés que nous avons observées.

Ainsi le modèle de flambage d’une interface chargée permet de rendre compte de l’insensibilité du flambage au sel présent dans la sous-phase et de l’hétérogénéité de la monocouche qui permet l’absorption de segments chargés à l’interface. Par contre, il ne met pas clairement en évidence

la dépendance linéaire de la longueur d’onde du flambage avec l’épaisseur de la monocouche et l’influence du copolymère présent dans la sous-phase sur l’apparition des bandes.

Les modèles décrivant le flambage d’une monocouche élastique montrent bien une dépendance linéaire de la longueur d’onde de flambage avec l’épaisseur de la monocouche qui est une caracté-ristique essentielle de nos observations. Le modèle sur susbtrat élastique permet aussi de prendre en compte une éventuelle rigidification de la sous-phase due à la concentration en polymère dans la sous-phase. Par contre il est difficile de déterminer les différents paramètres structuraux décrivant la monocouche (contraintes et modules élastiques). De plus les hétérogénéités de la monocouche doivent très certainement modifier la répartition des contraintes au sein de la monocouche.

On peut finalement songer à un couplage entre ces trois visions différentes de la monocouche et de son flambage qui permettrait une description globale des caractéristiques du flambage que nous avons observé.

5.5 Conclusion

Dans ce chapitre nous avons mis en évidence l’existence d’un phénomène peu courant : le flambage d’une monocouche de copolymère étalée à la surface de l’eau. Nous avons pu identifier quels sont les différents paramètres qui régissent l’apparition de ces structures et proposer des mécanismes susceptibles de rendre compte de nos observations. Il reste cependant assez frustrant de ne pouvoir montrer les déformations d’une telle interface que par une méthode indirecte : la diffusion des rayons X. On aimerait ainsi pouvoir mesurer directement les faibles variations de hauteur de l’interface. Il existe aujourd’hui des techniques permettant de visualiser de faibles variations de hauteur sur des interfaces solides comme la microscopie à force atomique. Dans la partie suivante de notre manuscrit nous allons montrer qu’il est possible d’utiliser cette technique pour l’observation de monocouches à l’interface eau/air.

Microscopie à force atomique en mode

non-contact

Pendant longtemps l’observation des petits objets a été limitée par le pouvoir de résolution des microscopes optiques et les limites de la diffraction à une taille minimale de l’ordre de 300 nm. L’émergence en 1930 du microscope électronique à transmission a permis de reculer ces limites à l’échelle de l’angström [106] . Un autre pas a été franchi en 1982 avec l’invention du microscope à effet tunnel (STM) par Binnig et collaborateurs [107]. Ce microscope a été le précurseur d’une nouvelle classe de microscopes : les microscopes à sonde locale. Ces microscopes ne font pas appel à des lentilles pour former des images mais utilisent le déplacement sur des cales piezoélectriques d’une pointe très fine comme détecteur pour sonder localement les propriétés d’une surface.

Contrairement au STM, le microscope à force atomique (AFM [108] ou Scanning Force Mi-croscope) ne nécessite pas d’échantillon conducteur. La simplicité de préparation des échantillons et la possibilité de travailler dans différents environnements (vide, air ou liquide) sont à l’origine de l’important développement de l’AFM qui est devenu aujourd’hui un outil courant pour observer la matière à l’échelle nanométrique.

Afin d’observer directement les surfaces liquides, nous avons développé une nouvelle tech-nique AFM, dont les premiers résultats, présentés au chapitre suivant s’avèrent très prometteurs.

Dans ce chapitre nous allons décrire les différents modes de fonctionnement de l’AFM et plus particulièrement le mode non-contact utilisé pour l’observation de surfaces fragiles. Nous présenterons ensuite les avancées récentes dans l’imagerie de surfaces fluides par microscopie à sonde locale. Nous terminerons enfin par la description de notre dispositif expérimental et les développements nécessaires à la réalisation de nos expériences.

