• Aucun résultat trouvé

1.1 Un micropervaporateur pour mesurer des coefficients de diffusion

1.1.3 Micropervaporation dans les r´ egimes concentr´ es

Le mod`ele du micropervaporateur id´eal d´ecrit pr´ec´edemment se heurte cependant `a certaines limites. En effet, il n’est valable que pour des m´elanges dilu´es dont l’activit´e chi-mique du solvant et le coefficient de diffusion des solut´es/particules ne d´ependent pas de leur concentration dans le m´elange. Les interactions entre solut´es ou particules ne peuvent pourtant pas ˆetre n´eglig´ees pour des r´egimes concentr´es. M. Schindler et A. Adjari ont alors d´evelopp´e un mod`ele th´eorique permettant de d´ecrire le processus de concentration dans un canal unidirectionnel pour le cas g´en´eral d’un syst`eme binaire [37]. Cette descrip-tion permet de pr´edire les profils de concentration et de vitesse dans le micropervaporateur au-del`a de la limite dilu´ee en prenant en compte les interactions entre solut´es/particules dans le m´elange.

Mod`ele g´en´eral

Les ´equations g´en´erales de continuit´e et de convection/diffusion `a consid´erer s’´ecrivent :

tρ = −∇(ρv) , (1.20)

tws = ∇(D∇ws) − ∇(vws) , (1.21)

avec ρ la densit´e, v la vitesse massique du m´elange et ws la concentration en solu-t´es/particules du m´elange. Pour simplifier, M. Schindler et A. Adjari ont consid´er´e un canal unidirectionnel 1D o`u les flux sont moyenn´es sur une tranche de canal hw. Le mo-d`ele donne le syst`eme d’´equations suivant qui d´ecrit l’´evolution spatiale et temporelle d’un m´elange binaire qui s’´evapore le long d’un canal unidirectionnel :

tρ = −∂x(ρv) −Qeρ

0 e

hw , (1.22)

avec ρ0

e la densit´e de l’eau pure, ρs la densit´e du solut´e/particule et D(ws) le coefficient de diffusion mutuelle/collective du m´elange `a la concentration ws en solut´es ou particules.

Qe correspond au taux de pervaporation d´ecrit dans les parties pr´ec´edentes. Il d´epend de la g´eom´etrie du canal, la solubilit´e et la diffusion des mol´ecules d’eau dans le PDMS mais aussi de la diff´erence d’activit´e chimique du solvant entre l’int´erieur et l’ext´erieur du canal not´ee ∆a = (a(ws) − ae), avec a(ws) l’activit´e de l’eau `a la concentration massique ws de la solution/dispersion et ae l’humidit´e ext´erieure. On d´efinit :

Qe = qe0∆a = qe0(a(ws) − ae) , (1.24) o`u qe0 correspond au flux de pervaporation lorsque l’humidit´e ae est nulle et a(ws) vaut 1. Il d´epend de la g´eom´etrie de la puce microfluidique, la solubilit´e et la diffusion des mol´ecules d’eau dans le PDMS. On d´efinit aussi le temps de pervaporation τe = qe0/hw.

L’´equation 1.22 devient :

tρ = −∂x(ρv) − ρ

0 e

τe(a(ws) − ae) . (1.25)

L’´equation 1.25 est une ´equation de conservation qui exprime le flux de mati`ere dans le canal en fonction de la pervaporation de l’eau `a travers la membrane qui d´epend de la variable qe0 et de la diff´erence d’activit´e ∆a. L’´equation 1.23 correspond simplement `a l’´ecriture 1D de l’´equation g´en´erale de la convection/diffusion (´equation 1.21).

Pour la plupart des m´elanges de liquides binaires classiques ou dans le cas de dis-persions collo¨ıdales, le volume des compos´es reste inchang´e lorsqu’ils sont m´elang´es et v´erifient : ϕ1 + ϕ2 = 1, avec ϕi = ρi0

i leur fraction volumique, ρ0

i ´etant la masse vo-lumique du compos´e i pur et ρi = ρwi avec ρ la masse volumique du m´elange et wi la fraction massique du compos´e i dans le m´elange. Dans ce cas, il est plus ais´e de travailler dans un r´ef´erentiel de vitesses volumiques o`u u = ϕ1v1+ ϕ2v2 avec vi les vitesses des com-pos´es. La vitesse volumique moyenne suit alors ∇.u = 0 [40], et les ´equations du mod`ele de M. Schindler et A. Adjari prennent la forme plus simple :

xu = −1 τe

(a(ϕs) − ae) , (1.26)

tϕs+ ∂xsu) = ∂x(D(ϕs)∂ϕs) , (1.27) avec ϕs la concentration volumique en solut´es/particules dans le m´elange. La vitesse massique et la vitesse volumique sont reli´ees par la relation :

v = u − ( 1 ρs01

ρe0)Dρ∇ws. (1.28)

Les deux ´equations 1.23 et 1.25 dans le r´ef´erentiel de vitesses massiques ou les deux ´

equations 1.26 et 1.27 dans le r´ef´erentiel de vitesses volumiques d´ecrivent le processus de concentration dans un micropervaporateur et d´ependent principalement des deux va-riables a, l’activit´e chimique du solvant et D, le coefficient de diffusion. Deux cas sont envisageables et ont ´et´e ´etudi´es dans les th`eses de L. Daubersies [41] et A. Merlin [38] :

— Le cas de liquides binaires, illustr´e sur la figure 1.12 (a). Pour ce type de m´elange, l’activit´e a(ws) chute lorsque la concentration augmente ce qui a une influence non n´egligeable sur le flux de pervaporation Qe. La concentration au bout du canal va

alors augmenter jusqu’`a atteindre une valeur maximale ws impos´ee par l’´equilibre local a(ws) = ae : le flux de pervaporation diminue et entrave l’accumulation des solut´es au-del`a de ws. Le profil de vitesse est d´ecal´e vers l’entr´ee du canal.

— Le cas de dispersions collo¨ıdales, illustr´e sur la figure 1.12 (b). L’activit´e de l’eau n’est pas modifi´ee par la pr´esence des particules et reste constante ´egale `a 1 [30, 42, 43], le taux de pervaporation Qe n’en est donc pas modifi´e : la pervapo-ration a lieu sur toute la longueur du canal. Dans ce cas cependant, le coefficient de diffusion collective peut ˆetre modifi´e par les interactions entre particules lorsque la concentration change ce qui affecte la relaxation des gradients de concentration. Ces deux cas ont ´et´e ´etudi´es par la suite avec un m´elange eau/glyc´erol et une disper-sion aqueuse de nanoparticules de silice.

Gradient de concentration stationnaire

Comme dans le r´egime dilu´e, un gradient de concentration stationnaire est g´en´er´e lorsque l’on impose, avec le protocole d´ecrit par la figure 1.11, un flux d’entr´ee en solu-t´es/particules nul en rempla¸cant le contenu du r´eservoir par de l’eau pure (ws = 0). Les solut´es/particules adoptent, apr`es un ´etat transitoire de l’ordre de quelques τe, un profil de concentration stationnaire (∂tws = 0). On a alors : ∂tρ = 0, l’´equation 1.23 devient :

wsv(x) = D(ws)∂xws. (1.29)

Cet ´etat stationnaire peut ˆetre utilis´e afin d’obtenir des estimations du coefficient de diffusion mutuelle/collective, `a partir d’une mesure du profil de concentration ws(x) et du profil de vitesses v(x), car la forme du gradient ne d´epend que de D(ws). Notons que la mesure de v(x) est difficile `a mesurer mais qu’elle n’est pas n´ecessaire. En effet, la mesure in situ du profil de concentration et du temps de pervaporation τe permet aussi de remonter au profil de vitesses v(x) en int´egrant l’´equation 1.22 :

ρv(x) = ρ 0 e τe Z x 0 d˜x(a(wsx)) − ae) , (1.30) si l’on connait la fonction a(ws).

Exp´erimentalement τe peut ˆetre estim´e par des mesures du profil de vitesses `a dif-f´erentes positions x en amont du gradient de concentration, voir figure 1.12. Seules les variables thermodynamiques ρ(ws) et a(ws) sont requises. Finalement, la d´eriv´ee spatiale de la mesure du profil de concentration ws(x) permet d’obtenir le coefficient de diffusion

D sur la gamme de concentrations 0 − ws `a partir de l’´equation 1.29.

Dans le r´ef´erentiel de vitesses volumiques, les ´equations s’´ecrivent en r´egime station-naire (∂tϕs= 0) : ϕsu = D(ϕs)∂xϕs, (1.31) u(x) = −1 τe Z x 0 d˜x(a(ϕsx)) − ae) . (1.32) Dans ce r´ef´erentiel, la connaissance de ρ(ws) n’est pas n´ecessaire pour d´eterminer le coef-ficient de diffusion D.

(a) (b) ݔ 0 ݒ(ݔ) ߮(ݔ) ܸ ߮ 1/ܶ ݔ 0 ݒ(ݔ) ݓ(ݔ) ܸ ݓ ܽ ݓ ݓݏכ ݓ ܦ ܽ ݓݏכ ܽ ߮ ߮ ܦ 1 1/ܶ

Figure 1.12 – Illustration des deux cas possibles lors d’une exp´erience de micropervaporation : (a) pr´esente le cas d’un m´elange de liquides binaire, (b) pr´esente le cas d’une dispersion collo¨ıdale. La premi`ere ligne sch´ematise une vue de profil d’un canal microfluidique. Les fl`eches bleues correspondent `a la pervaporation ainsi qu’au flux induit par celle-ci dans le canal. La fl`eche rouge correspond au sens de diffusion des solut´es ou des particules. La seconde ligne repr´esente sch´ematiquement les profils attendus pour l’activit´e chimique du solvant a et le coefficient de diffusion mutuelle ou collective D en fonction de la concentration massique ws ou volumique ϕs du m´elange. La troisi`eme ligne correspond aux profils de concentration et de vitesse dans le micropervaporateur dans les deux cas propos´es.

1.2 Le cas d’un m´elange de liquides binaire : le