6.1 Principe

Le fonctionnement d’un microscope à sonde locale repose sur l’interaction d’une fine pointe et d’une surface sous l’effet des forces intermoléculaires existant entre les atomes ou molécules de la pointe et de l’échantillon. La détection du mouvement de la pointe lorsque l’on balaye la surface de l’échantillon permet de rendre compte de la topographie de la surface. Pour repérer le déplacement vertical de la pointe, celle-ci est solidaire d’un levier flexible (ou cantilever) dont la déflexion est mesurée par une détection optique. Un faisceau laser est réfléchi sur la partie supérieure du levier vers une photodiode quatre quadrants : la différence d’intensité relevée sur ces diodes permet de déduire la variation de hauteur du levier et donc de la pointe. Cette méthode de détection, illustrée à la figure 6.1 est très sensible car le faible déplacement vertical du levier est considérablement amplifié. On peut ainsi détecter des variations de hauteurs inférieures à 1 Å. Le facteur limitant la sensibilité de la détection est alors la vibration du levier sous l’effet de l’énergie thermique. Pratiquement cette limite est atteinte pour des leviers souples mais pour des leviers rigides, d’autres bruits limitent la détection.

Figure 6.1 – Détection de la déflexion du cantilever lié à la pointe.

Décrivons plus précisément les interactions entre la pointe et l’échantillon. Leurs effets sur l’image obtenue dépendent de la nature de la force dominante, du mode utilisé, de la nature de l’échantillon ainsi que de la forme et de la finesse de la pointe. Les forces à courte portée sont les forces de répulsion atomique. Les forces à longue portée sont de différentes natures : les forces de van der Waals sont toujours présentes mais il est également possible d’utiliser des pointes sen-sibles aux forces magnétiques ou d’utiliser les interactions électrostatiques en polarisant l’échan-tillon. Lorsque l’on opère dans l’air, une fine couche d’eau recouvre généralement l’échantillon par condensation. Quand la pointe vient toucher cette couche, les forces capillaires attirent fortement la pointe sur l’échantillon.

La figure 6.2 montre les différents régimes dans lesquels peut travailler l’AFM en fonction de la distance à l’échantillon dans l’hypothèse où la pointe n’est soumise qu’aux forces de répulsion atomique à courte portée et aux forces attractives à longue portée de van der Waals. La force dominante dépend du mode de fonctionnement (contact, tapping ou non-contact).

Figure 6.2 – Les différents modes de travail en microscopie AFM dans le cas

d’interactions attractives de type van der Waals entre la pointe et l’échan-tillon, d’après la référence [109]. Les forces à courte portée sont les forces de répulsion atomique.

Décrivons les trois modes de fonctionnement différents : le mode contact, le mode tapping et le mode non-contact.

Le mode contact est le mode le plus simple de fonctionnement : la pointe touche de façon permanente la surface de l’échantillon et suit les aspérités de la surface lors du balayage. Ce mode d’imagerie permet l’obtention d’images stables, de haute résolution sur des surfaces dures [110]. Cependant les forces de compression et de cisaillement induites par le déplacement de la pointe sur la surface peuvent être la cause d’une érosion de la pointe ou de l’échantillon. Ce mode est donc mal adapté à l’observation de matériaux fragiles comme les matériaux biologiques ceux-ci étant généralement mous, liés par des interactions faibles et faiblement ancrés sur les substrats.

Le mode “tapping” [111] appelé aussi mode de contact intermittent, est un mode beaucoup plus doux pour la surface. La pointe AFM vibre à grande amplitude (10 à 40 nm) avec une haute fréquence (typiquement une centaine de kilohertz) et ne vient toucher la surface qu’en fin de cycle d’oscillation. Ce mode est un compromis entre le mode de contact et le mode de non-contact. La résolution est généralement très bonne et comme le contact avec la surface est très bref, les dommages causés par le frottement de la pointe sur la surface sont éliminés. Ce mode est de plus en plus utilisé en biologie pour l’observation d’échantillons in situ [112].

En mode de non-contact, la pointe vibre à haute fréquence (de l’ordre de 300 kHz) avec cette fois une faible amplitude (de l’ordre de quelques nanomètres) au dessus de la surface, idéalement sans jamais la toucher. Durant ces oscillations, la pointe est sensible uniquement aux forces à longue portée telles les forces de van der Waals. L’effet de ces forces sur les décalages en am-plitude, phase ou fréquence de l’oscillation du levier est utilisé pour suivre la topographie de la surface. Le mode de non-contact est donc adapté à l’étude d’échantillons particulièrement fragiles car on évite a priori tout contact de la pointe avec la surface de l’échantillon. Par ailleurs ce mode a été utilisé en microscopie sous ultra-vide et a permis l’observation de surfaces avec une résolution atomique [113].

C’est ce mode que nous avons privilégié pour l’approche de surfaces liquides et dont nous allons détailler le principe de fonctionnement.